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Décisions

Cass. 3e civ., 27 novembre 1996, n° 94-18.215

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

M. Bourrelly

Avocat général :

M. Sodini

Avocat :

Me Baraduc-Benabent

Paris, 16e ch., sect. A, du 14 juin 1994

14 juin 1994

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 1994), que la société Mud, propriétaire d'un local à usage commercial, a délivré à Mlle X..., preneur à bail, un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction, puis l'a assignée afin de faire juger le congé valable et fixer les indemnités d'éviction et d'occupation;

Attendu que la société Mud fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité d'éviction à une certaine somme, alors, selon le moyen, "1°/ que les juges du fond ne peuvent relever d'office des moyens, même d'ordre public, sans mettre les parties en mesure d'en débattre; que Mlle X... ne contestait pas, devant la cour d'appel, la date retenue par l'expert pour apprécier les possibilités de cession; qu'en retenant un tel moyen, à l'encontre de la société Mud, sans permettre à celle-ci de formuler ses observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile; 2°/ que le juge doit respecter et faire respecter les règles relatives à la communication régulière des pièces, que la société Mud, par conclusions signifiées le 3 mai 1994, sollicitait un donné acte de ce qu'elle avait vainement sommé Mlle X... de communiquer ses pièces; que la communication des bilans des exercices 1992 et 1993 est intervenue le 10 mai 1994, soit la vieille de l'audience des débats, de sorte que la société Mud, qui avait discuté la valeur du fonds de commerce en fonction des années 1988 à 1990 dont les bilans lui étaient connus, n'a pu connaître les bilans des années 1991 à 1993 et n'a pu en débattre; qu'en fondant, dès lors, sa décision sur ces derniers bilans, dont celui de l'année 1991 ne figure pas sur un bordereau de communication, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles 15,

16 et 132 du nouveau Code de procédure civile; 3°/ qu'enfin, l'estimation de l'indemnité d'éviction en fonction du chiffre d'affaires ne doit pas tenir compte de la TVA; qu'en retenant la moyenne des chiffres d'affaires TTC, la cour d'appel a violé l'article 8 du décret du 30 septembre 1953";

Mais attendu qu'ayant relevé, sans violer le principe de la contradiction, que la société Mud ne rapportait pas la preuve que le préjudice causé par le défaut de renouvellement serait moindre que celui qu'entraînerait la perte du fonds de commerce, invoquée par Mlle X..., dont elle a retenu, à bon droit, que les possibilités de réinstallation devaient être appréciées à la date la plus proche de l'éviction, la cour d'appel, qui a constaté que les bilans de 1991, 1992 et 1993 avaient été régulièrement communiqués, et qui n'était pas saisie d'une demande de révocation de l'ordonnance de clôture ou de rejet des débats de ces documents, a pu évaluer l'indemnité due à la locataire en incluant la taxe sur la valeur ajoutée dans le chiffre d'affaires qui a servi de base à son calcul;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Mud fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité d'occupation due par Mlle X... en affectant la valeur locative d'un abattement d'usage, pour tenir compte de la précarité de la situation de tout locataire évincé, alors, selon le moyen, "que les juges du fond ne peuvent statuer par voie d'affirmation générale; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si, en l'espèce, la locataire subissait réellement un préjudice lié à la précarité de la situation, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile";

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté qu'un usage était applicable au cas d'espèce, et ne s'est pas prononcée par voie d'affirmation générale, a souverainement apprécié le montant de l'indemnité d'occupation;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.