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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 21 septembre 2023, n° 22/07553

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 22/07553

21 septembre 2023

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 21 SEPTEMBRE 2023

N° 2023/576

Rôle N° RG 22/07553 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJOYM

[L] [G] épouse [J]

C/

[N] [X]

[H] [V] épouse [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Benjamin CRESPY

Me Déborah MICHEL

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 10 Mai 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 12-22-000128.

APPELANTE

Madame [L] [G] épouse [J]

née le [Date naissance 1] 1951 au [Localité 6] (EGYPTE),

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Benjamin CRESPY de l'AARPI BALDO - CRESPY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [N] [X]

né le [Date naissance 5] 1941 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]

Madame [H] [V] épouse [X]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]

représentés et assistés par Me Déborah MICHEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Angélique NETO, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Angélique NETO, Présidente

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Madame Myriam GINOUX, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023

Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] sont propriétaires d'un appartement situé [Adresse 3].

A compter du 1er novembre 2021, ils ont consenti à Mme [L] [G] épouse [J] une location saisonnière pour une durée d'un mois, expirant le 30 novembre 2021, moyennant un loyer mensuel de 750 euros, charges comprises.

Ils lui ont consenti une deuxième location saisonnière le 1er décembre 2021 d'une durée d'un mois, expirant le 31 décembre 2021.

Ils lui ont consenti une troisième location saisonnière le 1er janvier 2022 d'une durée d'un mois, expirant le 31 janvier 2022.

Par courrier en date du 7 février 2022, les époux [X] vont enjoindre Mme [G] épouse [J] à quitter les lieux sans délai.

Par acte d'huissier en date du 17 février 2022, ils vont lui faire sommation de quitter les lieux et libérer le bien qu'elle occupe de toutes personnes et de tous biens.

Lui faisant grief de se maintenir dans les lieux sans droit ni titre, les époux [X] l'ont, par acte d'huissier en date du 4 mars 2022, fait assigner devant le juge du contentieux de la protection du pôle de proximité de Martigues statuant en référé aux fins d'obtenir son expulsion et sa condamnation à lui verser diverses sommes.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 10 mai 2022, ce magistrat a :

- ordonné l'expulsion de Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] et de tous occupants de son chef, hors les lieux, sis [Adresse 3], appartenant à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X], avec l'assistance de la force publique si besoin est ;

- condamné Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser, à titre provisionnel, à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] une indemnité journalière d'occupation d'un montant de 85 euros à compter du 1er février 2022 ;

- condamné Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamné Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] la somme de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- condamné Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] aux entiers dépens, en ce compris le coût de la sommation de payer, de citation et de signification de l'ordonnance.

Suivant déclaration transmise au greffe le 25 mai 2022, Mme [L] [G] épouse [J] a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions dûment reprises.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 12 juillet 2022, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, elle sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau qu'elle :

- déboute les intimés de leurs demandes en l'état d'une contestation sérieuse portant sur la qualification du bail et de demandes qui excèdent les pouvoirs du juge des référés en ce qui concerne la fixation d'une indemnité journalière d'occupation et l'octroi de dommages et intérêts ;

- à titre reconventionnel, ordonne la production de quittances de loyers pour la période allant du mois de février au mois de juillet 2022 et jusqu'à l'intervention de la décision à intervenir ;

- condamne les intimés à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamne aux dépens de première instance et d'appel.

Elle expose qu'alors même que la location saisonnière doit porter sur une durée maximale et non renouvelable de 90 jours, les contrats qui lui ont été consentis portent sur 92 jours. Elle souligne également que le bien n'est aucunement meublé, faute d'inventaire, et qu'elle a conclu les baux pour y établir son domicile et non pour un séjour touristique estival ou pour une activité professionnelle liée à des activités de tourisme, sachant qu'elle est âgée de 71 ans et qu'elle vit seule. Par ailleurs, elle considère qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de fixer une indemnité d'occupation sans tenir compte de la valeur locative du bien résultant des baux, soit 750 euros, pas plus qu'il ne peut caractériser une faute et apprécier le préjudice subi.

Aux termes de leurs conclusions transmises le 9 juin 2023, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, les époux [X] demandent à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité des trois baux pour vice du consentement en raison du dol dont s'est rendue coupable l'appelante et, partant, confirmer l'ordonnance entreprise ;

- condamner l'appelante à leur verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner l'appelante à leur verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux dépens.

Ils soulignent que l'appelante a été expulsée des lieux le 18 octobre 2022 sans qu'elle ne règle la moindre indemnité d'occupation entre le 1er février et le 18 octobre 2022. Ils insistent sur le fait que les baux consentis à l'appelante sont bien des baux saisonniers qui échappent aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989. Afin de pouvoir louer leur bien en meublé de tourisme, ils indiquent avoir respecté les dispositions de l'article L 324-1-1 du code de tourisme en effectuant une déclaration du meublé auprès de la mairie de la commune, en s'inscrivant en tant que tel au répertoire Sirène, en déclarant aux impôts les sommes provenant de cette activité et en étant inscrits sur la plateforme dédiée de Airbnb. Ils exposent que la durée cumulée des trois baux est de 89 jours, de sorte qu'ils ont respecté le délai de 90 jours consécutifs imposé par la loi. De plus, ils affirment que le meublé de tourisme n'a pas vocation à accueillir uniquement des touristes et peut être loué à une clientèle professionnelle ou à toute autre personne qui n'y élit pas sa résidence principale. Ils indiquent que les pièces de la procédure établissent que la commune intention des parties était de soumettre leur relation contractuelle à la règlementation afférente à la location saisonnière de courte durée, ce qui résulte des termes mêmes des baux et des conditions en tourant la location. Enfin, ils affirment que le logement est bien meublé comme en atteste l'état des lieux et inventaire des biens meubles et objets mobiliers qu'ils versent aux débats et qui a été porté à la connaissance de l'appelante, tel que cela résulte des baux.

En tout état de cause, ils exposent avoir été victimes de manoeuvres dolosives de la part de l'appelante aux fins de lui permettre de s'installer de manière définitive chez eux à des conditions très favorables sans aucune intention de le quitter à son échéance. Ils se prévalent donc, à titre subsidiaire, de la nullité des baux pour vice du consentement.

S'agissant du montant de l'indemnité d'occupation, ils exposent qu'il a été fixé par le premier au regard des tarifs déclarés pour leur appartement, soit 600 euros la semaine, soit une moyenne de 85 euros par jour, faisant observer qu'ils ont été contraints de rembourser tous les locataires qui avaient réservé leur appartement au cours de la période pendant laquelle l'appelante s'est indûment maintenue dans les lieux.

S'agissant de la somme sollicitée à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, ils l'expliquent par le maintien délibéré de l'appelante dans les lieux, son absence de réponse et de réaction au appels, missives et injonctions qui lui ont été adressées, à l'origine d'un préjudice distinct du préjudice commercial résultant de la perte de revenus locatifs saisonniers des locations qu'ils ont été contraints de rembourser. Ils se prévalent également d'un préjudice moral.

L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 12 juin 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'occupation sans droit ni titre de l'appelante

Il résulte en premier lieu de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'urgence est caractérisée chaque fois qu'un retard dans la prescription de la mesure sollicitée serait préjudiciable aux intérêts du demandeur.

En outre, une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Enfin, c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier non seulement l'urgence mais également l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ces moyens.

En second lieu, il résulte de l'article 835 alinéa 1 que le président peut toujours, même en cas de contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

L'existence de contestations sérieuses n'interdit pas au juge de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser un dommage imminent ou un trouble manifestement illicite.

La cour doit apprécier l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite au moment où le premier juge a statué, peu important le fait que ce dernier ait cessé, en raison de l'exécution de l'ordonnance déférée, exécutoire de plein droit.

L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble est ainsi de nature à constituer un trouble manifestement illicite et, à tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est non sérieusement contestable.

En l'espèce, les parties ont signé trois contrats de location saisonnière portant sur un même local vacant meublé à usage d'habitation exclusivement pour les périodes allant du 1er au 30 novembre 2021, du 1er au 31 décembre 2021 et du 1er au 31 janvier 2022.

Se prévalant d'une occupation sans droit ni titre de Mme [G] épouse [J] à compter du 1er février 2022, les époux [X] sollicitent son expulsion.

Mme [G] épouse [J], qui a été expulsée des lieux le 18 octobre 2022, se prévaut de l'absence de trouble illicite en raison de la requalification des baux susvisé en un contrat de bail d'habitation sousmis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989.

La location saisonnière désigne des logements loués sur de courtes durées. L'article L 324-1 du code de tourisme définit la location saisonnière comme les meublés de tourisme (villas, appartements ou studios), à l'usage exclusif du locataire, offerts à la location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, semaine ou au mois et qui n'y élit pas domicile. Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès de la mairie de la commune où est situé le meublé.

Contrairement aux baux d'habitation, une telle location est uniquement régie par les dispositions du code civil. La durée, le prix et les conditions du contrat sont fixés en toute liberté par les deux parties. Il convient de relever que la loi définit la location saisonnière comme la location d'un logement pour une durée maximale et non renouvelable de 90 jours consécutifs.

En l'occurrence, les locations ont été respectivement conclues pour des durées de 29 jours, 30 jours et 30 jours, soit 89 jours, ce qui n'excède pas les 90 jours consécutifs requis par la loi, contrairement à ce que prétend l'appelante.

De plus, alors même que les locations ont été conclues au mois, l'appelante n'établit aucunement qu'elle y a élit son domicile, sachant que la résidence principale est définie par l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989 comme le logement occupé au moins huit mois par an, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge. Le fait que les contrats n'ont pas été conclus pendant les vacances d'été n'enlèvent rien à leur qualification de locations saisonnières.

En outre, ces contrats mentionnent, dans la clause particulière figurant dans un encadré à la fin, qu'un inventaire et un état des lieux a été fait lors de la prise de possession de l'appartement, outre le fait que le locataire déclare avoir reçu un état descriptif obligatoire, un inventaire des meubles et objets mobiliers compris dans la location, un état des lieux et une photographie des lieux loués. L'état des lieux et l'inventaire en question sont versés aux débats et font clairement apparaître le caractère meublé du logement de façon à offrir tout le confort nécessaire à une clientèle de passage.

L'ameublement du logement résulte également des photographies insérées dans les guides de 2021 et 2022 de la location saisonnière de la ville de [Localité 7], dressé par l'office du tourisme, des photographies publiées sur le plateforme Airbnb, de la déclaration de location 2020 remis à la mairie de la commune proposant un inventaire des meubles et du courriel de l'appelante, adressé le 17 novembre 2021, dans lequel elle demande que le four soit en état.

Enfin, les intimés justifient avoir effectué une déclaration de meublé auprès de la mairie de [Localité 7], être inscrits au répertoire Sirène pour une telle activité sous le numéro de SIRET n° 484564 547 00012, être déclarés auprès des services fiscaux, réglés des impôts sur les sommes perçues et être inscrits sur la plateforme Airbnb.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les contestations soulevées par l'appelante ne sont pas de nature à remettre en cause l'existence même du trouble manifestement illicite résultant de son occupation sans droit ni titre du logement appartenant aux intimés à compter de la date de déchéance du dernier contrat de location saisonnière.

Dans ces conditions, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de l'appelante du logement appartenant aux intimés.

Sur la provision à valoir sur l'indemnité d'occupation

Par application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

C'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.

En l'espèce, le fait pour l'appelante d'avoir occupé sans droit ni titre le logement du 1er février au 18 octobre 2022 rend non sérieusement contestable son obligation de régler une indemnité d'occupation.

Si l'appelante a loué le bien moyennant la somme de 750 euros par mois, soit environ 25 euros par nuit, les intimés justifient avoir réservé leur bien du 12 au 16 février 2022 à raison de 50 euros par nuit, du 26 mars au 4 avril 2022 à raison de 45 euros par nuit, du 4 au 13 juillet 2022 à raison de 46 euros par nuit, du 18 au 22 juillet 2022 à raison de 46 euros par nuit et du 6 août au 3 septembre 2022 à raison de 74 euros par nuit.

Ils justifient également avoir réglé des factures d'électricité concernant le logement, à savoir 456,57 euros le 21 janvier 2022, 560,30 euros le 21 mars 2022 et 395,38 euros le 22 mai 2022, soit une moyenne de 401 euros par mois et 13 euros par jour entre janvier et juin 2022.

En considération de ces éléments, le montant non sérieusement contestable de l'indemnité d'occupation journalière due par l'appelante doit être fixé à la somme de 70 euros.

L'ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce qu'elle a retenu une indemnité d'occupation journalière, à titre provisionnel, de 85 euros.

Sur la recevabilité de la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence et dans les cas ou l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Ils ne peuvent donc accorder qu'une provision au créancier, à l'exclusion du prononcé de toute condamnation définitive.

En l'espèce, à la lecture de l'ordonnance entreprise, il apparaît que les intimés ont sollicité des dommages et intérêts pour résistance abusive à titre définitif, et non provisionnel.

Si le premier juge a fait droit à leur demande de dommages et intérêts en leur allouant la somme de 800 euros de ce chef, il convient de relever qu'il ne s'agit pas d'une condamnation faite à titre provisionnel.

A hauteur d'appel, les intimés, en sollicitant la confirmation de l'ordonnance entreprise de ce chef, réitère leur demande.

C'est donc à juste titre que l'appelante indique que la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, telle qu'elle est formulée par les intimés, excède les pouvoirs du juge des référés.

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'appelante à verser aux intimés la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts à valoir sur le préjudice subi par les intimés du fait de la résistance abusive de l'appelante.

Il n'y a pas lieu à référé sur la demande des époux [X] formée de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle de production des quittances de loyers

Par application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation de faire qui fonde sa demande tendant à obtenir des documents.

En l'espèce, l'obligation des intimés de remettre à l'appelante des quittances d'indemnités d'occupation à compter du mois de février 2022 se heurte à une contestation sérieuse dès lors que Mme [G] épouse [J] ne démontre pas avoir réglé la moindre somme au cours de la période considérée.

Ele sera donc déboutée de sa demande formée de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui a causé à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L'article 559 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés. Néanmoins, l'exercice d'un recours, de même que la défense à une tel recours, constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette en dommages et intérêts, sur le fondement de ces textes, que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, le fait même pour l'appelante de se prévaloir d'une requalification de la relation contractuelle en un bail soumis au statut des baux commerciaux, sans aucun moyen sérieux, ne caractèrise pas un comportement abusif dans son droit d'interjeter appel d'une ordonnance réputée contradictoire du fait de sa non comparution et/ou non représentation.

De plus, l'exécution de l'ordonnance entreprise a permis d'expulser l'appelante des lieux le 18 octobre 2022.

Dans ces conditions, les intimés seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

L'appelante, succombant en appel concernant la demande principale sollicitée par les intimés, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens, en ce compris le coût de la citation et la signification de l'ordonnance, et à verser aux intimés la somme de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance non compris dans les dépens.

En revanche, le coût de la sommation de payer ne doit pas être incluse dans les dépens mais dans l'article 700 du code de procédure civile, comme ne faisant pas partie des dépens limitativement énumérés par l'article 695 du code de procédure civile, de sorte que l'ordonnance sera infirmée de ce chef.

L'appelante sera tenue aux dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande en outre de la condamner à verser aux intimés la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens.

En tant que partie perdante, l'appelante sera déboutée de sa demande formulée sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- fixé à la somme de 85 euros l'indemnité journalière d'occupation due, à titre provisionnel, par Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J], à compter du 1er février 2022 ;

- condamné Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts ;

- inclu dans les dépens le coût de la sommation de payer ;

La confirme en toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Fixe à la somme de 70 euros l'indemnité journalière d'occupation due, à titre provisionnel, par Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J], à compter du 1er février 2022, et ce, jusqu'à libération effective des lieux ;

Condamne Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser ladite somme à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive sollicitée M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] ;

Déboute Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] de sa demande de voir enjoindre M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] à lui remettre les quittances de loyers à compter du mois de février 2022 ;

Déboute M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] de leur demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

Condamne Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] à verser à M. [N] [X] et Mme [H] [V] épouse [X] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;

Déboute Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] de sa demande formulée sur le même fondement ;

Dit que les dépens de première instance ne peuvent comprendre le coût de la sommation de payer ;

Condamne Mme [L] [G] épouse [J] se faisant appeler Mme [B] [G] épouse [J] aux dépens de la procédure d'appel.

La greffière, La présidente,