CA Paris, 16e ch. A, 24 octobre 2007, n° 04/21937
PARIS
Arrêt
Autre
PARTIES
Demandeur :
Gestion Gagey (SARL)
Défendeur :
Mme Charmet, M. Laurent, M. Laurent, M. Laurent, Mme Morin, Mme Lamy, Mme Rey, M. Laurent, M. Laurent, M. Laurent, M. Laurent
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gaboriau
Conseillers :
Mme Imbaud-Content, M. Zavaro Maurice
Avoués :
SCP Roblin - Chaix De Lavarene, SCP Duboscq - Pellerin
Avocats :
Me Perrault, Me De Clerck
PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La Cour, saisie de l'appel interjeté par la SARL GESTION GAGEY à l'encontre du jugement rendu le 3/9/2004 par le tribunal de grande instance de PARIS ayant statué dans un litige en fixation du prix du bail renouvelé entre les parties à compter du 1er/7/2001 pour les locaux situés à [...] a, par arrêt du 1er/3/2006 , 'dit y avoir lieu d'interroger l'expert désigné en première instance et au vu du rapport duquel la décision déférée avait été rendue afin qu'il précise s'il avait ou non visité la pièce constituant le lot n° 24, objet d'un bail distinct non concerné par le présent litige et l'avait incluse dans son évaluation de la surface des locaux litigieux et afin qu'il visualise sur le plan annexé à son rapport la partie des locaux du 6ème étage comprise dans le bail et en détaille la surface' ;
L'expert, Mme MAIGNE GABORIT, dans son rapport complémentaire du 13/8/2006, a indiqué que l'ensemble des surfaces du plateau du 5 ème étage sur entresol où se situe le lot 24 en cause avait été examiné lors de sa visite sur place, que la surface de ce lot était de 11,40 m2 et que la surface des locaux concernés par le présent litige (le lot 24 exclu ) était de 239m2, soit une valeur locative sur cette base et sur celle d'un prix unitaire de 350 € retenu au rapport initial de 83 650 € par an au lieu de 87 500 € comme initialement retenu ;
Postérieurement à l'arrêt du 1er/3/2006, la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC a, en application de l'article L 145-57 alinéa 2 du code de commerce, notifié à Mme Agnès LAURENT épouse MORIN , à M. Denis LAURENT, à M. Philippe LAURENT, Mme Marie-Françoise CHARMET épouse LAURENT, M. Bruno LAURENT, M. Bernard LAURENT, M.Christophe LAURENT et Mme Blandine LAURENT épouse LAMY son intention de renoncer au renouvellement du bail, ce par acte extrajudiciaire des 24/7/2006, 28/7/2006, 25/7/2006 et 27/7/2006 ;
Dans ses conclusions après rapport complémentaire, la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC, appelante, demande à la Cour :
-d'infirmer le jugement déféré,
-de donner acte aux intimés de ce qu'ils reconnaissent que la surface de 11,40m2 doit être retranchée de la surface globale à retenir,
-de fixer le loyer du bail renouvelé au 1er/7/2001, à la somme de 55 550 € en principal par an,
-vu la renonciation de la concluante au renouvellement du bail, de dire qu'un abattement de 20% pour précarité devra être appliqué sur l' indemnité d'occupation due par la concluante,
-de condamner les consorts LAURENT au paiement d'une indemnité de 1500 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux entiers dépens ;
Les consorts LAURENT, pour leur part, demandent à la Cour :
-d'infirmer le jugement déféré sur la surface y retenue des locaux,
-de fixer le loyer du bail renouvelé au 1er/7/2001 à la somme de 83 650 € retenue au rapport d'expertise complémentaire avec intérêts au taux légal à compter du 1er/7/2001 et avec capitalisation de ces intérêts ;
-de débouter la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC de ses demandes,
-de la condamner au paiement d'une indemnité de 2 500 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d' expertise ;
MOTIFS DE LA DECISION
Considérant qu'il sera tout d'abord relevé qu'ensuite de l'exercice par la locataire de son droit d'option , le litige n'a plus trait à la fixation du loyer du bail renouvelé au 1er/7/2001 mais à la fixation de l'indemnité d'occupation due par la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC entre le 1er/7/2001 (date à laquelle, par l'effet du congé, le bail a pris fin) et l'exercice du droit d'option et éventuellement, au cas où la locataire se serait maintenue dans les lieux postérieurement à l'exercice de ce droit, à la fixation de l'indemnité d'occupation entre cet exercice et le départ des lieux ;
