Cass. 3e civ., 13 mars 1991, n° 89-18.164
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Senselme
Rapporteur :
M. Gautier
Avocat général :
M. Marcelli
Avocat :
Me Choucroy
Sur les trois moyens, réunis :
Attendu que la société Larrose Père et fils, locataire de locaux à usage commercial appartenant à la Société civile immobilière (SCI) du ..., fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 23 mai 1989) d'avoir déclaré valable le congé avec refus de renouvellement du bail, sans indemnité d'éviction, que cette société lui avait fait délivrer, alors, selon le moyen,
1°) que l'inexécution par le preneur d'une de ses obligations ne peut être invoquée comme motif grave et légitime de refus de renouvellement que si l'infraction s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure d'avoir à la faire cesser ; qu'il s'évince des documents de la cause et des motifs de l'arrêt que la société propriétaire, qui avait autorisé expressément les sous-locations, et qui avait eu connaissance de la présence de la société sous-locataire dans les lieux, n'avait jamais mis en demeure la société locataire de l'appeler à concourir à l'acte de sous-location ; qu'en retenant pourtant l'inexécution de cette obligation comme motif grave et légitime de refus de renouvellement, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision, au regard de l'article 9-1° du décret du 30 septembre 1953 ;
2°) que les conventions doivent s'exécuter de bonne foi ; que, pour débouter la société bailleresse de sa demande en validation de congé, le tribunal avait relevé la mauvaise foi "patente" de celle-ci, qui avait connu la sous-location avant même l'entrée dans les locaux de la société Vitis ; que la société Larrose avait ajouté que la société propriétaire, qui avait connaissance de la présence de la société Vitis dans les lieux, et qui avait toujours entretenu des rapports courtois avec les dirigeants de cette société, n'avait pu, de bonne foi, s'abstenir de toute mise en demeure d'appeler le bailleur à concourir à l'acte, avant de se prévaloir, cinq ans plus tard, d'une infraction à l'article 21 du décret de 1953 au moment du renouvellement du bail ; que la cour d'appel qui, tout en constatant que la société propriétaire avait connu le président-directeur général de la société Vitis, qui lui avait été présenté, et avait eu connaissance de la présence de cette société dans les lieux, n'a pas recherché si la bailleresse n'avait pas manqué à son obligation de bonne foi en se prévalant du défaut de concours du propriétaire à la sous-location qu'elle avait autorisé, sans mettre en demeure la locataire d'exécuter son obligation, a) a entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, b) n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l'article 1134 alinéa 3 du Code civil ;
3°) qu'il s'évince des constatations de l'arrêt que la société propriétaire avait expressément autorisé les sous-locations, qu'elle avait eu connaissance de la présence de la société Vitis dans les lieux, et que, avant le début de la sous-location, elle avait connu le président-directeur général de la société sous-locataire, qui lui avait été présenté ; que, sur le fondement de ces constatations, le tribunal avait jugé que l'infraction aux dispositions de l'article 21 du décret du 30 septembre 1953 ne pouvait avoir un caractère suffisant de gravité pour justifier le refus sans indemnité de renouvellement du bail ; que la cour d'appel, qui a validé le congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction, sans rechercher et apprécier si l'infraction alléguée avait un caractère de gravité suffisant pour justifier cette sanction, et sans opposer aucune réfutation aux motifs du jugement sur ce point, a) a entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, b) n'a pas justifié légalement sa décision, au regard de l'article 9-1° du décret du 30 septembre 1953 ;
Mais attendu qu'après avoir justement retenu que l'infraction commise par la société Larrose ne pouvant être réparée, la bailleresse n'avait pas l'obligation de faire délivrer une mise en demeure préalable au congé, ce qui excluait qu'elle n'ait pas agi de bonne foi en s'en abstenant, la cour d'appel a répondu aux conclusions et légalement justifié sa décision en énonçant souverainement que le défaut de respect, par la société Larrose Père et fils, des formalités de l'article 21 du décret du 30 septembre 1953 constituait un motif grave et légitime de refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.