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Décisions

CA Amiens, 5e ch. prud'homale, 13 septembre 2023, n° 22/04168

AMIENS

Arrêt

Autre

CA Amiens n° 22/04168

13 septembre 2023

ARRET



[U]

C/

S.A.S. BEAUVAISIS DISTRIBUTION

copie exécutoire

le 13/09/2023

à

Me MUHMEL

Me VOIVENEL

LDS/IL/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2023

*************************************************************

N° RG 22/04168 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IRVB

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 19 JUILLET 2022 (référence dossier N° RG F 21/00102)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [Y] [U]

né le 18 Août 1970 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

concluant par Me Francois MUHMEL de la SELARL CABINET MUHMEL, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMEE

S.A.S. BEAUVAISIS DISTRIBUTION, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

concluant par Me Claire VOIVENEL de la SELARL DLV, avocat au barreau de CAEN

DEBATS :

A l'audience publique du 14 juin 2023, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Laurence de SURIREY indique que l'arrêt sera prononcé le 13 septembre 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Laurence de SURIREY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 13 septembre 2023, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

La SAS Beauvaisis distribution (la société ou l'employeur) exploite un hypermarché à [Localité 3] sous l'enseigne Carrefour. Elle relève de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Son effectif est de 155 salariés.

Elle a embauché M.[U] d'abord par contrat de travail à durée déterminée entre le 14 décembre 2017 et le 29 avril 2018 en qualité d'employé commercial puis, aux termes d'un contrat de travail du 30 avril 2018, par contrat à durée indéterminée à temps plein.

Par avenant du 31 mai 2018, à effet du 1er juin 2018, M. [U] a été promu au poste d'adjoint responsable du rayon poissonnerie, statut agent de maîtrise, niveau 5, pour une rémunération de 1 982,68 euros, correspondant à une durée de travail de 169 heures 20 de travail effectif, et un forfait mensuel de 5 % de pauses conventionnelles payées 8h46.

M. [U] a été convoqué par lettre du 17 septembre 2020 à un entretien préalable au licenciement fixé le 24 septembre 2020.

Il a été licencié pour faute grave le 1er octobre 2020 dans les termes suivants :

« Le mercredi 9 septembre 2020, vous avez acheté de la queue de lotte, que vous avez passée en caisse à 12 heures 08 pour un montant de 10.52 euros.

0 Sur ce produit vous vous êtes permis de vous octroyer une remise de 60% au motif que la marchandise arrivait à date de péremption.

0 En consultant l'état « CA solde articles à date courte '' du rayon poissonnerie, M. [Y] [V] et M. [G] [M] se sont aperçus qu'il y avait eu une remise de 60% sur de la queue de lotte le 09/09/2020. Ceux-ci vous ont demandé à 2 reprises à qui bénéficiait cette remise ' Vous avez répondu que vous ne saviez pas et que vous n'étiez pas au courant, que c'était certainement votre collègue M. [P] [O] qui avait effectué cette remise pour un client.

0 Messieurs [Y] [V] ET [G] [M] ont alors interrogé M. [P] [O], qui a alors affirmé ne rien savoir.

Lors de l'entretien du 24 septembre, vous persistez dans vos mensonges en niant les-faits pour ensuite reconnaître non seulement avoir effectué cette remise de 60% à votre profit, mais de plus, avoir demandé à M. [P] [O] (votre collaborateur) de ne jamais divulguer que cette marchandise était remisée pour votre compte.

Non seulement, vous nous avez menti à plusieurs reprises à votre hiérarchie en dévoyant les faits mais de plus vous avez monté un stratagème en obligeant votre collaborateur à mentir, ce qui est incompréhensible et inexcusable.

Par ailleurs, vous auriez dû privilégier le client en transformant la queue de lotte en filet avant la date de péremption via le procédé Retalix.

Vous occupez les fonctions d'Adjoint Manager du rayon poissonnerie ; catégorie Agent de Maîtrise depuis le 1er juin 2018. Vous êtes parfaitement informé qu'il est strictement interdit d'effectuer des remises sur les rayons traditionnels, sauf cas exceptionnels et avec accord de la direction. Vous ne respectez pas les consignes et vous allez jusqu'à appliquer une remise à votre profit. Votre comportement est inadmissible et dénote un manque manifeste d'honnêteté.

