Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 1-7, 5 octobre 2023, n° 22/14086
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 05 OCTOBRE 2023
N° 2023/ 302
Rôle N° RG 22/14086 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKGWJ
[W] [N]
C/
[D] [A] ÉPOUSE [C] épouse [A]
[H] [Y] épouse [A]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric NOELL
Me Hervé ITRAC
Me Jean-louis BONAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité d'AUBAGNE en date du 14 Octobre 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 1120000308.
APPELANT
Monsieur [W] [N]
né le [Date naissance 7] 1941 à [Localité 13]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Frédéric NOELL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
INTIMEES
Madame [D] [A] épouse [C] épouse [A]
née le [Date naissance 8] 1971 à [Localité 11] (94), demeurant [Adresse 9]
représentée par Me Jean-louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Benjamin GUION, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
Madame [H] [Y] épouse [A]
née le [Date naissance 2] 1937 à [Localité 12], demeurant [Adresse 10]
représentée par Me Hervé ITRAC, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Juin 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère,a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2023,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par actes des 30 novembre 2020 et 04 décembre 2020, Madame [A] épouse [C] a fait assigner Monsieur [W] [N] et Madame [Y] épouse [N] aux fins de voir prononcer la résolution judiciaire d'un bail verbal liant les parties, portant sur un bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] et de voir prononcer leur condamnation solidaire à un impayé locatif.
Madame [Y] épouse [N] est la soeur de Madame [Y] épouse [A] et la tante de Madame [A] épouse [C].
Par acte du 30 décembre 2020, Monsieur et Madame [N] ont assigné en intervention forcée Madame [H] [Y] épouse [A] pour qu'elle soutienne le débouté des prétentions de Madame [A] épouse [C] et subsidiairement, qu'elle soit condamnée à les garantir de toutes condamnations financières prononcées à leur encontre.
Madame [Y] épouse [N] est décédée le [Date décès 1] 2021.
Par acte des 23 et 24 août 2021, Madame [A] épouse [C] a assigné en intervention forcée Monsieur [W] [N], Monsieur [J] [T] et Monsieur [R] [T], héritiers de Madame [Y] épouse [N] aux fins principalement de voir prononcer la jonction entre les procédures, de voir prononcer la résiliation judiciaire du bail verbal et de les voir condamner à lui verser un arriéré locatif et une indemnité d'occupation.
Par jugement réputé contradictoire du 14 octobre 2022, le tribunal de proximité dAubagne a :
- ordonné la jonction des dossiers enregistrés sous le numéro RG11 21-11 d'une part et RG 11 21-274 d'autre part au dossier enregistre RG 11 20-308,
- pris acte du décès de Madame [V] [Y] épouse [N] survenu le [Date décès 1]/2021,
- rejeté les demandes de Madame [D] [A] épouse [C] à l'encontre de Monsieur [J] [T] et Monsieur [R] [P] [E] [T]
- rejeté la demande de Monsieur [W] [F] [N] d'être relevé et garanti par Madame [H] [Y] épouse [A],
- rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame [H] [Y] épouse [A] pour procédure abusive
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [H] [Y] épouse [A] la somme de CINQ CENTS EUROS (500,00 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- écarté des débats comme non conformes aux articles 220 et suivants du code de procédure civile les attestations de Madame [S], de Madame [Z], de Madame [K] et de Monsieur et Madame [O],
- constaté les manquements graves de Monsieur [W] [F] [N] locataire à ses obligations,
- constaté le défaut de paiement des loyers par Monsieur [W] [F] [N],
- prononcé la résiliation judiciaire du bail verbal liant les parties pour manquements graves à ses clauses et obligations,
- ordonné l'expulsion passé le délai prévu par l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution de Monsieur [W] [F] [N] et de tous occupants de son chef, des locaux situés a [Adresse 3] cadastré section AP n°[Cadastre 4] et [Cadastre 5] par toutes voies et moyens de droit, et au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme en principal et accessoire de DIX SEPT MILLE QUATRE CENTS EUROS (17.400,00 €)correspondant aux loyers et charges impayés selon décompte arrêté à la date de 06/2020,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] une indemnité d'occupation mensuelle fixée au montant actuel du loyer et des charges jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000,00 €) à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 .500,00 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] aux dépens de l'instance.
Le premier juge a écarté toutes demandes formées à l'encontre de Messieurs [T] (fils et petits fils de Madame [Y] épouse [N]), au motif que Monsieur [W] [N] était usufruitier des biens de sa défunte épouse.
Il a noté que Madame [H] [Y] épouse [A], propriétaire du bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] jusqu'au 18 juillet 2011, en avait fait donation à sa fille, Madame [D] [A] épouse [C], si bien que cette dernière était fondée à réclamer des loyers à compter du premier août 2015.
Il a rejeté la demande d'appel en garantie formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et a rejeté la demande de dommages et intérêts faite par cette dernière à l'encontre de Monsieur [N] en l'absence de démonstration d'une faute commise par celui-ci.
Il a écarté des débats diverses attestations pour n'être pas conformes à l'article 220 du code de procédure civile.
Il a estimé que Madame [A] épouse [C] et Monsieur [N] étaient liés par un bail verbal dont ce dernier se prévalait. Il a jugé que le loyer s'élevait à la somme mensuelle de 300 euros. Il a ainsi condamné Monsieur [N] à verser la somme de 17.400 euros au titre d'un arriéré locatif.
Il a condamné Mnosieur [N] à verser à Madame [A] épouse [C] des dommages et intérêts pour résistance abusive.
Le 24 octobre 2022, Monsieur [N] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a rejeté sa demande d'appel en garantie de Madame [H] [Y] épouse [A], en ce qu'elle l'a été condamné à verser des indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'elle a écarté les attestations de Madame [S], [Z], [K] et Monsieur et Madame [O], en ce qu'elle a prononcé la résiliation judiciaire du bail, ordonné son expulsion, en ce qu'elle l'a condamné à un arriéré locatif de 17.200 euros, à des indemnités d'occupation et aux dépens et en ce qu'elle a rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
Madame [D] [A] née [C] et Madame [H] [Y] épouse [A] ont constitué avocat.
Par conclusions notifiées le 17 mai 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se reporter, Monsieur [N] demande à la cour :
- de réformer le jugement déféré dans son intégralité
- de débouter Madame [A] épouse [C] de ses demandes
- de condamner Madame [A] épouse [C] à lui rembourser la somme de 2400 euros de loyers perçus de janvier 2020 à août 2020
- de condamner Madame [A] épouse [C] à lui verser la somme de 22.898,04 euros au titre des sommes saisies et versées consécutivement au jugement déféré
* subsidiairement
- de relever et garantir Monsieur [N] des conséquences financières de toute condamnation éventuelle que pourrait prononcer à son encontre le tribunal dans le cadre des instances engagées par Madame [A]-[C]
* à titre infiniment subsidiaire
- de lui octroyer les plus larges délais de paiement 36 mois au titre des dispositions de l'article 1343-5 du code civil
*à titre reconventionnel
- de condamner Madame [A] [H] et Madame [C]-[A] [D] solidairement à lui payer la somme de 10.000 € a titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
- de condamner Madame [A] [H] et Madame [C]-[A] [D] solidairement à payer à titre d'amende civile la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code civil.
- de condamner solidairement Madame [A] [H] et Madame [A]- [C] [D] à lui régler la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et frais d'appel distraits au profit de Maître NOELL Frédéric.
Il relate les tergiversations de la partie adverse s'agissant du caractère gratuit ou pas de son occupation des lieux. Il expose avoir réglé des loyers depuis 35 ans à Madame [Y] épouse [A], en espèces, à sa demande. Il relève avoir payé par chèques à compter de l'année 2020 après avoir appris en janvier 2020 que le bien appartenait à Madame [A] épouse [C].
Il soutient justifier avoir toujours réglé les loyers. Il relève que le paiement ne se faisait pas tous les mois mais que l'argent était remis à Madame [A] qui venait deux ou trois fois par an à [Localité 12] et recevait les règlements convenus. Il fait état de retraits d'espèces et note qu'un procès-verbal d'huissier démontre que Madame [A] a expliqué par téléphone que les loyers seront gratuits à compter du premier janvier et que tout avait toujours été payé en espèces.
Il fait état d'un aveu extra-judiciaire constitué par les lettres de Madame [A] épouse [C] adressées aux époux [N] le 28 janvier 2020 et le 22 avril 2020 qui notent qu'aucun loyer n'a jamais été réclamé et qu'il s'agit d'une mise à disposition gratuite.
Il relève que les chèques qu'il a adressé à compter de janvier 2020 n'ont pas tous été encaissés.
Il soutient qu'il est donc possible de dire que son occupation était gratuite jusqu'en août 2020, période à compter de laquelle le contrat liant les parties est devenu un bail verbal. Il en conclut n'être redevable de loyers qu'à compter de cette date, si bien qu'il sollicite le remboursement de la somme de 2400 euros correspondant aux loyers payés de janvier à août 2020.
Il expose être âgé et estime bénéficier d'une protection selon laquelle le bailleur ne peut lui donner congé sauf à lui trouver un logement similaire.
Il sollicite des dommages et intérêts en notant que la procédure engagée contre lui par la nièce de sa femme a eu des conséquences psychologiques importantes sur lui et sa défunte épouse.
Il demande à ce que les intimées soient condamnées également à une amende civile.
Subsidiairement, il sollicite des délais de paiement.
Par conclusions notifiées le 02 décembre 2022, Madame [Y] épouse [A] demande à la cour :
- de confirmer le jugement déféré
- de débouter Monsieur [N] de ses demandes
- de condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 5000 euros pour procédure abusive
- de condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle expose être devenue propriétaire du bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] le 12 novembre 1971 à la suite de partage familiaux et en avoir fait donation à sa fille, Madame [D] [A] épouse [C], en 2011, ce dont était informée sa soeur, Madame [Y] épouse [N].
Elle relève que le bien situé à [Localité 12] n'était pas la résidence principale des époux [N] qui, toutefois, après des séjours saisonniers, y ont élu domicile principal.
Elle fait état d'un engagement verbal avec sa soeur, Madame [N], depuis 30 ans.
Elle conteste avoir perçu un loyer de 300 euros par mois depuis 1987, comme l'affirme Monsieur [N] et relève que ce dernier ne le démontre pas.
Elle estime abusive la procédure intentée à son encontre par Monsieur [N].
Par conclusions notifiées le 20 décembre 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [A] épouse [C] demande à la cour :
- de confirmer le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité d'occupation fixée à la somme de 300 euros par mois,
- de fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 50 euros par jour,
- de condamner Monsieur [N] à lui verser 3000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif
- de condamner Monsieur [N] à la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner Monsieur [N] aux dépens.
Elle expose être devenue propriétaire du bien sis 191 (anciennement [Adresse 3] à [Localité 12] après que sa mère, Madame [Y] épouse [A] lui en a fait donation le 18 juillet 2011, acte qui avait reçu l'accord de Madame [Y] épouse [N].
Elle soutient que le logement a été loué aux époux [N], dans le cadre d'un bail verbal, ce qu'avait d'ailleurs indiqué son conseil dans une correspondance du 11 juin 2020.
Elle déclare qu'aucun loyer n'a été versé entre les mains de sa mère et souligne que Monsieur [N] ne le démontre pas. Elle fait état d'impayés du mois d'août 2015 au 28 août 2020, ce qui a justifié la délivrance d'un commandement de payer du 28 août 2020.
Elle indique que les époux [N] ont uniquement payé les loyers des mois de mai à octobre 2020, puis à compter du premier janvier 2021.
Elle note que les correspondances dont elle est l'auteur et aux termes desquelles elle fait état d'une mise à disposition gratuite n'est que la manifestation de sa lassitude face aux tergiversations de Monsieur [N] qui, de son côté, a revendiqué, par lettre de son conseil du 11 juin 2020, l'existence d'un bail verbal moyennant un loyer mensuel de 300 euros.
Elle souligne que la protection du locataire âgé de plus de 65 ans ne s'applique pas au cas d'espèce.
Elle estime que les attestations produites au débat par Monsieur [N] doivent être écartées des débats pour n'être pas rédigées conformément à l'article 220 du code de procédure civile. Elle note par ailleurs qu'elles ne sont pas probantes et sont de complaisances.
Elle conclut au rejet des demandes de Monsieur [N] dont elle déplore la mauvaise foi.
Elle sollicite la fixation d'une indemnité d'occupation à hauteur de 50 euros par jour de retard, alors que le logement a une valeur locative plus importante qu'une somme de 300 euros par mois.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2023.
MOTIVATION
Le prêt à usage se définit comme la remise d'une chose par l'une des parties à l'autre pour s'en servir à charge pour le preneur de la rendre après s'en être servi selon l'article 1875 du code civil.
L'article 1876 du même code précise qu'il est essentiellement gratuit même si ce caractère n'exclut pas l'obligation pour l'emprunteur de rembourser au prêteur les impenses faites par ce dernier telles que sa part de taxes ou de consommations diverses.
Le bail se définit comme la jouissance d'une chose accordée par son propriétaire à un tiers pendant un certain temps et moyennant un certain prix que l'occupant s'oblige à payer selon l'article 1709 du code civil.
Il peut être verbal selon les dispositions de l'article 1714 du même code.
La preuve du bail verbal qui incombe à celui qui entend s'en prévaloir ne peut en principe être rapportée par témoins conformément à l'article 1715 de ce code.
Cependant, lorsqu'il a reçu exécution, il peut être prouvé pour tous moyens y compris par témoins ou présomptions.
La preuve du commencement d'exécution peut être rapportée par tous moyens s'agissant d'un fait juridique.
Il convient d'apprécier si les attestations produites au débat par Monsieur [N], qui ne répondent pas à l'intégralité des exigences de l'article 202 du code de procédure civile, présentent des garanties suffisantes pour être probantes.
Les attestations produites par Monsieur [N] (celles de Madame [S], Madame [Z], Madame [K], Monsieur et Madame [O]), toutes accompagnées d'une pièce d'identité, témoignent de ce que ce dernier vit au 191 (anciennement [Adresse 3] à [Localité 12] depuis de nombreuses années et revendique être locataire du bien occupé.
Les attestations, qui ne font que retranscrire des propos tenus par Monsieur [N] ne sont pas probantes pour établir l'existence d'un bail.
Les autres attestations produites (celles Madame [M], Monsieur et Madame [B], Monsieur et Madame [X]) ne répondent pas non plus aux exigences de l'article 202. Elles sont toutefois accompagnées de la pièce d'identité de leur auteur et permettent de constater que Monsieur et Madame [N] résidaient 'à longueur d'années' à [Localité 12] et qu'ils ne se rendaient dans leur maison du Cantal que durant les périodes estivales.
Les pièces produites par Monsieur [N] permettent de démontrer que ce dernier a établi sa résidence principale dans le bien appartenant depuis 2011 à Madame [A] épouse [C].
Le 06 janvier 2020, Monsieur et Madame [N] adressaient une lettre recommandée avec accusé de réception à Madame [H] [A] (née [Y]), aux termes de laquelle il était noté que 'conformément à nos accords, nous te prions de trouver ci-joint un chèque d'un montant de 300 euros (trois cent) correspondant au loyer du mois de janvier 2020. Nous t'adressions jusqu'à présent le loyer en espèces, nous souhaitons désormais régler le loyer par chèque ou virement (...)'.
Madame [A] épouse [C] répondait à cette missive par lettre recommandée avec accusée de réception du 28 janvier 2020 pour indiquer : '(...) Je tiens (...) à te rappeler que je suis propriétaire du cabanon de [Localité 12] depuis 2011. (....). Contrairement à ce que tu prétends, aucun loyer mensuel n'a jamais été réclamé ni réglé, puisqu'il s'agit d'une mise à disposition à titre gratuit de ma part. Je n'entends pas revenir à cet égard sur les volontés de [L] que ce soit pour le passé et pour l'avenir(...).
Les parties ne s'accordaient pas sur la nature de l'occupation du bien, Monsieur et Madame [N] indiquant y avoir fixé leur résidence principale depuis 1987 et régler un loyer, Madame [A] épouse [C] relevant que sa mère avait mis ce cabanon à disposition de sa soeur (épouse défunte de Monsieur [N]) à titre de résidence secondaire et pour quelques mois par an, pendant l'hiver, à titre gratuit.
