Cass. 2e civ., 20 mai 2021, n° 20-15.098
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
1. Selon l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation (Paris, 29 janvier 2020), la société Publi Expert a interjeté appel du jugement d'un tribunal de commerce qui l'a condamnée au paiement de dommages-intérêts à la société Nobilas France.
2. La société Nobilas France a formé un pourvoi contre l'arrêt qui a déclaré irrecevable son action en indemnisation.
3. Cet arrêt ayant été cassé, (1re Civ., 6 septembre 2017, pourvoi n° 16-26.459), l'arrêt de la Cour de cassation a été signifié à la société Publi Expert le 26 septembre 2017.
4. Le 22 novembre 2017, la société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion, associée unique de la société Publi Gestion a constaté le caractère définitif de la dissolution sans liquidation de celle-ci, aucune opposition n'ayant été formulée dans le délai légal.
5. La société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion a déposé une déclaration de saisine au greffe de la cour d'appel de renvoi le 5 décembre 2017.
6. La société Nobilas France a soulevé l'irrecevabilité de la déclaration de saisine pour tardiveté.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. La société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la saisine de la cour d'appel de renvoi en date du 5 décembre 2017 et, en conséquence, de conférer force de chose jugée au jugement rendu le 23 décembre 2014 par le tribunal de commerce, alors « que la perte par une société dissoute de sa personnalité morale à l'issu du délai de trente jours conféré aux éventuels créanciers pour faire opposition, combinée à la transmission universelle simultanée de l'ensemble de ses droits et obligations à une société absorbante, permet à cette dernière d'invoquer la cause d'interruption de l'instance pour cause de succession à l'action d'une partie définitivement éteinte, visée à l'article 370 du code de procédure civile ; qu'en refusant de décider de la sorte, au motif totalement inopérant que le délai de forclusion de deux mois visé à l'article 1034 du code de procédure civile courrait encore à la date du 18 novembre 2017, à laquelle la société Publi Expert avait perdu sa personnalité morale et à laquelle la société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion avait obtenu la transmission de son patrimoine universel et de l'ensemble de ses droits et obligations, quand ce fait permettait au contraire de constater que le délai de forclusion n'étant pas écoulé à la date de la succession, l'interruption pouvait encore jouer, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 370 et 1034 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. D'une part, la dissolution d'une personne morale, même assortie d'une transmission universelle de son patrimoine, qui n'est pas assimilable au décès d'une personne physique, même lorsque l'action est transmissible, ne constitue pas une cause d'interruption de l'instance au sens de l'article 370 du code de procédure civile.
9. D'autre part, la transmission universelle de son patrimoine à une personne morale par une société dissoute étant indissociablement liée à sa dissolution, la perte de sa capacité juridique n'interrompt pas le délai de forclusion pour saisir la juridiction de renvoi après cassation, qui continue à courir. Ce délai devient, par l'effet de la transmission de ses droits par la société absorbée, opposable à la société absorbante, qui acquiert de plein droit, à la date de l'assemblée générale ayant approuvé l'opération de fusion-absorption, la qualité pour poursuivre les instances engagées par la société absorbée.
10. Ayant relevé que l'annonce de la dissolution anticipée sans liquidation de la société Publi Expert avait été publiée le 19 octobre 2017 et n'avait provoqué, dans le délai de trente jours, aucune opposition, la cour d'appel, qui a constaté que la disparition de la personnalité morale de la société Publi Expert assortie de la transmission universelle de son patrimoine, composé de l'ensemble de ses droits, à la société absorbante Publi Expert GestionPubli Expert Gestion s'était produite le 18 novembre 2017, en a exactement déduit que, si la société Publi Expert avait la capacité de la saisir entre le 26 septembre 2017 et le 18 novembre 2017, la société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion avait recueilli cette capacité dès le 19 novembre 2017, de sorte qu'en déposant la déclaration de saisine au greffe de la cour d'appel après l'expiration, le 26 novembre 2017, du délai de forclusion, qui n'avait pas été interrompu, elle avait agi tardivement.
11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Publi Expert GestionPubli Expert Gestion et la condamne à payer à la société NobilasFrance la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code procédure civile.