Ce comportement intervient en violation du règlement intérieur et impliquer un collaborateur dans

de tels agissements est inqualifiable. votre attitude est particulièrement déloyale est totalement inacceptable.

L'ensemble de ces faits, qui caractérisent un manquement très sérieux à vos obligations contractuelles et à votre obligation de loyauté et de probité, est constitutif d'une faute de nature à nuire au bon fonctionnement de notre société.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis».

Ne s'estimant pas rempli de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail et contestant la légitimité de son licenciement, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 3] qui, par jugement du 19 juillet 2022, a :

' Fixé la moyenne des rémunérations à 2 263,98 euros ;

' Débouté M. [U] de sa demande de requalification de son poste de travail en échelon niveau 7 de la convention collective applicable ;

' Dit et jugé le licenciement pour faute grave fondé ;

' Dit et jugé que l'avertissement du 25 février 2020 était nul ;

En conséquence,

' Condamné la société à payer à M. [U] les sommes suivantes :

o 4 535,79 euros brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires de 2018 à 2020 ;

o 453,57 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

o 184,45 euros brut à titre de rappel de salaire sur les pauses non-rémunérées ;

o 18,14 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

o 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour non-respect des amplitudes de travail ;

o 3 449,39 euros net à titre de dommages et intérêts pour absence de contrepartie obligatoire en repos ;

o 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour annulation de l'avertissement.

' Dit et jugé que les condamnations pécuniaires porteraient intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement à intervenir ;

' Condamné la société à remettre à M. [Y] [U] les documents sociaux de fin de contrat rectifiés conformément à la décision à intervenir, à savoir :

o Un bulletin de paie mentionnant l'intégralité des sommes allouées ;

o Un reçu pour solde de tout compte mentionnant l'intégralité des sommes versées en exécution du jugement à intervenir ;

' Ordonné l'exécution provisoire de droit du jugement à intervenir ;

' Condamné la société à payer à M. [Y] [U] la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Débouté les parties de leurs plus amples demandes ;

' Condamné la société aux entiers dépens.

M. [U], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par conclusions notifiées le 12 avril 2023, demande à la cour de dire et juger qu'il est recevable et bien fondé en ses demandes et en conséquence,

- Infirmer le jugement en ce qu'il :

' a fixé la moyenne des rémunérations à 2 263,98 euros ;

' l'a débouté de sa demande de requalification de son poste de travail en échelon niveau 7 de la convention collective applicable ;

' Dit et jugé le licenciement pour faute grave fondé ;

' Condamné la société à lui payer les sommes suivantes :

- 4 535,79 euros brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires de 2018 à 2020

- 453,57 euros brut au titre des congés payés y afférents

- 181,45 euros brut à titre de rappel de salaire sur les pauses non-rémunérées

- 18,14 euros brut au titre des congés payés y afférents

- 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour non-respect des amplitudes de travail

- 3 449,39 euros net à titre de dommages et intérêts pour absence de contrepartie obligatoire en repos

- 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour annulation de l'avertissement

' Dit et jugé que les condamnations pécuniaires porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement à intervenir ;

' Condamné la société à lui payer la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Débouté les parties de leurs plus amples demandes ;

Et statuant à nouveau,

-Fixer la moyenne des 12 derniers mois de salaire à la somme mensuelle de 3 269,97 euros,

-Dire et juger le licenciement pour faute grave en date du 01 octobre 2020 sans cause réelle et sérieuse,

-Requalifier son poste de travail au sein de la société en échelon « niveau 7 » de la convention

collective applicable à compter du 1er juin 2018,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a annulé l'avertissement en date du 25 février 2020,

En conséquence,

- Condamner la société à lui verser les sommes suivantes :

- Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 13 079,88 euros

- Indemnité légale de licenciement : 2 492,80 euros

- Indemnité compensatrice de préavis : 9 809,91 euros

- Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 980,99 euros

- Rappel de salaire pour la requalification du poste de travail : 24 185,45 euros

