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CA Lyon, 1re ch. civ. b, 17 octobre 2023, n° 23/00027

LYON

Arrêt

Autre

CA Lyon n° 23/00027

17 octobre 2023

N° RG 23/00027 - N° Portalis DBVX-V-B7H-OWNH

Décision du

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LYON

Au fond

du 05 décembre 2022

RG : 22/05395

[O]

C/

[B]

[B]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 17 Octobre 2023

APPELANTE :

Mme [L] [O] épouse [B]

née le 03 Janvier 1930 à [Localité 13] (38)

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

ayant pour avocat plaidant Me François CHARPIN de la SELARL QG AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 748

INTIMES :

M. [X] [B]

né le 11 Mars 1954 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 7]

Mme [Z] [B]

née le 11 Janvier 1950 à [Localité 11]

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentés par Me Clarisse BOUGAUD de la SELARL HESTAE AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 180

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 25 Août 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Septembre 2023

Date de mise à disposition : 17 Octobre 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

[U] [B] et [P] [C] se sont mariés le 17 mai 1947 sous le régime matrimonial de la communauté de meubles et acquêts.

Ils ont eu ensemble deux enfants, [X] et [Z] [B].

[P] [C] épouse [B] est décédée le 26 décembre 2015. Sa succession n'a pas été réglée et la communauté n'a été ni liquidée ni partagée.

[U] [B] a épousé Mme [O] en secondes noces le 25 octobre 2016 et les époux ont opté pour le régime matrimonial de la séparation de biens.

Par testament authentique du 5 janvier 2017, [U] [B] a privé Mme [O] de tout droit dans sa succession, sauf le droit d'usufruit sur les biens immobiliers et mobiliers situés [Adresse 8] à [Localité 10].

Par testament olographe du 1er août 2017, [U] [B] a confirmé ses dernières dispositions et ajouté " pour le cas où mes enfants [X] et [Z] ou leurs descendants entendraient ne pas respecter ces dispositions, il devra être versé à mon épouse une rente d'un montant de 1.200 € par mois ".

[U] [B] est décédé le 19 février 2019 laissant pour lui succéder ses deux enfants, [Z] et [X] [B] ainsi que sa seconde épouse, Mme [O].

Considérant que [U] [B] avait disposé de la totalité de l'usufruit des biens qui étaient détenus en indivision depuis le décès de [P] [B], [X] et [Z] [B], ci-après les consorts [B], ont par exploit d'huissier du 16 juillet 2022 fait assigner Mme [O] épouse [B] selon la procédure accélérée au fond aux fins de la voir condamner au paiement d'une indemnité d'occupation.

Mme [O] a sollicité reconventionnellement la condamnation des consorts [B] à lui payer une rente mensuelle à compter du 20 février 2019.

Par jugement du 5 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a :

- condamné [L] [O] à payer à [X] et [Z] [B] la somme de 27.657 € au titre de l'indemnité d'occupation due du 20 février 2019 au 29 août 2022,

- rejeté la demande reconventionnelle de [L] [O],

- condamné [L] [O] aux dépens,

- laissé à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés.

Par déclaration du 2 janvier 2023, Mme [O] veuve [B] a interjeté appel de ce jugement.

L'affaire a été fixée par le président de la chambre à l'audience du 4 septembre 2023.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 15 juin 2023, Mme [L] [O] demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel interjeté à l'encontre du jugement rendu le 5 décembre 2022,

- le réformer en toutes ses dispositions,

- débouter Mr [X] [B] et Mme [Z] [B] de leur demande d'indemnité d'occupation,

- faire droit à sa demande en paiement d'une rente mensuelle de 1.200 € à compter du décès de Mr [U] [B] le 19 février 2019,

- condamner solidairement Mr [X] [B] et Mme [Z] [B] à lui payer la somme de 55.200 € arrêtée au 31 décembre 2022, à parfaire,

- condamner solidairement Mr [X] [B] et Mme [Z] [B] à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes solidairement aux entiers dépens.

Mme [O] conteste être redevable du paiement d'une indemnité d'occupation et fait valoir que :

- compte tenu des relations entre [U] [B] et ses enfants qui s'étaient détournés de lui à compter de son remariage, il a souhaité, par dispositions testamentaires, qu'elle puisse bénéficier de l'usufruit portant sur la totalité de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 10] et non seulement sur la seule quotité de ses droits, soit la moitié,

- [U] [B], n'ignorant pas qu'il ne disposait que de la moitié de l'usufruit, l'autre moitié appartenant à ses enfants, a imposé à ces derniers une charge afin qu'ils supportent la totalité de l'usufruit, y compris sur la part de leur mère et ces dispositions étaient parfaitement valables.

Elle déclare par ailleurs que n'ayant pas respecté les dispositions testamentaires lui conférant la totalité de l'usufruit des biens immobiliers situés [Adresse 8] à [Localité 10] et en exécution des dispositions testamentaires de Mr [B] , les consorts [B] sont tenus au paiement d'une rente mensuelle de 1.200€ pour la période du 19 février 2019 au 31 décembre 2022, soit la somme globale de 55.200 €.

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 21 août 2023, Mr [X] [B] et Mme [Z] [B] demandent à la cour de :

- confirmer l'ordonnance rendu le 5 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Lyon en ce qu'elle a :

- condamné Mme [L] [O] à leur payer la somme de 27.657 € au titre de l'indemnité d'occupation due du 20 février 2019 au 29 août 2022,

- rejeté la demande reconventionnelle de Mme [L] [O],

- condamné Mme [L] [O] aux dépens,

au surplus,

- débouter Mme [L] [O] de sa demande de condamnation au paiement d'une rente mensuelle de 1.200 € à compter du décès de [U] [B] le 19 février 2019,

- débouter Mme [L] [O] de sa demande de condamnation solidaire à lui payer la somme de 55.200 € arrêtée au 31 décembre 2022, à parfaire,

- débouter Mme [L] [O] de toutes ses demandes,

- débouter Mme [L] [O] sa demande de condamnation solidaire à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [L] [O] à leur payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [B] font valoir de leur côté que :

- les biens visés par le testament dépendent de la communauté ayant existé entre [U] et [P] [B], lesquels sont devenus indivis entre eux mêmes et leur père au moment du décès de [P] [B],

- en dépit des dispositions testamentaires, l'usufruit dont Mme [O] bénéficiait ne pouvait porter que sur la part dont [U] [B] était propriétaire, soit la moitié, l'autre moitié leur appartenant,

- Mme [O] a occupé le bien sis [Adresse 8] à [Localité 10] de manière privative depuis le décès de [U] [B] intervenu le 19 février 2019 jusqu'au 29 août 2022, date à laquelle les clés leur ont été remises,

- en vertu du testament, Mme [O] avait certes le droit d'occuper la totalité du bien, ce qu'ils ont respecté, mais l'occupation du bien pour la moitié leur appartenant n'était pas gratuite de sorte qu'elle était redevable à leur égard d'une indemnité d'occupation qui sur une base mensuelle de 654 €, représentant la moitié de la valeur locative du bien, s'élève au total pour la période du 20 février 2019 au 29 août à la somme de 27.657 €,

- la charge, non contestée, qui leur est imposée par le testament est la privation de leur droit de jouir de la moitié du bien non concerné par l'usufruit et elle a été respectée et ils n'ont en effet jamais fait obstacle aux dispositions testamentaires dès lors qu'ils ont laissé à Mme [O] l'usufruit des biens composant la succession de [U] [B] et représentant la moitié des biens immobiliers.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 août 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il n'est pas contesté et il ressort des pièces produites que suite au décès de [P] [C], son époux [U] [B] était propriétaire indivis avec ses enfants, [X] et [Z] [B] des biens de la communauté ayant existé entre les époux [B] à raison de 1/4 chacun pour [X] et [Z] [B] en leur qualité d'héritiers réservataires et d'1/2 pour [U] [B] au titre de sa part de communauté.

Parmi ces biens figure l'appartement sis au [Adresse 3] et [Adresse 4] et [Adresse 9] à [Localité 12].

[U] [B] qui n'était propriétaire que la moitié de ce bien n'a pu au terme de son testament authentique du 5 janvier 2017 léguer à son épouse, Mme [L] [O], qu'un droit d'usufruit portant sur la moitié du bien.

Par ailleurs, Mme [O] ne démontre pas que la charge imposée par le testament à l'encontre des héritiers de [U] [B] visant à respecter le droit d'usufruit conféré sur le bien du [Adresse 3] et [Adresse 4] et [Adresse 9] à [Localité 12], sous peine de lui verser une rente mensuelle de 1.200 €, ne l'a pas été.

Il n'est en effet pas établi que les intimés aient d'une façon quelconque fait obstacle à l'exercice par Mme [O] de son droit d'usufruit sur le bien litigieux, notamment en lui demandant de quitter les lieux, et cela n'est pas soutenu par Mme [O].

Leur intervention s'est en effet limitée à lui réclamer le paiement d'une indemnité d'occupation portant sur la moitié du bien, ce qu'ils étaient parfaitement en droit de faire en leur qualité de propriétaire indivis d'une partie du bien sur lequel elle n'avait aucun droit.

Dés lors, le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [O] de sa demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 1.200 € par mois.

Le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme [O] au titre de cette occupation du bien indivis a par ailleurs été justement fixée par le premier juge, au vu d'une estimation de valeur locative produite aux débats et en l'absence de plus amples contestations de l'appelante sur ce point, à 654 € par mois au titre de l'appartement avec garage simple et cave et d'un double garage.

Mme [L] [O] ne discute pas avoir occupé ces biens à titre privatif depuis le 20 février 2019 et ne conteste pas davantage avoir remis les clés le 29 août 2022.

Elle est donc redevable d'une indemnité d'occupation de 27.657 € ainsi que l'a justement retenu le jugement qui est donc confirmé également sur ce point.

Il l'est également en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour estime par contre que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des consorts [B] en cause d'appel et il leur est alloué à ce titre la somme de 2.000 €.

Les dépens d'appel sont mis à la charge de Mme [O] qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Condamne Mme [L] [O] à payer à Mr [X] [B] et Mme [Z] [B], unis d'intérêt, la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamne Mme [O] aux dépens d'appel.

La greffière, Le Président,