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Décisions

CA Limoges, ch. soc., 19 octobre 2023, n° 23/00230

LIMOGES

Arrêt

Autre

CA Limoges n° 23/00230

19 octobre 2023

ARRET N° .

RG N° : N° RG 23/00230 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BINWU

AFFAIRE :

M. [S] [D] [I] MBDT Associés, Avocat plaidant

C/

S.A.S. CLARME (INTERMARCHE)

GV/MS

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Grosse délivrée à Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, Me Sandrine PAGNOU, le 19-10-23.

COUR D'APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

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ARRET DU 19 OCTOBRE 2023

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Le DIX NEUF OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS la CHAMBRE économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur [S] [D] [I] né le 02 Avril 1968 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sandrine PAGNOU, avocat au barreau de LIMOGES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/000091 du 18/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)

APPELANT d'une décision rendue le 20 JUIN 2017 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE POITIERS

ET :

S.A.S. CLARME (INTERMARCHE), demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMEE

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Sur renvoi de cassation : jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE POITIERS en date du 20 JUIN 2017 - arrêt de la cour d'appel de POITIERS en date du 30 janvier 2019 - arrêt de la cour de Cassation en date du 16 novembre 2022.

Suivant avis de fixation du Président de chambre, l'affaire a été fixée à l'audience du 18 Septembre 2023.

La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN et de Madame Valérie CHAUMOND, Conseillers, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier.

A cette audience, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller a été entendu en son rapport oral, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 19 Octobre 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR

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EXPOSE DU LITIGE

La société CLARME exerce une activité de commerce de détail de produits alimentaires à [Localité 6] (86) sous l'enseigne Intermarché.

Elle a engagé M. [S] [D], en qualité d'employé commercial niveau I à temps partiel suivant contrat à durée déterminée du 5 mars 2012 au 31 mars 2012, puis sous contrat aidé du 2 avril 2012 au 2 octobre 2012 et de nouveau en contrat de travail à durée déterminée du 2 octobre 2012 au 5 janvier 2013, renouvelé jusqu'au 1er avril 2013.

Puis, sous la même qualification, elle l'a embauché en contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er avril 2013 à temps partiel de 30 heures par semaine, étant précisé qu'il bénéficierait d'un tuteur.

Par décision du 21 février 2013 à effet rétroactif au 1er décembre 2012, la MDPH de la Vienne a reconnu à M. [D] le statut de travailleur handicapé avec un taux d'incapacité de 50 %.

Il a fait l'objet d'une visite médicale auprès du médecin du travail le 15 mai 2013 qui a conclu en ces termes : « Apte avec aménagement suivant : besoin d'un tuteur. Etude de poste à prévoir pour reconnaissance lourdeur du handicap. Pas de contre-indication à la conduite du chariot automoteur ».

Il a été déclaré apte à son poste suivant visite auprès du médecin du travail le 18 juin 2015.

Il a été arrêté pour maladie :

- du 10 septembre 2015 au 29 septembre 2015

- du 5 octobre 2015 au 10 octobre 2015

- puis à compter du 28 avril 2016.

M. [D] a déposé plainte le 26 octobre 2016 contre son employeur pour harcèlement moral et discrimination, se disant victime d'immixtion dans sa vie privée, de saisies injustifiées sur son salaire, de moqueries et persécution de ses collègues ainsi que de reproches incessants.

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Estimant que la dégradation de son état de santé, son syndrome dépressif, étaient la conséquence directe de faits de harcèlement moral, l'employeur ayant manqué à son obligation de sécurité, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Poitiers le 2 juin 2016 pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société CLARME.

Par jugement du 20 juin 2017, le conseil de prud'hommes de Poitiers a :

- débouté M. [D] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail;

- condamné la société CLARME à payer à M. [D] la somme de 1 238,14 € au titre de la prime de fin d'année pour l'année 2013 ;

- débouté M. [D] de ses autres demandes ;

- condamné M. [D] à payer à la société CLARME les sommes de :

- 486,56 € indûment perçus

- 5 276,07 € nets au titre de son compte débiteur 'avances et acomptes' ;

- ordonné la compensation judiciaire des créances dues par M. [D] à la société CLARME avec la somme de 1 238,14 € brut de prime de fin d'année due à M. [D] par la société CLARME ;

- déclaré le conseil de prud'hommes incompétent pour statuer sur les sommes dues au titre du solde débiteur du compte 'achats magasin' ;

- débouté la société CLARME de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [D] aux dépens.

Le 28 août 2017, le médecin du travail a constaté l'inaptitude de M. [D] à son poste et à tout poste dans l'entreprise pour raison de santé.

Le 16 octobre 2017, la société CLARME a recueilli l'avis des délégués du personnel sur le reclassement de M. [D]. Ils ont émis l'avis qu'il n'existait pas de solution de reclassement pour ce dernier.

Par courrier du 19 octobre 2017, la société CLARME a informé M. [D] de l'impossibilité de son reclassement sur un poste existant disponible et conforme à ses aptitudes physiques et professionnelles.

Puis, elle l'a convoqué à un entretien préalable pour le 31 octobre 2017 en vue de son licenciement pour inaptitude à son poste de travail avec impossibilité de reclassement

Elle l'a licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 6 novembre 2017.

M. [D] a interjeté appel du jugement du 20 juin 2017 du conseil de prud'hommes de Poitiers.

Par arrêt du 30 janvier 2019, la cour d'appel de Poitiers a :

- déclaré irrecevables comme nouvelles les demandes de M. [D] tendant :

' au prononcé de la nullité de son licenciement,

' à voir dire et juger non remplie l'obligation de reclassement à son égard,

' à faire juger que son licenciement n'est pas intervenu dans le délai de l'article L 1226'11 du code du travail,

' au paiement d'une indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle ;

- déclaré recevable la demande de M. [D] en paiement d'une somme au titre de la prime annuelle 2016, mais l'a dit mal fondée ;

- confirmé le jugement, sauf en sa disposition par laquelle le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent pour statuer sur les sommes dues par M. [D] au titre du solde débiteur du compte 'achats magasin' et statuant à nouveau de ce chef ;

- déclaré la juridiction prud'homale compétente pour connaître de la demande de remboursement des avances faites par la société CLARME au moyen de retenues opérées sur les salaires de M. [D] via la mise en oeuvre du compte 'achats magasin' et ordonner éventuelle compensation entre les créances réciproques des parties nées à l'occasion de l'exécution du contrat de travail et de sa rupture ;

- condamné en conséquence M. [D] à payer à la société CLARME la somme de 394,16 € au titre de ce solde du compte 'achats magasin' ;

- ordonné compensation judiciaire des sommes dues par M. [D] à la société CLARME avec celle de 1 238,14 € bruts qui lui était due au titre de la prime de fin d'année 2013 ;

- rejeté la demande de la société CLARME en paiement de somme à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32'1 du code de procédure civile ;

- rejeté toutes autres demandes ;

- condamné M. [D] aux dépens et dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [D] a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt du 16 novembre 2022, la Cour de cassation a, au visa de l'article R. 1452-7 du code du travail applicable et des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 30 janvier 2019,

mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevables comme nouvelles les demandes de M. [D] tendant au prononcé de la nullité de son licenciement, à voir juger non remplie l'obligation de reclassement à son égard, à faire juger que son licenciement n'est pas intervenu dans le délai de l'article L. 1226-11 du code du travail, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle,

en ce qu'il a débouté M. [D] de ses demandes à titre d'indemnité pour défaut de reclassement, de rappel de salaire, d'indemnité pour inaptitude professionnelle, d'indemnité compensatrice de préavis, de régularisation des bulletins de paie, ainsi que de délivrance de documents de rupture conformes,

et en ce qu'il condamne M. [D] aux dépens et dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Cour de cassation a renvoyé les parties sur ces points dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt devant la cour d'appel de Limoges.

M. [D] a saisi la cour d'appel de Limoges le 14 mars 2023.

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Aux termes de ses dernières écritures notifiés par voie électronique le 5 juin 2023, M. [S] [D] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables comme nouvelles ses demandes tendant :

' au prononcé de la nullité de son licenciement,

' à voir juger non remplie l'obligation de reclassement à son égard,

' à faire juger que son licenciement n'est pas intervenu dans le délai de l'article L 1226'11 du code du travail,

' au paiement d'une indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle ;

et par conséquent en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre :

' de l'indemnité pour défaut de reclassement,

' de rappel de salaire,

' d'indemnité pour inaptitude professionnelle,

' d'indemnité compensatrice de préavis,

' de régularisation des bulletins de paie,

' de la délivrance de documents de rupture conformes,

' et en ce qu'il a condamné la société CLARME aux dépens et a dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- déclarer la nullité de son licenciement pour inaptitude ;

- déclarer que l'obligation de reclassement n'a pas été remplie par l'employeur ;

- déclarer que la société CLARME ne l'a pas licencié dans le délai imparti par l'article L. 1226'11 du code du travail ;

Par conséquent,

- condamner la société CLARME au paiement des sommes suivantes :

* 16 241,04 € (12 mois de salaire) à titre d'indemnité pour défaut de reclassement,

* 1 552,80 € de rappel de salaire pour non-respect du délai de licenciement,

* 3 891,08 € d'indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle,

* 2 706,84 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 5 465,17 € de rappel de salaire pour les sommes illégalement retenues ;

En toutes hypothèses et vu le lien d'indivisibilité,

- condamner la société CLARME au paiement des sommes suivantes :

* 1 883€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 1 257,10 € au titre de la prime annuelle 2016 ;

- ordonner à la société CLARME la régularisation de ses bulletins de salaire et la délivrance des documents liés à la rupture du contrat sous astreinte de 60 € par jour de retard et par document, à compter de la notification du jugement à venir ;

- condamner, encore, la société CLARME aux entiers dépens et au paiement de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile faisant application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle.

Aux termes de ses dernières écritures notifiés par voie électronique le 20 juillet 2023, la société CLARME demande à la cour, statuant dans les limites de la cassation partielle de l'arrêt de la Cour de cassation,

à titre principal de :

- déclarer irrecevable la demande de M. [D] de voir prononcer la nullité de son licenciement ;

- déclarer irrecevable la demande de M. [D] de la voir condamner à lui verser 5 665, 17 € à titre de rappel de salaire pour les sommes illégalement retenues ;

- déclarer irrecevable la demande de M. [D] de la voir condamner à lui verser la somme de 1 883 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- déclarer irrecevable la demande de M. [D] de la voir condamner à lui verser la somme de 1 257, 10 € au titre de la prime annuelle 2016 ;

- débouter M. [D] de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

- débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

- condamner M. [D] à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel, y compris ceux éventuels d'exécution forcée.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

SUR CE,

À titre liminaire, il convient de noter que la société CLARME ne formule plus de demandes reconventionnelles en paiement, hormis la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a donc plus lieu à statuer de ces chefs.

- Sur la demande de M. [D] tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement

- Sur l'autorité de la chose jugée

L'article 480 du code de procédure civile dispose que 'Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4".

Selon l'article 4 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, ces prétentions étant fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense.

En l'espèce, la cassation par arrêt du 16 novembre 2022 n'ayant été que partielle, l'objet du litige constitué par la demande de résiliation du contrat de travail de M. [D] a été définitivement tranché par l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 30 janvier 2019 qui a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de Poitiers du 29 juin 2017 en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande à ce titre.

En revanche, la demande de M. [D] tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement pour inaptitude suite à la discrimination subie n'a pas été tranchée, puisque la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers en ce que cette dernière avait déclaré irrecevable comme nouvelle cette demande.