- Rappel de salaire pour la prime annuelle : 3 881,78 euros

- Rappel de salaire pour les heures supplémentaires et le temps de pause rémunéré : 7 224,89 euros

- Indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour les heures supplémentaires et le temps de pause non rémunéré : 722,48 euros

- Indemnité forfaitaire pour le travail dissimulé :19 619,82 euros

- Dommages et intérêts pour non-respect des amplitudes de travail : 2 000,00 euros

- Dommages et intérêts pour l'absence de contrepartie obligatoire en repos : 6 540,87 euros

- Dommages et intérêts pour annulation de l'avertissement du 25 février 2020 : 2 000,00 euros

- Dire que l'intégralité des sommes allouées sera majorée du taux d'intérêt légal à compter de la date de saisine du conseil des prud'hommes, soit à compter du 17 mai 2021,

- Condamner, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir, la société à lui remettre les documents suivants :

- un bulletin de salaire mentionnant l'intégralité des condamnations,

- un reçu pour solde de tout compte mentionnant les sommes versées,

- Débouter la société de l'intégralité de ses demandes,

- Condamner la société à lui verser la somme de 4 000 euros en première instance et en appel, soit 8 000 euros au total, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées le 16 février 2023, la société Beauvaisis distribution demande à la cour de :

A titre principal,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

' Débouté M. [U] de sa demande de requalification de son poste de travail en échelon niveau 7 de la convention collective applicable ;

' Dit et jugé le licenciement pour faute grave fondé ;

' Débouté M. [U] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, de rappel de salaire pour la requalification du poste de travail, de rappel de salaire pour la prime annuelle, d'indemnité forfaitaire pour le travail dissimulé, et du surplus de ses demandes.

L'infirmer en ce qu'il :

' a dit et jugé que l'avertissement du 25 février 2020 était nul ;

' l'a condamnée à payer à M. [Y] [U] les sommes suivantes :

- 4 535,79 euros brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires de 2018 à

2020 ;

- 453,57 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

- 184,45 euros brut à titre de rappel de salaire sur les pauses non-rémunérées ;

- 18,14 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

- 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour non-respect des amplitudes de travail;

- 3 449,39 euros net à titre de dommages et intérêts pour absence de contrepartie obligatoire en repos ;

- 200,00 euros net à titre de dommages et intérêts pour annulation de l'avertissement,

- 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Statuant à nouveau :

- Limiter le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires à la somme de 2 764,25 euros brut outre 276, 42 euros brut au titre des congés payés, et le rappel sur le temps de pause rémunéré à 138,21 euros brut, outre 13,82 euros, et débouter M. [U] du surplus de ses demandes,

- Limiter l'indemnité au titre des contreparties en repos non prises à la somme de 3 000 euros,

- Débouter M. [U] de ses autres demandes.

A titre subsidiaire,

- Réduire les condamnations dans leur quantum.

En tout état de cause,

- Condamner M. [U] à lui verser une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

EXPOSE DES MOTIFS :

1/ Sur l'exécution du contrat de travail :

1-1/ Sur la classification du salarié :

M. [U] soutient que bien que selon son contrat de travail il soit classé au niveau 5 de la convention collective correspondant à un poste d'agent de maîtrise en qualité d'adjoint manager rayon poissonnerie, il exerçait en réalité des missions de niveau 7 correspondant à un poste de cadre autonome comme responsable du rayon poissonnerie qu'il gérait en totale autonomie, commandant la marchandise, en fixant les prix, organisant le planning des vendeurs du rayon et se voyant fixer l'objectif de dégager une marge de 22 % sur les produits vendus, ce depuis le mois de juin 2018 ; que tous les autres responsables de rayon bénéficiaient du niveau 7 ; qu'il n'avait d'autre supérieur hiérarchique que le directeur du magasin ; que l'employeur n'a pas répondu à sa sommation de communiquer le contrat de travail et des bulletins de paie du salarié embauché pour le remplacer ce qui confirme que celui-ci a bien le statut de cadre comme chef de rayon avec le salaire y afférent ; qu'il justifie d'une grande expérience d'encadrement et des compétences requises pour exercer en tant que cadre et que son expérience dans l'entreprise est sans incidence sur la reconnaissance d'une telle qualité.

La société répond que M. [U] exerçait effectivement l'emploi de manager de rayon 1 de la convention collective correspondant à la fiche de fonction « manager rayon produits de la mer (1) agent de maîtrise niveau 5, sous la responsabilité de M. [D], remplaçant de M. [E] ; que l'avertissement notifié le 28 février 2020 précisait qu'il était assisté de M. [D], « votre manager de rayon » et rappelait le contenu de ses attributions correspondant au niveau 5 sans que cela ait suscité de contestation de sa part à ce sujet ; que la chaîne hiérarchique n'a pas d'incidence sur la classification ; que le salarié ne rapporte pas la preuve de ce qu'il assumait le niveau de responsabilité et les fonctions du niveau 7 ; que les managers de rayon fruits et légumes et poissonnerie, PGC et produits libre-service et charcuterie fromagerie traditionnelle relevant de la classification cadre niveau 7 avaient une grande ancienneté ce qui n'était pas le cas de M. [U], entré dans l'entreprise comme employé commercial en décembre 2017 puis au rayon poissonnerie, qu'il a découvert, en janvier 2018.

La qualification professionnelle d'un salarié se détermine selon les fonctions réellement et concrètement exercées.

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.

En cas de différend sur la classification professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, il y a lieu de rechercher la nature de l'emploi effectivement occupé par le salarié et la qualification qu'il requiert au regard de la convention collective applicable.

C'est par de justes motifs que la cour adopte, que le conseil de prud'hommes après avoir constaté que le salarié ne rapportait pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il exerçait effectivement des attributions de cadre de niveau 7 et souligné qu'il n'avait d'ailleurs pas contesté la description de son poste et son niveau hiérarchique tel qu'ils étaient rappelés dans l'avertissement qui lui a été infligé le 25 février 2020, a rejeté la demande de requalification du poste de M. [U] et les demandes financières qui en découlent.

1-2/ Sur les demandes au titre du temps de travail :

- au titre des heures supplémentaires :

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

M. [U] affirme qu'il effectuait quasiment tous les mois un nombre d'heures supplémentaires extrêmement important dont toutes ne lui ont pas été payées, soit 329,33 heures, correspondant à la somme de 6 971,75 euros en tenant compte de sa qualification de niveau 7.

Il verse aux débats ses plannings pour la période du 4 juin 2018 au 13 octobre 2019 et du 16 décembre 2019 au 5 janvier 2020 avec les heures de prise de poste et de fin de poste et le total des heures effectuées chaque jour, deux tableaux présentant le calcul des heures supplémentaires semaine par semaine pour les années 2018, 2019 2020, une attestation de la présidente de la société La bonne paye picarde qui certifie avoir effectué, à la demande du salarié, le calcul des heures supplémentaires non payées selon plannings fournis par lui, ses bulletins de paie ainsi qu'une lettre du 28 février 2020 par laquelle il demande à l'employeur de reprendre le décompte des heures effectuées depuis plusieurs mois, des récupérations non prises et de l'amplitude horaire non respectée.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre en apportant les siens.

Ce dernier affirme que ces plannings servent de base au manager pour organiser leur planning et ceux de leurs équipes mais ne correspondent pas aux heures de travail effectif ; que les relevés de badgeage effectuées à compter du 15 juillet 2019 mettent en évidence un nombre d'heures travaillées inférieures à celui mentionné sur les plannings ; que les heures supplémentaires ont été récupérées entre le 14 octobre et le 14 décembre 2019, période pour laquelle le salarié ne produit pas ses plannings, par le biais de RTT ; que le salarié, sur les journées au cours desquelles il assurait une permanence de 17 heures à 21 heures, n'a pas badgé à maintes reprises sa coupure de 14 heures à 17 heures qu'il ne conteste pas avoir prise ; que sur la période du 15 juillet au 31 décembre 2019, la badgeuse a enregistré 46,25 heures travaillées au-delà de 39 heures ; que, sur l'année 2019, il convient de déduire des coupures, des récupérations des jours de RTT et les heures supplémentaires payées en décembre 2019 non décomptés dans le calcul du salarié soit un total de 105,39 heures et que sur l'année 2020 les heures supplémentaires ont été payées sur le solde de tout compte ainsi que les 4,5 jours de RTT représentant 35,10 heures.

L'employeur ne justifie pas des horaires effectivement réalisées par le salarié pour l'année 2018, il s'en remet donc à la décision de la cour mais demande à juste titre que soit déduite des heures supplémentaires travaillées les dimanches en décembre, majorés de 100 % et les heures supplémentaires réglées en juin.

Pour l'année 2019, les relevés de présence, versés aux débats par la société, permettent de constater que les plannings produits par le salarié ne correspondent pas à ses horaires de travail effectif, les variations étant nombreuses dans un sens comme dans l'autre.

L'employeur justifie des heures effectivement accomplies seulement à compter du 15 juillet évaluées à 134,08 heure par le salarié par l'intermédiaire de ses relevés de bageage.

Il résulte par ailleurs de son bulletin de paie d'octobre 2019 que M. [U] a bénéficié de 6 jours de RTT qui doivent être décomptés, de même que 9 heures de coupure non badgées que le salarié ne conteste pas avoir prises. Ce dernier n'a pas décompté non plus 15,24 heures supplémentaires payées en décembre 2019.

Les autres éléments avancés par l'employeur afin de minimiser le nombre d'heures ne résultent pas des pièces produites.

Pour l'année 2020, le salarié a signé un tableau récapitulatif des heures supplémentaires pour un total de 101,75 heures payées sur le solde de tout compte, il compte néanmoins 6,5 heures impayées pour le mois de janvier qui ne ressortent pas des relevés de présence. Aucune somme n'est donc due pour cette année.

Le taux horaire à retenir pour le calcul de la somme due est celui correspondant à la classification au niveau 5 de la convention collective.

Ainsi, au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que M. [U] a bien effectué des heures supplémentaires non rémunérées ouvrant droit à une rémunération totale de 4 535,79 euros, outre 453,57 euros de congés payés afférents pour l'ensemble de la période sollicitée, étant précisé que les éléments produits ne permettent pas de considérer qu'il ait accompli des heures supplémentaires à hauteur des heures et sommes qu'il réclame. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

- Sur la demande au titre de l'absence de contrepartie obligatoire en repos :

Le salarié soutient qu'il a travaillé 382,15 heures au-delà du contingent annuel de 180 heures visé par la convention collective ce qui lui ouvre droit à une indemnité de 6 540,87 euros congés payés compris, calculée sur la base du taux horaire pour un cadre de catégorie 7.

L'employeur soutient que M. [U] a abusivement comptabilisé les 17,55 heures supplémentaires contractuelles qui ne correspondent pas nécessairement à du travail effectif ainsi que les congés payés, des absences rémunérées et des RTT qui ne sont pas non plus des heures de travail effectif comptant pour évaluer un éventuel dépassement du contingent annuel, pour un total de 76 heures au moins. Il estime que la cour devrait limiter l'indemnisation à ce titre à la somme de 3 000 euros.

Aux termes de l'article L.3121-30 du code du travail, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale.

Il s'agit des heures de travail effectif ou assimilées comme telles par la loi au regard de la législation sur les heures supplémentaires.

En application de l'article L. 3121-28, toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel ouvre droit au salarié à une contrepartie obligatoire en repos qui s'ajoute à la rémunération des heures au taux majoré ou au repos compensateur de remplacement.

Aux termes de l'article L. 3121-38, à défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnés à l'article L. 3121- 30 est fixée à 50% pour les entreprises de 20 salariés au plus et à 100% pour les entreprises de plus de 20 salariés.

En application de l'article D. 3121-23 du code du travail, le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis.

Cette indemnisation comporte à la fois le montant de l'indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos et le montant des congés payés afférents.

Le contingent prévu par la convention collective est de 180 heures.

Au vu de ce qui précède, retenant le taux horaire figurant sur les bulletins de paie et excluant les heures ne correspondant pas à du travail effectif, la cour évalue, comme le conseil de prud'hommes, le dépassement du contingent de 252,12 heures pour 2018, 356,68 pour 2019 et 80,35 heures pour 2019.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de la somme de 3449,39 euros de ce chef outre 344,93 euros au titre des congés payés.

- Sur la demande au titre du temps de pause :

Le salarié se dit bien fondé à solliciter la somme de 253,47 euros correspondant à 5% des heures effectuées au titre des heures supplémentaires par application de la convention collective.

L'employeur ne répond pas sur ce point.

Le contrat de travail prévoit le règlement d'un forfait mensuel de 5 % de pause conventionnelle payées.

Au vu du nombre d'heures supplémentaires accomplies, le conseil de prud'hommes a procédé à une exacte évaluation de la rémunération à ce titre.

- Sur la demande au titre du non-respect de l'amplitude de travail :

M. [U] soutient que la société ne respectait pas les amplitudes de travail car, lorsqu'il était cadre de permanence, soit trois jours par mois et un week-end tous les trois mois, il terminait sa journée à 21 heures minimum et reprenait à 5 h. Il sollicite la majoration à 2 000 euros de la somme accordée par le conseil de prud'hommes.

La société fait valoir que si une telle situation est arrivée ponctuellement, moins d'une dizaine de fois sur la totalité exécution du contrat de travail, le salarié ne justifie d'aucun préjudice.

Le fait, non contesté par l'employeur, que M. [U] n'ait pas bénéficié de 11 heures de repos quotidien, même ponctuellement, lui a nécessairement causé préjudice.

La somme de 200 euros allouée par le conseil de prud'hommes indemnise exactement le préjudice subi par le salarié au regard de la courte période considérée.

1-3/ Sur la demande au titre du travail dissimulé :

M. [U] affirme que l'intention de dissimuler le nombre d'heures supplémentaires accomplies se déduit notamment du fait que, pour l'année 2020, l'employeur au moment du licenciement, a explicitement reconnu ne pas avoir payé toutes les heures supplémentaires en effectuant un rappel pour un total de 101,75 heures.

L'employeur conteste toute intention de dissimulation, invoquant notamment la possibilité, aux termes de la convention collective, de lisser la rémunération sur l'année dans les mêmes conditions qu'en cas de modulation des horaires de travail.

L'article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L. 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

Aux termes de l'article L .8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule absence de mention d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

En l'espèce, le fait de solder en une fois, au moment de la rupture du contrat de travail, les heures supplémentaires de l'année écoulée ne suffit pas à caractériser une volonté de dissimulation étant observé que le nombre d'heures impayées au cours de la relation contractuelle n'est pas significatif.

La demande de ce chef sera rejetée par confirmation du jugement.

2/ Sur la demande d'annulation de l'avertissement du 25 février 2020 :

M. [U] fait sienne l'argumentation du conseil de prud'hommes qui a annulé l'avertissement du 25 février 2020 au motif qu'il existe des doutes quant à la matérialité des faits reprochés mais estime que l'indemnité qui lui a été accordée est insuffisante au regard du préjudice moral incontestable qu'il a subi.

La société fait valoir que le salarié, dans la lettre qu'il lui a adressée le 28 février 2020 en réponse à l'avertissement reçu, n'a pas contesté le refus de suivre les instructions de sa direction concernant l'étiquetage du saumon Atlantique, ni le fait d'avoir présenté des plateaux de fruits de mer sans langoustine ce qui justifiait un avertissement. Subsidiairement, elle affirme que la demande indemnitaire est exagérée, faute de préjudice avéré et prouvé.

Le 25 février 2020, l'employeur a adressé au salarié un avertissement pour :

- ne pas avoir rectifié les étiquettes de la balance concernant le filet de saumon alors que consigne lui avait été donnée en ce sens le 14 février 2020 à 9h30,

- le même jour, avoir préparé des plateaux de fruits de mer dépourvus de langoustine car il avait oublié d'en commander et avoir trouvé normal de partir déjeuner à midi alors que deux de ses collègues s'affairaient à installer les plateaux dans les bacs réfrigérés à sa place,

- la semaine précédente, avoir pointé ses prospectus alors que les produits n'étaient pas présents dans les rayons.

Par lettre du 28 février, le salarié a contesté cette sanction, s'indignant de ce qu'il ait pu lui être reproché d'être parti à l'heure pour vaquer à ses occupations personnelles alors qu'au cours des mois précédents il n'avait pas bénéficié de récupération et que les amplitudes horaires n'avaient pas été respectées, invoque la fatigue accumulée comme source d'erreur et affirme avoir commandé les langoustines et pointé sur le prospectus des produits qui étaient bien présents dans le rayon.

C'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a relevé que l'employeur n'apportait aucun élément pour justifier de la matérialité des faits reprochés au salarié alors que la charge de la preuve lui incombe, le contenu de la lettre de contestation ne pouvant être interprété comme un aveu.

Il y a lieu également d'approuver les premiers juges en ce qu'ils ont condamné la société au paiement de la somme de 200 euros en réparation du préjudice moral causé par la réception d'une sanction injustifiée.

3/ Sur le licenciement :

M. [U] estime calomnieuses les accusations selon lesquelles il aurait demandé à M. [O] de mentir, conteste fermement les deux attestations produites aux débats par l'employeur, se prévaut d'une attestation de M. [O] lui-même et affirme que la lettre en sens contraire de ce dernier, dont se prévaut la société, a été obtenue sous la pression.

Il ne conteste pas s'être appliqué une remise de 60% sur le prix du poisson à son bénéfice, mais soutient qu'il avait une totale liberté d'action s'agissant des remises commerciales et qu'il décidait en toute autonomie des rabais à réaliser afin de vendre le poisson arrivé à échéance de consommation ; qu'il avait pour seule consigne d'obtenir une marge nette de 22 % à la fin de chaque mois sur l'ensemble des produits vendus ; que la société refuse de communiquer les relevés de vente du rayon poissonnerie de juin 2018 à septembre 2020 qui démontreraient qu'il effectuait d'importantes remises sur les produits arrivés en fin de consommation ; qu'il pouvait librement acheter ce poisson ; que s'il avait voulu dissimuler un achat frauduleux, il n'aurait à l'évidence pas payé en présentant sa carte de fidélité et en demandant un duplicata du ticket de caisse pour obtenir le bon de réduction de fin de mois ; que l'absence de mise à pied conservatoire et le temps écoulé entre la convocation à l'entretien préalable au licenciement rendaient impossible le prononcé d'un licenciement pour faute grave.

Il ajoute qu'il n'a pas violé l'article 28b du règlement intérieur qui interdit d'acheter à prix réduits tout produit impropre à la consommation dont la date limite de vente est dépassée puisque lorsqu'il a acheté le poisson celui-ci n'était pas impropre à la consommation et que s'il l'a jeté le lendemain c'est uniquement par précaution au vu de l'odeur qu'il dégageait.

L'employeur réplique qu'il est de jurisprudence constante que la mise à pied conservatoire n'est pas un préalable nécessaire au licenciement pour faute grave ; qu'il n'est pas seulement reproché au salarié la remise sur la queue de lotte qui a été portée à la connaissance du directeur le 9 septembre mais surtout le fait d'avoir menti lorsqu'il a été interrogé sur cette remise à plusieurs reprises allant jusqu'à mettre en cause les vendeurs de son rayon et d'avoir demandé à son subordonné de mentir sur les conditions de cette remise, fait qui ont été commis le 10 septembre et dans les jours qui ont suivi et que, dans ces conditions, la remise de la convocation à entretien préalable sept jours après la découverte des premiers faits n'est pas tardive.

Il affirme que le salarié n'avait pas autorité pour décider de rabais, encore moins à son profit, ainsi que le stipule le règlement intérieur pour des raisons évidentes et que le fait d'avoir présenté sa carte de fidélité n'est pas une preuve de son absence d'intention frauduleuse dès lors qu'il ne lui est pas reproché d'avoir volé de la marchandise mais d'avoir appliqué une réduction illicite ; que le salarié soutenait dans sa requête devant le conseil de prud'hommes avoir acheté une marchandise arrivée à péremption qu'il a jetée mais que cet argument est inopérant dès lors qu'il était interdit d'acheter à prix réduit un produit impropre à la consommation.

S'agissant du grief tenant au mensonge et à la corruption de son subordonné, l'employeur s'appuie sur les témoignages de M. [M] et Mme [H] qui déclarent l'avoir entendu mentir et reconnaître avoir sollicité M. [O] pour le protéger et sur une lettre de M. [O] le confirmant.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Elle s'apprécie in concreto, en fonction de l'ancienneté du salarié, de la qualité de son travail et de l'attitude qu'il a adoptée pendant toute la durée de la collaboration.

La mise en œuvre de la procédure de licenciement doit donc intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs allégués et dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire. Toutefois, il n'est pas exigé que l'employeur procède à une mise à pied conservatoire.

C'est à l'employeur qui invoque la faute grave et s'est situé sur le terrain disciplinaire de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu'ils rendaient impossibles la poursuite du contrat de travail.

Le doute doit profiter au salarié.

Concernant la valeur probante des témoignages produits par l'employeur, il y a lieu de rappeler qu'en matière prud'homale, la preuve est libre et dès l'instant que la partie à qui sont opposées des attestations a pu en contester la force probante, notamment en faisant valoir que les auteurs des attestations étaient soumis à un lien de subordination avec l'employeur, il appartient au juge saisi de cette contestation d'apprécier souverainement la valeur et la portée des dites attestations.

En l'espèce, l'achat reproché à M. [U] a été fait le vendredi 9 septembre 2020, le salarié a été interrogé le lendemain et a été convoqué à un entretien préalable le 17 septembre suivant. L'employeur a donc engagé la procédure de licenciement dans un délai restreint.

Ces moyens sont mal fondés.

Sur le premier grief, il résulte de l'article 28b du règlement intérieur que seule l'équipe d'encadrement est habilitée à solder des articles et à faire appliquer des tarifs particuliers et qu'il est interdit de fixer soi-même le prix d'une marchandise quand on en envisage l'achat. Or, le salarié reconnaît qu'il s'est lui-même appliqué une réduction de 60 % sur la queue de lotte ce qui constitue un premier manquement au règlement intérieur et, n'ayant pas la qualité de cadre ainsi qu'il a été précédemment jugé, il n'était pas habilité à solder le produit ce qui constitue un second manquement au règlement intérieur.

Cette faute est donc caractérisée.

S'agissant de l'incitation de M. [O] à mentir pour le protéger, la cour constate que celui-ci a, le 24 septembre 2020, écrit une lettre dans laquelle il confirme les faits en concluant qu'il certifie sur l'honneur l'exactitude de ses propos et est informé que son « attestation » est susceptible d'être « remise en justice », puis, dans un second temps, le 9 octobre 2020, a attesté en sens inverse à la demande du salarié, de sorte que son témoignage est dépourvu de toute valeur probante au profit de l'une et l'autre partie.

En revanche, les attestations circonstanciées et concordantes de M. [M] et Mme [H], étant observé que cette dernière est élu du comité économique et social et assistait M. [O] lors de l'entretien avec le directeur du 24 septembre 2020 ce qui renforce son témoignage, établissent que M. [U] a menti au directeur du magasin et a incité son collaborateur à faire de même pour le couvrir.

Ce grief, qui manifeste un manquement à l'obligation de loyauté et d'exemplarité attendue d'un manager et au règlement intérieur, est donc également avéré.

Ces fautes empêchaient le maintien du salarié dans l'entreprise.

Ainsi, au vu des éléments versés aux débats en cause d'appel, il apparaît que les premiers juges ont à bon droit retenu dans les circonstances particulières de l'espèce, l'existence d'une faute grave et rejeté les demandes de M. [U] du chef du licenciement notamment celle qui concerne la prime annuelle que le salarié lie à la reconnaissance de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

4/ Sur les autres demandes:

Le jugement sera confirmé quant aux dépens et frais de procédure.

M. [U], qui perd le procès en appel, doit en supporter les dépens et sera débouté de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera condamné à payer à l'employeur la somme indiquée au dispositif sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

confirme le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

condamne M. [U] à payer à la société Beauvaisis distribution la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

rejette toute autre demande,

condamne M. [U] aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.