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Décisions

CA Paris, Pôle 3 - ch. 1, 18 octobre 2023, n° 21/16212

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 21/16212

18 octobre 2023

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRET DU 18 OCTOBRE 2023

(n° 2023/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/16212 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEKN6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juillet 2021 - Tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 20/04032

APPELANT

Monsieur [W] [N]

né le 01 Novembre 1954 à [Localité 10] (76)

[Adresse 4]

[Localité 6]

représenté et plaidant par Me Alexandre DAZIN, avocat au barreau de PARIS, toque : W06

INTIME

Monsieur [B] [V] [H] [N]

né le 16 Mai 1957 à [Localité 10] (76)

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Mathilde HAAS, avocat au barreau de PARIS, toque : R014

ayant pour avocat plaidant Me Pénélope BARGAIN, avocat au barreau de GRASSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Patricia GRASSO, Président, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Patricia GRASSO, Président

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller

M. Bertrand GELOT, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

EXPOSE DU LITIGE :

Suite au décès de leurs parents et d'un accord de partage partiel intervenu en 2011, MM. [W] et [B] [N] sont propriétaires indivis des lots 6 et 35 dépendant de la copropriété de l'immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 9].

Par acte d'huissier du 18 mai 2020, M. [W] [N] a assigné M. [B] [N] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de :

-ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage des biens indivis,

-en ordonner la licitation,

-condamner [B] [N] à lui verser une somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice financier, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation avec capitalisation,

-le condamner à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-ordonner l'exécution provisoire,

Par jugement réputé contradictoire du 7 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Paris a statué dans les termes suivants :

-ordonne l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des biens indivis suivants :

*les lots 6 et 35 d'une copropriété sise [Adresse 2] à [Localité 8] cadastrée section CI [Cadastre 7];

-ordonner, sur les poursuites de la partie la plus diligente et en présence des autres parties, ou celles-ci dûment appelées, la licitation en un lot de vente à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Paris des biens susmentionnés,

-fixe la mise à prix du lot de vente à la somme de 350 000 euros sans faculté de baisse,

-dit qu'il incombera à la partie la plus diligente :

*de constituer avocat dans le ressort du tribunal chargé de la vente et de déposer le cahier des conditions de vente utile au greffe du tribunal,

*de communiquer ce cahier aux autres indivisaires dès son dépôt au greffe du tribunal,

-dit qu'il sera procédé par la partie la plus diligente aux formalités de publicité prévues aux articles R 322-31 à R 322-36 du code des procédures civiles d'exécution,

-autorise la partie la plus diligente à faire visiter par l'huissier de son choix territorialement compétent les biens à vendre aux fins de rédaction d'un procès-verbal descriptif comprenant les informations prévues à l'article R 322-2 du code des procédures civiles d'exécution et de réalisation des diagnostics obligatoires,

-autorise la partie la plus diligente à faire procéder par l'huissier territorialement compétente de son choix à la visite des biens à vendre dans les jours précédant la vente,

-dit qu'à chaque fois, l'huissier pourra pénétrer dans lesdits biens avec l'assistance, si nécessaire, d'un serrurier et de la force publique ou de deux témoins à condition d'avertir de sa venue les occupants des lieux au moins 7 jours à l'avance,

-déboute [W] [N] de ses demandes tendant à :

*condamner [B] [N] à lui verser une somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice financier, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation avec capitalisation,

*le condamner à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

*ordonner l'exécution provisoire,

-ordonne le partage des dépens entre les copartageants à proportion de leurs parts respectives,

-sursoit à statuer sur la liquidation et la composition des lots dans l'attente de l'exécution de la licitation,

-renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 10 novembre 2021 à 13h30 pour justification de l'exécution de la licitation.

M. [W] [N] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 3 septembre 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 juin 2023, l'appelant demande à la cour de :

-réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 7 juillet 2021 en ce qu'il a:

*débouté M. [W] [N] de ses demandes tendant à :

>la condamnation de M. [B] [N] à lui verser une somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice financier, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation avec capitalisation,

>la condamnation de M. [B] [N] à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

>l'application de l'exécution provisoire,

*ordonné le partage des dépens entre les copartageants à proportion de leurs parts respectives,

*sursis à statuer sur la liquidation et la composition des lots dans l'attente de l'exécution de la licitation,

et en ce qu'il a omis de statuer sur la demande de M. [W] [N] tendant à ce que :

*le prix de vente de l'appartement soit imputé prioritairement sur :

>le préjudice locatif du fait de l'inoccupation de l'appartement, étant précisé que ce montant restera à parfaire,

>les frais de la vente,

>les droits de partage,

et statuant à nouveau et y ajoutant :

