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Décisions

CA Montpellier, 3e ch. civ., 21 septembre 2023, n° 19/01709

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 19/01709

21 septembre 2023

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/01709 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OB2M

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 février 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 18/01632

APPELANTE :

Madame [N] [V] [Z] [R]

née le 05 Janvier 1966 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 8]

Et actuellement :

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Pascal ADDE de la SCP GRAPPIN - ADDE - SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [L] [G] exerçant sous la dénomination RENOV SERVICES

N°SIREN 477 731 103

de nationalité Française

domicilié [Adresse 5]

[Localité 7]

domicilié professionnellement [Adresse 10]

[Localité 1]

Non représenté - signification délivrée le 15 avril 2019 par procès-verbal de recherches infructueuses

Ordonnance de clôture du 23 Mai 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 juin 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA

en présence de Mme Nadia BELLAKHAL, greffière stagiaire

ARRET :

- rendu par défaut ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant devis des 3 et 12 juillet 2017, Madame [N] [R] a confié à Monsieur [L] [G] exerçant sous la dénomination "Renov Services" des travaux de peinture, maçonnerie et plomberie sur un bien immobilier divisé en deux logements, situés [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 6] (34), pour un montant de 6 800 euros.

Suite à l'abandon des travaux par Monsieur [G] constaté au mois de septembre 2017, et après une mise en demeure infructueuse de poursuivre les travaux sous huitaine et de les terminer pour la fin du mois de novembre 2017, Madame [R] a sollicité la mise en oeuvre d'une expertise amiable auprès de son assureur la compagnie Pacifica.

Le rapport d'expertise contradictoire a été diffusé le 25 janvier 2018.

Par acte d'huissier du 29 mai 2018, Madame [R] a assigné Monsieur [G] devant le tribunal de grande instance de Béziers, au visa des articles 1103 et 1231-1 et suivants du code civil et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, aux fins de le voir condamner à payer diverses sommes au titre des différents préjudices subis.

Le procès-verbal de signification de l'assignation à Monsieur [L] [G] a été transformé en procès-verbal de recherches infructueuses et Monsieur [G] n'a pas constitué avocat.

Par jugement réputé contradictoire du 18 février 2019, le tribunal a :

- débouté Madame [N] [R] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Madame [N] [R] aux dépens de l'instance ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision.

Le 11 mars 2019, Madame [N] [R] a relevé appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions de Madame [N] [R] remises au greffe le 24 février 2023 ;

La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à Monsieur [L] [G] le 15 avril 2019.

Monsieur [L] [G] n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur l'acompte :

Madame [R] soutient avoir réglé à Monsieur [G] un acompte d'un montant total de 3 200 euros TTC, faisant valoir qu'elle en rapporte la preuve par la production aux débats de trois chèques qui auraient été encaissés par Monsieur [G].

Or, force est de constater que seul le chèque émis le 14 juillet 2017 d'un montant de 1 500 euros est à l'ordre de Monsieur [G], le deuxième chèque en date du 10 septembre 2017 d'un montant de 1 000 euros ne mentionnant aucun ordre et le troisième chèque en date du 18 novembre 2017 d'un montant de 700 euros étant libellé à l'ordre de Monsieur [K] [T] et non à l'ordre de Monsieur [G].

Par conséquent, Madame [R] ne justifie en l'espèce que du règlement à Monsieur [G] d'un acompte de 1 500 euros , somme que Monsieur [G] sera condamné à lui rembourser.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les travaux de reprise :

Au préalable, il convient de relever que l'expertise amiable diligentée par le cabinet Polyexpert a bien été effectuée au contradictoire de Monsieur [L] [G], ce dernier ayant été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 novembre 2017 pour participer aux opérations d'expertise, le recommandé étant cependant revenu avec la mention non réclamé, ce qui démontre qu'après avoir abandonné le chantier, Monsieur [G] a volontairement choisi de ne plus se manifester, étant rappelé qu'il n'a comparu ni en première instance ni en appel.

Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, une expertise privée peut constituer l'unique élément de preuve, à condition que l'expertise elle-même ait été contradictoire, ce qui est le cas en l'espèce, Monsieur [G] ayant été régulièrement convoqué aux opérations d'expertise et ayant choisi de ne pas y participer.

Par ailleurs, le tribunal ne pouvait relever que les conclusions expertales étaient rédigées en des termes généraux ne permettant pas de déterminer la nature et la cause des désordres et qu'elles ne seraient pas concordantes avec la nature des travaux mis à la charge de Monsieur [G] alors qu'il résulte du rapport d'expertise, photographies à l'appui :

* s'agissant du n° [Adresse 4] :

Aucun des travaux prévus au devis n'a été réalisé, à l'exception des rails du faux plafond qui ne sont pas installés dans les règles de l'art ;

* s'agissant du n° [Adresse 3] :

- la reprise du sol en hauteur est inesthétique ;

- un désordre généralisé sur la mise en oeuvre de toile de verre et des peintures, dû à la mise en oeuvre qui n'est pas satisfaisante et à la présence d'humidité ;

- la projection de peinture sur les prises électriques ;

- la pose du faux plafond n'a pas été mis en oeuvre dans les règles de l'art, les plaques de BA13 vont se fissurer au fil du temps ;

- une porte ne ferme pas à l'étage ;

- dans la salle de bains, le cumulus est de capacité supérieure à celle prévue au devis et un impact est présent en partie haute ;

- la plomberie n'a pas été réalisée conformément aux règles de l'art, une fuite existe au droit des WC ;

L'expert conclut en conséquence à l'existence de nombreuses malfaçons, de dommages, d'une fuite sur le réseau AEP de la maison et à des inachèvements de travaux.

Il relève également que l'artisan a manqué à son devoir de conseil en ne proposant pas de doubler les murs pour remédier au problème d'humidité.

Par conséquent,le rapport d'expertise amiable décrit bien la nature des désordres, étant relevé qu'il n'est pas démontré qu'une autre entreprise serait intervenue sur le chantier litigieux, l'ensemble des désordres constatés étant donc imputables à Monsieur [G].

Ce dernier engage donc sa responsabilité contractuelle à l'égard de Madame [R].

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la réparation des préjudices :

Sur les travaux de reprise :

Le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 13 564,89 euros TTC, selon deux devis de la SAS C.A Elegance du 14 janvier 2018 (10 176,89 euros + 3 388 euros), outre la somme de 602 euros TTC au titre de deux factures de l'entreprise Cayuela Juan qui est intervenue pour réparer le ballon d'eau chaude.

Monsieur [L] [G] sera donc condamné à payer à Madame [N] [R] la somme de 14 166,89 euros TTC au titre des travaux de reprise.

Sur le préjudice de jouissance et le préjudice locatif :

Madame [R] expose que depuis le démarrage des travaux, les deux logements ne sont pas occupables et sont inlouables.

Si l'appelante ne justifie pas, notamment par la production d'une attestation d'une agence immobilière, de la valeur locative de ces deux logements, les évaluations dont elle fait état apparaissent cependant concordantes avec la description des biens telle qu'elle figure dans le rapport du cabinet Polyexpert.

Par conséquent, Monsieur [G] sera condamné à payer à Madame [N] [R] :

- sur la base d'une valeur locative de 600 euros mensuels, la somme de 9 600 euros (600 euros x 16 mois) au titre du préjudice de jouissance relatif au logement n° 25 ;

- sur la base d'une valeur locative de 400 euros mensuels, la somme de 6 400 euros (400 euros x 16 mois) au titre du préjudice locatif relatif au logement n° [Adresse 3] ;

Sur le préjudice moral :

En l'espèce, Madame [R] justifie d'un préjudice moral résultant d'une part de son impossibilité d'occuper les lieux depuis le démarrage des travaux le 14 juillet 2017, d'autre part de l'absence totale de manifestation de Monsieur [G] après son abandon de chantier et pendant toute la procédure devant le tribunal puis devant la cour d'appel.

Monsieur [L] [G] sera donc condamné à payer à Madame [N] [R] une somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Retient la responsabilité contractuelle de Monsieur [L] [G] ;

Condamne en conséquence Monsieur [L] [G] à payer à Madame [N] [R] :

- la somme de 1 500 euros TTC au titre de l'acompte ;

- la somme de 14 166,89 euros TTC au titre des travaux de reprise ;

- la somme de 9 600 euros au titre du préjudice de jouissance relatif au logement n° 25 ;

- la somme de 6 400 euros au titre du préjudice locatif relatif au logement n° [Adresse 3] ;

- la somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral ;

Condamne Monsieur [G] à payer à Madame [N] [R] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour ses frais engagés en première instance et en appel ;

Condamne Monsieur [L] [G] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La greffière, Le président,