Considérant que la question relative à la fixation de l' indemnité d'occupation est dans le débat dés lors que la SARL GESTION GAGEY fait, dans ses écritures, état de cette indemnité pour laquelle elle réclame une réfaction pour précarité ;
Considérant que l' indemnité d'occupation due entre la date à laquelle le bail a pris fin et l'exercice du droit d'option est de nature statutaire et s'établit au montant de la valeur locative en renouvellement ;
Considérant qu'il convient donc de déterminer cette valeur ;
Considérant, à cet égard, que la SARL GESTION GAGEY, outre sa contestation sur la surface des locaux au motif que l'expert a inclus dans son calcul une chambre de service située au 6ème étage (5ème étage sur entresol) faisant l'objet d'un bail distinct et correspondant au lot n° 24 de l'état de division de l'immeuble alors que les locaux litigieux constituent le lot n° 18 de cet état, conteste la pondération retenue par l'expert estimant que la surface globale de 76 m2 de l'entrée et des nombreux dégagements, débarras et couloirs pour les locaux du 4ème étage sur entresol doit être pondérée à 0,50 d'où une surface pondérée des locaux de 202 m2 et conteste, par ailleurs, le prixunitaire retenu par l'expert et le tribunal qu'elle estime s'établir à 275 € /m2 au lieu de 350 € relevant, à cet égard, qu'une seule pièce bénéficie d'une vue (au demeurant non directe) sur le jardin des Tuileries, que les références citées par l'expert se rapportent à des bureaux dépendant d'immeubles de standing situés sur des grandes avenues , que les locaux sont dépourvus de prestations techniques (climatisation ou faux-plancher technique), qu'il sont équipés d'un chauffage individuel au gaz, que les fenêtres ne sont pas équipées de double-vitrage et présentent des signes de vétusté et des désordres d'étanchéité , que le local d'archives est très lambrissé, le tout justifiant , selon elle, un prix unitaire sur lequel doit être appliqué un abattement minimum de 10% pour travaux locatifs excédant les obligations normales d'entretien ;
Considérant, concernant la surface, que les bailleurs acceptent les conclusions du rapport complémentaire quant à l'exclusion de la surface des locaux litigieux pour 11,40m2 correspondant, au vu du rapport d'expertise, au lot 24, ce dont il leur sera donné acte ;
Considérant, concernant la pondération, qu'elle doit être appréciée en fonction de l'utilité pour l'activité exercée ;
Considérant, à cet égard, que la configuration du 4ème étage, nonobstant la présence alléguée de couloirs et débarras à cet étage ne représente pas une contrainte particulière pour l'activité exercée alors que le descriptif figurant au rapport rend compte , à ce niveau, de la fonctionnalité des locaux constitués d'une large galerie d'entrée distribuant quatre bureaux sur rue de bonne hauteur sous plafond et d'un bon éclairage naturel et six bureaux sur cour bénéficiant aussi d'un éclairage naturel, de sorte que la critique de l'appelante sur la pondération n'apparaît pas fondée, le coefficient de pondération devant être de 1 comme justement retenu par l'expert et le tribunal ;
Considérant, concernant le prix unitaire, que l'expert a relevé l'absence de climatisation et de faux-plancher technique, retenant des prestations banales pour les bureaux et que parmi les références par elle citées figurent des locaux présentant des équipements et prestations similaires ;
Que celle de ces références concernant des locaux à usage de bureaux situés dans le même immeuble et à une même période (puisque de Mars 2001), est incontestablement intéressante pour la détermination de la valeur locative des locaux litigieux mais qu'elle est imprécise sur l'état des locaux concernés et qu'elle ne saurait , en tout état de cause, rendre compte à elle seule de la valeur locative devant être complétée par d'autres références concernant des locaux équivalents ;
Considérant qu'il doit être tenu compte, dans l'appréciation du prix unitaire, de l'état d'entretien mais que ceci n'a pas échappé à l'expert qui relève que les fenêtres des locaux en cause présentent des signes de vétusté et des désordres d'étanchéité ;
Considérant que le fait que ces locaux soient dotés d'un chauffage individuel au gaz n'est pas constitutif d'un inconvénient particulier ;
Considérant que l'immeuble décrit par l'expert comme étant un bel immeuble à façade en pierre de taille dont les parties communes sont de bonne facture , a été exactement par elle qualifié d'immeuble de 'bon standing' et que parmi les références citées au rapport d'expertise figurent des locaux dépendant d'immeubles de standing équivalent ;
