Décisions
CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 12 octobre 2023, n° 20/13261
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRET DU 12 OCTOBRE 2023
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 20/13261 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCLSH
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 novembre 2019 -Tribunal de grande instance de Paris (loyers commerciaux) - RG n° 18/01353
APPELANTE
S.A.S. FONCIERE COUR CARREE
Immatriculée au R.C.S. d'Evry sous le n° 479 622 839
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de Paris, toque : K0065
INTIMEE
S.C.O.P. BANQUE POPULAIRE RIVES DE [Localité 9]
Immatriculée au RCS de Paris sous le n° 552 002 313
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : K0148
Assistée de Me Ivan IWANOWSKI de la SELARL I.C.E. IWANOWSKI CONSEIL ENTREPRISE, avocat au barreau de Paris, toque : B1014
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 7 juin 2023, en audience publique, devant Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
M. Douglas Berthe, conseiller
Mme Marie Girousse, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Laurène Blanco
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte du 17 juin 2004, la SCI Bonsergent, aux droits de laquelle vient la société Foncière Cour Carrée (ci-après, la Foncière Cour Carrée), a donné à bail en renouvellement à la société Banque Populaire Nord De [Localité 8], aux droits de laquelle vient la société Banque Populaire Rives De [Localité 8] (ci-après, la Banque Populaire) des locaux à usage commercial sis [Adresse 2] et [Adresse 11] à [Localité 10], moyennant un loyer annuel en principal de 90.000 euros hors taxes et hors charges, pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2004.
Par acte extrajudiciaire du 22 juin 2017, la Banque Populaire a sollicité le renouvellement de son bail à compter du 1er juillet 2017, moyennant un loyer annuel en principal de 91.400 € H.T.H.C. Par acte extrajudiciaire du 11 septembre 2017, la bailleresse a accepté le principe du renouvellement au 1er juillet 2017 mais sollicité la fixation d'un loyer annuel de 140.000 euros hors taxes et hors charges.
Le 26 octobre 2017, la Banque Populaire a notifié à la Foncière Cour Carrée un mémoire en demande sollicitant la fixation du montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2017 à la valeur locative des lieux loués, en raison de la durée du bail expiré, soit à la somme annuelle de 91.500 € H.T.H.C. S'appuyant notamment sur un rapport d'expertise amiable établi le 13 mars 2017 par le cabinet Vaz Da Cruz - Berthelot, elle estime que la surface pondérée doit être fixée à 163 m² et qu'une valeur du m² unitaire de 625 euros doit être retenue, outre un abattement de 10 % pour clauses exorbitantes.
Par acte du 19 janvier 2018, la Banque Populaire a fait assigner devant le juge des loyers commerciaux de [Localité 8] la Foncière Cour Carrée aux fins essentielles de la fixation du loyer à 91.500 euros, par conséquent du remboursement de la différence entre le prix du bail renouvelé et le montant effectivement payé par elle au titre de l'article 1377 du code civil.
Par jugement du 25 mai 2018, le juge des loyers commerciaux a notamment constaté le principe du renouvellement du bail liant les parties à compter du 1er juillet 2017, dit que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative, avant-dire droit, a ordonné une expertise désignant M. [J] et fixé le loyer provisionnel dû à compter du 1er juillet 2017 au montant du loyer contractuel indexé HT/HC.
L'expert judiciaire a rendu son rapport le 19 mars 2019, aux termes duquel il propose de retenir une valeur locative de renouvellement au 1er juillet 2017 de 87.500 euros hors taxes et charges par an, soit 525 euros/m²P pour une surface de 183 m²P, déduction faite de l'impôt foncier évalué à la somme de 6.458 euros et d'un abattement de 3 % pour la prise en compte par le preneur des travaux de mise en conformité.
Par jugement en date du 4 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a, notamment, fixé à la somme de 87.500 euros en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du 1er juillet 2017, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la Foncière Cour Carrée et la Banque Populaire et dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer finalement dû, à compter du 29 mars 2018 pour les loyers échus avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuellement pour les loyer échus après cette date.
Par déclaration en date du 21 septembre 2020, la Foncière Cour Carrée a interjeté appel total du jugement du 4 novembre 2019.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Dans les conclusions déposées le 12 mai 2021, la Foncière Cour Carrée, appelante, demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris le 4 novembre 2019 en toutes ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
- fixer le loyer du bail renouvelé au 1er juillet 2017 à un montant annuel de 110.000 euros en principal, hors charges et hors taxes ;
- juger que le loyer fixé portera intérêt au taux légal de plein droit à compter de la date d'assignation de la Banque Populaire, soit le 19 janvier 2018 ;
- débouter la société locataire de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner la société Banque Populaire aux entiers dépens et à verser à la Foncière Cour Carrée la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Denizot sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans les conclusions déposées le 6 octobre 2021, la société Banque Populaire, intimée, demande à la cour de :
- recevoir la Banque Populaire en ses conclusions et demandes et l'y dire bien fondée ;
- infirmer le jugement en date du 4 novembre 2019 en ce qu'il a fixé le loyer annuel à la somme de 87.500 euros ;
Et statuant à nouveau :
- fixer à la somme de 86.750 euros en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du 1er juillet 2017, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la Foncière Cour Carrée et la Banque Populaire ;
- confirmer pour le surplus le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 19 novembre 2019 ;
- débouter la Foncière Cour Carrée de la totalité de ses demandes ;
- condamner la Foncière Cour Carrée à verser à la Banque Populaire la somme de 5.000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la Foncière Cour Carrée aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Véronique de La Taille, Récamier Avocats Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, leur position sera succinctement résumée.
SUR CE,
L'article L. 145-33 du code de commerce dispose que le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative et qu'à défaut d'accord entre les parties, cette valeur locative est déterminée d'après les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
L'article R. 145-3 du code de commerce prévoit que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération de sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public, de 1'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux, de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée, de l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail, de la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.
L'article R. 145-7 du même code dispose que les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surfaces, concernent des locaux équivalents, qu'à défaut d'équivalence, ils peuvent, à titre indicatif, être utilisés pour la détermination des prix de base, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence et que toutes les références proposées comportent, pour chaque local, son adresse, sa description succincte et sont corrigées à raison des différences qui peuvent exister entre les dates de fixation des prix et les modalités de cette fixation.
L'article R. 145-8 énonce notamment que les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. En outre, les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.
Enfin, l'article R. 145-11 prévoit que le prix du bail des locaux à usage exclusif de bureaux est fixé par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.
Sur l'appréciation de la valeur locative
La Foncière Cour Carrée conteste l'estimation de la valeur unitaire de 525 euros/m²P retenue par l'expert judiciaire aux motifs qu'il n'a pas pris les références portant sur des locaux présentant des caractéristiques identiques pour une activité de même nature, soit au cas d'espèce des agences bancaires et a retenu des références trop éloignées de la date d'effet du renouvellement ne permettant pas d'apprécier le prix à une date donnée, qu'à défaut de références pertinentes de banque, seules les références de bureaux-boutiques antérieures à la date d'effet du renouvellement, situées à proximité ou dans des secteurs comparables à celui des locaux loués peuvent être retenues, qu'ainsi la référence postérieure au 1er juillet 2017 devra être écartée (réf. n°1 Crédit Agricole du 1er jan. 2018) et les références de 2008 (Maïf et HSBC) doivent être écartées comme trop anciennes et, sur les références de bureaux-boutiques, cinq références devront être écartées pour ne pas influer artificiellement sur la valeur locative des locaux litigieux. Elle estime que les prix des termes de comparaison pertinents sont compris entre 445 et 798 euros/m²p, qu'il convient de tenir compte de l'évolution des valeurs du secteur à la hausse et de l'existence de modifications notables des facteurs locaux de commercialité et que, de ce fait, le prix du bail renouvelé au 1er juillet 2017 ne peut être inférieur à 570 euros/m²P.
La Banque Populaire soutient que s'agissant des cinq références de type « bureau-boutique », dans le cadre du renouvellement amiable, les prix de boutiques-comparables sont compris entre 404 et 465 euros/m²P, s'agissant des cinq références de type « bureau-boutique », dans le cadre du renouvellement judiciaire, leur pertinence doit être relativisée étant très ancienne (2008 -2010), que dans ce cadre les prix sont compris entre 350 et 550 euros/m²P, que les références de type « boutique » doivent être considérées de façon purement indicative en ce que les critères liés à l'activité du locataire doivent être pris en compte, notamment les évolutions remarquées dans le secteur bancaire résultant de la digitalisation citée par l'expert. De ce fait, la cour confirmera le jugement en ce qu'il a estimé la valeur locative de 525 euros /m²P et fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros (525 euros /m²P X 183 m²P).
En l'espèce, il n'est pas discuté par les parties que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative, que les règles du plafonnement sont à écarter au regard de sa durée, que les locaux ont une destination de commerce de banque et sont donc à usage exclusif de bureaux. Enfin, la surface pondérée des locaux calculée par l'expert et retenue par le tribunal à hauteur de 183 m²P n'est pas contestée.
La valeur locative est définie pour les « bureaux-boutique », typologie qui concerne les banques, par les loyers de marché pratiqués pour des locaux équivalents, qui, contrairement à ce que soutiennent les parties, ne se réduisent pas par principe à des locaux ayant une destination équivalente, la notion des locaux équivalents se rapportant aussi à la nature des locaux.
Dans ces conditions, les termes de référence peuvent inclure, non seulement, des références de type « bureau-boutique » à savoir des commerces dédiés essentiellement à des activités intellectuelles de prestation de service mais aussi des références de type commerce. Ce panel permet, comme souligné par le premier juge, d'avoir une image générale des prix des loyers commerciaux pratiqués dans le quartier considéré. Il importe en revanche que la pertinence des références soit ensuite examinée et corrigée le cas échéant selon la nature des locaux. Pour ce faire, l'expert a opéré un classement des références proposées au regard de leur « comparabilité » avec les locaux litigieux s'agissant de leur nature résultant, notamment, de la surface, de l'environnement, de la destination des locaux et des facteurs locaux de commercialité et s'agissant de la date de renouvellement.
Il en résulte que c'est à bon droit que le juge des loyers commerciaux a retenu l'ensemble des références proposées par l'expert.
Sur le prix unitaire
La Foncière Cour Carrée soutient qu'au regard du bon emplacement des locaux sur un axe passant et commerçant, de leur bonne visibilité, de leur bonne configuration, de l'activité exercée, des clauses du bail et des prix pratiqués dans le voisinage, il y a lieu de retenir un prix de 570 € m²P soit une valeur locative au 1er juillet 2017 de 104.310 euros HT/HC par an (183 m²P x 570 euros/ m²P).
La Banque Populaire oppose que l'emplacement des locaux loués est très secondaire et ne dispose d'aucun attrait particulier, qu'il est impossible de stationner, que la commercialité reste strictement locale et, notamment, côté [Adresse 11] est totalement inexistante, que la preneuse ne profite donc pas de son effet d'angle, que la valeur locative retenue par l'expert et entérinée par le tribunal à 525 €/m²P s'inscrit dans les fourchettes hautes des références pertinentes et est supérieure à celle des références bureaux/boutiques relevées.
Pour déterminer la valeur locative et le prix du loyer, le juge des loyers commerciaux a, par motifs détaillés que la cour adopte et auxquels elle se réfère, d'une part, décrit l'emplacement des locaux et leurs caractéristiques tels qu'exposés par l'expert, « en particulier » leur bonne visibilité, leur surface importante, leur implantation dans un secteur bénéficiant d'une bonne dynamique commerciale mais d'intérêt local en raison des difficultés majeures de stationnement suite aux travaux de rénovation du [Adresse 7] et, d'autre part, repris l'ensemble des références citées par l'expert s'agissant des bureaux-boutiques et des boutiques, pour chacun des prix relevés sur les locations nouvelles, les renouvellement amiables déplafonnés et les renouvellements judiciaires déplafonnés.
En revanche, contrairement à ce que soutiennent les parties, les mutations connues par le secteur bancaire, liées essentiellement à l'évolution du commerce en ligne, ne lui sont pas propres mais touchent toutes les activités commerciales, comme le relève l'expert qui en a donc tenu-compte dans sa proposition de prix unitaire.
Ainsi c'est à bon droit que le premier juge a retenu la valeur locative unitaire au 1er juillet 2017 proposée par l'expert à hauteur de 525 euros m²/P et fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros (525€ X 183 m²P).
Sur les abattements
La Foncière Cour Carrée soutient que les parties s'accordent sur le fait que la prime d'assurance bailleresse n'étant pas refacturée à la preneuse il n'y pas lieu de pratiquer un abattement à ce titre, que faute de savoir si les références visées comportent un transfert de la taxe foncière sur le locataire et compte tenu du bon emplacement justifiant plutôt un droit d'entrée il n'y a pas lieu de déduire le montant de la taxe foncière, qu'au vu du prix unitaire qui tient déjà compte de l'abattement de 3 % et en vertu de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite loi Pinel (art. R. 145-35 du code de commerce) qui proscrit le transfert au locataire des grosses réparations, il n'y a pas lieu de déduire un abattement de 3 % de la valeur locative.
La société Banque Populaire oppose qu'en ce qui concerne la taxe foncière, elle constitue une charge exorbitante au sens de l'article R.145-8 du code de commerce, de ce fait elle doit être déduite, que, dans la mesure où la mise aux normes des locaux incombe au preneur, la diminution de 3 % de la valeur locative entérinée par le tribunal est légitime.
Contrairement à ce que soutient le bailleur, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que le transfert de la charge de la taxe foncière au preneur constitue une clause exorbitante de droit commun, cet impôt incombant par nature au propriétaire du bien, et l'a en conséquence déduit de la valeur locative de renouvellement. De même, si par application des dispositions de l'article R. 145-35 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite loi Pinel, le bailleur ne peut plus faire peser sur le preneur les grosses réparations relevant de l'article 606 du code civil, il résulte du bail que les travaux de mises aux normes des locaux résultant notamment de l'exercice de son activité incombe au preneur s'agissant entre autres des travaux relatifs à la réglementation des établissements recevant du public. Ainsi c'est à bon droit que le tribunal a retenu l'abattement de 3 % proposé par l'expert du fait des travaux réglementaires.
Par conséquent, le prix du bail renouvelé au 1er juillet 2017 s'établit à la somme annuelle de :
96.075 - 6.458 - (96.075x3%) = 96.075 - 6.458 - 2.882,25
= 86.734,75 €
soit la somme arrondie à 86.750 euros.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fixé le prix du bail renouvelé à la somme de 87.500 euros, résultant de l'erreur matérielle commise par le juge des loyers commerciaux qui a fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros mais qui, dans son calcul pour en déduire les abattements, est parti d'un montant de 96.862,50 euros. L'erreur matérielle commise sera ainsi rectifiée.
Sur la majoration à la valeur locative
La Foncière Cour Carrée soutient que dans la mesure où la preneuse bénéficie de l'allègement de la charge des gros travaux, il convient de rééquilibrer le contrat en appliquant une majoration de 5 % à la valeur locative en raison de la modification notable des obligations des parties, que, de ce fait, la valeur locative doit être fixée à 109.525,50 euros arrondie à 110.000 euros HT/HC/an (104.310 + 5.215,50 (soit 5 %) ).
La société Banque Populaire oppose que l'imputation contractuelle au locataire des grosses réparations constituait une clause exorbitante du bail au sens de l'article R. 145-8 du code de commerce puisque le redevable légal en était le bailleur selon l'article 606 du code civil, qu'en application dudit article R. 145-8 cette obligation dont le bailleur s'est déchargé sur son locataire devait venir en diminution de la valeur locative, qu'ainsi, aux termes de l'article R. 145-35 du code de commerce, ce transfert de charge au locataire n'a pas modifié l'équilibre des obligations des parties.
Contrairement à ce que soutient le bailleur, l'impossibilité de faire supporter au locataire tous les travaux qui, par nature, présentent le caractère de grosses réparations au sens de l'article 606 du code civil résultant des dispositions de la loi du 18 juin 2014 ne peuvent ouvrir droit pour les baux renouvelés à une majoration en compensation des conséquences financières de ces dispositions en résultant pour lui, dès lors qu'elles ne constituent pas par nature une charge indue pour ce dernier et que, sous l'application de la loi ancienne, ce transfert était compensé par une diminution du prix du loyer ce qui n'est plus le cas sous l'emprise de la loi nouvelle.
La demande formée à ce titre sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
Succombant en ses prétentions, la Foncière Cour Carrée sera sera condamnée à supporter la charge des dépens d'appel et condamnée à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris le 4 novembre 2019 sous le numéro de RG 18/01353 en ce qu'il a fixé la somme de 87.500 euros (quatre vingt sept mille cinq cents euros) en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du ler juillet 20l7, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la société Foncière Cour Carrée et la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] et portant sur les locaux situés [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 10] ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant de nouveau,
Rectifie l'erreur matérielle commise par le premier juge ;
Fixe à la somme de 86.750 euros (quatre vingt six mille sept cents cinquante euros) en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du ler juillet 20l7, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la société Foncière Cour Carrée et la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] et portant sur les locaux situés [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 10] ;
Rejette la demande de majoration du loyer formée par la société Foncière Cour Carrée ;
Condamne la société Foncière Cour Carrée à payer à la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Foncière Cour Carrée à supporter la charge des dépens d'appel dont distraction au profit de Me Véronique de La Taille, Récamier Avocats Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRET DU 12 OCTOBRE 2023
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 20/13261 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCLSH
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 novembre 2019 -Tribunal de grande instance de Paris (loyers commerciaux) - RG n° 18/01353
APPELANTE
S.A.S. FONCIERE COUR CARREE
Immatriculée au R.C.S. d'Evry sous le n° 479 622 839
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de Paris, toque : K0065
INTIMEE
S.C.O.P. BANQUE POPULAIRE RIVES DE [Localité 9]
Immatriculée au RCS de Paris sous le n° 552 002 313
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : K0148
Assistée de Me Ivan IWANOWSKI de la SELARL I.C.E. IWANOWSKI CONSEIL ENTREPRISE, avocat au barreau de Paris, toque : B1014
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 7 juin 2023, en audience publique, devant Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
M. Douglas Berthe, conseiller
Mme Marie Girousse, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Laurène Blanco
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte du 17 juin 2004, la SCI Bonsergent, aux droits de laquelle vient la société Foncière Cour Carrée (ci-après, la Foncière Cour Carrée), a donné à bail en renouvellement à la société Banque Populaire Nord De [Localité 8], aux droits de laquelle vient la société Banque Populaire Rives De [Localité 8] (ci-après, la Banque Populaire) des locaux à usage commercial sis [Adresse 2] et [Adresse 11] à [Localité 10], moyennant un loyer annuel en principal de 90.000 euros hors taxes et hors charges, pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2004.
Par acte extrajudiciaire du 22 juin 2017, la Banque Populaire a sollicité le renouvellement de son bail à compter du 1er juillet 2017, moyennant un loyer annuel en principal de 91.400 € H.T.H.C. Par acte extrajudiciaire du 11 septembre 2017, la bailleresse a accepté le principe du renouvellement au 1er juillet 2017 mais sollicité la fixation d'un loyer annuel de 140.000 euros hors taxes et hors charges.
Le 26 octobre 2017, la Banque Populaire a notifié à la Foncière Cour Carrée un mémoire en demande sollicitant la fixation du montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2017 à la valeur locative des lieux loués, en raison de la durée du bail expiré, soit à la somme annuelle de 91.500 € H.T.H.C. S'appuyant notamment sur un rapport d'expertise amiable établi le 13 mars 2017 par le cabinet Vaz Da Cruz - Berthelot, elle estime que la surface pondérée doit être fixée à 163 m² et qu'une valeur du m² unitaire de 625 euros doit être retenue, outre un abattement de 10 % pour clauses exorbitantes.
Par acte du 19 janvier 2018, la Banque Populaire a fait assigner devant le juge des loyers commerciaux de [Localité 8] la Foncière Cour Carrée aux fins essentielles de la fixation du loyer à 91.500 euros, par conséquent du remboursement de la différence entre le prix du bail renouvelé et le montant effectivement payé par elle au titre de l'article 1377 du code civil.
Par jugement du 25 mai 2018, le juge des loyers commerciaux a notamment constaté le principe du renouvellement du bail liant les parties à compter du 1er juillet 2017, dit que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative, avant-dire droit, a ordonné une expertise désignant M. [J] et fixé le loyer provisionnel dû à compter du 1er juillet 2017 au montant du loyer contractuel indexé HT/HC.
L'expert judiciaire a rendu son rapport le 19 mars 2019, aux termes duquel il propose de retenir une valeur locative de renouvellement au 1er juillet 2017 de 87.500 euros hors taxes et charges par an, soit 525 euros/m²P pour une surface de 183 m²P, déduction faite de l'impôt foncier évalué à la somme de 6.458 euros et d'un abattement de 3 % pour la prise en compte par le preneur des travaux de mise en conformité.
Par jugement en date du 4 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a, notamment, fixé à la somme de 87.500 euros en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du 1er juillet 2017, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la Foncière Cour Carrée et la Banque Populaire et dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer finalement dû, à compter du 29 mars 2018 pour les loyers échus avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuellement pour les loyer échus après cette date.
Par déclaration en date du 21 septembre 2020, la Foncière Cour Carrée a interjeté appel total du jugement du 4 novembre 2019.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Dans les conclusions déposées le 12 mai 2021, la Foncière Cour Carrée, appelante, demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris le 4 novembre 2019 en toutes ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
- fixer le loyer du bail renouvelé au 1er juillet 2017 à un montant annuel de 110.000 euros en principal, hors charges et hors taxes ;
- juger que le loyer fixé portera intérêt au taux légal de plein droit à compter de la date d'assignation de la Banque Populaire, soit le 19 janvier 2018 ;
- débouter la société locataire de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner la société Banque Populaire aux entiers dépens et à verser à la Foncière Cour Carrée la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Denizot sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans les conclusions déposées le 6 octobre 2021, la société Banque Populaire, intimée, demande à la cour de :
- recevoir la Banque Populaire en ses conclusions et demandes et l'y dire bien fondée ;
- infirmer le jugement en date du 4 novembre 2019 en ce qu'il a fixé le loyer annuel à la somme de 87.500 euros ;
Et statuant à nouveau :
- fixer à la somme de 86.750 euros en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du 1er juillet 2017, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la Foncière Cour Carrée et la Banque Populaire ;
- confirmer pour le surplus le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 19 novembre 2019 ;
- débouter la Foncière Cour Carrée de la totalité de ses demandes ;
- condamner la Foncière Cour Carrée à verser à la Banque Populaire la somme de 5.000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la Foncière Cour Carrée aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Véronique de La Taille, Récamier Avocats Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, leur position sera succinctement résumée.
SUR CE,
L'article L. 145-33 du code de commerce dispose que le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative et qu'à défaut d'accord entre les parties, cette valeur locative est déterminée d'après les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
L'article R. 145-3 du code de commerce prévoit que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération de sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public, de 1'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux, de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée, de l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail, de la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.
L'article R. 145-7 du même code dispose que les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surfaces, concernent des locaux équivalents, qu'à défaut d'équivalence, ils peuvent, à titre indicatif, être utilisés pour la détermination des prix de base, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence et que toutes les références proposées comportent, pour chaque local, son adresse, sa description succincte et sont corrigées à raison des différences qui peuvent exister entre les dates de fixation des prix et les modalités de cette fixation.
L'article R. 145-8 énonce notamment que les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. En outre, les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.
Enfin, l'article R. 145-11 prévoit que le prix du bail des locaux à usage exclusif de bureaux est fixé par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.
Sur l'appréciation de la valeur locative
La Foncière Cour Carrée conteste l'estimation de la valeur unitaire de 525 euros/m²P retenue par l'expert judiciaire aux motifs qu'il n'a pas pris les références portant sur des locaux présentant des caractéristiques identiques pour une activité de même nature, soit au cas d'espèce des agences bancaires et a retenu des références trop éloignées de la date d'effet du renouvellement ne permettant pas d'apprécier le prix à une date donnée, qu'à défaut de références pertinentes de banque, seules les références de bureaux-boutiques antérieures à la date d'effet du renouvellement, situées à proximité ou dans des secteurs comparables à celui des locaux loués peuvent être retenues, qu'ainsi la référence postérieure au 1er juillet 2017 devra être écartée (réf. n°1 Crédit Agricole du 1er jan. 2018) et les références de 2008 (Maïf et HSBC) doivent être écartées comme trop anciennes et, sur les références de bureaux-boutiques, cinq références devront être écartées pour ne pas influer artificiellement sur la valeur locative des locaux litigieux. Elle estime que les prix des termes de comparaison pertinents sont compris entre 445 et 798 euros/m²p, qu'il convient de tenir compte de l'évolution des valeurs du secteur à la hausse et de l'existence de modifications notables des facteurs locaux de commercialité et que, de ce fait, le prix du bail renouvelé au 1er juillet 2017 ne peut être inférieur à 570 euros/m²P.
La Banque Populaire soutient que s'agissant des cinq références de type « bureau-boutique », dans le cadre du renouvellement amiable, les prix de boutiques-comparables sont compris entre 404 et 465 euros/m²P, s'agissant des cinq références de type « bureau-boutique », dans le cadre du renouvellement judiciaire, leur pertinence doit être relativisée étant très ancienne (2008 -2010), que dans ce cadre les prix sont compris entre 350 et 550 euros/m²P, que les références de type « boutique » doivent être considérées de façon purement indicative en ce que les critères liés à l'activité du locataire doivent être pris en compte, notamment les évolutions remarquées dans le secteur bancaire résultant de la digitalisation citée par l'expert. De ce fait, la cour confirmera le jugement en ce qu'il a estimé la valeur locative de 525 euros /m²P et fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros (525 euros /m²P X 183 m²P).
En l'espèce, il n'est pas discuté par les parties que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative, que les règles du plafonnement sont à écarter au regard de sa durée, que les locaux ont une destination de commerce de banque et sont donc à usage exclusif de bureaux. Enfin, la surface pondérée des locaux calculée par l'expert et retenue par le tribunal à hauteur de 183 m²P n'est pas contestée.
