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Décisions

CA Paris, Pôle 6 - ch. 9, 30 août 2023, n° 21/00736

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 21/00736

30 août 2023

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 30 AOUT 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00736 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDAGP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Décembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - Section Activités diverses - RG n° F18/01012

APPELANTE

Madame [P] [E]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Nathalie BAUDIN-VERVAECKE, avocat au barreau de MEAUX

INTIMÉS

Monsieur [V], [J] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Anne LEVEILLARD, avocat au barreau de MEAUX

Madame [D], [K], [R] [T] épouse [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne LEVEILLARD, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe MICHEL, président, et M. Fabrice MORILLO, conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Philippe MICHEL, président de chambre

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour.

- signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant convention de mise à disposition d'une maison d'habitation en date du 2 septembre 2017, M. et Mme [O] (propriétaires) ont mis à disposition de M. [L] [E] et Mme [X] [E] (preneurs) « une maison d'habitation sise à [Adresse 4], composée de 5 pièces, salle de bains, WC et buanderie ainsi que de la pelouse devant la maison et d'un petit terrain situé à côté de l'ancien lavoir en bordure du Petit Morin », l'article 2 de la convention stipulant que « En échange, les preneurs payent un loyer mensuel de 450 euros payable en début de mois, assurent cinq heures hebdomadaires de charge d'entretien (ménage, jardin par ex) et des tâches de gardiennage (réception d'objet livrés, sortie des poubelles, ouverture du portail à des ouvriers ou prestataires des réceptions, soins des animaux, etc.)».

Suivant courrier du 3 juin 2018, M. et Mme [O] ont donné congé avec application d'un préavis de 3 mois.

Invoquant l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée la liant avec M. et Mme [O] et s'estimant insuffisamment remplie de ses droits, Mme [P] [E], fille de M. [L] [E] et Mme [X] [E], a saisi la juridiction prud'homale le 23 novembre 2018.

Par jugement du 23 novembre 2020, le conseil de prud'hommes de Meaux a :

- dit qu'il n'existe pas de contrat de travail entre Mme [P] [E] et M. et Mme [O],

- débouté Mme [P] [E] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté M. et Mme [O] de leur demande relative à l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [P] [E] aux entiers dépens.

Par déclaration du 30 décembre 2020, Mme [P] [E] a interjeté appel du jugement lui ayant été notifié le 7 décembre 2020.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 juillet 2021, Mme [P] [E] demande à la cour de :

- infirmer le jugement et, statuant à nouveau,

- ordonner la reconnaissance d'un contrat de travail à durée indéterminée,

- dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

à titre principal,

- ordonner la qualification d'un contrat à temps complet,

- condamner en conséquence M. et Mme [O] à lui payer les sommes suivantes :

- 18 200,40 euros à titre de rappel de salaire outre 1 820,04 euros au titre des congés payés s'y rapportant,

- 10 920,24 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 1 820,04 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 397,18 euros à titre d'indemnité de licenciement,

à titre subsidiaire,

- ordonner la qualification d'un contrat à temps partiel,

- condamner en conséquence M. et Mme [O] à lui payer les sommes suivantes :

- 12 470,40 euros à titre de rappel de salaire outre 1 240,70 euros au titre des congés payés s'y rapportant,

- 7 482,24 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 1 247,04 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 311,76 euros à titre d'indemnité de licenciement,

en tout état de cause,

- condamner M. et Mme [O] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la remise des documents suivants sous astreinte de 20 euros par jour et par document:

- certificat de travail,

- attestation Pôle Emploi comprenant les mêmes indications,

- bulletins de salaire correspondant à la période courant de novembre 2017 à août 2018,

- ordonner que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et qu'ils seront majorés selon l'article L. 313-3 du code monétaire et financier,

- ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner les employeurs aux dépens y compris les frais et honoraires de recouvrement forcé par voie d'huissier de justice,

- débouter M. et Mme [O] de leurs demandes, fins et conclusions,

- rejeter toute demande contraire aux présentes.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 juin 2021, M. et Mme [O] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter en conséquence Mme [P] [E] de toutes ses demandes et, y ajoutant,

- condamner Mme [P] [E] au paiement des sommes de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [P] [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire l'existence d'un contrat de travail était retenue,

- réduire aux plus justes proportions les condamnations qui seraient prononcées.

L'instruction a été clôturée le 11 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 12 avril 2023.

MOTIFS

Sur l'existence d'un contrat de travail

L'appelante fait valoir que la convention de mise à disposition imposait à ses parents de travailler plusieurs heures par semaine, sous la direction des époux [O], ces derniers étant propriétaires du Moulin de Mourette, grande propriété de 3 hectares arborés, comprenant une salle principale de 200 mètres carrés, deux salles attenantes, un appartement de 75 mètres carrés, un studio et un dortoir, ladite propriété étant louée pour des mariages, des séminaires ou tout événement regroupant de nombreuses personnes. Elle souligne que, si elle n'était pas signataire de la convention de mise à disposition, elle a cependant été amenée à intervenir en lieu et place de ses parents pour réaliser leurs prestations, les époux [O] ayant très rapidement commencé à la solliciter afin qu'elle travaille également pour eux. Elle précise qu'elle avait pour tâche de s'occuper chaque jour de sortir les animaux mais aussi de faire visiter la salle de réception aux clients de la résidence. Elle souligne qu'il existait ainsi une prestation de travail, une rémunération ainsi qu'un lien de subordination juridique se manifestant par un pouvoir de direction, un pouvoir de contrôle et un pouvoir de sanction des intimés à son encontre.

Les intimés répliquent que l'appelante n'est pas signataire de la convention de mise à disposition d'un logement en contrepartie de services, ladite convention, qui doit s'analyser en un contrat de location avec un loyer payé en partie en nature, ayant uniquement été signée par ses parents et qu'elle n'a donc pas qualité pour en demander la requalification en contrat de travail. Ils ajoutent que les éléments cumulatifs requis pour caractériser l'existence d'un contrat de travail, et en particulier le lien de subordination, font défaut en ce qu'ils n'ont jamais été placés dans une position d'autorité leur permettant de donner des ordres à l'intéressée et de sanctionner ses éventuels manquements. Ils soulignent que la prestation de travail prévue dans le contrat de mise à disposition n'était qu'une modalité de paiement du loyer prévue pour la mise à disposition d'un logement et que l'appelante n'était en toute hypothèse pas tenue d'exécuter la moindre prestation de travail, le fait que les époux [E] aient éventuellement pu demander à leur propre fille d'accomplir ponctuellement quelques tâches prévues dans le contrat, en leur lieu et place, ne pouvant avoir eu pour effet de créer une relation de travail avec cette dernière. Ils précisent ne jamais avoir eu à la solliciter pour s'occuper des animaux, qu'il s'agissait de chevaux au pré n'ayant pas besoin d'être sortis et que c'est elle qui, par amour des chevaux, avait demandé si elle pouvait occasionnellement les approcher et leur prodiguer des soins, demande à laquelle ils ne s'étaient pas opposés.

Il y a contrat de travail lorsqu'une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la subordination d'une autre, moyennant rémunération, le lien de subordination étant caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, le travail au sein d'un service organisé pouvant constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail.

En outre, il sera rappelé que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

Enfin, il résulte des articles 1315 devenu 1353 du code civil et L. 1221-1 du code du travail, qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, si l'appelante soutient avoir également accompli des prestations de travail pour le compte et sous la subordination des intimés au titre de la période courant de novembre 2017 à août 2018, il sera tout d'abord relevé que l'intéressée ne produit ni contrat de travail, ni déclaration unique d'embauche, ni bulletin de paie, de sorte que cette dernière ne peut se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail apparent, étant par ailleurs observé, ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges, que l'appelante n'était pas partie à la convention de mise à disposition d'une maison d'habitation en date du 2 septembre 2017, ladite convention liant uniquement ses parents, en leur qualité de preneurs, et les intimés, en leur qualité de propriétaires.

S'agissant de la convention de mise à disposition litigieuse, il résulte de l'article 1er de la convention de mise à disposition que M. et Mme [O] mettent à la disposition de M. et Mme [E] « une maison d'habitation sise à [Adresse 4], composée de 5 pièces, salle de bains, WC et buanderie ainsi que de la pelouse devant la maison et d'un petit terrain situé à côté de l'ancien lavoir en bordure du Petit Morin », l'article 2 de la convention stipulant que « En échange, les preneurs payent un loyer mensuel de 450 euros payable en début de mois, assurent cinq heures hebdomadaires de charge d'entretien (ménage, jardin par ex) et des tâches de gardiennage (réception d'objet livrés, sortie des poubelles, ouverture du portail à des ouvriers ou prestataires des réceptions, soins des animaux, etc.)», l'article 4 précisant que « Les preneurs doivent prendre un soin particulier de l'extérieur de leur maison en lui donnant un aspect pimpant : pelouse tondue, jardinières et parterres (devant et à l'arrière de la maison) entretenus, haie bordant leur pelouse régulièrement taillée (intérieur et extérieur sur rue), pas d'objets laissés à l'abandon etc. Les meubles de jardin devront faire l'objet d'un accord avec les propriétaires pour s'harmoniser avec les autres meubles de jardin de la propriété. »