Monsieur [N] ne démontre pas l'accord des parties sur le versement d'un loyer mensuel de 300 euros qui serait la contre partie de l'occupation du bien. Il ne démontre pas avoir procédé à ce versement par espèces. Il ne justifie pas de l'encaissement d'une telle somme par le propriétaire des locaux. Le procès-verbal d'huissier du justice du 23 octobre 2020 n'a pas de force probante puisqu'il n'est pas possible d'identifier les locuteurs et que rien ne permet d'établir l'existence d'un loyer de 300 euros par mois en contrepartie de l'occupation des lieux.
A compter du mois de janvier 2020, Monsieur et Madame [N] ont adressé des chèques de 300 euros, tout d'abord à Madame [Y] épouse [A] puis à Madame [A] née [C]. Dès le 11 juillet 2011, l'épouse de Monsieur [N] savait que soeur, Madame [H] [Y] épouse [A] donnait cette maison en pleine propriété à sa fille, Madame [A] épouse [C] (pièces 1 et 2 de Madame [A] épouse [C]).
Le 09 mars 2020, Madame [A] épouse [C] a envoyé une lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur et Madame [N] aux termes de laquelle elle indiquait réitérer les termes de sa correspondance du 28 janvier 2020, n'avoir pas l'intention d'encaisser les deux chèques qui lui avaient été transmis et les leur adresser en retour avec la mention 'annulé'. Elle ajoutait (s'adressant en réalité à Monsieur [N]) ' je t'indique par ailleurs que l'agence Fleurot immobilier de [Localité 12] doit se mettre en relation avec toi en vue de la signature, si tu le souhaites, d'un contrat de location à usage d'habitation principale'.
Par une lettre recommandée du 22 avril 2020, Madame [A] épouse [C] indiquait à Monsieur [N] qu'elle regrettait le fait qu'il fasse état d'accords qui n'avaient jamais existé, qu'il feignait d'ignorer la teneur de ses lettres et persistait à solliciter une quittance, demande sans objet puisqu'il aucun loyer n'avait jamais été ni sollicité ni réglé en contre-partie de l'occupation de la maison de [Localité 12]. Elle renvoyait le chèque de 300 euros établi le premier avril 2020.
Enfin, Monsieur [N] produit une attestation d'hébergement émanant de Madame [A] née [Y], du 02 juillet 1991, aux termes de laquelle cette dernière (alors propriétaire du bien), attestait héberger Monsieur et Madame [N] dans sa propriété de [Localité 12]. Par ailleurs, Madame [A] née [Y], qui ne conteste pas être le rédacteur de l'attestation du 02 juillet 1991, énonce dans ses conclusions n'avoir jamais perçu un loyer mensuel de 300 euros en espèces depuis 1987.
A partir du mois de mai 2020, une agence immobilière a envoyé un projet de bail moyennant un loyer mensuel de 375 euros à Monsieur et Madame [N], refusé par ces derniers.
C'est dans ce cadre que Madame [D] [A] épouse [C] a fait délivrer le 28 août 2020 à Monsieur et Madame [N] un commandement de payer d'avoir à payer la somme de 18.000 euros, correspondant à un impayés locatifs pour des loyers de 300 euros par mois à compter du premier août 2015.
Or, elle ne peut se contredire en faisant état d'un bail verbal moyennant un loyer mensuel de 300 euros revendiqué par Monsieur [N] alors qu'elle avait envoyé auparavant des lettres faisant état d'une occupation gratuite et qu'elle avait refusé d'encaisser les chèques qui lui avaient été adressés depuis le mois de janvier 2020. Monsieur [N] de son côté ne démontre pas l'existence d'un bail verbal qui aurait auparavant lié les parties avec le paiement d'une somme mensuelle de 300 euros.
Il ressort en revanche des pièces produites qu'à compter de la délivrance du commandement de payer, alors que Monsieur [N] continuait à envoyer des chèques depuis le premier janvier 2020, Madame [A] épouse [C] a établi au profit de ce dernier des quittances de loyer et a encaissé les chèques, pour les périodes suivantes :
mai, juillet, août, septembre et octobre 2020 (pièce 9 de Madame [A] épouse [C]).
En acceptant d'encaisser les chèques envoyés par Monsieur [N] et en lui remettant des quittances de loyer, pour un montant mensuel de 300 euros, il est démontré qu'il existe à compter du mois de mai 2020 une commune des parties de se lier par un bail moyennant un loyer mensuel de 300 euros.
Sur la demande de résiliation judiciaire du bail
Selon l'article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut provoquer la résolution du contrat.
Monsieur [N] ne peut revendiquer la protection du locataire âgé de plus de 65 ans visée par l'article 15 III de la loi du 06 juillet 1989 puisque Madame [A] épouse [C] sollicite la résiliation judiciaire du bail pour impayés locatifs et non dans le cadre de la validation d'un congé.
Il a été jugé qu'il existe un bail verbal liant les parties à compter du premier mai 2020 portant sur le bien actuellement occupé par Monsieur [N], moyennant la somme mensuelle de 300 euros.
Madame [A] épouse [C] sollicite la confirmation du jugement déféré qui a condamné Monsieur [N] au versement de la somme de 17.400 euros, correspondant à l'arriéré locatif pour une période courant du premier août 2015 au mois de juin 2020 inclus.
Elle ne sollicite pas subsidiairement le versement d'autres loyers, pour des périodes postérieures.
Il est établi que Madame [A] épouse [C] a délivré une quittance de loyer pour le mois de mai. Monsieur [N] ne démontre pas avoir payé le loyer du mois de juin 2020. Ce seul impayé n'est pas un manquement suffisamment grave justifiant le prononcé de la résiliation judiciaire du bail.
Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
En l'absence de résiliation du bail, il n'y a donc pas lieu de prononcer la condamnation de Monsieur [N] au versement d'une indemnité d'occupation et d'ordonner son expulsion.
Monsieur [N] sera condamné à verser à Madame [A] épouse [C] la somme de 300 euros au titre de l'impayé locatif du mois de juin 2020.
Compte tenu du montant de cette somme, il sera débouté de sa demande de délais de paiement.
Il sera débouté de sa demande tendant à être remboursé de la somme de 2400 euros pour la période de janvier 2020 à août 2020. En effet, il ne justifie pas avoir payé la somme mensuelle de 300 euros pour la période de janvier à avril 2020 (la simple production de chèques, sans justificatif d'encaissement, ne vaut pas paiement). Pour la période débutant en mai 2020, le loyer est dû.
Monsieur [N], qui ne démontre aucune faute commise par Madame [Y] épouse [A] à son encontre, sera débouté de sa demande d'appel en garantie à l'encontre de cette dernière. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C]
Monsieur [N] ne démontre pas que ces dernières auraient commis des fautes à son encontre (ni contractuelle, ni extra-contractuelle). Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la demande d'amende civile formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C]
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
Même si la procédure intentée par Madame [A] épouse [C] n'a pas abouti, il n'apparaît pas que son action en justice ait dégénéré en abus de droit, d'autant moins que Monsieur [N], qui revendiquait un bail verbal depuis plusieurs années, conclut dans le même temps à une occupation gratuite jusqu'en août 2020.
Il n'y a pas lieu de condamner Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C] à une amende civile. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes de dommages et intérêts formée par Madame [A] épouse [C] à l'encontre de Monsieur [N] pour résistance abusive et appel abusif et sur la demande de dommages et intérêts de Madame [Y] épouse [A] pour procédures abusives
Il a été jugé que l'occupation de Monsieur [N] du bien appartenant à Madame [A] épouse [C] avait été gratuite jusqu'en avril 2020 inclus et que la relation locative n'avait été nouée entre les parties qu'à compter du mois de mai 2020. Il a également été jugé que le seul impayé locatif pour la période sollicitée datait du mois de juin 2020 et qu'aucune résiliation judiciaire du bail n'était encourue. Dès lors, il ne peut être reproché à Monsieur [N] une résistance abusive. Madame [A] épouse [C] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement sera infirmé sur ce point.
L'appel formé par Monsieur [N] à l'encontre de la décision entreprise n'a pas dégénéré en abus de droit. Madame [A] épouse [C] sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Madame [Y] ne justifie pas d'une action abusive intentée par Monsieur [N] à son encontre qui aurait dégénéré en abus de droit. Le jugement déféré qui a rejeté sa demande à ce titre sera confirmé. Sa demande de dommages et intérêts au titre d'un appel abusif formé par Monsieur [N] n'est pas plus justifiée. Elle en sera déboutée.
Sur la demande de Monsieur [N] tendant à être remboursé de la somme de 22.898, 04 euros
Il appartient aux parties d'exécuter les termes de cet arrêt et d'en tirer toutes conséquences financières. Monsieur [N] sera débouté de sa demande de remboursement.
Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
Chaque partie est en partie succombante. Dès lors, il convient de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement déféré qui a condamné Monsieur [N] aux dépens et à verser à Madame [A] épouse [C] et Madame [Y] épouse [A] des indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile sera infirmé.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe
REFORME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'appel en garantie formée par Monsieur [W] [N], sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts et d'amende civile formées par Monsieur [W] [N], sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Madame [H] [Y] épouse [A]
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
DIT que Monsieur [W] [N] et Madame [D] [A] épouse [C] sont liés depuis le mois de mai 2020 par un bail verbal portant sur les locaux occupés par Monsieur [N] au [Adresse 6] à [Localité 12] moyennant un loyer mensuel de 300 euros,
CONDAMNE Monsieur [W] [N] à verser à Madame [D] [A] épouse [C] la somme de 300 euros au titre du loyer du mois de juin 2020,
REJETTE la demande de Madame [D] [A] épouse [C] tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du bail,
REJETTE les demandes de dommages et intérêts formées par Monsieur [W] [N], Madame [H] [Y] épouse [A] et Madame [D] [A] épouse [C],
REJETTE la demande de Monsieur [W] [N] tendant à être remboursé des sommes de 2400 euros et 22.898, 04 euros, les parties devant faire leur compte en exécutant le présent arrêt,
DIT que les parties supporteront la charge des dépens qu'ils ont exposés en première instance et en appel,
DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 05 OCTOBRE 2023
N° 2023/ 302
Rôle N° RG 22/14086 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKGWJ
[W] [N]
C/
[D] [A] ÉPOUSE [C] épouse [A]
[H] [Y] épouse [A]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric NOELL
Me Hervé ITRAC
Me Jean-louis BONAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité d'AUBAGNE en date du 14 Octobre 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 1120000308.
APPELANT
Monsieur [W] [N]
né le [Date naissance 7] 1941 à [Localité 13]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Frédéric NOELL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
INTIMEES
Madame [D] [A] épouse [C] épouse [A]
née le [Date naissance 8] 1971 à [Localité 11] (94), demeurant [Adresse 9]
représentée par Me Jean-louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Benjamin GUION, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
Madame [H] [Y] épouse [A]
née le [Date naissance 2] 1937 à [Localité 12], demeurant [Adresse 10]
représentée par Me Hervé ITRAC, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Juin 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère,a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2023,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par actes des 30 novembre 2020 et 04 décembre 2020, Madame [A] épouse [C] a fait assigner Monsieur [W] [N] et Madame [Y] épouse [N] aux fins de voir prononcer la résolution judiciaire d'un bail verbal liant les parties, portant sur un bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] et de voir prononcer leur condamnation solidaire à un impayé locatif.
Madame [Y] épouse [N] est la soeur de Madame [Y] épouse [A] et la tante de Madame [A] épouse [C].
Par acte du 30 décembre 2020, Monsieur et Madame [N] ont assigné en intervention forcée Madame [H] [Y] épouse [A] pour qu'elle soutienne le débouté des prétentions de Madame [A] épouse [C] et subsidiairement, qu'elle soit condamnée à les garantir de toutes condamnations financières prononcées à leur encontre.
Madame [Y] épouse [N] est décédée le [Date décès 1] 2021.
Par acte des 23 et 24 août 2021, Madame [A] épouse [C] a assigné en intervention forcée Monsieur [W] [N], Monsieur [J] [T] et Monsieur [R] [T], héritiers de Madame [Y] épouse [N] aux fins principalement de voir prononcer la jonction entre les procédures, de voir prononcer la résiliation judiciaire du bail verbal et de les voir condamner à lui verser un arriéré locatif et une indemnité d'occupation.
Par jugement réputé contradictoire du 14 octobre 2022, le tribunal de proximité dAubagne a :
- ordonné la jonction des dossiers enregistrés sous le numéro RG11 21-11 d'une part et RG 11 21-274 d'autre part au dossier enregistre RG 11 20-308,
- pris acte du décès de Madame [V] [Y] épouse [N] survenu le [Date décès 1]/2021,
- rejeté les demandes de Madame [D] [A] épouse [C] à l'encontre de Monsieur [J] [T] et Monsieur [R] [P] [E] [T]
- rejeté la demande de Monsieur [W] [F] [N] d'être relevé et garanti par Madame [H] [Y] épouse [A],
- rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame [H] [Y] épouse [A] pour procédure abusive
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [H] [Y] épouse [A] la somme de CINQ CENTS EUROS (500,00 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- écarté des débats comme non conformes aux articles 220 et suivants du code de procédure civile les attestations de Madame [S], de Madame [Z], de Madame [K] et de Monsieur et Madame [O],
- constaté les manquements graves de Monsieur [W] [F] [N] locataire à ses obligations,
- constaté le défaut de paiement des loyers par Monsieur [W] [F] [N],
- prononcé la résiliation judiciaire du bail verbal liant les parties pour manquements graves à ses clauses et obligations,
- ordonné l'expulsion passé le délai prévu par l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution de Monsieur [W] [F] [N] et de tous occupants de son chef, des locaux situés a [Adresse 3] cadastré section AP n°[Cadastre 4] et [Cadastre 5] par toutes voies et moyens de droit, et au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme en principal et accessoire de DIX SEPT MILLE QUATRE CENTS EUROS (17.400,00 €)correspondant aux loyers et charges impayés selon décompte arrêté à la date de 06/2020,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] une indemnité d'occupation mensuelle fixée au montant actuel du loyer et des charges jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000,00 €) à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] à payer à Madame [D] [I] [U] [A] épouse [G] la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 .500,00 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires,
- condamné Monsieur [W] [F] [N] aux dépens de l'instance.
Le premier juge a écarté toutes demandes formées à l'encontre de Messieurs [T] (fils et petits fils de Madame [Y] épouse [N]), au motif que Monsieur [W] [N] était usufruitier des biens de sa défunte épouse.
Il a noté que Madame [H] [Y] épouse [A], propriétaire du bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] jusqu'au 18 juillet 2011, en avait fait donation à sa fille, Madame [D] [A] épouse [C], si bien que cette dernière était fondée à réclamer des loyers à compter du premier août 2015.
Il a rejeté la demande d'appel en garantie formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et a rejeté la demande de dommages et intérêts faite par cette dernière à l'encontre de Monsieur [N] en l'absence de démonstration d'une faute commise par celui-ci.
Il a écarté des débats diverses attestations pour n'être pas conformes à l'article 220 du code de procédure civile.
Il a estimé que Madame [A] épouse [C] et Monsieur [N] étaient liés par un bail verbal dont ce dernier se prévalait. Il a jugé que le loyer s'élevait à la somme mensuelle de 300 euros. Il a ainsi condamné Monsieur [N] à verser la somme de 17.400 euros au titre d'un arriéré locatif.
Il a condamné Mnosieur [N] à verser à Madame [A] épouse [C] des dommages et intérêts pour résistance abusive.
Le 24 octobre 2022, Monsieur [N] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a rejeté sa demande d'appel en garantie de Madame [H] [Y] épouse [A], en ce qu'elle l'a été condamné à verser des indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'elle a écarté les attestations de Madame [S], [Z], [K] et Monsieur et Madame [O], en ce qu'elle a prononcé la résiliation judiciaire du bail, ordonné son expulsion, en ce qu'elle l'a condamné à un arriéré locatif de 17.200 euros, à des indemnités d'occupation et aux dépens et en ce qu'elle a rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
Madame [D] [A] née [C] et Madame [H] [Y] épouse [A] ont constitué avocat.
Par conclusions notifiées le 17 mai 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se reporter, Monsieur [N] demande à la cour :
- de réformer le jugement déféré dans son intégralité
- de débouter Madame [A] épouse [C] de ses demandes
- de condamner Madame [A] épouse [C] à lui rembourser la somme de 2400 euros de loyers perçus de janvier 2020 à août 2020
- de condamner Madame [A] épouse [C] à lui verser la somme de 22.898,04 euros au titre des sommes saisies et versées consécutivement au jugement déféré
* subsidiairement
- de relever et garantir Monsieur [N] des conséquences financières de toute condamnation éventuelle que pourrait prononcer à son encontre le tribunal dans le cadre des instances engagées par Madame [A]-[C]
* à titre infiniment subsidiaire
- de lui octroyer les plus larges délais de paiement 36 mois au titre des dispositions de l'article 1343-5 du code civil
*à titre reconventionnel
- de condamner Madame [A] [H] et Madame [C]-[A] [D] solidairement à lui payer la somme de 10.000 € a titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
- de condamner Madame [A] [H] et Madame [C]-[A] [D] solidairement à payer à titre d'amende civile la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code civil.
- de condamner solidairement Madame [A] [H] et Madame [A]- [C] [D] à lui régler la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et frais d'appel distraits au profit de Maître NOELL Frédéric.
Il relate les tergiversations de la partie adverse s'agissant du caractère gratuit ou pas de son occupation des lieux. Il expose avoir réglé des loyers depuis 35 ans à Madame [Y] épouse [A], en espèces, à sa demande. Il relève avoir payé par chèques à compter de l'année 2020 après avoir appris en janvier 2020 que le bien appartenait à Madame [A] épouse [C].
Il soutient justifier avoir toujours réglé les loyers. Il relève que le paiement ne se faisait pas tous les mois mais que l'argent était remis à Madame [A] qui venait deux ou trois fois par an à [Localité 12] et recevait les règlements convenus. Il fait état de retraits d'espèces et note qu'un procès-verbal d'huissier démontre que Madame [A] a expliqué par téléphone que les loyers seront gratuits à compter du premier janvier et que tout avait toujours été payé en espèces.
Il fait état d'un aveu extra-judiciaire constitué par les lettres de Madame [A] épouse [C] adressées aux époux [N] le 28 janvier 2020 et le 22 avril 2020 qui notent qu'aucun loyer n'a jamais été réclamé et qu'il s'agit d'une mise à disposition gratuite.
Il relève que les chèques qu'il a adressé à compter de janvier 2020 n'ont pas tous été encaissés.
Il soutient qu'il est donc possible de dire que son occupation était gratuite jusqu'en août 2020, période à compter de laquelle le contrat liant les parties est devenu un bail verbal. Il en conclut n'être redevable de loyers qu'à compter de cette date, si bien qu'il sollicite le remboursement de la somme de 2400 euros correspondant aux loyers payés de janvier à août 2020.
Il expose être âgé et estime bénéficier d'une protection selon laquelle le bailleur ne peut lui donner congé sauf à lui trouver un logement similaire.
Il sollicite des dommages et intérêts en notant que la procédure engagée contre lui par la nièce de sa femme a eu des conséquences psychologiques importantes sur lui et sa défunte épouse.
Il demande à ce que les intimées soient condamnées également à une amende civile.
Subsidiairement, il sollicite des délais de paiement.
Par conclusions notifiées le 02 décembre 2022, Madame [Y] épouse [A] demande à la cour :
- de confirmer le jugement déféré
- de débouter Monsieur [N] de ses demandes
- de condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 5000 euros pour procédure abusive
- de condamner Monsieur [N] à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle expose être devenue propriétaire du bien situé [Adresse 6] à [Localité 12] le 12 novembre 1971 à la suite de partage familiaux et en avoir fait donation à sa fille, Madame [D] [A] épouse [C], en 2011, ce dont était informée sa soeur, Madame [Y] épouse [N].
Elle relève que le bien situé à [Localité 12] n'était pas la résidence principale des époux [N] qui, toutefois, après des séjours saisonniers, y ont élu domicile principal.
Elle fait état d'un engagement verbal avec sa soeur, Madame [N], depuis 30 ans.
Elle conteste avoir perçu un loyer de 300 euros par mois depuis 1987, comme l'affirme Monsieur [N] et relève que ce dernier ne le démontre pas.
Elle estime abusive la procédure intentée à son encontre par Monsieur [N].
Par conclusions notifiées le 20 décembre 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [A] épouse [C] demande à la cour :
- de confirmer le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité d'occupation fixée à la somme de 300 euros par mois,
- de fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 50 euros par jour,
- de condamner Monsieur [N] à lui verser 3000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif
- de condamner Monsieur [N] à la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner Monsieur [N] aux dépens.
Elle expose être devenue propriétaire du bien sis 191 (anciennement [Adresse 3] à [Localité 12] après que sa mère, Madame [Y] épouse [A] lui en a fait donation le 18 juillet 2011, acte qui avait reçu l'accord de Madame [Y] épouse [N].
Elle soutient que le logement a été loué aux époux [N], dans le cadre d'un bail verbal, ce qu'avait d'ailleurs indiqué son conseil dans une correspondance du 11 juin 2020.
