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Décisions

Cass. com., 4 mai 1982, n° 78-14.406

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauvageot

Rapporteur :

M. Amalvy

Avocat général :

M. Laroque

Avocat :

Me Le Prado

Chambéry, du 9 mai 1978

9 mai 1978

SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE (CHAMBERY, 9 MAI 1978) QUE LA SOCIETE OUTINORD AYANT DEMANDE A LA SOCIETE MOIROUD ET COMPAGNIE (SOCIETE MOIROUD) DE POURVOIR, EN QUALITE DE COMMISSIONNAIRE, AU TRANSPORT D'AMPHION (HAUTE-SAVOIE) A ROME, D'UN LOT D'ELEMENTS DE COFFRAGE, CELLE-CI A CHARGE LA SOCIETE TRANSPORTS GUIBON (SOCIETE GUIBON) D'Y PROCEDER PAR ROUTE ;

QUE, LE 2 DECEMBRE 1974, EN COURS DE TRAJET, UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION A ENTRAINE LA PERTE D'UNE PARTIE DE CE MATERIEL, QUE, PAR ASSIGNATIONS DES 31 OCTOBRE ET 4 NOVEMBRE 1975, LA SOCIETE MOIROUD ET SA COMPAGNIE D'ASSURANCES, L'UNION DES ASSURANCES DE PARIS (UAP) ONT DEMANDE A LA SOCIETE GUIBON ET A SON ASSUREUR DE LEUR PAYER LE PRIX DU MATERIEL PERDU QUI ETAIT DESTINE AU CONSORZIO RAVENNATE DELLA COOPERATIVE DI PRODUZIONE E LAVORO (CONSORZIO RAVENNATE) ;

QUE LEUR ACTION A ETE DECLAREE IRRECEVABLE, LA COUR D'APPEL AYANT ESTIME QUE LA PRESCRIPTION ANNALE DE L'ARTICLE 32 DE LA CONVENTION DE GENEVE DU 19 MAI 1956, RELATIVE AU CONTRAT DE TRANSPORT INTERNATIONAL DE MARCHANDISES PAR ROUTE (CMR) A LAQUELLE ETAIT SOUMIS LE TRANSPORT EFFECTUE, AVAIT PRODUIT SON EFFET EXTINCTIF ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR AINSI STATUE AU MOTIF, SELON LE POURVOI, QU'AUCUNE RECLAMATION DU CONSORZIO RAVENNATE N'AVAIT ETE ADRESSEE A LA SOCIETE MOIROUD DANS LE DELAI LEGAL, ALORS QUE L'ACTION EN JUSTICE DU COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT CONTRE LE VOITURIER, DANS LE DELAI D'UN AN, INTERROMPT, A ELLE SEULE, LA PRESCRIPTION, QU'EN EXIGEANT, EN PARALLELE A CETTE ACTION ET DANS LE MEME DELAI, UNE RECLAMATION EMANANT DU CONSORZIO RAVENNATE, LES JUGES D'APPEL ONT AJOUTE A LA LOI UNE CONDITION QU'ELLE NE CONTENAIT PAS ET VIOLE LES ARTICLES 2242, 2244 ET 2247 DU CODE CIVIL ;

MAIS ATTENDU QU'AYANT RETENU QUE LA SOCIETE MOIROUD NE RAPPORTAIT PAS LA PREUVE QU'ELLE AVAIT, AVANT L'EXPIRATION DU DELAI DE PRESCRIPTION, DESINTERESSE LE CONSORZIO RAVENNATE OU RECU DE CELUI-CI UNE RECLAMATION PAR LAQUELLE IL LUI DEMANDAIT A ETRE INDEMNISE ET AVAIT ACCEPTE, LA SOCIETE MOIROUD S'Y ETANT ENGAGEE, D'ATTENDRE POUR CELA LE RESULTAT DE LA PROCEDURE QU'ELLE AVAIT INTRODUITE A L'ENCONTRE DE LA SOCIETE GUIBON, LA COUR D'APPEL A DECIDE A BON DROIT QUE LA SOCIETE MOIROUD N'AVAIT PAS QUALITE POUR AGIR CONTRE CETTE DERNIERE SOCIETE DONT ELLE N'ETAIT PAS CREANCIERE, EN PAIEMENT DU PRIX DES MARCHANDISES PERDUES ET QUE LES ASSIGNATIONS DELIVREES A SA REQUETE N'AVAIENT PAS, DES LORS, INTERROMPU LA PRESCRIPTION DONT LA SOCIETE GUIBON SE PREVALAIT ;

QUE LE MOYEN EST MAL FONDE ;

SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR STATUE COMME ELLE L'A FAIT, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QUE NI LA JURISPRUDENCE, NI LA LOI NE SUBORDONNENT LA QUALITE POUR AGIR DU COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT A L'EXISTENCE D'UNE RECLAMATION FORMELLE DU CLIENT, CE QUI AURAIT POUR EFFET DE LAISSER A LA DILIGENCE D'UN TIERS LA RECEVABILITE D'UNE ACTION PERSONNELLE, QUE LA RECEVABILITE D'UNE TELLE ACTION RESULTE DU SEUL LIEN DE DROIT UNISSANT LE COMMISSIONNAIRE AU TRANSPORTEUR, ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA COUR D'APPEL S'EST, EN TOUT ETAT DE CAUSE, MEPRISE SUR LES CONSEQUENCES DE LA PRETENDUE ABSENCE DE RECLAMATION, QU'EN EFFET, CELLE-CI N'AURAIT PU ENTRAINER LE REJET DE L'ACTION QUE POUR DEFAUT DE QUALITE ET NON EN RAISON DE LA PRESCRIPTION, LES JUGES NE CONTESTANT PAS QUE LA DEMANDE AIT ETE INTRODUITE DANS L'ANNEE DE L'ACCIDENT, QU'EN ENONCANT QUE L'ACTION INTENTEE ETAIT IRRECEVABLE CAR ATTEINTE PAR LA PRESCRIPTION, EN DEDUCTION DE MOTIFS ETRANGERS A CETTE PRESCRIPTION, LA COUR D'APPEL S'EST CONTREDITE ET N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION, ET ALORS, ENFIN, QUE LES JUGES D'APPEL SE SONT MEPRIS SUR LA QUALITE DES PARTIES EN EXIGEANT UNE RECLAMATION DE LA PART DU CONSORZIO RAVENNATE, DESTINATAIRE DE LA MARCHANDISE, ET NON DE L'EXPEDITEUR, LA SOCIETE OUTINORD, QUI EST SEUL CLIENT DU COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT, QU'ILS ONT, EN OUTRE, DENATURE LES TERMES EXEMPTS DE TOUTE AMBIGUITE DE LA LETTRE DU 6 NOVEMBRE 1975 EMANANT DE LA SOCIETE OUTINORD QUI CONSTITUAIT, SI BESOIN ETAIT, UNE RECLAMATION EXPLICITE AU NOM DU CONSORZIO RAVENNATE QUI AVAIT, AU SURPLUS, LUI-MEME RECLAME AINSI QUE L'ATTESTAIT UNE LETTRE DE L'UAP DU 15 NOVEMBRE 1975, ELLE AUSSI DENATUREE ;

MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE LE COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT DONT LA RESPONSABILITE EST RECHERCHEE EN TANT QU'IL EST GARANT DU TRANSPORTEUR, N'A QUALITE POUR EXERCER A L'ENCONTRE DE CE DERNIER UNE ACTION PRINCIPALE EN GARANTIE QUE S'IL A DESINTERESSE LE CREANCIER QUI A ACCEPTE D'ATTENDRE LE RESULTAT DE LA PROCEDURE ENGAGEE PAR CE COMMISSIONNAIRE CONTRE LE TRANSPORTEUR OU SON ASSUREUR ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE LA SOCIETE MOIROUD ET L'UAP SONT DEPOURVUES D'INTERET A SOUTENIR QUE LEUR ACTION AURAIT DU ETRE DECLAREE IRRECEVABLE NON PARCE QU'ELLE ETAIT PRESCRITE, MAIS PARCE QU'ELLES ETAIENT SANS QUALITE POUR L'EXERCER ;

QU'EN CONSIDERANT, PAR AILLEURS, QUE CETTE ACTION ETAIT PRESCRITE CAR LES ASSIGNATIONS QUE LA SOCIETE MOIROUD ET L'UAP AVAIENT FAIT DELIVRER A LA SOCIETE GUIBON N'AVAIENT PAS INTERROMPU LA PRESCRIPTION DES LORS QUE CES DERNIERES ETAIENT DEPOURVUES DE QUALITE POUR AGIR, LA COUR D'APPEL NE S'EST PAS CONTREDITE ET A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;

ATTENDU, ENFIN, QU'EN RETENANT QUE LE COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT EST GARANT DU TRANSPORTEUR NON SEULEMENT ENVERS L'EXPEDITEUR, MAIS ENCORE ENVERS LE DESTINATAIRE QUI A ADHERE AU CONTRAT DE TRANSPORT, LA COUR D'APPEL, QUI N'A PAS DENATURE LA LETTRE DE LA SOCIETE OUTINORD DU 6 NOVEMBRE 1975 DONT ELLE A SOUVERAINEMENT APPRECIE LA PORTEE, NON PLUS QUE LA LETTRE DE L'UAP DU 15 NOVEMBRE SUIVANT QUI N'EST VISEE NI DANS LES CONCLUSIONS DE LA SOCIETE MOIROUD ET DE CETTE COMPAGNIE D'ASSURANCES, NI DANS L'ARRET, A FAIT UNE EXACTE APPLICATION DE L'ARTICLE 99 DU CODE DU COMMERCE ;

QUE LE MOYEN, IRRECEVABLE POUR SA PARTIE EN SA DEUXIEME BRANCHE ET DEPOURVU DE FONDEMENT POUR LE SURPLUS, NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 9 MAI 1978 PAR LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY.