Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 2-4, 18 octobre 2023, n° 21/11663
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 18 OCTOBRE 2023
N° 2023/148
Rôle N° RG 21/11663 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH45X
[R] [Y] [H] [N]
C/
[V] [O] [J] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Christian DUREUIL
Me Benjamin AYOUN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge aux affaires familiales de MARSEILLE en date du 18 Mars 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/01611.
APPELANT
Monsieur [R] [Y] [H] [N]
né le 13 Mai 1964 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Christian DUREUIL de la SCP DUREUIL - GUETCHIDJIAN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me GUETCHIDJIAN.
INTIMEE
Madame [V] [O] [J] [Z]
née le 05 Décembre 1963 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Septembre 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Mme Pascale BOYER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Octobre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Octobre 2023,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
Selon acte notarié du 26 février 2004, Madame [Z] et Monsieur [N], concubins, ont acquis ensemble un bien immobilier en cours de construction sis à [Localité 6], moyennant un prix de 395.000euros payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux. L'acte mentionne que les acquéreurs sont propriétaires à raison de 29,5 % pour Monsieur [N] et de 70,5 % pour Madame [Z].
A la suite de la séparation du couple en 2008, aucun accord n'a été trouvé concernant le sort du bien indivis.
Le 10 janvier 2019, Madame [Z] a fait assigner Madame [Z] aux fins de partage judiciaire de l'immeuble.
Selon jugement du 18 mars 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Marseille a :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision entre les parties ,
- fixé la valeur du bien indivis à 560.000 euros,
- débouté Madame [Z] de sa demande d'attribution préférentielle,
- débouté Monsieur [N] de sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation,
- débouté Madame [Z] de sa demande de remboursement de frais ,
- condamné chaque partie à supporter la moitié des dépens,
- débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de procédure,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Le 29 juillet 2021, Monsieur [N] a formé appel des chefs du jugement à l'exception de ceux par lesquels ont été rejetées les demandes d'attribution préférentielle de Madame [Z] et de remboursement de frais exposés pour le compte de l'indivision.
Monsieur [N] a communiqué ses premières conclusions le 28 octobre 2021.
Il sollicite de la cour qu'elle :
- confirme le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et partage
- y ajoute, la désignation d'un notaire chargé de ces opérations et en disant qu'il devra établir un projet de partage dans les six mois et en rappelant les modalité de représentation d'un indivisaire défaillant,
- infirme le jugement critiqué en ce qu'il a fixé la valeur du bien indivis à 560.000 euros,
- y ajoutant la fixe à 574.213 euros .
- infirme du chef du jugement concernant l'indemnité d'occupation.
Il sollicite que Madame [Z] soit condamnée de ce chef à lui verser la somme de 1800 euros par mois à compter du mois d'août 2018,
- y ajoutant condamne Madame [Z] à lui verser la somme de 1800 euros au titre de l'indemnité d'occupation à compter du mois d'août 2018
- la condamne à payer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance
- la condamne à payer la somme de 2000 euros au titre de ces frais en appel et sa condamnation aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ses dernières conclusions du 23 février 2022, il :
- maintient ses prétentions,
- actualise la valeur du bien qu'il entend voir fixée à 580.000 euros
- demande que le jugement soit confirmé en ce qu'il a débouté Madame [Z] de ses demandes de remboursement de frais et de charges et qu'elle soit déboutée de toutes ses prétentions.
Madame [Z] a notifié ses premières conclusions le 23 novembre 2021.
Elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de partage judiciaire et débouté Monsieur [N] de toutes ses demandes.
- déclarer irrecevable ou à tout le moins au caractère infondé de la demande d'indemnité d'occupation,
- réformer le jugement du chef concernant le rejet de sa demande de remboursement de frais de notaire et de charges courantes,
- condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 6500 euros représentant la moitié des frais de notaire exposés et celle de 1779,25 euros au titre des frais avancés par elle,.
- le condamner à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.
Par ses dernières écritures du 25 avril 2023, elle maintient ses prétentions.
La présidente a sollicité par courriel du 16 décembre 2022, les observations des parties sur la validité de l'appel relativement à son absence d'objet.
Par note du 30 décembre 2022, le conseil de l'appelant a indiqué qu'il avait joint à sa déclaration d'appel une annexe visée dans le bordereau joint énumérant les chefs de jugement critiqués repris dans la déclaration d'appel.
Le 6 février 2023, les parties ont été avisées que la clôture serait prononcée le 28 juin 2023 et l'affaire fixée à plaider à l'audience du 20 septembre 2023.
Motifs de la décision
Sur la régularité de la saisine de la cour
Aux termes des articles 562 et 901 du code de procédure civile la cour d'appel est saisie par la déclaration d'appel des chefs de jugement qui y sont critiqués et qui doivent être énumérés dans l'acte d'appel à peine de nullité. Cette obligation d'énumération n'est pas applicable lorsque l'appelant sollicite l'annulation du jugement ou s'il se prévaut de l'indivisibilité du litige. La déclaration d'appel régulière opère effet dévolutif à la cour des chefs critiqués.
En l'espèce, l'appelant a mentionné dans la déclaration d'appel tous les chefs du jugement qu'il entendait déférer à la cour après avoir mentionné qu'il formait appel de la décision critiquée précisément désignée.
En outre, par ses premières conclusions, il a listé ses prétentions en précisant qu'il sollicitait la réformation du jugement sur les chefs critiqués, l'objet du litige soumis à la cour étant déterminé par les prétentions des parties exprimées dans les conclusions régulièrement communiquées.
Il convient donc de juger que la cour est régulièrement saisie des chefs de jugement critiqués.
Le seul chef de jugement non critiqué par les parties est celui portant rejet de la demande d'attribution préférentielle de Madame [Z] qui est devenu définitif.
Sur la question de la recevabilité de l'action en partage
Monsieur [N] a formé appel principal sur ce chef de la décision critiquée. Cependant, dans ses conclusions, il ne sollicite pas la réformation de cette décision et il ne présente aucun moyen d'infirmation ou de réformation.
Il convient, en conséquence, de confirmer la décision sur ce point.
Sur l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage
Le juge aux affaires familiales a ordonné un partage judiciaire du bien indivis.
Ce chef de jugement a été critiqué par Monsieur [N] dans l'acte d'appel. Cependant, dans ses conclusions, il sollicite la confirmation du jugement sur ce point et sollicite uniquement que la cour ajoute la désignation d'un notaire et qu'elle précise le délai qui lui est imparti pour établir le projet d'acte de partage et qu'elle rappelle la possibilité de pallier l'absence d'un indivisaire.
Il convient donc de confirmer la décision de première instance concernant l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre Madame [Z] et Monsieur [N].
En ce qui concerne les ajouts sollicités par Monsieur [N], la désignation d'un notaire n'est pas obligatoire dans le cadre d'un partage judiciaire qui peut être prononcé par la juridiction.
En l'espèce, selon la description du bien figurant dans l'acte d'achat et dans l'estimation du 15 novembre 2021, ce dernier n'est pas partageable en nature. La proposition de rachat de Madame [Z] a été refusée. La décision de rejet de la demande d'attribution préférentielle à Madame [Z] est devenue définitive et aucune des parties ne sollicite la vente forcée du bien ou la constitution de lots alors qu'il s'agit des seules modalités pour permettre le partage effectif du bien immobilier indivis.
La désignation d'un notaire commis s'agissant d'un partage simple n'est pas nécessaire à ce stade.
En tout état de cause, il convient de rappeler que les parties sont libres une fois les questions posées à la cour tranchées, de recourir à un partage amiable selon les modalités qu'ils fixeront.
Cette demande sera donc rejetée.
Sur la question de la valeur du bien indivis
Dans le cadre du partage judiciaire, il appartient au juge, en présence d'un désaccord des parties sur ce point, de fixer cette valeur afin de pouvoir établir la part de chaque indivisaire et celle qui doit lui être attribuée en fonction des créances qu'il peut faire valoir à l'encontre de l'indivision ou des dettes envers celle-ci.
L'article 829 du code civil commande qu'elle soit fixée à la date la plus proche du partage.
Monsieur [N] a formé appel sur ce point. Il soutient que le juge aux affaires familiales n'a pas tenu compte de l'évolution à la hausse des prix du marché de l'immobilier. Il se fonde sur une étude de marché et deux estimations plus récentes en précisant que son épouse n'a pas permis une visite du bien.
Madame [Z] n'a pas formé appel incident sur ce point. Elle soutient que la fixation de cette valeur aura peu d'incidence dans le partage puisqu'elle n'est pas en mesure de racheter la part de son co-indivisaire. Elle précise que, malgré un accord pour vendre, Monsieur [N] n'a pas signé le mandat à cette fin.
La dévolution ne permet donc à la cour que de confirmer la valeur fixée ou de fixer une valeur supérieure.
Il ressort de la décision de première instance que Monsieur [N] n'avait pas formulé devant lui une demande comportant un montant précis. Le juge a tenu compte de l'évolution du prix de l'immobilier en retenant, ainsi que le réclamait Monsieur [N], une valeur plus élevée que la plus haute de celle résultant de l'estimation présentée par Madame [Z].
Devant la cour, Monsieur [N] produit des annonces immobilières de 2020, pour des maisons sises à [Localité 3] d'une superficie comparable ou plus étendue, mentionnant des prix de 698.000 à 834.000 euros, une étude de valeur sans visite du bien du 21 décembre 2020 établissant la valeur du bien à 574.213 euros et des annonces locatives sur le site "Le Bon Coin".
Madame [Z] produit une estimation de valeur du 9 novembre 2021 par l'agence HOMEINVEST entre 550.000 et 600.000 euros. En outre, l'agence CLERVIMMO LA SUITE a établi une valeur entre 560.000 et 600.000 euros le 15 novembre 2021. Il était estimé le bien en 2018 entre 530.000 et 550.000 euros.
Ces éléments permettent de fixer la valeur du bien à la somme de 560.000 euros ainsi que l'a estimé le premier juge.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
Sur la demande d'indemnité d'occupation
L'article 815-9 du code civil prévoit que les indivisaires peuvent user de la chose indivise dans le respect du droit des autres indivisaires et qu'un usage exclusif de la chose induit le paiement d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision. Il appartient à celui qui se prévaut d'une occupation privative par l'autre indivisaire de prouver qu'il est empêché d'occuper le bien.
Monsieur [N] demande la réformation de la décision du tribunal qui a rejeté la demande de ce chef. Il réplique que cette prétention n'est pas nouvelle car il a sollicité le paiement d'une telle indemnité dans ses dernières conclusions de première instance. Il réplique que Madame [Z] n'a pas contesté son occupation exclusive du bien depuis le mois d'août 2018. Il conteste avoir un double des clés. Il admet s'être rendu dans les lieux pour récupérer sa moto mais pendant l'été 2018.
L'intimée soulève l'irrecevabilité de cette prétention nouvelle concernant le principe de fixation d'une indemnité d'occupation, non sollicitée en première instance. Elle soutient que Monsieur [N] a conservé un double des clés, et elle en déduit que la jouissance privative n'est pas établie.
Subsidiairement, elle fait état d'une estimation de la valeur locative entre 1500 et 1700 euros et rappelle la nécessité d'appliquer un abattement de 20 % pour précarité et de tenir compte de sa part dans le bien indivis.
Il ressort de l'exposé du litige du jugement critiqué que Monsieur [N], dans ses dernières conclusions admises aux débats après révocation de l'ordonnance de clôture, a sollicité le paiement, par Madame [Z] au profit de l'indivision, d'une indemnité d'occupation de 1800 euros. Cette prétention, reprise dans ses conclusions d'appelant, contient nécessairement la demande de fixation du principe de l'obligation à payer cette indemnité. Elle n'est donc pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile et sera déclarée recevable.
Le juge de première instance a justifié sa décision de rejet de cette prétention par l'absence de demande portant sur le principe de la fixation d'une telle indemnité. Or, il a été jugé qu'elle est contenue dans la demande de condamnation au paiement.
Madame [Z] ne conteste pas demeurer seule dans le bien indivis depuis le mois d'août 2018. Compte tenu de la description du bien et de la séparation des parties, l'occupation par Madame [Z] ne permet pas une occupation par Monsieur [N]. Les attestations produites par Madame [Z] ne contiennent pas de précision sur la date de la venue de Monsieur [N] pour récupérer une moto. En outre, il n'est attesté par aucun des témoins qu'il auraient utilisé des clés qu'il détenait. Le SMS adressé par Madame [Z] à Monsieur [N] le 18 novembre 2021 afin de lui réclamer le jeu de clés qu'il aurait conservé ne constitue pas une preuve de ce qu'il détient ces clés en application du principe selon lequel une partie ne peut se constituer une preuve à elle-même.
Il convient en conséquence de réformer le jugement critiqué et de juger que Madame [Z] est redevable d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision.
Madame [Z] indique une date de séparation du couple au mois d'août 2018. Monsieur [N] confirme cette date de séparation dans ses dernières conclusions en page 2. Il convient donc de retenir ce mois comme date du point de départ de l'indemnité due.
En ce qui concerne son montant, Il s'agit d'une maison de type 5 contenant 4 chambres, une pièce à vivre et une piscine dans un quartier prisé sur 680 mètres carrés de terrain. Madame [Z] produit des estimations émanant d'agents immobiliers de 2021 fixant la valeur locative entre 1300 et 1700 euros. Les annonces publiées sur le site "LE BON COIN" de mise en location contenant des loyers de 2165 euros à 2700 euros ne peuvent être retenues comme probantes car il n'est pas justifié qu'elles proviennent de professionnels de l'immobilier.
Il convient donc de retenir la valeur haute de 1700 euros et d'y appliquer un abattement de 20 % compte tenu de la précarité de l'occupation car le règlement des créances envers l'indivision va nécessiter la vente de l'immeuble. Elle sera donc fixée à la somme de 1500 euros par mois cette indemnité à compter du mois d'août 2018.
Sur la demande de l'intimée de remboursement des frais de notaires et de charges
Il appartient à chaque indivisaire de participer aux dépenses indivises à proportion de ses droits dans le bien indivis.
Il ressort de l'article 815-8 du code civil que l'indivisaire qui effectue des dépenses pour le compte de l'indivision doit en tenir un compte. Il lui appartient de prouver ces dépenses.
En outre l'article 815-13 du même code prévoit que l'indivisaire qui a exposé des dépenses de conservation de l'immeuble indivis peut en obtenir une indemnité.
Madame [Z] sollicite la réformation du jugement qui l'a débouté de ses demandes sur ces points. Elle soutient qu'elle a réglé de ses deniers les frais d'établissement de l'acte d'achat du bien provenant de la vente d'un bien lui appartenant. Elle ajoute que, depuis la séparation, elle a exposé seule la taxe d'habitation 2018 ainsi que les dépenses de consommation et d'abonnement relatives à l'électricité, à l'eau et au gaz alors qu'il s'agit de dépenses communes ou indivises.
Monsieur [N] réplique que la provenance de la somme de 13000 euros versée au notaire lors de l'achat n'est pas établie et qu'il s'agit d'économies communes. Il ajoute que les dépenses de consommation ne constituent pas des dépenses de conservation de l'immeuble indivis et doivent être prises en charge par celui qui occupe le bien.
Il ressort du décompte émanant de l'étude notariale que les frais notariés liés à l'achat du bien indivis ont été réglés le 19 juillet 2004 avec l'intitulé "VIRE MONTANT FRAIS DIVERS ACCORD CLIENTE". Cette seule mention ne permet pas d'établir que cette somme provient du seul patrimoine de Madame [Z]. La décision de première instance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejetée la demande de ce chef.
En ce qui concerne la taxe d'habitation, il s'agit d'une dépense de conservation de l'immeuble à la charge de l'indivision afférente en outre en partie à une période de vie commune. Il convient donc de réformer la décision de première instance et, statuant à nouveau, d'admettre une créance de Madame [Z] envers l'indivision du montant de la taxe d'habitation réglée en 2018 de 1389 euros.
En ce qui concerne les dépenses de consommation d'énergie et d'eau , elles sont afférentes en partie à l'occupation commune des concubins et en partie à l'occupation par Madame [Z] seule. Les concubins ne disposent pas du droit d'obtenir le remboursement des dépenses de la vie courante exposées par chacun au cours de leur vie commune. En ce qui concerne les dépenses postérieures à la séparation du couple, elles incombent à la personne qui en a profité, soit l'occupante du bien indivis. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision du jugement de première instance sur ce point.
Sur les demandes au titre des frais irrépétibles et aux dépens de la procédure de première instance
Chaque partie ayant succombé en partie, la décision du premier juge de mettre à la charge de chacun la moitié des dépens était justifiée et sera confirmée.
Pour ce même motif il n'était pas inéquitable de laisser supporter à chaque partie les frais de procédure non compris dans les dépens. La décision sera également confirmée sur ce point.
Sur les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure et aux dépens relatifs à la procédure d'appel
Chaque partie succombant en partie, elles seront tenues des dépens d'appel pour moitié chacune.
Les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- débouté Monsieur [N] de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation,
- rejeté la demande de Madame [Z] de reconnaître une créance à son profit envers l'indivision du montant de la taxe d'habitation réglée ;
Statuant à nouveau,
Déclare recevable la demande d'indemnité d'occupation de Monsieur [N] ;
Fixe l'indemnité d'occupation due par [V] [Z] au profit de l'indivision existant sur le bien indivis à la somme de 1500 euros par mois à compter du mois d'août 2008 jusqu'à la libération des lieux par l'occupante ou jusqu'au jour du partage :
Fixe à la somme de 1389 euros la créance de Madame [Z] envers l'indivision au titre de la taxe d'habitation payée par elle au titre de l'année 2018 ;
Confirme pour le surplus le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de désignation d'un notaire ;
Dit que chaque partie supportera la charge de la moitié des dépens de la procédure d'appel ;
Rejette les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente et par Madame Fabienne NIETO, greffière auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La présidente
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 18 OCTOBRE 2023
N° 2023/148
Rôle N° RG 21/11663 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH45X
[R] [Y] [H] [N]
C/
[V] [O] [J] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Christian DUREUIL
Me Benjamin AYOUN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge aux affaires familiales de MARSEILLE en date du 18 Mars 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/01611.
APPELANT
Monsieur [R] [Y] [H] [N]
né le 13 Mai 1964 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Christian DUREUIL de la SCP DUREUIL - GUETCHIDJIAN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me GUETCHIDJIAN.
INTIMEE
Madame [V] [O] [J] [Z]
née le 05 Décembre 1963 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Septembre 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Mme Pascale BOYER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Octobre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Octobre 2023,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
Selon acte notarié du 26 février 2004, Madame [Z] et Monsieur [N], concubins, ont acquis ensemble un bien immobilier en cours de construction sis à [Localité 6], moyennant un prix de 395.000euros payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux. L'acte mentionne que les acquéreurs sont propriétaires à raison de 29,5 % pour Monsieur [N] et de 70,5 % pour Madame [Z].
A la suite de la séparation du couple en 2008, aucun accord n'a été trouvé concernant le sort du bien indivis.
Le 10 janvier 2019, Madame [Z] a fait assigner Madame [Z] aux fins de partage judiciaire de l'immeuble.
Selon jugement du 18 mars 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Marseille a :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision entre les parties ,
- fixé la valeur du bien indivis à 560.000 euros,
- débouté Madame [Z] de sa demande d'attribution préférentielle,
- débouté Monsieur [N] de sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation,
- débouté Madame [Z] de sa demande de remboursement de frais ,
- condamné chaque partie à supporter la moitié des dépens,
- débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de procédure,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Le 29 juillet 2021, Monsieur [N] a formé appel des chefs du jugement à l'exception de ceux par lesquels ont été rejetées les demandes d'attribution préférentielle de Madame [Z] et de remboursement de frais exposés pour le compte de l'indivision.
Monsieur [N] a communiqué ses premières conclusions le 28 octobre 2021.
Il sollicite de la cour qu'elle :
- confirme le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et partage
- y ajoute, la désignation d'un notaire chargé de ces opérations et en disant qu'il devra établir un projet de partage dans les six mois et en rappelant les modalité de représentation d'un indivisaire défaillant,
- infirme le jugement critiqué en ce qu'il a fixé la valeur du bien indivis à 560.000 euros,
- y ajoutant la fixe à 574.213 euros .
- infirme du chef du jugement concernant l'indemnité d'occupation.
Il sollicite que Madame [Z] soit condamnée de ce chef à lui verser la somme de 1800 euros par mois à compter du mois d'août 2018,
- y ajoutant condamne Madame [Z] à lui verser la somme de 1800 euros au titre de l'indemnité d'occupation à compter du mois d'août 2018
- la condamne à payer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance
- la condamne à payer la somme de 2000 euros au titre de ces frais en appel et sa condamnation aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ses dernières conclusions du 23 février 2022, il :
- maintient ses prétentions,
- actualise la valeur du bien qu'il entend voir fixée à 580.000 euros
- demande que le jugement soit confirmé en ce qu'il a débouté Madame [Z] de ses demandes de remboursement de frais et de charges et qu'elle soit déboutée de toutes ses prétentions.
Madame [Z] a notifié ses premières conclusions le 23 novembre 2021.
Elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de partage judiciaire et débouté Monsieur [N] de toutes ses demandes.
- déclarer irrecevable ou à tout le moins au caractère infondé de la demande d'indemnité d'occupation,
- réformer le jugement du chef concernant le rejet de sa demande de remboursement de frais de notaire et de charges courantes,
- condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 6500 euros représentant la moitié des frais de notaire exposés et celle de 1779,25 euros au titre des frais avancés par elle,.
- le condamner à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.
Par ses dernières écritures du 25 avril 2023, elle maintient ses prétentions.
La présidente a sollicité par courriel du 16 décembre 2022, les observations des parties sur la validité de l'appel relativement à son absence d'objet.
Par note du 30 décembre 2022, le conseil de l'appelant a indiqué qu'il avait joint à sa déclaration d'appel une annexe visée dans le bordereau joint énumérant les chefs de jugement critiqués repris dans la déclaration d'appel.
Le 6 février 2023, les parties ont été avisées que la clôture serait prononcée le 28 juin 2023 et l'affaire fixée à plaider à l'audience du 20 septembre 2023.
Motifs de la décision
Sur la régularité de la saisine de la cour
Aux termes des articles 562 et 901 du code de procédure civile la cour d'appel est saisie par la déclaration d'appel des chefs de jugement qui y sont critiqués et qui doivent être énumérés dans l'acte d'appel à peine de nullité. Cette obligation d'énumération n'est pas applicable lorsque l'appelant sollicite l'annulation du jugement ou s'il se prévaut de l'indivisibilité du litige. La déclaration d'appel régulière opère effet dévolutif à la cour des chefs critiqués.
En l'espèce, l'appelant a mentionné dans la déclaration d'appel tous les chefs du jugement qu'il entendait déférer à la cour après avoir mentionné qu'il formait appel de la décision critiquée précisément désignée.
En outre, par ses premières conclusions, il a listé ses prétentions en précisant qu'il sollicitait la réformation du jugement sur les chefs critiqués, l'objet du litige soumis à la cour étant déterminé par les prétentions des parties exprimées dans les conclusions régulièrement communiquées.
Il convient donc de juger que la cour est régulièrement saisie des chefs de jugement critiqués.
Le seul chef de jugement non critiqué par les parties est celui portant rejet de la demande d'attribution préférentielle de Madame [Z] qui est devenu définitif.
Sur la question de la recevabilité de l'action en partage
Monsieur [N] a formé appel principal sur ce chef de la décision critiquée. Cependant, dans ses conclusions, il ne sollicite pas la réformation de cette décision et il ne présente aucun moyen d'infirmation ou de réformation.
Il convient, en conséquence, de confirmer la décision sur ce point.
Sur l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage
Le juge aux affaires familiales a ordonné un partage judiciaire du bien indivis.
Ce chef de jugement a été critiqué par Monsieur [N] dans l'acte d'appel. Cependant, dans ses conclusions, il sollicite la confirmation du jugement sur ce point et sollicite uniquement que la cour ajoute la désignation d'un notaire et qu'elle précise le délai qui lui est imparti pour établir le projet d'acte de partage et qu'elle rappelle la possibilité de pallier l'absence d'un indivisaire.
Il convient donc de confirmer la décision de première instance concernant l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre Madame [Z] et Monsieur [N].
En ce qui concerne les ajouts sollicités par Monsieur [N], la désignation d'un notaire n'est pas obligatoire dans le cadre d'un partage judiciaire qui peut être prononcé par la juridiction.
En l'espèce, selon la description du bien figurant dans l'acte d'achat et dans l'estimation du 15 novembre 2021, ce dernier n'est pas partageable en nature. La proposition de rachat de Madame [Z] a été refusée. La décision de rejet de la demande d'attribution préférentielle à Madame [Z] est devenue définitive et aucune des parties ne sollicite la vente forcée du bien ou la constitution de lots alors qu'il s'agit des seules modalités pour permettre le partage effectif du bien immobilier indivis.
La désignation d'un notaire commis s'agissant d'un partage simple n'est pas nécessaire à ce stade.
En tout état de cause, il convient de rappeler que les parties sont libres une fois les questions posées à la cour tranchées, de recourir à un partage amiable selon les modalités qu'ils fixeront.
Cette demande sera donc rejetée.
Sur la question de la valeur du bien indivis
Dans le cadre du partage judiciaire, il appartient au juge, en présence d'un désaccord des parties sur ce point, de fixer cette valeur afin de pouvoir établir la part de chaque indivisaire et celle qui doit lui être attribuée en fonction des créances qu'il peut faire valoir à l'encontre de l'indivision ou des dettes envers celle-ci.
L'article 829 du code civil commande qu'elle soit fixée à la date la plus proche du partage.
Monsieur [N] a formé appel sur ce point. Il soutient que le juge aux affaires familiales n'a pas tenu compte de l'évolution à la hausse des prix du marché de l'immobilier. Il se fonde sur une étude de marché et deux estimations plus récentes en précisant que son épouse n'a pas permis une visite du bien.
Madame [Z] n'a pas formé appel incident sur ce point. Elle soutient que la fixation de cette valeur aura peu d'incidence dans le partage puisqu'elle n'est pas en mesure de racheter la part de son co-indivisaire. Elle précise que, malgré un accord pour vendre, Monsieur [N] n'a pas signé le mandat à cette fin.
La dévolution ne permet donc à la cour que de confirmer la valeur fixée ou de fixer une valeur supérieure.
Il ressort de la décision de première instance que Monsieur [N] n'avait pas formulé devant lui une demande comportant un montant précis. Le juge a tenu compte de l'évolution du prix de l'immobilier en retenant, ainsi que le réclamait Monsieur [N], une valeur plus élevée que la plus haute de celle résultant de l'estimation présentée par Madame [Z].
Devant la cour, Monsieur [N] produit des annonces immobilières de 2020, pour des maisons sises à [Localité 3] d'une superficie comparable ou plus étendue, mentionnant des prix de 698.000 à 834.000 euros, une étude de valeur sans visite du bien du 21 décembre 2020 établissant la valeur du bien à 574.213 euros et des annonces locatives sur le site "Le Bon Coin".
Madame [Z] produit une estimation de valeur du 9 novembre 2021 par l'agence HOMEINVEST entre 550.000 et 600.000 euros. En outre, l'agence CLERVIMMO LA SUITE a établi une valeur entre 560.000 et 600.000 euros le 15 novembre 2021. Il était estimé le bien en 2018 entre 530.000 et 550.000 euros.
Ces éléments permettent de fixer la valeur du bien à la somme de 560.000 euros ainsi que l'a estimé le premier juge.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
Sur la demande d'indemnité d'occupation
L'article 815-9 du code civil prévoit que les indivisaires peuvent user de la chose indivise dans le respect du droit des autres indivisaires et qu'un usage exclusif de la chose induit le paiement d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision. Il appartient à celui qui se prévaut d'une occupation privative par l'autre indivisaire de prouver qu'il est empêché d'occuper le bien.
Monsieur [N] demande la réformation de la décision du tribunal qui a rejeté la demande de ce chef. Il réplique que cette prétention n'est pas nouvelle car il a sollicité le paiement d'une telle indemnité dans ses dernières conclusions de première instance. Il réplique que Madame [Z] n'a pas contesté son occupation exclusive du bien depuis le mois d'août 2018. Il conteste avoir un double des clés. Il admet s'être rendu dans les lieux pour récupérer sa moto mais pendant l'été 2018.
L'intimée soulève l'irrecevabilité de cette prétention nouvelle concernant le principe de fixation d'une indemnité d'occupation, non sollicitée en première instance. Elle soutient que Monsieur [N] a conservé un double des clés, et elle en déduit que la jouissance privative n'est pas établie.
Subsidiairement, elle fait état d'une estimation de la valeur locative entre 1500 et 1700 euros et rappelle la nécessité d'appliquer un abattement de 20 % pour précarité et de tenir compte de sa part dans le bien indivis.
Il ressort de l'exposé du litige du jugement critiqué que Monsieur [N], dans ses dernières conclusions admises aux débats après révocation de l'ordonnance de clôture, a sollicité le paiement, par Madame [Z] au profit de l'indivision, d'une indemnité d'occupation de 1800 euros. Cette prétention, reprise dans ses conclusions d'appelant, contient nécessairement la demande de fixation du principe de l'obligation à payer cette indemnité. Elle n'est donc pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile et sera déclarée recevable.
Le juge de première instance a justifié sa décision de rejet de cette prétention par l'absence de demande portant sur le principe de la fixation d'une telle indemnité. Or, il a été jugé qu'elle est contenue dans la demande de condamnation au paiement.
Madame [Z] ne conteste pas demeurer seule dans le bien indivis depuis le mois d'août 2018. Compte tenu de la description du bien et de la séparation des parties, l'occupation par Madame [Z] ne permet pas une occupation par Monsieur [N]. Les attestations produites par Madame [Z] ne contiennent pas de précision sur la date de la venue de Monsieur [N] pour récupérer une moto. En outre, il n'est attesté par aucun des témoins qu'il auraient utilisé des clés qu'il détenait. Le SMS adressé par Madame [Z] à Monsieur [N] le 18 novembre 2021 afin de lui réclamer le jeu de clés qu'il aurait conservé ne constitue pas une preuve de ce qu'il détient ces clés en application du principe selon lequel une partie ne peut se constituer une preuve à elle-même.
Il convient en conséquence de réformer le jugement critiqué et de juger que Madame [Z] est redevable d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision.
Madame [Z] indique une date de séparation du couple au mois d'août 2018. Monsieur [N] confirme cette date de séparation dans ses dernières conclusions en page 2. Il convient donc de retenir ce mois comme date du point de départ de l'indemnité due.
En ce qui concerne son montant, Il s'agit d'une maison de type 5 contenant 4 chambres, une pièce à vivre et une piscine dans un quartier prisé sur 680 mètres carrés de terrain. Madame [Z] produit des estimations émanant d'agents immobiliers de 2021 fixant la valeur locative entre 1300 et 1700 euros. Les annonces publiées sur le site "LE BON COIN" de mise en location contenant des loyers de 2165 euros à 2700 euros ne peuvent être retenues comme probantes car il n'est pas justifié qu'elles proviennent de professionnels de l'immobilier.
Il convient donc de retenir la valeur haute de 1700 euros et d'y appliquer un abattement de 20 % compte tenu de la précarité de l'occupation car le règlement des créances envers l'indivision va nécessiter la vente de l'immeuble. Elle sera donc fixée à la somme de 1500 euros par mois cette indemnité à compter du mois d'août 2018.
Sur la demande de l'intimée de remboursement des frais de notaires et de charges
Il appartient à chaque indivisaire de participer aux dépenses indivises à proportion de ses droits dans le bien indivis.
Il ressort de l'article 815-8 du code civil que l'indivisaire qui effectue des dépenses pour le compte de l'indivision doit en tenir un compte. Il lui appartient de prouver ces dépenses.
En outre l'article 815-13 du même code prévoit que l'indivisaire qui a exposé des dépenses de conservation de l'immeuble indivis peut en obtenir une indemnité.
Madame [Z] sollicite la réformation du jugement qui l'a débouté de ses demandes sur ces points. Elle soutient qu'elle a réglé de ses deniers les frais d'établissement de l'acte d'achat du bien provenant de la vente d'un bien lui appartenant. Elle ajoute que, depuis la séparation, elle a exposé seule la taxe d'habitation 2018 ainsi que les dépenses de consommation et d'abonnement relatives à l'électricité, à l'eau et au gaz alors qu'il s'agit de dépenses communes ou indivises.
Monsieur [N] réplique que la provenance de la somme de 13000 euros versée au notaire lors de l'achat n'est pas établie et qu'il s'agit d'économies communes. Il ajoute que les dépenses de consommation ne constituent pas des dépenses de conservation de l'immeuble indivis et doivent être prises en charge par celui qui occupe le bien.
Il ressort du décompte émanant de l'étude notariale que les frais notariés liés à l'achat du bien indivis ont été réglés le 19 juillet 2004 avec l'intitulé "VIRE MONTANT FRAIS DIVERS ACCORD CLIENTE". Cette seule mention ne permet pas d'établir que cette somme provient du seul patrimoine de Madame [Z]. La décision de première instance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejetée la demande de ce chef.
En ce qui concerne la taxe d'habitation, il s'agit d'une dépense de conservation de l'immeuble à la charge de l'indivision afférente en outre en partie à une période de vie commune. Il convient donc de réformer la décision de première instance et, statuant à nouveau, d'admettre une créance de Madame [Z] envers l'indivision du montant de la taxe d'habitation réglée en 2018 de 1389 euros.
En ce qui concerne les dépenses de consommation d'énergie et d'eau , elles sont afférentes en partie à l'occupation commune des concubins et en partie à l'occupation par Madame [Z] seule. Les concubins ne disposent pas du droit d'obtenir le remboursement des dépenses de la vie courante exposées par chacun au cours de leur vie commune. En ce qui concerne les dépenses postérieures à la séparation du couple, elles incombent à la personne qui en a profité, soit l'occupante du bien indivis. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision du jugement de première instance sur ce point.
Sur les demandes au titre des frais irrépétibles et aux dépens de la procédure de première instance
Chaque partie ayant succombé en partie, la décision du premier juge de mettre à la charge de chacun la moitié des dépens était justifiée et sera confirmée.
Pour ce même motif il n'était pas inéquitable de laisser supporter à chaque partie les frais de procédure non compris dans les dépens. La décision sera également confirmée sur ce point.
Sur les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure et aux dépens relatifs à la procédure d'appel
Chaque partie succombant en partie, elles seront tenues des dépens d'appel pour moitié chacune.
Les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- débouté Monsieur [N] de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation,
- rejeté la demande de Madame [Z] de reconnaître une créance à son profit envers l'indivision du montant de la taxe d'habitation réglée ;
Statuant à nouveau,
Déclare recevable la demande d'indemnité d'occupation de Monsieur [N] ;
Fixe l'indemnité d'occupation due par [V] [Z] au profit de l'indivision existant sur le bien indivis à la somme de 1500 euros par mois à compter du mois d'août 2008 jusqu'à la libération des lieux par l'occupante ou jusqu'au jour du partage :
Fixe à la somme de 1389 euros la créance de Madame [Z] envers l'indivision au titre de la taxe d'habitation payée par elle au titre de l'année 2018 ;
Confirme pour le surplus le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de désignation d'un notaire ;
Dit que chaque partie supportera la charge de la moitié des dépens de la procédure d'appel ;
Rejette les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente et par Madame Fabienne NIETO, greffière auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La présidente