La valeur locative est définie pour les « bureaux-boutique », typologie qui concerne les banques, par les loyers de marché pratiqués pour des locaux équivalents, qui, contrairement à ce que soutiennent les parties, ne se réduisent pas par principe à des locaux ayant une destination équivalente, la notion des locaux équivalents se rapportant aussi à la nature des locaux.
Dans ces conditions, les termes de référence peuvent inclure, non seulement, des références de type « bureau-boutique » à savoir des commerces dédiés essentiellement à des activités intellectuelles de prestation de service mais aussi des références de type commerce. Ce panel permet, comme souligné par le premier juge, d'avoir une image générale des prix des loyers commerciaux pratiqués dans le quartier considéré. Il importe en revanche que la pertinence des références soit ensuite examinée et corrigée le cas échéant selon la nature des locaux. Pour ce faire, l'expert a opéré un classement des références proposées au regard de leur « comparabilité » avec les locaux litigieux s'agissant de leur nature résultant, notamment, de la surface, de l'environnement, de la destination des locaux et des facteurs locaux de commercialité et s'agissant de la date de renouvellement.
Il en résulte que c'est à bon droit que le juge des loyers commerciaux a retenu l'ensemble des références proposées par l'expert.
Sur le prix unitaire
La Foncière Cour Carrée soutient qu'au regard du bon emplacement des locaux sur un axe passant et commerçant, de leur bonne visibilité, de leur bonne configuration, de l'activité exercée, des clauses du bail et des prix pratiqués dans le voisinage, il y a lieu de retenir un prix de 570 € m²P soit une valeur locative au 1er juillet 2017 de 104.310 euros HT/HC par an (183 m²P x 570 euros/ m²P).
La Banque Populaire oppose que l'emplacement des locaux loués est très secondaire et ne dispose d'aucun attrait particulier, qu'il est impossible de stationner, que la commercialité reste strictement locale et, notamment, côté [Adresse 11] est totalement inexistante, que la preneuse ne profite donc pas de son effet d'angle, que la valeur locative retenue par l'expert et entérinée par le tribunal à 525 €/m²P s'inscrit dans les fourchettes hautes des références pertinentes et est supérieure à celle des références bureaux/boutiques relevées.
Pour déterminer la valeur locative et le prix du loyer, le juge des loyers commerciaux a, par motifs détaillés que la cour adopte et auxquels elle se réfère, d'une part, décrit l'emplacement des locaux et leurs caractéristiques tels qu'exposés par l'expert, « en particulier » leur bonne visibilité, leur surface importante, leur implantation dans un secteur bénéficiant d'une bonne dynamique commerciale mais d'intérêt local en raison des difficultés majeures de stationnement suite aux travaux de rénovation du [Adresse 7] et, d'autre part, repris l'ensemble des références citées par l'expert s'agissant des bureaux-boutiques et des boutiques, pour chacun des prix relevés sur les locations nouvelles, les renouvellement amiables déplafonnés et les renouvellements judiciaires déplafonnés.
En revanche, contrairement à ce que soutiennent les parties, les mutations connues par le secteur bancaire, liées essentiellement à l'évolution du commerce en ligne, ne lui sont pas propres mais touchent toutes les activités commerciales, comme le relève l'expert qui en a donc tenu-compte dans sa proposition de prix unitaire.
Ainsi c'est à bon droit que le premier juge a retenu la valeur locative unitaire au 1er juillet 2017 proposée par l'expert à hauteur de 525 euros m²/P et fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros (525€ X 183 m²P).
Sur les abattements
La Foncière Cour Carrée soutient que les parties s'accordent sur le fait que la prime d'assurance bailleresse n'étant pas refacturée à la preneuse il n'y pas lieu de pratiquer un abattement à ce titre, que faute de savoir si les références visées comportent un transfert de la taxe foncière sur le locataire et compte tenu du bon emplacement justifiant plutôt un droit d'entrée il n'y a pas lieu de déduire le montant de la taxe foncière, qu'au vu du prix unitaire qui tient déjà compte de l'abattement de 3 % et en vertu de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite loi Pinel (art. R. 145-35 du code de commerce) qui proscrit le transfert au locataire des grosses réparations, il n'y a pas lieu de déduire un abattement de 3 % de la valeur locative.
La société Banque Populaire oppose qu'en ce qui concerne la taxe foncière, elle constitue une charge exorbitante au sens de l'article R.145-8 du code de commerce, de ce fait elle doit être déduite, que, dans la mesure où la mise aux normes des locaux incombe au preneur, la diminution de 3 % de la valeur locative entérinée par le tribunal est légitime.
Contrairement à ce que soutient le bailleur, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que le transfert de la charge de la taxe foncière au preneur constitue une clause exorbitante de droit commun, cet impôt incombant par nature au propriétaire du bien, et l'a en conséquence déduit de la valeur locative de renouvellement. De même, si par application des dispositions de l'article R. 145-35 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite loi Pinel, le bailleur ne peut plus faire peser sur le preneur les grosses réparations relevant de l'article 606 du code civil, il résulte du bail que les travaux de mises aux normes des locaux résultant notamment de l'exercice de son activité incombe au preneur s'agissant entre autres des travaux relatifs à la réglementation des établissements recevant du public. Ainsi c'est à bon droit que le tribunal a retenu l'abattement de 3 % proposé par l'expert du fait des travaux réglementaires.
Par conséquent, le prix du bail renouvelé au 1er juillet 2017 s'établit à la somme annuelle de :
96.075 - 6.458 - (96.075x3%) = 96.075 - 6.458 - 2.882,25
= 86.734,75 €
soit la somme arrondie à 86.750 euros.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fixé le prix du bail renouvelé à la somme de 87.500 euros, résultant de l'erreur matérielle commise par le juge des loyers commerciaux qui a fixé la valeur locative au 1er juillet 2017 à la somme de 96.075 euros mais qui, dans son calcul pour en déduire les abattements, est parti d'un montant de 96.862,50 euros. L'erreur matérielle commise sera ainsi rectifiée.
Sur la majoration à la valeur locative
La Foncière Cour Carrée soutient que dans la mesure où la preneuse bénéficie de l'allègement de la charge des gros travaux, il convient de rééquilibrer le contrat en appliquant une majoration de 5 % à la valeur locative en raison de la modification notable des obligations des parties, que, de ce fait, la valeur locative doit être fixée à 109.525,50 euros arrondie à 110.000 euros HT/HC/an (104.310 + 5.215,50 (soit 5 %) ).
La société Banque Populaire oppose que l'imputation contractuelle au locataire des grosses réparations constituait une clause exorbitante du bail au sens de l'article R. 145-8 du code de commerce puisque le redevable légal en était le bailleur selon l'article 606 du code civil, qu'en application dudit article R. 145-8 cette obligation dont le bailleur s'est déchargé sur son locataire devait venir en diminution de la valeur locative, qu'ainsi, aux termes de l'article R. 145-35 du code de commerce, ce transfert de charge au locataire n'a pas modifié l'équilibre des obligations des parties.
Contrairement à ce que soutient le bailleur, l'impossibilité de faire supporter au locataire tous les travaux qui, par nature, présentent le caractère de grosses réparations au sens de l'article 606 du code civil résultant des dispositions de la loi du 18 juin 2014 ne peuvent ouvrir droit pour les baux renouvelés à une majoration en compensation des conséquences financières de ces dispositions en résultant pour lui, dès lors qu'elles ne constituent pas par nature une charge indue pour ce dernier et que, sous l'application de la loi ancienne, ce transfert était compensé par une diminution du prix du loyer ce qui n'est plus le cas sous l'emprise de la loi nouvelle.
La demande formée à ce titre sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
Succombant en ses prétentions, la Foncière Cour Carrée sera sera condamnée à supporter la charge des dépens d'appel et condamnée à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris le 4 novembre 2019 sous le numéro de RG 18/01353 en ce qu'il a fixé la somme de 87.500 euros (quatre vingt sept mille cinq cents euros) en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du ler juillet 20l7, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la société Foncière Cour Carrée et la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] et portant sur les locaux situés [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 10] ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant de nouveau,
Rectifie l'erreur matérielle commise par le premier juge ;
Fixe à la somme de 86.750 euros (quatre vingt six mille sept cents cinquante euros) en principal, hors taxes et hors charges, par an, à compter du ler juillet 20l7, le montant du loyer annuel du bail renouvelé entre la société Foncière Cour Carrée et la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] et portant sur les locaux situés [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 10] ;
Rejette la demande de majoration du loyer formée par la société Foncière Cour Carrée ;
Condamne la société Foncière Cour Carrée à payer à la société Banque Populaire Rives de [Localité 8] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Foncière Cour Carrée à supporter la charge des dépens d'appel dont distraction au profit de Me Véronique de La Taille, Récamier Avocats Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE