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Décisions

CA Versailles, 14e ch., 14 septembre 2023, n° 22/07807

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 22/07807

14 septembre 2023

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 SEPTEMBRE 2023

N° RG 22/07807 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VTAY

AFFAIRE :

S.A.S. LA PEPITE DE [Localité 4]

C/

S.A. LOGIREP

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Novembre 2022 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 14.09.2023

à :

Me Antoine DE LA FERTE, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Stéphanie TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. LA PEPITE DE [Localité 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Antoine DE LA FERTE de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 283

APPELANTE

****************

S.A. LOGIREP Anciennement dénommée « LOGISTART »

représentée par la Présidente de son Directoire domicilié en cette qualité audit siège ladite société venant, par suite d'une fusion-absorption, aux droits et actions de LA SOCIETE ANONYME D'HABITATIONS A LOYER MODERE LOGEMENT ET GESTION IMMOBILIERE POUR LA REGION PARISIENNE - LOGIREP

N° SIRET : 393 54 2 4 28

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20230009

Ayant pour avocat pladiant Me UZAN-PERRIN, du barreau de Paris

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Juin 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marina IGELMAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Madame Marietta CHAUMET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seing privé en date du 22 juin 2021, la SA d'HLM LogiRep, anciennement dénommée Logistart, a donné à bail commercial à la société La Pépite de [Localité 4], en cours d'immatriculation, des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 4] (Hauts-de-Seine), afin d'y exercer une activité de boulangerie-pâtisserie.

Le bail a été conclu pour une durée de neuf années, à compter du 30 juillet 2021 et moyennant un loyer annuel de 23 000 euros, hors charges et hors taxes, avec une franchise de loyer pendant les 3 premiers mois (loyers réduits). Un dépôt de garantie de 5 750 euros a été versé.

Des loyers et des charges sont demeurés impayés.

Par acte d'huissier du 5 mai 2022, la société LogiRep a fait délivrer un commandement de payer, visant la clause résolutoire stipulée dans le bail, pour une somme de 7 166,65 euros, au titre de l'arriéré locatif arrêté au 1er mars 2022, outre 165,43 euros au titre de l'acte.

Par acte d'huissier de justice délivré le 28 juin 2022, la société LogiRep a fait assigner en référé la société La Pépite de [Localité 4] aux fins d'obtenir principalement la constatation de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire, son expulsion, sa condamnation au paiement de la provision de 10 816,65 euros à valoir sur l'arriéré des loyers dus à la date du 1er mai 2022 et la fixation du montant de l'indemnité d'occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 24 novembre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 5 juin 2022,

- ordonné à défaut de restitution volontaire des lieux dans les 15 jours de la signification de l'ordonnance, l'expulsion de la SAS La Pépite de [Localité 4] et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 2] à [Localité 4] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier,

- dit en cas de besoin que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrit avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point,

- condamné la société La Pépite de [Localité 4] à payer à la société LogiRep la somme de 10 076,65 euros à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au mois de mai 2022 inclus,

- fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la société La Pépite de [Localité 4], à compter de la résiliation du bail, soit du 6 juin 2022 et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires,

- condamné la société La Pépite de [Localité 4] aux dépens,

- condamné la société La Pépite de [Localité 4] à payer à la société LogiRep la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à référé sur toute autre demande.

Par déclaration reçue au greffe le 29 décembre 2022, la société La Pépite de [Localité 4] a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Dans ses dernières conclusions déposées le 5 mai 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société La Pépite de [Localité 4] demande à la cour, au visa des articles 1343-5 du code civil, L.145-41 du code de commerce et 700 du code de procédure civile, de :

'- infirmer l'ordonnance de référé rendue par le tribunal judiciaire de Nanterre en date du 24 novembre 2022 en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- débouter la sa Hlm Logirep de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter la sa Hlm Logirep de sa demande de condamnation de la sas la Pépite de [Localité 4] à payer une amende civile,

- accorder un délai de paiement rétroactif à la sas la Pépite de [Localité 4] courant du 5 mai 2022 au jour où la cour statue, afin de lui permettre de s'acquitter des causes du commandement de payer,

- suspendre les effets de la clause résolutoire mise en œuvre dans le commandement de payer délivré en date du 5 mai 2022 par application de l'article L. 145-41 du code de commerce,

- prendre acte du paiement de la sas la Pépite de [Localité 4] et de la disparition des causes du commandement de payer dans le délai de grâce,

- juger sans effet la clause résolutoire mise en œuvre dans le commandement de payer délivré en date du 5 mai 2022,

- juger sans effet le commandement de quitter les lieux délivré en date du 10 janvier 2023,

- accorder un délai de paiement rétroactif d'une durée de 24 mois, courant du 5 mai 2022 au 5 mai 2024 à la sas la Pépite de [Localité 4], pour lui permettre de s'acquitter du surplus de sa dette locative non compris dans le commandement de payer et arrivé à échéance au jour auquel la cour statue,

- condamner la sa Hlm Logirep au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la sa Hlm Logirep à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 10 mai 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société LogiRep demande à la cour, au visa des articles 834, 835 et 836 du code de procédure civile, 1134 ancien devenu 1103 nouveau, 1353, 1728 du code civil, L. 145-1 et L. 145-41 du code de commerce, de :

'- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 5 juin 2022,

- ordonné l'expulsion de sas la Pépite de [Localité 4] et de tous occupants de son chef au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier des locaux situés [Adresse 2] à défaut de restitution volontaire,

- condamné la sas la Pépite de [Localité 4] à payer à titre provisionnel la somme de 10 076,65 euros mai 2022 inclus,

- fixé l'indemnité d'occupation provisionnelle au loyer plus charges, taxes et impôts divers et indexations éventuelles à compter du 6 juin 2022 jusqu'au départ effectif,

- condamné la sas la Pépite de [Localité 4] à payer 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

y ajoutant,

- condamner la sas la Pépite de [Localité 4] à titre provisionnel à payer à la sa d'Hlm Logirep la somme de 16 815,79 euros avril 2023 inclus,

- fixer l'indemnité d'occupation provisionnelle au loyer plus charges, taxes et impôts divers et indexations éventuelles à compter du 6 juin 2022 jusqu'au départ effectif,

- condamner la sas la Pépite de [Localité 4] à la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles engagés devant la cour d'appel de Versailles ainsi qu'aux dépens qui comprendront notamment le droit de timbre de 225 euros qui seront recouvrés par selarl Minault-Teriitehau agissant par Maître Stéphanie Teriitehau , avocat au barreau de Versailles.

Faire droit à l'appel incident que forme par les présentes la sa Logirep en ce que la décision déférée n'a pas condamné la sas Pépite de [Localité 4] à l'indemnité d'occupation fixée, ni aux dépens.

en conséquence

- condamner la sas Pépite de [Localité 4] à payer à titre provisionnel l'indemnité d'occupation égale au loyer plus charges, taxes et impôts divers et indexations éventuelles à compter du 1er mai 2023 jusqu'au départ effectif ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront notamment le coût du commandement, les frais de levée des états et de k bis pour un montant de 46,91 euros ainsi que la totalité du droit proportionnel dû à l'huissier de justice.

à titre subsidiaire,

si par impossible, la cour devait suspendre les effets de la clause résolutoire et accorder des délais de paiement à l'appelante :

- condamner la sas Pépite de [Localité 4] à payer à titre provisionnel le loyer courant plus charges, taxes et impôts divers et indexations éventuelles outre l'arriéré au plus tard le 5 de chaque mois, à défaut de quoi, ordonner la déchéance du terme la dette devenant exigible dans son intégralité, ordonner l'expulsion de la sas la Pépite de [Localité 4] et de tous occupants de son chef au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier des locaux situés [Adresse 2].

en tout état de cause,

- débouter la sas la Pépite de [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

- condamner la sas Pépite de [Localité 4] à payer à la sa d'Hlm Logirep la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif ou dilatoire, sans préjudice de l'amende civile sur le fondement de l'article 599 du code civil'.

Sur saisine de la société La Pépite de [Localité 4], la juridiction du premier président de la présente cour a, par ordonnance en date du 9 mars 2023, rejeté sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire, l'a condamnée aux dépens et rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société La Pépite de [Localité 4], appelante, explique qu'elle n'a pu exploiter son activité avant d'y effectuer des travaux d'aménagement dans les locaux loués, pour lesquels elle a dû contracter un crédit-bail d'un montant total de 130 479,77 euros, et que ce n'est qu'à compter du mois de septembre 2021 qu'elle a pu ouvrir au public.

Elle expose qu'elle emploie 3 salariés en contrats à durée indéterminée, que selon l'attestation de son expert-comptable, elle a dégagé un chiffre d'affaires de 202 750,41 euros sur son premier exercice du 1er août 2021 au 31 décembre 2022.

Elle indique encore que malgré ses charges conséquentes au regard des travaux d'aménagement réalisés, elle connaît à ce jour une activité saine.