-condamner M. [B] [N] à payer la somme de 144 000 euros à l'indivision à titre d'indemnité d'occupation du fait de la jouissance exclusive de l'appartement de [Localité 8], et ce pour son occupation privative à compter du 8 juillet 2019, soit la somme de 3 000 euros par mois, somme à parfaire jusqu'au jour de la vente de l'appartement,

-juger que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de l'assignation avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

-condamner M. [B] [N] à supporter l'ensemble des frais résultant du partage judiciaire,

-juger que le prix de vente de l'appartement s'imputera prioritairement de la manière suivante :

*l'indemnité d'occupation de 144 000 euros, à parfaire,

*les frais de la vente,

*les droits de partage,

-débouter M. [B] [N] de son appel incident, et plus généralement ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires au présent dispositif,

-condamner M. [B] [N] au paiement à M. [W] [N] de la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et à hauteur d'appel,

-condamner M. [B] [N] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

-confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 7 juillet 2021 pour le surplus.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 1er août 2023, M. [B] [N], intimé, demande à la cour de :

Vu les articles 784, 15, 16, et 135 du Code de Procédure Civile,

Vu les articles 815, 815-8, 815-9 alinéa 2, 837, 840 du Code Civil,

Vu l'article 1240 du Code Civil,

Vu l'article 1686 du Code Civil,

Vu l'article 1873-10 du Code Civil,

Vu l'article 1377 du Code de Procédure Civile,

Vu l'article 23 de la Loi du 10 juillet 1965,

Vu le Jugement du 7 juillet 2021 du Tribunal Judiciaire de PARIS,

Vu les pièces produites,

' Infirmer le Jugement entrepris en ce qu'il :

-Ordonne l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des biens indivis suivants:

les lots 6 et 35 d'une copropriété sise [Adresse 2] à [Localité 8] cadastrée section CI [Cadastre 7];

-Ordonne, sur les poursuites de la partie la plus diligente et en présence des autres parties, ou celles-ci dûment appelées, la licitation en un lot de vente à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Paris 25 des biens susmentionnés;

-Fixe la mise à prix du lot de vente à la somme de 350.000 euros sans faculté de baisse;

-Dit qu'il incombera à la partie la plus diligente :

' de constituer avocat dans le ressort du tribunal chargé de la vente et de déposer le cahier des conditions de vente utile au greffe du tribunal,

' de communiquer ce cahier aux autres indivisaires dès son dépôt au greffe du tribunal;

-Dit qu'il sera procédé par la partie la plus diligente aux formalités de publicité prévues aux articles R 322'31 à R 322'36 du code des procédures civiles d'exécution;

-Autorise la partie la plus diligente à faire visiter par l'huissier de son choix territorialement compétent les biens à vendre aux fins de rédaction d'un procès-verbal descriptif comprenant les informations prévues à l'article R 322-2 du code des procédures civiles d'exécution et de réalisation des diagnostics obligatoires;

-Autorise la partie la plus diligente à faire procéder par l'huissier territorialement compétent de son choix à la visite des biens à vendre dans les jours précédant la vente;

-Dit qu'à chaque fois, l'huissier pourra pénétrer dans lesdits biens avec l'assistance, si nécessaire, d'un serrurier et de la force publique ou de deux témoins à condition d'avertir de sa venue les occupants des lieux au moins 7 jours à l'avance;

-Ordonne le partage des dépens entre les copartageants à proportion de leurs parts respectives;

-Sursoit à statuer sur la liquidation et la composition des lots dans l'attente de l'exécution de la licitation;

-Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 10 novembre 2021 à 13h30 pour justification de l'exécution de la licitation

Statuant à nouveau :

-Juger que Monsieur [W] [N] n'a pas justifié de démarches suffisantes en vue de

l'aboutissement du partage amiable pour lequel les copartageants étaient d'accord, à savoir la vente de gré à gré du bien sis [Adresse 2] à [Localité 8],

-Juger par suite qu'il n'y a pas lieu à partage judiciaire,

-Juger par voie de conséquence qu'il n'y a pas lieu à licitation du bien par vente aux enchères,

- Confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il :

*déboute [W] [N] de ses demandes tendant à:

. condamner [B] [N] à lui verser une somme de 9.000 euros en réparation de son préjudice financier, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation avec capitalisation,

. le condamner à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. ordonner l'exécution provisoire;

-Juger que Monsieur [B] [N] ne jouit pas privativement du bien indivis dans la mesure où il n'est pas prouvé qu'il dispose seul des clefs et du badge d'accès à l'appartement litigieux,

-juger par suite qu'il n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation à l'indivision,

-débouter monsieur [W] [N] de sa demande paiement de 144 000 à ce titre.

subsidiairement sur ce point :

-accorder à Monsieur [B] [N] un délai de paiement de 24 mois en cas de

condamnation de celui-ci au paiement de sommes d'argent, au vu de sa situation financière

obérée,

-dire et juger que le premier juge n'a aucunement omis de statuer.

-débouter Monsieur [W] [N] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

-le condamner au paiement de 5 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-le condamner au paiement de 7 000 € au titre des frais irrépétibles en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 202323.

L'affaire a été appelée à l'audience du 6 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera rappelé qu'en vertu de l'alinéa 2 de l'article 954 du code de procédure civile les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.

En application de son alinéa 3, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils ont été invoqués dans la discussion.

En conséquence, les chefs de dispositif des écritures tendant à voir « dire et juger » ou « juger » qui n'élèvent pas de droits spécifiques ne donneront pas lieu à mention au dispositif du présent arrêt.

L'appelant ne développe aucun moyen sur sa demande tendant à voir réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 7 juillet 2021 en ce qu'il :

*l'a débouté de sa demandes tendant à l'application de l'exécution provisoire,

*sursis à statuer sur la liquidation et la composition des lots dans l'attente de l'exécution de la licitation.

Sur le partage judiciaire et la licitation des biens indivis

Parce qu'en l'espèce l'indivision ne comprend qu'un appartement et une cave et qu'il n'est donc pas possible de composer plusieurs lots de valeur équivalente, le tribunal, après avoir constaté que les parties n'étaient pas d'accord sur les modalités du partage et rappelé que nul ne pouvait être contraint de rester dans l'indivision, a ordonné l'ouverture des opérations de partage sans désignation de notaire et la licitation des biens indivis.

L'intimé s'oppose au partage judiciaire au motif que M. [W] [N] n'a pas justifié de démarches suffisantes en vue de l'aboutissement du partage amiable pour lequel les copartageants étaient d'accord, à savoir la vente de gré à gré du bien sis [Adresse 2] à [Localité 8], et fait valoir que le partage amiable doit primer sur le partage judiciaire.

C'est vainement que M. [B] [N] soutient que M. [W] [N] n'a pas justifié de démarches suffisantes en vue de l'aboutissement du partage amiable puisqu'il ne fonde aucune demande sur le fondement de l'article 1360 du code de procédure civile qui prévoit qu'à peine d'irrecevabilité, l'assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable.

Force est de constater qu'il rappelle lui-même que ce n'est qu'en cas de refus de partage par un des co-indivisaires ou lorsque les modalités de réalisation du partage envisagé n'emportent pas l'aval de tous que le juge peut être saisi.

Tel est bien le cas en l'espèce puisque si Monsieur [B] [N] a fait connaître à son frère son intention de vendre le bien indivis dès le départ de Madame [P], locataire, en juillet 2019 (par mail du 31 juillet 2019 de l'agent immobilier qu'il souhaitait mandater à cette fin et par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 septembre 2019), son frère n'a pas répondu à ses courriers.

Les parties s'abstiennent à tour de rôle de répondre aux sollicitations de l'autre, cette inertie suffisant à consacrer le désaccord des parties.

Ce désaccord est largement confirmé par l'attitude procédurale particulièrement hostile des parties qui, par ailleurs, se reprochent leur inertie respective dans la réalisation d'une vente amiable alors qu'il était de leur intérêt commun de parvenir, pour le partage, à la vente amiable, plus favorable que la vente aux enchères eu égard notamment aux frais qu'elle entraîne, de ce seul bien indivis.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des biens indivis et ordonné leur licitation.

Sur le préjudice financier de 9000 euros

L'appelant demande l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à la condamnation de M. [B] [N] à lui verser une somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice financier résultant de l'absence de location du bien indivis dont il impute la responsabilité à son frère, mais ne forme aucune demande pour que la cour statue à nouveau sur ce point, puisque devant la cour, il demande à présent qu'une indemnité d'occupation soit mise à la charge de son frère.
En tout état de cause, sa demande de dommages et intérêts étant fondée sur la valeur locative du bien, le tribunal a, à juste titre, rappelé que la qualité d'indivisaire n'emporte pas l'obligation de faire produire des fruits au bien indivis et faute par l'appelant de critiquer ce motif et d'énoncer un moyen à l'appui de sa demande d'infirmation, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité d'occupation

L'appelant demande à la cour de condamner M. [B] [N] à payer la somme de 144 000 euros à l'indivision à titre d'indemnité d'occupation du fait de la jouissance exclusive de l'appartement de [Localité 8], et ce pour son occupation privative à compter du 8 juillet 2019, soit la somme de 3 000 euros par mois, somme à parfaire jusqu'au jour de la vente de l'appartement, et de juger que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de l'assignation avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Cette demande n'était en première instance que le subsidiaire de la demande d'indemnisation au titre du préjudice locatif.