Il ressort en outre de l'article 6 de la convention de mise à disposition que « Un point est fait tous les mois sur la façon dont les preneurs remplissent les obligations prévues aux articles 2, 3 et 4. En cas de non-respect de ces obligations, une mise en demeure est adressée aux preneurs. Si la situation persiste le mois suivant, le préavis prévu à l'article 5 est réduit à un mois », l'article 7 précisant que « Si les propriétaires demandent un supplément d'heures de travail, ils s'engagent à payer ces heures supplémentaires par Chèque Emploi Service au taux de 12 € net par heure. », tandis que l'article 8 indique que « Inversement, si les preneurs étaient dans l'impossibilité, pour quelque raison que ce soit, d'apporter tout ou partie de la contribution aux charges d'entretien, ils s'engagent à verser forfaitairement 12 € par heure non exécutée.», l'article 10 prévoyant enfin que « Les preneurs ont droit à quatre semaines de vacances l'été et deux semaines l'hiver. Ils doivent informer les propriétaires de leurs intentions trois mois à l'avance. Comme pour toute location, le loyer et les heures d'entretien sont dus aussi pendant les périodes de vacances.»

Concernant la prestation de travail alléguée, étant rappelé qu'en application des dispositions de l'article 1709 du code civil, le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer, et ce peu important que la rémunération prenne la forme d'un versement en numéraire, en espèces ou d'une prestation en nature, il apparaît en l'espèce que le fait que le contrat litigieux ait prévu l'exécution par les preneurs de certaines tâches matérielles à titre de règlement d'une partie du loyer n'est, en lui-même, pas de nature à remettre en cause la qualification de contrat de bail dès lors qu'il n'existe entre les parties aucun lien de subordination, élément nécessaire à l'existence d'un contrat de travail. Il sera ainsi constaté que le contrat prévoit la mise à disposition d'une maison d'habitation ainsi que de la pelouse devant la maison et d'un petit terrain situé à côté de l'ancien lavoir en bordure du Petit Morin, et ce moyennant le paiement d'un loyer mixte composé d'une partie en numéraire (450 euros mensuels payables en début de mois) et d'une partie en nature consistant en l'exécution de 5 heures hebdomadaires de travaux d'entretien (ménage, jardin) et de tâches diverses de gardiennage (réception d'objet livrés, sortie des poubelles, ouverture du portail à des ouvriers ou prestataires des réceptions, soins des animaux), les différents exemples expressément mentionnés dans la convention n'apparaissant pas limitatifs.

Au vu des différents mails et des feuilles d'heures versés aux débats par les parents de l'appelante au titre des tâches accomplies au cours des mois de novembre 2017 à juillet 2018, la cour ne peut que relever que les divers travaux dont il est fait état correspondent aux prestations en nature d'entretien et de gardiennage effectivement prévues par la convention de mise à disposition, celles-ci constituant une modalité de règlement du loyer, et ce s'agissant notamment du ménage, de l'entretien du jardin, du soin des animaux et de certaines tâches de réception, étant observé de ce dernier chef qu'il résulte des éléments produits qu'il ne revenait pas aux preneurs de faire systématiquement procéder à la visite des lieux pour les potentiels clients/utilisateurs du domaine mais uniquement d'ouvrir la propriété aux fins de permettre à certains clients d'accéder au domaine pour effectuer une nouvelle visite, et ce uniquement en l'absence des propriétaires, les clients se voyant alors adresser un guide explicatif pour procéder eux-mêmes à la visite. Il sera de surcroît constaté que les preneurs transmettaient leurs feuilles d'heures mensuelles aux propriétaires et que, dans l'hypothèse où les travaux et prestations effectués auraient excédé les 5 heures hebdomadaires prévues par la convention, il aurait alors été fait application de l'article 7 du contrat prévoyant le paiement des heures réalisées selon un tarif horaire en net. Enfin, il sera noté à la lecture des différentes factures produites par les intimés au titre de la période litigieuse, que ces derniers faisaient également intervenir un prestataire extérieur (M. [A] [N]) pour effectuer divers « travaux de bricolage d'intérieur et d'extérieur » à hauteur de plusieurs heures par mois.

Concernant la situation particulière de l'appelante, outre que les premiers juges ont justement retenu que le fait que les parents de l'intéressée, preneurs tenus d'exécuter diverses prestations en nature d'entretien et de gardiennage (en ce compris les soins des animaux) à titre de modalité de règlement du loyer, aient sollicité leur fille pour les aider ou effectuer en leur lieu et place lesdites prestations, n'est aucunement de nature à permettre à cette dernière de prétendre à l'existence d'un contrat de travail la liant personnellement et directement avec les intimés, la cour ne peut en toute hypothèse qu'observer que l'appelante ne justifie pas, au vu des seuls éléments produits et mises à part ses propres déclarations ou celles de ses parents (notamment reprises dans les feuilles d'heures ou les mails transmis aux intimés), de la matérialité et du contenu des prestations de travail qu'elle aurait effectuées à titre personnel pour le compte des intimés, et ce de manière distincte de celles revenant effectivement à ses parents, l'intéressée se limitant à indiquer, tout comme ses parents et de manière inexacte ainsi que cela a déjà été indiqué, qu'elle devait faire visiter les lieux aux clients, avant d'ajouter qu'elle s'occupait chaque jour des animaux appartenant aux intimés, et ce sans autre précision quant aux animaux concernés ainsi qu'au contenu de ses interventions. Il sera de surcroît noté de ce dernier chef que l'appelante allègue qu'elle devait, chaque jour, « sortir » les animaux des intimés, alors qu'il résulte des indications de ces derniers qu'il s'agissait uniquement de chevaux étant d'ores et déjà au pré et qui n'avaient dès lors pas besoin d'être sortis, les seuls éléments produits par l'appelante ne permettant en toute hypothèse pas d'établir que ses interventions dépassaient le cadre de la simple autorisation lui ayant été donnée par les intimés, compte tenu de son intérêt pour les chevaux, de les approcher et de leur prodiguer quelques soins.

S'agissant de la rémunération alléguée, il apparaît que les 5 heures hebdomadaires de tâches d'entretien et de gardiennage prévues dans le cadre de la convention de mise à disposition correspondent à la partie en nature du loyer afférent à la mise à disposition et non pas à la rémunération en nature d'une prestation de travail effectuée par les appelants, lesdites heures venant compléter, ainsi que cela a déjà été indiqué, le paiement de la partie en numéraire du loyer d'un montant de 450 euros, et ce alors que les locaux loués avaient une valeur locative globale moyenne de 1 220 euros par mois ainsi que cela résulte des trois estimations locatives versées aux débats par les intimés, soit une différence de 770 euros, les preneurs ne justifiant pas, mises à part leurs propres affirmations de principe et au regard des seuls éléments produits, que les lieux loués auraient été en mauvais état. Il sera également relevé que le fait que le contrat ait prévu la rémunération distincte des éventuelles heures effectuées au delà des 5 heures contractuelles n'est que la simple conséquence de l'économie de la convention de mise à disposition liant les parties et prévoyant le paiement d'un loyer mixte composé d'une partie en numéraire et d'une partie en nature correspondant à des tâches à effectuer au sein de la propriété, tout dépassement de la partie en nature du loyer nécessitant en conséquence le versement d'une indemnisation spécifique et distincte (ce qui résulte également du mail des intimés du 16 janvier 2018 faisant état du fait que les prestations accomplies par « [P] » seraient comptabilisées dans les heures de sa mère et que les heures effectuées en dépassement feraient l'objet d'un paiement direct distinct), un tel versement n'étant aucunement de nature à entraîner la requalification de la convention de mise à disposition en contrat de travail ou à caractériser l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée.

Il sera par ailleurs constaté que les seules pièces versées aux débats ne font état d'aucune directive précise des intimés, distincte du seul respect des obligations locatives contractuelles telles qu'elles ressortent de la convention de mise à disposition, et ce s'agissant tant des prestations à accomplir que du maintien en bon état et du soin devant être apporté à l'aspect extérieur de la maison louée, celle-ci étant intégrée au domaine faisant l'objet de locations pour l'organisation de divers événements dont des mariages, les pièces précitées ne permettant pas de déterminer que les intimés intervenaient relativement à la fixation des conditions de réalisation des diverses prestations devant être effectuées par les preneurs, et ce s'agissant notamment du rythme et de la répartition entre les intéressés des 5 heures hebdomadaires à réaliser ainsi que de la possibilité pour leur fille de les aider et/ou de les remplacer ponctuellement, les appelants apparaissant ainsi bénéficier d'une grande liberté d'organisation ainsi que d'une autonomie non sérieusement contestable dans l'organisation des prestations litigieuses. Il sera observé de ce même chef que les preneurs (ainsi que leur fille) n'étaient pas soumis à un horaire de travail fixé par les intimés, l'intégration à un service organisé avec une activité exercée au sein d'une structure mettant à leur disposition une infrastructure matérielle et impliquant pour eux de se soumettre à un minimum de contraintes n'étant pas caractérisée.

La cour ne peut par ailleurs que relever que les articles 6 et 10 de la convention précitée s'inscrivent dans le cadre de la bonne exécution du bail, le fait de prévoir la répartition des vacances entre les périodes d'été et d'hiver ainsi que la nécessité pour les preneurs d'informer les propriétaires de leurs intentions trois mois à l'avance, s'expliquant par le paiement d'une partie du loyer en nature et l'obligation pour les propriétaires de s'organiser afin de pallier à l'absence des preneurs, et ce en procédant, le cas échéant, à leur remplacement dans l'accomplissement des tâches d'entretien et de gardiennage. Il en va de même s'agissant de l'organisation d'un point mensuel quant à l'accomplissement de leur tâches par les preneurs, ledit point ayant uniquement pour fonction de permettre aux bailleurs de s'assurer du paiement de la partie en nature du loyer.

Concernant enfin les stipulations des articles 6 et 8 de la convention de mise à disposition relatives au non-respect de leurs obligations par les locataires, outre le fait qu'il est pour le moins habituel que les baux et contrats de location contiennent des clauses spécifiques en cas de manquement des preneurs à leurs obligations locatives, en ce comprise une clause résolutoire après délivrance d'une mise en demeure, il sera de surcroît noté à la lecture des feuilles d'heures transmises par les preneurs aux propriétaires pour la période courant de novembre 2017 à juillet 2018, que les intéressés n'ont jamais effectué, en moyenne sur la période d'exécution de la convention de mise à disposition, plus de 5 heures hebdomadaires correspondant au paiement de la partie en nature du loyer, ces derniers ayant même accompli moins d'heures que ce qui avait été contractuellement prévu, et ce sans que les intimés ne fassent application des stipulations contractuelles précitées, aucune mise en demeure n'ayant notamment été délivrée, aucun préavis réduit n'ayant été appliqué. Il sera noté de ce dernier chef que les propriétaires se sont limités à proposer aux preneurs, compte tenu du non-accomplissement de l'intégralité des tâches d'entretien et de gardiennage, de procéder à une augmentation de la partie en numéraire du loyer afin de la porter à la somme mensuelle de 700 euros, Mme [E] ayant même proposé, suivant mail du 16 mai 2018, de la fixer à la somme de 650 euros s'ils continuaient à s'occuper de sortir/rentrer les poubelles les jours de ramassage, avant que toute proposition ne soit finalement refusée par les preneurs suivant courrier du 30 mai 2018.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour relève que, mises à part ses propres déclarations et affirmations de principe, l'appelante ne justifie ni de l'existence d'une prestation de travail, ni d'une rémunération convenue par les parties, ni d'un lien de subordination résultant de l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements, les seuls éléments produits étant manifestement insuffisants de ces chefs et étant uniquement de nature à permettre de retenir la simple intervention de l'intéressée en sa qualité de fille des preneurs dans le cadre de l'application d'une convention de mise à disposition d'une maison d'habitation moyennant le paiement d'un loyer composé en partie de prestations accomplies en nature, et ce sans que les liens précités ne puissent s'analyser comme étant constitutifs d'un contrat de travail.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il n'existait pas de contrat de travail entre Mme [P] [E] et les époux [O] et en ce qu'il a débouté l'intéressée de l'intégralité de ses demandes.

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive

Les intimés font valoir que l'action de l'appelante procède d'une singulière mauvaise foi, que son droit d'agir en justice a dégénéré au stade de l'appel en abus et relève d'un véritable acharnement judiciaire et d'une intention malicieuse.

L'appelante réplique que cette demande de dommages-intérêts ne s'appuie sur aucun fondement et qu'elle apparaît pour le moins étonnante en ce qu'elle sollicite simplement le rétablissement dans ses droits.

En application de l'article 1382, devenu 1240 du code civil, étant rappelé que l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à condamnation à dommages-intérêts que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol, la réitération en appel de moyens soutenus en première instance et rejetés par les premiers juges ne constituant pas un abus en soi, les intimés ne démontrant en toute hypothèse ni la mauvaise foi, l'intention de nuire ou même la légèreté blâmable de l'appelante, ni d'ailleurs l'étendue de leur préjudice, il convient de les débouter de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les autres demandes

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [O] de leur demande relative aux frais non compris dans les dépens exposés en première instance, l'équité et la situation économique des parties commandant de ne pas prononcer de condamnation sur ce même fondement en cause d'appel.

Mme [P] [E], qui succombe, supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute M. et Mme [O] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive;

Dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Mme [P] [E] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT