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Décisions

Cass. com., 16 novembre 1993, n° 91-14.987

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Apollis

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Gatineau, Me Choucroy, SCP Nicolay et de Lanouvelle

Douai, du 21 mars 1991

21 mars 1991

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 21 mars 1991), que, pour l'organisation d'un transport de marchandises appartenant à la société Roquette, avec laquelle elle était en relation commerciale, la société des transports Debeaux (société Debeaux) s'est adressée à la société GEFCO ; que le déplacement confié à la société Moreau a été exécuté par une société La Violette ; que les marchandises laissées en souffrance puis saisies par la douane italienne ont été livrées à leur destinataire avec retard ; que la société Debeaux, prétendant qu'à la suite de ce transport elle avait perdu durant une certaine période la clientèle de la société Roquette, a assigné la société GEFCO en réparation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen pris en ses trois branches :

Attendu que la société GEFCO fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Debeaux, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la société GEFCO était simple commissionnaire de transports ; que sa responsabilité ne pouvait être recherchée que pour manquement à son obligation de diligence dans le choix d'un transporteur solvable et normalement diligent ; que la société Debeaux imputait d'ailleurs seulement à faute à la société GEFCO d'avoir choisi un transporteur insolvable et incompétent et de n'avoir pas su contrôler suffisamment le déroulement du transport ;

qu'en retenant la responsabilité de la société GEFCO sur la seule constatation du caractère défectueux du transport sans rechercher si la société GEFCO avait commis une faute personnelle en manquant à son obligation de diligence dans le choix du transporteur, notamment en choisissant un transporteur dont elle aurait dû normalement connaître l'incompétence ainsi que dans son obligation de diligence

dans le contrôle du transport, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du Code civil et 96 et suivants du Code du commerce ; alors, d'autre part, que, la responsabilité de la société GEFCO ne pouvait être retenue que s'il était prouvé que sa faute, avait été à l'origine de la perte temporaire de clientèle invoquée par la société Debeaux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à constater que la perte de clientèle invoquée par la société Debeaux avait provoqué une baisse de son chiffre d'affaires ; que la cour d'appel n'a pas constaté que c'est l'incident de livraison imputé à la société GEFCO qui avait été à l'origine de la perte temporaire de clientèle ; qu'ainsi, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du Code civil et 96 et suivants du Code du commerce ; et alors, enfin, que toute décision doit être motivée ; qu'en se bornant à affirmer "qu'il résulte des pièces versées aux débats" que la société Debeaux a subi une baisse du chiffre d'affaires, sans analyser ni préciser ces documents, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le commissionnaire de transport est responsable non seulement de ses propres fautes mais aussi de celles des transporteurs qu'il s'est substitué ;

qu'ayant relevé, d'un côté,que le retard à la livraison était imputable à la négligence d'un des transporteurs que la société GEFCO s'était substitués et, d'un autre côté, que la société Debeaux, à la suite de la mauvaise exécution de ce transport, s'était trouvée en difficulté avec son donneur d'ordre lequel avait interrompu un certain temps ses relations commerciales ce qui avait entraîné pour elle une perte de chiffre d'affaires, la cour d'appel qui a ainsi établi le lien de causalité entre le transport litigieux et le dommage subi par la société Debeaux, a souverainement évalué au vu des éléments de la cause, le montant de l'indemnité propre àréparer ce dommage et, dès lors, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société GEFCO fait encore grief à l'arrêt d'avoir fixé au jour de l'assignation introductive d'instance le point de départ des intérêts des sommes allouées à la société Debeaux, alors, selon le pourvoi, que lorsqu'une décision d'appel est constitutive d'un droit à indemnité, la somme ainsi allouée porte intérêt à compter du prononcé de cette décision ; que si le juge peut déroger à cette règle, sa décision doit être motivée ; qu'en condamnant la société GEFCO à verser à la société Debeaux Transports une somme de 100 000 francs de dommages et intérêts avec intérêts judiciaires à compter du 23 mars 1988, date de l'assignation, sans motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153-1 du Code civil ;

Mais attendu qu'en fixant à une date autre que celle de sa décision, le point de départ des intérêts, la cour d'appel n'a fait qu'user de la faculté remise à sa discrétion par l'article 1153-1 du Code civil ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.