L'objet du litige est donc différent.

Par ailleurs, si les moyens invoqués par M. [D] au soutien de sa demande de nullité du licenciement sont les mêmes que ceux invoqués à l'appui de sa demande de résiliation de son contrat de travail devant la cour d'appel de Poitiers, c'est-à-dire manquement de son employeur à son obligation de sécurité en ce qu'il a été victime de harcèlement moral et de discrimination, l'autorité de la chose jugée ne s'impose qu'à l'égard de ce qui a été tranché dans le dispositif de la décision, les motifs, seraient-ils au soutien nécessaire du dispositif, n'ayant pas autorité de la chose jugée.

En conséquence, même si la cour d'appel de Poitiers a écarté dans ses motifs l'existence d'une discrimination, d'un harcèlement moral et d'un manquement de la société CLARME à son obligation de sécurité, ils n'ont pas autorité de la chose jugée.

La demande de M. [D] tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement est donc recevable.

- Sur son bien fondé

M. [D] soutient qu'il a été discriminé en raison de son handicap en ce qu'il a été victime du harcèlement moral commis par son employeur qui a ainsi manqué à son obligation de sécurité à son égard. Ces faits de harcèlement moral ont ainsi entraîné la dégradation de ses conditions de travail et de sa santé, ce qui est à l'origine de son inaptitude.

Le licenciement serait donc nul en application des dispositions de l'article L 1132-1 du code du travail selon lesquelles 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte, au sens, respectivement, du I de l'article 6 et des 1° et 2° de l'article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique'.

L'article L1134-1 du même code : 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

Concernant le harcèlement moral, l'article L1152-1 du code du travail prévoit que 'Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

L'article L1154-1 du même code : 'Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

Il convient donc de vérifier si M. [D] a été victime de harcèlement moral pour dire s'il a fait l'objet d'une discrimination.

- En premier lieu, pour soutenir qu'il a été victime de harcèlement moral, M. [D] invoque des retenues illégales sur son salaire opérées par son employeur, ce qui l'a conduit à une situation financière très difficile.

Il présente à cet égard un tableau émanant de lui-même récapitulant les sommes prélevées par la société CLARME, ses bulletins de salaire, des relevés de ses comptes bancaires du Crédit Agricole de 2014 à 2016, des tickets de caisse, un historique des opérations sur son compte Crédit Agricole du 1er avril 2016 au 30 décembre 2016, ainsi que les mises en demeure des 11 mars 2016 et 3 juin 2016 adressées à la société CLARME.

La société CLARME produit quant à elle :

- différents avis d'opposition à tiers détenteur émanant de la Trésorerie de Lussac les Châteaux et de la société garage Rebeyrat dirigés contre M. [D] ;

- les factures d'achats de M. [D] au sein du magasin Intermarché en cause ;

- le bordereau de confirmation d'un virement de 3 000 € de la société CLARME à un huissier de justice concernant les dettes de M. [D] dans le dossier référencé n° 2012/A455;

- les extraits des comptes n° [XXXXXXXXXX03] et [XXXXXXXXXX02] relatifs aux acomptes et avances sur salaires de M. [D] à hauteur respectivement de - 5 276,07 € et - 394,16 €.

Il ressort de ces éléments que la société CLARME a, comme elle en avait l'obligation, diligenté des saisies sur le salaire de M. [D] en exécution de différents avis d'opposition à tiers détenteurs émanant de la Trésorerie de [Localité 6] et de la société garage Rebeyrat Mickael en vertu de titres exécutoires.

De même, la société CLARME a accordé à M. [D] de nombreuses avances sur salaires et achats à crédit en son sein pour des courses alimentaires ou de l'essence.