Il fait valoir qu'il n'a jamais disposé des clefs de l'appartement dont il ne conteste pas qu'il était inoccupé puisqu'il en souhaitait vainement la location, et a été notamment contraint de solliciter l'assistance d'un commissaire de justice et d'un serrurier pour pouvoir pénétrer dans l'appartement le 17 janvier 2022, afin de procéder à la rédaction du cahier des charges, en application des dispositions du jugement du tribunal judiciaire.

Il en conclut que son frère a donc bénéficié d'une occupation privative des lieux, au moins à compter de la date de départ des derniers locataires, soit le 8 juillet 2019.

M. [B] [N] répond qu'il n'est pas démontré qu'il était seul en possession des clefs que son frère ne les lui a d'ailleurs jamais demandées ni ne s'est plaint d'une quelconque impossibilité d'accéder au bien.

Aux termes de l'article 815-9 alinéa 2 du code civil :

« L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité d'occupation ».

Il est constant que M. [B] [N] n'a jamais occupé le bien indivis et que seule la question de la possession des clefs pourrait fonder l'existence d'une jouissance privative.

Il résulte des pièces produites par l'appelant que par courriel du 24 novembre 2020 adressé à Madame [T], une habitante de l'immeuble, qui sollicitait de pouvoir entrer dans l'appartement indivis afin de régler une difficulté liée à un dégât des eaux, Monsieur [W] [N] a indiqué qu'il n'était pas en possession des clés, qu'en 2021, dans un courrier du 30 octobre 2021, les époux [Z] (potentiels acquéreurs de l'appartement), indiquaient à Monsieur [W] [N] qu'un badge était nécessaire afin d'entrer dans l'immeuble et se proposaient d'en acquérir un pour lui permettre d'au moins entrer dans les parties communes et enfin qu'à l'occasion d'un énième dégât des eaux, Monsieur [W] [N] a indiqué au syndicat des copropriétaires qu'il ne détenait toujours aucun jeu de clés et se trouvait dans l'impossibilité de donner accès à l'appartement.

Cependant, d'une part il résulte des propres pièces de Monsieur [W] [N] qu'il était lui-même l'interlocuteur auquel les tiers ont pu s'adresser au sujet du bien indivis, ce qui dément ses affirmations selon lesquelles son frère se serait accaparé la gestion du bien, d'autre part, il affirme ne jamais avoir été en possession des clefs et tente de le prouver par ses propres courriers et mails dépourvus de valeur probante.

Enfin et surtout, il ne justifie pas avoir demandé les clefs à son frère avant le 19 avril 2022.

Il n'établit donc pas que les clefs n'auraient pas pu être mises à sa disposition sur sa demande, ce qui exclut l'existence d'une jouissance privative de la part de Monsieur [B] [N].

Par suite la demande au titre de l'indemnité d'occupation sera rejetée.

Sur l'omission de statuer

L'appelant demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a omis de statuer sur sa demande tendant à ce que le prix de vente de l'appartement soit imputé prioritairement sur :

-le préjudice locatif du fait de l'inoccupation de l'appartement, étant précisé que ce montant restera à parfaire,

-les frais de la vente,

-les droits de partage.

Etant observé que le premier poste invoqué n'a pas d'existence, le tribunal a sursis à statuer sur la liquidation et la composition des lots dans l'attente de la licitation et a prévu la prise en charge des frais de partage relevant des dépens à proportion des droits de chacun dans l'indivision.
Il n'y a donc pas eu d'omission de statuer et pas lieu à réformer le jugement sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Le fait que le partage amiable n'ait pu avoir lieu et que l'instance ait dû être introduite résulte de l'attitude des deux parties, frères, propriétaires indivis d'un seul bien immobilier qui aurait pu facilement être vendu en vue du partage, mais qui ont préféré se nuire l'un à l'autre au mépris des intérêts de leur indivision.

Il y a lieu donc de confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que la nature du litige commandait que Monsieur [W] [N] conserve la charge de ses frais irrépétibles et ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage.

L'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou de l'autre des parties en ce qui concerne l'instance d'appel.

Eu égard à la nature du litige, il convient d'ordonner l'emploi des dépens en frais généraux de partage et de dire qu'ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [W] [N] de sa demande au titre de l'indemnité d'occupation,

Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l'emploi des dépens en frais généraux de partage et dit qu'ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.

Le Greffier, Le Président,