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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 5 octobre 2023, n° 21/05940

LYON

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Atsi Groupe - Alliance de Techniques pour Solutions Industrielles (SAS)

Défendeur :

LYON Machines Outils (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gonzalez

Conseillers :

Mme La Mesta, Mme Jullien

Avocats :

Me Moulin, Me Boungab, Me de Prat, Me Guilmain, Me Wojcik

T. com. Lyon, du 14 juin 2021, n° 2019j1…

14 juin 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

Au cours de l'année 2017, la Sas Atsi-Groupe Alliance de Techniques pour Solutions Industrielles (ci-après « la société Atsi-Groupe ») qui exerce des activités de métallerie et d'usinage a acheté à la Sa Lyon Machines Outils (ci-après « la société LMO ») :

- deux machines neuves :

un tour numérique Pinacho SE250,

un tour additionnel Alpha Super 410,

- trois machines d'occasion :

un centre d'usinage Hyundai Supatec V32S/405,

une cisaille guillotine Durma MS2004,

une plieuse universelle Favrin p1MH.

Pour un investissement total de 91.810 euros HT comprenant le transport des machines, leur mise en place et leur mise en service. La livraison a été effectuée le 26 juillet 2017.

La société Atsi-Groupe a reproché à la société LMO diverses défaillances du matériel livré, tant pour le matériel neuf que pour le matériel d'occasion. Dans ce cadre, une expertise amiable a été diligentée le 24 septembre 2018.

Aucun accord amiable n'ayant été trouvé, par acte d'huissier du 16 octobre 2019, la société Atsi-Groupe a assigné la société LMO devant le tribunal de commerce de Lyon en indemnisation de ses préjudices.

Par jugement contradictoire du 14 juin 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté la société Atsi-Groupe de l'ensemble de ses demandes,

- ordonné à la société Atsi-Groupe de restituer la fraiseuse conventionnelle et le transformateur mis à disposition pour le matériel Hyundai, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, et cela sans astreinte,

- condamné la société Atsi-Groupe à payer à la société LMO la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Atsi-Groupe aux entiers dépens.

La société Atsi-Groupe a interjeté appel par acte du 16 juillet 2021.

Moyens

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 7 avril 2022 fondées sur les articles 1103, 1104, 1604, 1616 et 1231-1 du code civil, la société Atsi-Groupe demande à la cour de, rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- condamner la société LMO à lui payer la somme de 120.684,44 euros au titre des préjudices subis du 27 juillet 2017 au 31 janvier 2020, outre intérêts au taux légal à compter du 20 août 2019, date de la mise en demeure,

- condamner la société LMO à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société LMO aux entiers dépens avec droit de recouvrement.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 10 janvier 2022 fondées sur les articles 1103 et suivants et 1648 du code civil, la société LMO demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions exceptées celles liées à la restitution sous astreinte,

En conséquence,

- débouter la société Atsi Groupe de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- la recevoir en son appel incident et dire que l'obligation de restitution sera assortie d'une astreinte de 50 euros par jour, par matériel et durant 1 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir après quoi, il sera de nouveau statué s'il échet,

- condamner la société Atsi-Groupe à lui payer, en cause d'appel, la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Atsi-Groupe aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 7 juillet 2022, les débats étant fixés au 21 juin 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est postérieur au 1er octobre 2016.

Sur l'intérêt à agir,

La société Atsi-Groupe fait valoir que :

- la société LMO n'a reçu aucune somme de la société Star Lease car elle a refusé la condition imposée par cette dernière lui demandant de livrer le matériel avant d'en obtenir le paiement,

- elle a dû émettre un chèque de caution d'un montant de 49.692 euros correspondant à la valeur des deux machines neuves pour obtenir la livraison ; ce chèque n'avait pas vocation à être encaissé mais l'a été ; par conséquent, elle a bien vocation à agir contre la société LMO pour la vente de matériel neuf.

La société LMO réplique que le matériel neuf vendu n'est pas la propriété de la société Atsi-Groupe, tel qu'attesté par la facture libellée à l'ordre de la société Star Lease, de sorte que l'appelante ne justifie pas d'un intérêt à agir concernant ce matériel.

Sur ce,

L'article 31 du code de procédure civile dispose que : « L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »

La société Atsi-Groupe produit au soutien de ses prétentions en pièce 12 le justificatif du paiement par elle-même des deux machines neuves, la facture adressée certes à la société Starlease indiquant clairement que le règlement a été effectué par les Ets Atsi par chèque de la Banque Rhône-Alpes de 49.692 euros de sorte que l'appelante établit qu'elle a suppléé la société Starlease dans le financement des matériels et qu'elle a acquis directement les matériels neufs.

En conséquence, elle justifie de son droit à agir envers l'intimée.

Sur l'absence de délivrance conforme

La société Atsi-Groupe fait valoir que :

- la société LMO est tenue à une obligation de délivrance conforme y compris pour les machines d'occasion,

- les machines ne sont pas conformes à la commande pour répondre à ses besoins ; des dysfonctionnements ont été relevés par l'expert sur des machines neuves et des machines d'occasion telles qu'un défaut d'étanchéité ou l'absence d'éléments de sécurité, ou un mandrin (non sélectionné par la concluante) dimensionné pour une vitesse maximale de 1.300 tours par minute monté sur un tour tournant à 2.500 tours par minute ; l'expert a relevé que la résolution des problèmes incombe à la société LMO mais certains dysfonctionnements n'ont jamais été résolus,

- la société LMO, professionnelle, doit apprécier si le matériel vendu peut être utilisé en l'état ; compte tenu de son installation électrique pourtant dûment révisée et mise à jour pour l'installation de ces nouvelles machines, il est apparu qu'un transformateur était indispensable mais la société LMO ne l'avait pas prévu ; de même, elle n'a pas vérifié la conformité du mandrin déjà monté sur le tour,

- elle conteste que les dysfonctionnements du matériel d'occasion puissent s'expliquer par une usure naturelle des composants car ils sont apparus immédiatement à la mise en service ; sur ce point, l'auteur du rapport produit par l'intimée est la société Axyum qu'elle mandate habituellement de sorte qu'il existe manifestement une relation d'affaires établie entre elles, voire une dépendance économique ; le doute sur l'indépendance et l'impartialité de l'auteur de l'attestation prive cette dernière de force probante,

- l'exclusion de garantie du matériel d'occasion n'écarte pas l'obligation de délivrance conforme,

- le document signé le 3 février 2017 n'est pas un procès-verbal de réception du matériel, mais une simple réception technique chez le vendeur plus de 5 mois avant la livraison,

- les usages professionnels de ce secteur exigent la révision du matériel d'occasion entre la réception technique chez le vendeur et la livraison chez l'acquéreur ; le délai entre ces deux événements a pour objet cette révision ; l'obligation de révision est explicitement mentionnée par la facture du 27 juillet 2017 qui précise 'Matériel d'occasion en bon état de marche, mis en conformité selon le décret 9340-41' ; or, aucune révision n'a été effectuée par la société LMO,

- le rapport de la société Ronatec atteste également de dysfonctionnements du matériel d'occasion pouvant affecter la sécurité des employés ; ainsi, le mandrin aurait pu causer une blessure de l'opérateur,

- le caractère inadapté du mandrin est démontré par le rapport d'expertise ; la simple déclaration de la société Metosa qui le contredit doit être écartée,

- à titre subsidiaire, si la cour retient pour le matériel neuf qu'elle est tiers au contrat de vente entre les sociétés LMO et Star Lease, la responsabilité délictuelle de la société LMO est engagée par invocation de son manquement contractuel ayant causé un dommage au tiers.

La société LMO réplique que :

- la société Atsi-Groupe est un professionnel qui connaît parfaitement les machines-outils, lesquelles ne font l'objet d'aucune garantie, mise à part la garantie des vices cachés ; plus de 2 ans s'étant écoulés entre la date de livraison des matériels et la date de l'assignation de sorte que les demandes sont prescrites,

- les problèmes relevés ne ressortent pas de la responsabilité du vendeur mais d'une utilisation d'un matériel d'occasion,

- la preuve d'une différence entre la chose contractuellement convenue et la chose effectivement livrée n'est pas apportée de sorte que le défaut de conformité n'est pas prouvé ; le mandrin du tour Pinacho n'est qu'accessoire (l'attestation Metosa) ; la responsabilité du choix n'incombe pas au vendeur s'adressant à un professionnel de sorte que le défaut de conformité est infondé,

- concernant le matériel neuf objet d'un contrat auquel la société appelante est tierce, aucun manquement contractuel entre les cocontractants susceptible de fonder une responsabilité délictuelle vis-à-vis du tiers n'est démontré ; subsidiairement, elle a reçu un procès-verbal de livraison daté et signé par la société appelante le 26 juillet 2017 dont il ressort que le matériel a, pour le locataire, « été réceptionné en bon état de marche sans vice ni défaut. »,

- le matériel neuf à l'exception du tour Pinacho et son mandrin est parfaitement fonctionnel puisque de l'aveu même de la société Atsi-Groupe, les quelques dysfonctionnements du cycle de perçage et le défaut d'étanchéité seront repris rapidement dans le cadre de la garantie,

- M. [K], représentant de l'appelante, a pu procéder à différents essais sur le centre d'usinage Hyundai dont il a pu se convaincre de la qualité ; la réception du matériel en février 2017 démontre que le matériel était fonctionnel ; il est resté fonctionnel suite à un prêt d'un transformateur,

Sur ce,

L'article 1604 du code civil qui fonde l'obligation de délivrance conforme dispose que : 'La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.' et impose au vendeur de délivrer une chose conforme à l'usage auquel elle est destinée.

La délivrance conforme concerne tant les produits neufs que les produits d'occasion et l'absence de garantie sur ces produits n'exclut pas cette obligation.

La société Atsi invoque à titre principal l'absence de délivrance conforme des machines et ne se prévaut pas de la garantie des vices cachés. C'est donc à tort que le tribunal a examiné les conditions d'une telle garantie.

De manière liminaire, la cour relève que l'argumentation de l'intimée sur ses relations contractuelles avec une société Als Valve Tech et les pièces contractuelles la liant à cette société sont sans effet sur la présente affaire même si M. [K] en est le dirigeant, s'agissant d'une société sans lien avec ce litige.

Il résulte du rapport de l'expert, dressé contradictoirement en présence de la dirigeante de la société SMO et de son assureur, du président d'Atsi-Groupe et de son expert mandaté par l'assureur protection juridique, que :

- le tour additionnel ALPHA SUPER 410 et la cisaille guillotine DURMA MS2004 ne présentaient pas de défauts de fonctionnement susceptible de justifier une réclamation,

- la plieuse universelle FAVRIN P1MH (matériel d'occasion) a été livrée sans les cellules nécessaires à la mise en sécurité de la machine et les manomètres dysfonctionnent ; l'absence de cellule ne permet pas à la société Atsi-Groupe d'aménager les carters de protection selon la configuration choisie et pourrait invalider l'audit auquel est soumis cette société, laquelle réclame la fourniture des cellules et le remplacement des manomètres, se chargeant de leur mise en œuvre ; il appartient à la société LMO de fournir les éléments nécessaires à la sécurité de la machine livrée,

- le tour Pinacho SE250 a été livré et réceptionné avec un mandrin de 1.300 tours/minute alors que la machine est configurée à 2.300 tours/minute ; selon l'expert, la machine a été livrée de telle manière qu'elle n'assure pas la sécurité de son utilisateur, et doit être livré un mandrin conforme à la configuration requise,

- le centre d'usinage est resté non fonctionnel malgré le remplacement d'un technicien de la société Axyum ; il n'est pas exploitable en l'état du fait de son non-fonctionnement inhérent au défaut d'appréciation du vendeur quant à la nécessité d'ajout d'un transformateur intermédiaire d'isolement ; il convient que l'intimée mette en œuvre ce transformateur afin d'en assurer le bon fonctionnement,

- l'expert en a déduit que la responsabilité contractuelle de la Sa Lyon Machines outils est susceptible d'être recherchée.

Il est constant, concernant les pièces d'occasion, que le dirigeant de la société Atsi s'est rendu en février 2017 au siège de la société Nord Machine Outils pour vérifier l'état général et le fonctionnement du centre d'usinage, que la plieuse se trouvait dans les locaux de l'intimée et a fait l'objet d'une visite sur site. Cependant, la "lettre de réception" technique signée 5 mois avant la livraison effective des matériels par le dirigeant de la société Atsi ne prive pas cette société de la possibilité de se prévaloir d'une délivrance non conforme du matériel acquis au moment de la livraison et de la mise en service des machines d'occasion dans les locaux de la société Atsi, étant en outre relevé que selon la facture du matériel d'occasion, la mise en conformité du matériel était prévue.

S'agissant de la plieuse universelle, le tribunal de commerce a écarté la demande au motif que le désordre n'était pas couvert par la garantie des vices cachés (non invoquée). Or, il résulte clairement de l'expertise qu'il appartient au vendeur de fournir les éléments nécessaires à la sécurité de la machine. Le défaut de délivrance conforme est en conséquence établi.

S'agissant du centre d'usinage, il ressort de ce qui précède qu'il ne peut être exploité en l'état et qu'un transformateur d'isolement de la machine s'avère indispensable pour éviter les disjonctions électriques. Il en découle également que le matériel vendu ne peut être utilisé pour l'usage auquel il était destiné de sorte que le défaut de conformité est là-aussi établi.

L'intimée se prévaut néanmoins du rapport de la société Axyum, selon lequel le 'dysfonctionnement' de l'élément serait occasionné en fait par le vieillissement naturel des composants et particulièrement des condensateurs. Toutefois, la preuve technique qui pourrait contredire les constatations de l'expert n'est pas rapportée alors que les dysfonctionnements sont rapidement apparus et le témoignage de cette société ne peut par ailleurs être probant, s'agissant d'une société habituellement mandatée par l'intimée et ayant une relation d'affaires avec elle.

S'agissant enfin du Tour numérique acquis à l'état neuf, la discussion porte sur la non-conformité du mandrin qui selon l'expert, n'est pas adapté à la vitesse de broche de la machine.

Il n'est pas établi que les productions que ce mandrin aurait été choisi par la société Atsi et il s'agit bien d'une non-conformité en ce que la machine telle que livrée n'assure pas la sécurité de l'utilisateur. Par ailleurs, si l'intimée produit un procès-verbal de réception, il ne ressort pas du rapport que cette non-conformité (adaptation du mandrin à la machine) était nécessairement décelable au moment de la livraison.

Il résulte de ce qui précède que la société intimée a manqué à son obligation de délivrance conforme sur trois des matériels acquis par Atsi, laquelle est en droit de demander l'indemnisation de ses préjudices. Le jugement qui a rejeté ces prétentions est en conséquence infirmé.

Sur le préjudice de la société Atsi-Groupe

La société Atsi-Groupe fait valoir que :

- elle a subi un préjudice d'image et un préjudice d'exploitation ; certains de ses clients se sont retirés en attendant un bon fonctionnement des machines ; la perte de chiffre d'affaires est de 33.600 euros,

- elle a dû faire appel à des sous-traitants du fait de l'absence de fonctionnement de certaines machines acquises auprès de la société LMO, engendrant des frais de 60.817,34 euros TTC et une perte de marge,

- le préjudice matériel global évalué par expert amiable est de 5.000 euros,

- elle doit régler des crédits pour des machines qui ne fonctionnent pas ou pas totalement pour 657,57 euros HT par mois, soit 20.267,10 euros au cours de la période concernée de 30 mois,

- elle a proposé en vain à la société LMO une issue amiable au litige,

- le quantum total du préjudice est de 120.684,44 euros ;

- le préjudice subi est d'autant plus critique qu'il s'agissait de la première année de son activité,

- le préjudice subi était prévisible car le contrat portait sur du matériel pour les besoins de son activité, de sorte que la société LMO pouvait prévoir les conséquences d'une délivrance non conforme sur le paiement d'un crédit en pure perte, le paiement d'assurances et la sous-traitance pour pallier au défaut de fonctionnement.

La société LMO réplique que :

- aucune faute lourde d'une exceptionnelle gravité ou dolosive n'est démontrée, de sorte qu'elle n'est tenue que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat,

- l'existence du préjudice n'est pas démontrée, n'étant attestée par aucun document,

- le préjudice est indirect et n'est pas certain.

- un préjudice économique implique une réparation d'une perte de bénéfice et non pas de charges ou de chiffre d'affaires,

- le préjudice ne saurait inclure le coût d'une sous-traitance, dont il n'est même pas démontré qu'elle soit en lien ; cette sous-traitance génère un chiffre d'affaires et donc de la marge,

- les machines neuves sont utilisées et intégrées au plan comptable, ce qui exclut que l'on puisse considérer que le crédit, donc une charge, soit un préjudice.

Sur ce,

L'article 1231-3 du code civil dispose que : « Le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l'inexécution est due à une faute lourde ou dolosive. »

La société Atsi produit en pièce 10 un document dénommé "tableau récap perts" et un extrait de compte.

Toutefois, le tableau listant les préjudices et dressé par ses soins n'est pas une pièce justifiant le bien fondé des prétentions.

La demande au titre d'une perte de chiffre d’affaire à hauteur de 33.600 euros n'est étayée par aucun élément probant et la société ne peut par ailleurs prétendre qu'à une perte de marge. Mais il est toutefois établi par des attestations dont rien ne permet de suspecter l'absence de véracité que des cocontractants habituels d'Atsi ont renoncé à lui confier des travaux en raison des machines déficientes d'où un préjudice de perte de marchés qui doit être évalué sans que la société intimée ne puisse faire valoir qu'il appartenait à sa cocontractante d'acquérir immédiatement les pièces adaptées comme retenu à tort pas le tribunal.

La somme de 5.000 euros correspondant selon l'expert à la réparation des matériels est raisonnable et doit être reprise.

S'agissant du poste "coût de la sous-traitance extérieure", entre le 31 juillet 2017 et le 31 janvier 2020, il n'est pas justifié d'une sous-traitance en lien avec les désordres des machines.

Le poste "crédit des machines" vise en fait à faire financer les machines par le vendeur, alors que les machines ont été conservées et peuvent être remises en état de marche à hauteur du montant des préjudices matériels ; cette demande n'est en conséquence pas justifiée.

Compte tenu de ce qui précède, le préjudice de la société appelante, réparation des matériels comprise, est évaluée à 20.000 euros.

Sur la demande en restitution du matériel mis à disposition,

La société Atsi-Groupe fait valoir que :

- le transformateur électrique et la fraiseuse conventionnelle ont été mises à disposition par la société LMO pour pallier l'absence de mise en conformité du centre d'usinage Hyundai ; or, les dysfonctionnements de ce matériel persistent,

- le retrait du transformateur entraînerait un effacement de la mémoire de la machine Hyundai ; les informations qu'elle contient sont indispensables et particulièrement onéreuse ; par conséquent, le matériel ne doit pas être restitué, au moins avant que la société LMO ne soit condamnée à réparer les préjudices qu'elle a causés.

La société LMO réplique que :

- un transformateur électrique ainsi qu'une fraiseuse conventionnelle ont été mis à disposition de l'appelante début août 2017, lors de la panne du centre d'usinage Hyundai ; ce transformateur et cette fraiseuse sont toujours la propriété de la société LMO ; l'appelante utilise depuis 4 ans un matériel qui ne lui appartient pas et ce matériel doit être restitué sous astreinte.

Sur ce,

Il est constant que le matériel litigieux mis à disposition de la société Atsi début août 2017 lors de la panne du matériel Hyundai est resté la propriété de la société LMO et n'a pas été restitué.

Or, la société Atsi qui a la possibilité de demander la mise en conformité de ses machines et l'indemnisation de ses préjudices ne peut prétendre conserver en parallèle celles mises à sa disposition et elle ne rapporte nullement la preuve de ce que leur conservation serait indispensable pour "préserver la mémoire de la machine".

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de restitution sans qu'il ne soit nécessaire au stade de l'appel d'ordonner une astreinte, le jugement de première instance n'ayant pas été assorti de l'exécution provisoire de sorte qu'il ne peut rien être déduit d'une non-restitution.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

La société intimée qui succombe en appel supportera les dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement et versera à son adversaire la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonné à la société Atsi-Groupe de restituer la fraiseuse conventionnelle et le transformateur mis à disposition pour le matériel Hyundai, dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, et cela sans astreinte.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la Sa Lyon Machines Outils a manqué à son obligation de délivrance conforme envers la Sas Atsi-Groupe.

Condamne Sa Lyon Machines Outils à payer à la Sas Atsi-Groupe la somme de 20.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices subis.

Condamne la Sa Lyon Machines Outils aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers avec droit de recouvrement et verser à la Sas Atsi-Groupe une indemnité de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.