Il ressort également de l'attestation de M. [A] [U], comptable de la société CLARME, que M. [D] le sollicitait régulièrement pour effectuer à crédit des courses et des pleins d'essence ainsi que des avances sur son salaire, afin de faire face à son endettement. M. [U] confirme avoir reçu différents avis d'opposition à tiers détenteur et avis d'intervention à tiers saisi à exécuter sur la rémunération de M. [D]. Il indique également que, lors d'un entretien qui s'est déroulé entre lui-même, M. [K] (Directeur de l'Intermarché), M. [D] et un délégué syndical, ces difficultés financières sont apparues au grand jour. M. [K] a alors proposé à M. [D] de prendre rendez-vous avec le Crédit Agricole pour l'aider, ce que M. [D] a accepté.

En conséquence, il ressort de l'ensemble de ces éléments que M. [D] connaissait une situation financière très difficile. Il a d'ailleurs fait l'objet d'un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire suivant décision du tribunal d'instance de Poitiers du 15 décembre 2016. La société CLARME a légitimement opéré sur son salaire des actes réguliers de saisies, ainsi que des remboursements d'avances et achats à crédit dans le magasin.

Il ne s'agit donc aucunement d'actes de harcèlement moral, ce d'autant plus que, comme indiqué ci-dessus, elle a cherché à aider M. [D] face à ses difficultés.

- M. [D] invoque également une immixtion de la société CLARME dans sa vie privée en ce qu'elle aurait fait pression sur lui pour inscrire son fils dans une école privée. Or, il ne produit aucune pièce à ce sujet alors que la société CLARME produit une attestation du directeur de l'école en cause indiquant que toutes les inscriptions auxquelles il a procédé ont été librement consenties par les familles. Ce grief n'est donc pas établi.

- M. [D] se plaint également d'une tutelle humiliante de son employeur à son égard.

Pour autant, l'avis du médecin du travail du 15 mai 2013 précise que M. [D] devait bénéficier d'un tuteur.

Mme [Y] [P], désignée comme tutrice depuis le 1er avril 2013, atteste que:

'Mr [K] a toujours été plutôt clément et calme envers Mr [D], même lorsque ce dernier devenait coléreux au point de donner des coups de poings sur les meubles.

Il a toujours fait en sorte de l'aider dans le cadre du travail et même privé.

Pour ma part, ses réactions m'ont parfois fait penser qu'il était à deux doigts de devenir violent envers moi-même.

Il avait du mal à accepter qu'on lui dise comment faire son travail et que cela vienne d'une femme était à mon avis encore plus dur.

On lui expliquait comment faire pour gagner du temps et s'économiser et il continuait à faire comme il l'entendait.

Plusieurs fois, j'ai pris le temps de discuter avec lui pour essayer que les choses s'arrangent et qu'il se sente bien et finalement dès le lendemain il recommençait.

Le respect des consignes de sécurité notamment avec l'élévateur était difficile'.

Sur ce dernier point, même si le médecin du travail a pu indiquer le 15 mai 2013 l'absence de contre-indication de M. [D] à la conduite de chariots automoteurs et même s'il a obtenu une attestation de formation à la conduite de ce type de véhicule le 29 juin 2015, M. [N] [Z], manager alimentaire, confirmant les dires de Mme [P] insiste sur le fait que M. [D] avait des difficultés à respecter les consignes de sécurité, notamment au niveau des palettes et de la presse à carton et à plastique.

D'autres salariés ont attesté de l'absence de harcèlement moral à l'égard de M. [D] dont le comportement était difficile.

Par suite, il ressort de l'ensemble ces éléments que ce que M. [D] a pu ressentir comme un harcèlement moral et des humiliations manifestait en réalité une volonté de la société CLARME de gérer au mieux son travail et de l'aider face à ses difficultés.

- En ce qui concerne la vitrine cassée par M. [D], ce n'est pas la société CLARME qui lui a réclamé paiement de la facture de réparation, mais la société CMDM (mises en demeure des 11 mars 2015 et 25 juin 2016).

Ce grief isolé doit donc également être écarté.

- Enfin, les éléments médicaux que produit M. [D] (arrêts de travail pour dépression, certificat de Mme [O] infirmière psychiatrique, certificat du Docteur [W] [E] du 28 mai 2016, certificat de passage au CHU de [Localité 7] du 7 juin 2016) ainsi que les avis du médecin du travail ne permettent pas de les relier à une dégradation de ses conditions de travail imputable à l'employeur.

Au total, M. [D] ne présente aucun élément laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral et, par suite, aucun élément laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte commise par la société CLARME à son égard en raison de son handicap ayant conduit à son inaptitude.

Il doit donc être débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement en date du 6 novembre 2017.

- Sur l'obligation de reclassement de M. [D] par la société CLARME

Alors qu'aucun harcèlement moral, discrimination ou manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ne sont établis, aucune des pièces du dossier (arrêts de travail, certificats médicaux, avis du médecin du travail...) permet de considérer que l'inaptitude de M. [D] ait une origine professionnelle. En conséquence, seules les dispositions de l'article L. 1226'2 du code du travail sur le reclassement sont applicables.

Sur le point de savoir si l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 est applicable ratione temporis, selon un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 11 mai 2022 n° 20-20.717, l'obligation qui pèse sur l'employeur de rechercher un reclassement au salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment naît à la date de la déclaration d'inaptitude par le médecin du travail.

Si la société CLARME soutient que cette obligation n'a pas pu naître avant sa connaissance de l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 28 août 2017 soit le 26 septembre 2017, il convient de noter que M. [D] a rempli le questionnaire destiné à faciliter les recherches de reclassement dès le 11 septembre 2017. Il s'en déduit que la société CLARME avait connaissance de l'avis d'inaptitude du 28 août 2017 dès le 11 septembre 2017, donc antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

Dès lors, les dispositions de l'article L. 1226'2 du code du travail alors applicables du 1er janvier 2017 au 24 septembre 2017 étaient les suivantes : 'Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail'.

L'employeur doit proposer au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagements du temps de travail.

Le périmètre de l'obligation de reclassement est :

' l'entreprise où travaillait le salarié en cause ;

' les entreprises du groupe à laquelle cette entreprise appartient, dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permet à l'employeur d'effectuer une permutation de tout ou partie du personnel.

C'est à l'employeur d'apporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié.

Le questionnaire renseigné par M. [D] le 11 septembre 2017 indique que ce dernier n'acceptait pas une modification de la durée de son travail, ni d'être employé sous contrat à durée déterminée, ni de voir diminuer son salaire. Mais, il acceptait un changement de métier ou d'emploi. Or, selon son curriculum vitae, il disposait d'une expérience relativement large ayant exercé différents métiers (ouvrier, agent d'entretien, chauffeur livreur, préparateur de commande, agent espace vert, maçon, agent de maintenance...).

La société CLARME a recueilli l'avis des délégués du personnel le 16 octobre 2017 selon lequel il n'existait pas de solution de reclassement au profit de M. [D], la société CLARME ayant préalablement exposé avoir recherché des postes disponibles au sein des sociétés du groupe, les sociétés MAGE et BOPI, cette dernière étant la société holding comprenant deux postes de cadres non compatibles avec le profil de M. [D]. Néanmoins, si la société CLARME soutient avoir procédé à des recherches au sein de ces sociétés, elle n'en rapporte pas la preuve.

Dans son avis d'inaptitude du 28 août 2017, le médecin du travail a indiqué que M. [D] était inapte à tout poste dans l'entreprise, ce qui interdisait tout reclassement au sein même de la société CLARME.

Néanmoins, elle était membre du groupement Intermarché dont les sociétés sont unies par des liens étroits, des intérêts communs, des politiques communes d'approvisionnement et de prix ainsi qu'une communauté d'organisation qui permetait une permutation de personnel. Or, la société CLARME n'a effectué aucune recherche de reclassement au sein de ce groupement, ce dont il doit être tiré comme conséquence l'absence de recherche loyale à ce titre.

Le licenciement de M. [D] du 6 novembre 2017 est donc sans cause réelle et sérieuse.

Il a donc droit à l'indemnité, prévue par l'article L 1235'3 du code du travail, due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ayant une ancienneté de 4 années et 1 mois au sein de la société CLARME, déduction faite de la durée des arrêts de travail, il a droit à une indemnité comprise entre 3 et 5 mois de salaire brut. Ses derniers bulletins de salaire des mois d'octobre et novembre 2017 font état d'un salaire mensuel brut de base de 1 268,37 €. M. [D] ne faisant pas état et ne démontrant pas un préjudice particulier, il convient de fixer l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme médiane de 5'000 € et de condamner la société CLARME à lui payer le montant de cette somme.

- Sur la demande de M. [D] en paiement de dommages et intérêts fondée sur le non-respect du délai pour le licencier

M. [D] fonde cette demande sur les dispositions de l'article L 1226'11 du code du travail. Or, cet article figure à la section 3 intitulée « Accident du travail ou maladie professionnelle » du chapitre 6 du titre 2 du livre deuxième du code du travail. En conséquence, l'inaptitude de M. [D] n'étant pas causée par un accident du travail ou une maladie professionnelle, cette disposition ne lui est pas applicable.

Il doit donc être débouté de sa demande en paiement de la somme de 1 552,80 € brut.

- Sur la demande en paiement de l'indemnité légale de licenciement pour inaptitude professionnelle

Comme indiqué ci-dessus, l'inaptitude de M. [D] n'ayant aucune origine professionnelle, il doit être débouté de sa demande en paiement de la somme de 3 891,08 € correspondant au doublement de l'indemnité de licenciement prévu par l'article L 1226'14 du code du travail.

- Sur la demande de M. [D] en paiement au titre de l'indemnité de préavis

Le licenciement de M. [D] étant sans cause réelle et sérieuse, il a droit à une indemnité de préavis équivalent à deux mois de salaire brut, soit la somme de 2'536,74€ brut, son dernier salaire brut de base s'élevant à 1 268,37 € (cf bulletins de paie d'octobre et novembre 2017).

Il convient en conséquence de condamner la société CLARME à lui payer le montant de cette somme.

- Sur la demande en paiement de M. [D] au titre de sommes prétendues illégalement retenues

La cour d'appel de Poitiers dans son arrêt du 30 janvier 2019 a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de Poitiers du 20 juin 2017 qui a énoncé que les retenues sur salaire opérées par la société CLARME à l'encontre de M. [D] étaient 'parfaitement justifiées' et qui a donc débouté M. [D] de sa demande en paiement pour saisies illégales. Dans son arrêt 16 novembre 2022, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers sur la question des demandes nouvelles présentées en appel. Or, la demande de M. [D] au titre des retenues invoquées comme illégales avait déjà été présentée par ce dernier en première instance à hauteur de 5 302,62 €. Il ne s'agissait donc pas d'une demande nouvelle.

En conséquence, en ayant confirmé le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il déboutait M. [D] de sa demande au titre des saisies prétendues illégales, l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers est devenu définitif sur ce point.

Se heurtant à l'autorité de la chose jugée, la demande en paiement de M. [D] à ce titre est donc irrecevable.

- Sur la demande de M. [D] en paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés

Comme énoncé ci-dessus, dans son arrêt 16 novembre 2022, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers sur la question des demandes nouvelles présentées par M. [D] en appel. Or, la demande au titre des congés payés avait déjà été présentée par M. [D] en première instance à hauteur de 209,51 €. Il ne s'agissait donc pas d'une demande déclarée irrecevable en appel comme nouvelle et ayant donné lieu à cassation.

Cette demande est donc recevable.

Contrairement à ce que prétend la société CLARME, la cour d'appel de Poitiers n'a pas débouté M. [D] de sa demande en paiement au titre des congés payés. En effet, le conseil de prud'hommes a reconnu le droit de M. [D] à ce titre, mais n'en a pas ordonné paiement car le contrat de travail de M. [D] était toujours en cours à la date du jugement. La cour d'appel de Poitiers, confirmant ce raisonnement, a fixé à la somme de '1 516,46 € bruts le montant de l'indemnité de congés payés qui lui était due' (page 16 de l'arrêt)représentant 33 jours de congés impayés, en application des stipulations de la convention collective en son article 7-1. Mais, il convient de constater que la société CLARME a payé à M. [D] le montant de cette somme sur la base de 33 jours, ainsi que cela ressort de son bulletin de paie de novembre 2017 et du courrier de la société CLARME du 6 novembre 2017.

M. [D] doit être débouté de sa demande en paiement présentée à ce titre.

- Sur la demande de M. [D] en paiement de la prime annuelle 2016 à hauteur de 1 257,10 €

La cour d'appel de Poitiers a considéré en page 15 de son arrêt que la demande de M. [D] tendant au paiement de la somme de 1 257,10 €

au titre du reliquat de la prime annuelle conventionnelle pour l'année 2016 était recevable en application des articles 565'et 566 du code de procédure civile, pour ne pas être nouvelle.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt seulement sur la question de la recevabilité des demandes considérées comme irrecevables car nouvelles par la cour d'appel de Poitiers, avec les conséquences corrélatives au niveau des déboutés.

En conséquence, en 'déclarant recevable la demande de M. [D] en paiement d'une somme au titre de la prime annuelle 2016, mais en l'a disant mal fondée', l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers a acquis l'autorité de la chose jugée.

La demande de M. [D] à ce titre doit donc être déclarée irrecevable.

- Sur la demande de M. [D] en paiement de l'indemnité légale de licenciement

La demande en paiement de M. [D] à ce titre à hauteur de 1 945,44 € n'est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions. Il n'y a donc pas lieu à statuer de ce chef en application de l'article 954 du code de procédure civile en son alinéa 3.

- Sur la remise des documents de fin de contrat

Au vu de la solution du litige, il convient d'ordonner à la société CLARME la régularisation des bulletins de salaire de M. [D] et la délivrance à ce dernier des documents liés à la rupture du contrat, ce sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. [D] succombant majoritairement à l'instance, il doit être condamné aux dépens, mais il est équitable de ne pas le condamner à payer à la société CLARME une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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PAR CES MOTIFS

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La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Poitiers du 20 juin 2017, sauf en ce qu'il a débouté M. [S] [D] de sa demande en paiement au titre de l'indemnité de préavis ;

Statuant à nouveau de ce chef, CONDAMNE la société CLARME à payer à M. [S] [D] la somme de 2 536,74 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

Y ajoutant :

DECLARE recevable la demande de M. [S] [D] tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement ;

DEBOUTE M. [S] [D] de sa demandes tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement pour inaptitude en date du 6 novembre 2017 ;

DIT ET JUGE que la société CLARME n'a pas respecté son obligation de reclassement à l'égard de M. [S] [D] ;

DIT ET JUGE en conséquence que le licenciement de M. [D] le 6 novembre 2017 est sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la société CLARME à payer à M. [S] [D] la somme de 5 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DECLARE irrecevables les demandes de M. [S] [D] tendant à voir condamner la société CLARME à lui payer les sommes de :

* 5 465,17 € de rappel de salaire pour les sommes prétendues illégalement retenues,

* 1 257,10 € au titre de la prime annuelle 2016 ;

DEBOUTE M. [S] [D] de ses demandes tendant à voir condamner la société CLARME à lui payer les sommes de :

* 1 552,80 € de rappel de salaire pour non-respect du délai de licenciement,

* 3 891,08 € d'indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle,

* 1 883€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;

ORDONNE à la société CLARME de procéder à la régularisation des bulletins de salaire de M. [S] [D] et à la délivrance des documents liés à la rupture du contrat ;

DEBOUTE chacune des parties de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [S] [D] aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.