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Décisions

Cass. com., 16 octobre 2007, n° 06-15.608

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Nîmes, du 2 mars 2006

2 mars 2006

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 2 mars 2006), qu'après la mise en redressement judiciaire de la Banque Majorel (la banque), M. X... ayant été désigné représentant des créanciers, le tribunal a adopté le plan de cession de l'entreprise et désigné M. X... commissaire à l'exécution du plan, le maintenant en outre dans ses fonctions de représentant des créanciers ; que par acte du 27 avril 1992, régularisé le 27 juin 1995, M. X..., agissant en sa double qualité, a assigné la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l Ardèche, devenue la caisse régionale de crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes (la caisse) en paiement de dommages-intérêts pour soutien abusif ; que devant le tribunal, la caisse a soulevé l'exception de péremption de l'instance, en faisant valoir que M. Y..., désigné en remplacement de M. X... qui avait fait valoir ses droits à la retraite le 30 juin 2000, n'avait conclu que le 22 avril 2002, soit plus de deux années après ses propres conclusions du 8 février 2000 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir constaté la péremption de l'instance, alors, selon le moyen :

1 / que l'interruption de l'instance emporte celle du délai de péremption ; qu'il résulte de l'article 370 du nouveau code de procédure civile, qu'à compter de la notification qui en est faite à l'autre partie, l'instance est interrompue par le recouvrement ou la perte par une partie de la capacité d'ester en justice ; que la cessation des fonctions du commissaire à l'exécution du plan de cession d'une société en redressement judiciaire, et la désignation d'un nouveau commissaire à l'exécution du plan pour succéder au précédent, entraînent respectivement une perte et un recouvrement de la capacité d'agir en justice au sens de ce texte ; que la cour d'appel, pour constater la péremption de l'instance depuis le 8 février 2002, et nier tout effet interruptif d'instance, sous réserve de notification, au départ à la retraite de M. X... et à la désignation de M. Y..., les 30 juin et 28 novembre 2000, décide que ces événements n'entrent pas dans les prévisions des articles 369 et 370 du nouveau code de procédure civile ;

qu'en statuant ainsi, la cour d'appel viole les dispositions précitées, ensemble l'article L. 621-68 du code de commerce ;

2 / que le commissaire à l'exécution du plan poursuit les actions introduites par l'administrateur judiciaire ou le représentant des créanciers avant le jugement arrêtant le plan ; qu'à compter du jugement arrêtant le plan de cession, et indépendamment de l'existence d'un dessaisissement frappant le débiteur, il a seul qualité pour introduire des actions dans l'intérêt collectif des créanciers ; qu'en refusant de constater l'interruption de l'instance consécutive à la cessation des fonctions du mandataire judiciaire, aux motifs erronés que le débiteur avait qualité pour agir, alors que l'action tendait à la reconstitution de l'actif dans l'intérêt collectif des créanciers et devait nécessairement être poursuivie par le commissaire à l'exécution du plan l'ayant introduite, la cour d'appel viole l'article L. 621-68 du code de commerce ;

3 / que le commissaire à l'exécution du plan a qualité pour introduire une action dans l'intérêt collectif des créanciers après le jugement arrêtant le plan de cession ; que la cessation des fonctions du mandataire judiciaire partie à l'instance entraîne, à compter de sa notification, interruption de l'instance ; que la cour d'appel qui, pour refuser de constater une telle interruption, relève que le débiteur en redressement judiciaire pouvait agir, alors que les pouvoirs éventuels du débiteur ne sauraient avoir d'influence sur l'interruption résultant de la perte de la capacité d'ester touchant une partie à l'instance, viole l'article 370 du nouveau code de procédure civile et L. 621-68 du code de commerce ;

4 / que la perte de la capacité d'ester entraîne à compter de sa notification une interruption de l'instance ; qu'il en est ainsi de la cessation des fonctions du mandataire judiciaire ; que la cour d'appel, pour dire que le moyen tiré de l'interruption de l'instance n'était pas fondé, relève qu'en l'absence de production de la requête en remplacement de M. X... dont la date est par conséquent ignorée, la négligence du mandataire judiciaire ne peut être exclue ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier l'absence d'interruption de l'instance fondée sur la cessation des fonctions de M. X..., la cour d'appel prive sa décision de base légale au regard de l'article 370 du nouveau code de procédure civile, violé ;

Mais attendu que l'instance n'est interrompue par la perte de la capacité d'ester en justice qu'à compter de la notification qui en est faite à l'autre partie ; que dès lors qu'il n'était pas établi, ni même soutenu que la notification de la cause d'interruption invoquée avait été notifiée à l'autre partie, la cour d'appel n'avait pas à mettre en oeuvre les règles régissant l'interruption de l'instance ; qu'ainsi, et abstraction faite de tous autres motifs, la décision se trouve justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement ayant constaté la péremption de l'instance, alors, selon le moyen :

1 / que le délai de péremption se trouve interrompu par toute diligence émanant d'une partie et manifestant la volonté de son auteur de poursuivre l'instance ; que cette diligence peut revêtir n'importe quelle forme et qu'il n'est notamment pas exigé qu'elle s'identifie à un acte de procédure ; qu'en décidant que ne pouvait avoir de caractère interruptif de la péremption le paiement de frais divers auprès du greffe du tribunal de commerce effectué par le mandataire judiciaire, ce paiement devant s'analyser en une simple mesure administrative, alors que le paiement d'une provision sur frais d'instance réclamée par le greffe dans le cadre de l'instance en cours manifestait clairement l'intention du mandataire judiciaire de poursuivre cette instance et avait effectivement rendu rendre possible une telle poursuite, la cour d'appel a violé l'article 386 du nouveau code de procédure civile ;

2 / que le délai de péremption se trouve interrompu par toute diligence émanant d'une partie et manifestant la volonté de son auteur de poursuivre l'instance ; que cette diligence peut revêtir n'importe quelle forme et qu'il n'est notamment pas exigé qu'elle s'identifie à un acte de procédure ; qu'en décidant que le paiement des frais de greffe du tribunal de commerce ne témoignait pas d'une volonté de faire progresser l'affaire et s'analysait en une simple mesure administrative, sans influence sur la solution du litige, sans rechercher à quoi correspondaient ces frais réglés par le commissaire à l'exécution du plan, recherche indispensable pour déterminer la portée de leur règlement au regard de la volonté du mandataire de poursuivre l'instance, la cour d'appel prive sa décision de base légale au regard de l'article 386 du nouveau code de procédure civile, violé ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la diligence interruptive de la péremption, invoquée par M. Y..., ès qualités, consistait dans le versement au greffe, le 17 mai 2000, d'une somme de 579,73 francs concernant : " formalités suite à renvoi sur incompétence, saisine du tribunal de commerce d'Aubenas suite à arrêt de la cour d'appel de Montpellier, jugement au fond avec mise au rapport tarif : 15 + 16 + H, provision pour instance - M. Jean X... contre Crédit agricole " , et énoncé, par motifs propres et adoptés que la diligence interruptive de péremption d'instance consiste en un acte émanant de l'une ou l'autre des parties témoignant d'une volonté de voir aboutir la procédure, l'arrêt retient à bon droit que le seul paiement des frais de greffe du tribunal de commerce, qui ne témoigne pas d'une volonté de faire progresser l'affaire et n'a aucun effet sur le déroulement de l'instance, n'a pas interrompu la péremption ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille sept.