Considérant qu'il est exact, comme l'a indiqué l'expert dans sa réponse aux dires sur ce point de la locataire, qu'une seule pièce des locaux au quatrième sur entresol bénéficie d'une vue sur les jardins des Tuileries, mais qu'il doit être tenu compte de l'environnement agréable de ceux-ci ;
Considérant, enfin, que le bail ne contient aucune clause faisant supporter au preneur des charges excédant les obligations d'entretien usuellement supportées par un locataire, de sorte qu'aucun abattement de ce chef ne saurait être appliqué comme le réclame la SARL de GESTION GAGEY ;
Considérant, au vu notamment, de l'emplacement favorable et des références figurant au rapport d'expertise, qu'il sera retenu, comme l'expert et le tribunal, un prix unitaire de 350€ pour les locaux en cause au 1er/7/2001 ;
Considérant que la valeur locative desdits locaux à la date susvisée s'établit donc, sur la base de ce prix et d'une surface pondérée de 239 m2, à la somme de 83 650 € par an ;
Considérant, dès lors que la locataire a librement fait le choix de renoncer au renouvellement du bail qui lui était offert , qu'aucune réfaction pour précarité ne saurait être opérée sur la valeur locative ;
Considérant que l'indemnité d'occupation due par la SARL de GESTION GAGEY entre le 1er/7/2001 et l'exercice du droit d'option sera fixée, en conséquence, à la somme annuelle susvisée de 83650€ ;
Considérant, dans l' hypothèse où la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC se serait maintenue dans les lieux après exercice de son droit d'option, que l'indemnité d'occupation par elle due serait non une indemnité de nature statutaire mais une indemnité de droit commun générée par une occupation sans droit ni titre des lieux ;
Considérant que la Cour estime, au vu des éléments du dossier, devoir fixer cette éventuelle indemnité sur la même base que l'indemnité précédente soit sur la base mensuelle de 6970,83€ ;
SUR LA DEMANDE DES PARTIES AU TITRE DE L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET SUR LES DEPENS,
Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L 145-57 du code de commerce, la SARL GESTION GAGEY qui a exercé son droit d'option devra supporter tous les frais de l'instance en ce inclus les frais d'expertise ;
Considérant qu'elle ne saurait donc solliciter indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Considérant, concernant la demande du même chef des consorts LAURENT qu'il n'est pas inéquitable de laisser à leur charge les frais par eux exposés, leur demande à cet égard étant donc rejetée ;
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort,
Vu l'exercice par la locataire de son droit d'option par acte des 24,25, 27 et 28 juillet 2006,
I - Constatant que le litige, ensuite de l'exercice du droit d'option, n'a plus trait à la fixation du loyer du bail renouvelé au 1er/7/2001 mais à la fixation de l'indemnité d'occupation due par la locataire entre la date d'expiration du bail, soit le 1er/7/2001, et l'exercice de son droit d'option et éventuellement, au cas où elle se serait maintenue dans les lieux postérieurement à ce droit, à la fixation de l'indemnité d'occupation pour la période postérieure courue de l'exercice de ce droit jusqu'à son départ des lieux, réforme la décision entreprise.
II - Donne acte aux bailleurs de ce qu'ils acceptent qu'une surface de 11,40m2 soit exclue de la surface des locaux en cause,
III - Fixe l'indemnité d'occupation de nature statutaire due par la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC du 1er/7/2001jusqu'à la date d'exercice de son droit d'option à la somme de 83 650 € par an,
IV - Fixe, en tant que de besoin et au cas où la SARL de GESTION GAGEY se serait maintenue dans les lieux postérieurement à l'exercice de son droit d'option, l'indemnité d'occupation par elle due aux consorts LAURENT de l'exercice de ce droit jusqu'à son départ des lieux, à la somme de 6970, 83 € par mois,
V -Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
VI - Condamne la SARL de GESTION GAGEY venue aux droits de la société GESTION GAGEY SNC aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce inclus les frais d'expertise ;
VII - Ordonne la distraction des dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.