Au regard de ces éléments, elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance dont appel, de lui accorder un délai de paiement rétroactif sur le fondement des articles L. 145-41 du code de commerce et 1343-5 du code civil, pour lui permettre de s'acquitter des causes du commandement de payer, soit la somme de 7 332,08 euros, et de suspendre les effets de la clause résolutoire compte tenu du règlement de cette somme.

A l'appui de ces demandes, elle argue de son bonne foi, relatant que son gérant, M. [G], s'est présenté à l'audience devant le premier juge sans avocat, de sorte qu'il n'a pas pu faire exercer ses droits de la défense .

Elle expose qu'à la suite du commandement de payer en date du 5 mai 2022, elle a poursuivi au gré de ses moyens le paiement de son loyer pour un montant total de 5 986,23 euros, de sorte que la bailleresse ne peut prétendre qu'aucun règlement ne serait intervenu depuis le mois de novembre 2021.

Elle indique également que la société CGE, sa holding, a vainement tenté d'avancer la somme de 7 500 euros mais que la société LogiRep a refusé de recevoir ce paiement, pourtant valable, et qu'elle a versé sur le compte CARPA de son conseil, à la disposition de la société LogiRep, la somme de 15 000 euros le 13 mars 2023.

Elle rétorque par ailleurs aux conclusions adverses que si certains bulletins de paie de ses salariés ne comportent pas de numéro de sécurité sociale, les employés ont bien fait l'objet d'une déclaration préalable à l'embauche auprès de l'URSSAF ; que les développements de la bailleresse sur l'emploi de salariés en cas de difficultés pour le paiement des loyers est sans objet par rapport aux demandes et qu'elle a besoin d'employer de la main d'oeuvre pour assurer le développement de son activité, rappelant aussi qu'elle est une jeune société qui vient de clore son premier exercice comptable qui est en cours d'établissement.

Sur le montant du loyer restant dû, elle soutient que lors de la première audience, la société LogiRep n'a pas présenté un décompte à jour, alors que des paiements intermédiaires étaient intervenus, et qu'au jour de ses dernières conclusions, échéance du mois de mai 2023 incluse, le montant de la créance de la société LogiRep est de 26 151,63 euros, duquel il convient de déduire les 15 000 euros versés au compte CARPA, ramenant la créance à la somme de 11 151,63 euros.

Elle entend souligner aussi que par courriel du 9 novembre 2022, elle a proposé un échelonnement de sa dette auprès de la bailleresse, outre un paiement partiel immédiat, et qu'elle a reçu pour toute réponse une demande de paiement immédiat de l'intégralité de la dette.

Elle prétend que la société LogiRep a tout intérêt à ne lui laisser aucune chance, puisqu'en résiliant le bail, elle récupérera des locaux refaits à neuf, ayant fait l'objet de travaux d'une valeur d'environ 80 000 euros.

L'appelante sollicite ensuite des délais de paiement de 12 mois pour s'acquitter des sommes postérieures au commandement de payer.

En réponse à la demande de condamnation pour appel abusif formée par l'intimée, elle entend rappeler que :

- l'exercice d'une voie de recours est un droit,

- elle a proposé en vain à la société LogiRep des solutions et des délais pour avoir une chance de pérenniser sa activité nouvelle,

- elle n'a pas pu faire valoir ses contestations et demandes devant le juge des référés,

- les éléments qu'elle verse aux débats sont réguliers et ne sont pas « suspects » sauf à considérer que l'URSSAF délivre des fausses déclarations préalables à l'embauche, rappelant que tout employeur peut établir un contrat de travail à l'égard d'une personne non munie d'un numéro de sécurité sociale français,

- elle produit aux débats des versements pour apurer sa dette et démontre sa bonne foi,

- il existe manifestement des incohérences flagrantes entre les montants déclarés par la société LogiRep devant le juge des référés et le montant dont elle se prévaut en appel,

- la société LogiRep tente par tout moyen de faire obstacle à ses demande,car elle y a un intérêt financier certain au vu des travaux réalisés qui ont augmenté la valeur locative des locaux,

de sorte qu'il ne saurait être considéré que son appel est abusif.

La société LogiRep, bailleresse intimée, demande la confirmation de l'ordonnance en son principe et le débouté des demandes de l'appelante.

Elle souligne que les jurisprudences que cite la société La Pépite de [Localité 4] font toutes application des délais rétroactifs lorsque la société locataire a payé toutes les sommes dues, ce qui n'est pas le cas puisqu'elle ne règle rien depuis le mois de décembre 2021.

Elle précise que les prélèvements qu'elle a effectués sur le compte de la locataire ont tous été rejetés faute de provision et qu'elle n'a même pas les moyens de régler un parking de 39,99 euros par mois.

Elle considère que la mauvaise foi de l'appelante résulte de ce qu'elle n'a pas respecté sa proposition de régler 9 000 euros après l'audience de première instance.

Elle soutient que la société La Pépite de [Localité 4] ne justifie d'aucune de ses allégations ; qu'elle ne produit pas de situation bancaire pour attester de la trésorerie qu'elle invoque ; que les 4 salariés ont tous été engagés alors que la locataire ne réglait aucun loyer et que les bulletins de paie produits ne mentionnent pas le numéro de sécurité sociale de ces salariés, considérant qu'il n'est donc pas justifié de l'activité effective de l'entreprise, qui en outre ne produit aucun bilan.

Au cours de l'instance d'appel, elle reconnaît que la somme de 15 000 euros versée en compte CARPA lui a été virée le 28 avril 2023, de sorte que la dette, avril 2023 inclus, est désormais d'un montant de 16 815,79 euros, soulignant qu'il s'agit toutefois du premier versement depuis le mois de décembre 2021.

Elle ajoute qu'elle ne saurait accepter un virement émanant d'une autre société, opération qui pourrait être qualifiée d'abus de biens sociaux.

A titre d'appel incident, la bailleresse demande à ce qu'il soit ajouté à l'ordonnance querellée la condamnation de la société La Pépite de [Localité 4] à lui verser les sommes dues au titre de l'indemnité d'occupation.

Elle sollicite également l'application des dispositions de l'article 559 du code de procédure civile, soutenant que « l'appelante a formé appel et tenté de retardé l'exécution de l'ordonnance déférée, a trompé la religion de la cour en affirmant qu'elle avait fait trois virements alors qu'elle savait parfaitement qu'ils avaient été rejetés faute de provision, produits des bulletins de paie suspects et mentionnant des embauches postérieures au commandement de payer et à l'ordonnance déférée, fait état d'un virement entre les mains de son conseil émanant d'une société tierce ».

Sur ce,

Sur l'octroi de délais rétroactifs :

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que :

'Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge'.

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti d'un mois, le preneur ne peut remettre en cause l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer, ce que la société La Pépite de [Localité 4] n'allègue pas en l'espèce.

Elle ne conteste pas davantage n'avoir ni payé ni contesté le commandement de payer dans le délai qui lui était imparti, de sorte que la clause résolutoire du bail s'est trouvée automatiquement acquise.

Bien qu'ayant dirigé sa déclaration d'appel à l'encontre de tous les chefs de l'ordonnance déférée, l'appelante ne critique pas à proprement parler ses dispositions dans ses dernières conclusions, demandant uniquement l'octroi de délais, la suspension des effets de la clause résolutoire et son anéantissement rétroactif.

L'ordonnance sera en conséquence dès à présent confirmée en toutes ses dispositions principales, à l'exception du montant de l'arriéré dû comme il sera ci-après examiné.

S'il est acquis par les deux parties qu'un versement de 15 000 euros a désormais été fait pour venir en déduction de la dette locative et d'occupation, il s'avère toutefois que la totalité de la dette n'a toujours pas été apurée, de sorte qu'en l'absence de cette condition qui seule peut permettre de justifier de la bonne foi pouvant donner lieu à l'octroi de délais rétroactifs, à la suspension des effets de la clause résolutoire et finalement à la constatation que la clause résolutoire est censée n'avoir jamais joué, les demandes à ce titre de la part de la société La Pépite de [Localité 4] doivent être rejetées.

Sur la provision, l'indemnité d'occupation et l'octroi de délais classiques :

Il convient compte tenu de ce qui a été jugé ci-dessus d'examiner la demande de délais de l'appelante s'agissant de l'intégralité de la dette restant due, étant relevé que la bailleresse justifie par sa pièce n° 13 que les prélèvements effectués aux mois de juillet, août et septembre 2022 depuis le compte de la locataire ont fait l'objet de rejet de la part de l'établissement bancaire.

Au vu du dernier décompte produit par la bailleresse datant du 4 mai 2023, il apparaît que cette somme s'élève, règlement de la somme de 15 000 euros en cours d'instance d'appel inclus, au montant de

16 815,79 euros, duquel il convient toutefois de soustraire les montants de 165,43 euros, 0,80 euros,

265,82 euros, 0,80 euros, 0,80 euros, 13 euros, 74,98 euros et 90,54 euros, mentionnés dans le décompte comme « frais » et comme tels non justifiés par la société LogiRep, soit au montant final de 16 203,62 euros.

Par voie d'infirmation, la société La Pépite de [Localité 4] sera en conséquence condamnée à payer à la société LogiRep la somme provisionnelle de 16 203,62 euros à valoir sur l'arriéré locatif et d'occupation arrêté au mois d'avril 2023 inclus.

Par ailleurs, ajoutant à l'ordonnance critiquée, il convient de condamner la société La Pépite de [Localité 4] à payer à la société LogiRep l'indemnité d'occupation telle que fixée par le premier juge.

L'article 1343-5 alinéa 1er du code civil mentionné par l'article L. 145-41 2e alinéa susvisé, dispose quant à lui que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Compte tenu du chiffre d'affaires réalisé par la société La Pépite de [Localité 4] sur la période du 1/11/2021 au 31/12/2022 attesté par un expert-comptable à hauteur de la somme de 202 750,41 euros, de ce qu'il s'agit d'une très jeune société et de ce que la bailleresse n'allègue pas pour sa part de difficulté financière, il convient d'octroyer des délais de paiement de 24 mois à la société La Pépite de [Localité 4] comme il sera dit au dispositif du présent arrêt.

La suspension des effets de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail sera ordonnée jusqu'au terme de ce délai et il sera rappelé que, si la société La Pépite de [Localité 4] paie le loyer courant et se libère de sa dette locative dans le délai, la clause de résiliation de plein droit sera réputée ne pas avoir joué.

Au cas contraire, la clause résolutoire retrouvera son plein effet et le bailleur sera en droit de faire procéder à l'expulsion de la société La Pépite de [Localité 4].

Sur la demande au titre de la procédure abusive :

Aux termes de l'article 559 du code de procédure civile, en cas d'appelcprincipal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés.

Il est constant que qui obtient gain de cause, même partiellement, en son appel, comme c'est le cas de la société La Pépite de [Localité 4], ne peut être condamné à des dommages-intérêts pour avoir abusé de son droit d'exercer des voies de recours, de sorte que la demande de la société LogiRep à ce titre sera rejetée.

Sur les demandes accessoires :

L'ordonnance querellée étant confirmée en ses principales dispositions, elle sera confirmée en celles relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance, sur lesquels le premier juge a statué contrairement aux dires de l'intimé et qui ne peuvent au demeurant inclure que les sommes limitativement énumérées à l'article 695 du code de procédure civile.

La société La Pépite de [Localité 4] étant déboutée de sa demande principale et restant débitrice vis-à-vis de sa bailleresse, elle ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens d'appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice de l'avocat qui en a fait la demande.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la société LogiRep la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. L'appelante sera en conséquence condamnée à lui verser une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme l'ordonnance du 24 novembre 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a statué sur le montant de la provision,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne la société La Pépite de [Localité 4] à payer à la société LogiRep la somme provisionnelle de 16 203,62 euros à valoir sur l'arriéré locatif et d'occupation arrêté au mois d'avril 2023 inclus,

Condamne la société La Pépite de [Localité 4] à payer à la société LogiRep l'indemnité d'occupation telle que l'a fixée le premier juge,

Rejette la demande d'octroi de délais rétroactifs de la société La Pépite de [Localité 4],

Autorise la société La Pépite de [Localité 4] à s'acquitter de sa dette locative en 23 mensualités de 680 euros et une dernière mensualité égale au solde, en principal, intérêts et frais, qui devront être réglées au plus tard le 5 de chaque mois, en sus du loyer courant et jusqu'à extinction de la dette,

Ordonne jusqu'à l'expiration de ce délai de paiement la suspension des effets de la clause résolutoire insérée au bail,

Rappelle que si la société La Pépite de [Localité 4] se libère de sa dette locative en plus du loyer courant dans le délai, la clause de résiliation de plein droit sera réputée ne pas avoir joué mais qu'au cas contraire, elle retrouvera son plein effet, à savoir que :

- le tout deviendra immédiatement exigible,

- la clause résolutoire acquise à la date du 5 juin 2022 reprendra son plein effet et :

- il pourra être procédé à l'expulsion immédiate de la société La Pépite de [Localité 4],

- le sort des biens meubles garnissant les lieux loués suivra celui décidé par le premier juge,

- la société La Pépite de [Localité 4] devra payer à titre provisionnel l'indemnité d'occupation fixée jusqu'à parfaite libération des lieux,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société La Pépite de [Localité 4] à verser à la société LogiRep la somme de 2 500 euros application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

Dit que la société La Pépite de [Localité 4] supportera les dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,