Elle déclare qu'aucun loyer n'a été versé entre les mains de sa mère et souligne que Monsieur [N] ne le démontre pas. Elle fait état d'impayés du mois d'août 2015 au 28 août 2020, ce qui a justifié la délivrance d'un commandement de payer du 28 août 2020.
Elle indique que les époux [N] ont uniquement payé les loyers des mois de mai à octobre 2020, puis à compter du premier janvier 2021.
Elle note que les correspondances dont elle est l'auteur et aux termes desquelles elle fait état d'une mise à disposition gratuite n'est que la manifestation de sa lassitude face aux tergiversations de Monsieur [N] qui, de son côté, a revendiqué, par lettre de son conseil du 11 juin 2020, l'existence d'un bail verbal moyennant un loyer mensuel de 300 euros.
Elle souligne que la protection du locataire âgé de plus de 65 ans ne s'applique pas au cas d'espèce.
Elle estime que les attestations produites au débat par Monsieur [N] doivent être écartées des débats pour n'être pas rédigées conformément à l'article 220 du code de procédure civile. Elle note par ailleurs qu'elles ne sont pas probantes et sont de complaisances.
Elle conclut au rejet des demandes de Monsieur [N] dont elle déplore la mauvaise foi.
Elle sollicite la fixation d'une indemnité d'occupation à hauteur de 50 euros par jour de retard, alors que le logement a une valeur locative plus importante qu'une somme de 300 euros par mois.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2023.
MOTIVATION
Le prêt à usage se définit comme la remise d'une chose par l'une des parties à l'autre pour s'en servir à charge pour le preneur de la rendre après s'en être servi selon l'article 1875 du code civil.
L'article 1876 du même code précise qu'il est essentiellement gratuit même si ce caractère n'exclut pas l'obligation pour l'emprunteur de rembourser au prêteur les impenses faites par ce dernier telles que sa part de taxes ou de consommations diverses.
Le bail se définit comme la jouissance d'une chose accordée par son propriétaire à un tiers pendant un certain temps et moyennant un certain prix que l'occupant s'oblige à payer selon l'article 1709 du code civil.
Il peut être verbal selon les dispositions de l'article 1714 du même code.
La preuve du bail verbal qui incombe à celui qui entend s'en prévaloir ne peut en principe être rapportée par témoins conformément à l'article 1715 de ce code.
Cependant, lorsqu'il a reçu exécution, il peut être prouvé pour tous moyens y compris par témoins ou présomptions.
La preuve du commencement d'exécution peut être rapportée par tous moyens s'agissant d'un fait juridique.
Il convient d'apprécier si les attestations produites au débat par Monsieur [N], qui ne répondent pas à l'intégralité des exigences de l'article 202 du code de procédure civile, présentent des garanties suffisantes pour être probantes.
Les attestations produites par Monsieur [N] (celles de Madame [S], Madame [Z], Madame [K], Monsieur et Madame [O]), toutes accompagnées d'une pièce d'identité, témoignent de ce que ce dernier vit au 191 (anciennement [Adresse 3] à [Localité 12] depuis de nombreuses années et revendique être locataire du bien occupé.
Les attestations, qui ne font que retranscrire des propos tenus par Monsieur [N] ne sont pas probantes pour établir l'existence d'un bail.
Les autres attestations produites (celles Madame [M], Monsieur et Madame [B], Monsieur et Madame [X]) ne répondent pas non plus aux exigences de l'article 202. Elles sont toutefois accompagnées de la pièce d'identité de leur auteur et permettent de constater que Monsieur et Madame [N] résidaient 'à longueur d'années' à [Localité 12] et qu'ils ne se rendaient dans leur maison du Cantal que durant les périodes estivales.
Les pièces produites par Monsieur [N] permettent de démontrer que ce dernier a établi sa résidence principale dans le bien appartenant depuis 2011 à Madame [A] épouse [C].
Le 06 janvier 2020, Monsieur et Madame [N] adressaient une lettre recommandée avec accusé de réception à Madame [H] [A] (née [Y]), aux termes de laquelle il était noté que 'conformément à nos accords, nous te prions de trouver ci-joint un chèque d'un montant de 300 euros (trois cent) correspondant au loyer du mois de janvier 2020. Nous t'adressions jusqu'à présent le loyer en espèces, nous souhaitons désormais régler le loyer par chèque ou virement (...)'.
Madame [A] épouse [C] répondait à cette missive par lettre recommandée avec accusée de réception du 28 janvier 2020 pour indiquer : '(...) Je tiens (...) à te rappeler que je suis propriétaire du cabanon de [Localité 12] depuis 2011. (....). Contrairement à ce que tu prétends, aucun loyer mensuel n'a jamais été réclamé ni réglé, puisqu'il s'agit d'une mise à disposition à titre gratuit de ma part. Je n'entends pas revenir à cet égard sur les volontés de [L] que ce soit pour le passé et pour l'avenir(...).
Les parties ne s'accordaient pas sur la nature de l'occupation du bien, Monsieur et Madame [N] indiquant y avoir fixé leur résidence principale depuis 1987 et régler un loyer, Madame [A] épouse [C] relevant que sa mère avait mis ce cabanon à disposition de sa soeur (épouse défunte de Monsieur [N]) à titre de résidence secondaire et pour quelques mois par an, pendant l'hiver, à titre gratuit.
Monsieur [N] ne démontre pas l'accord des parties sur le versement d'un loyer mensuel de 300 euros qui serait la contre partie de l'occupation du bien. Il ne démontre pas avoir procédé à ce versement par espèces. Il ne justifie pas de l'encaissement d'une telle somme par le propriétaire des locaux. Le procès-verbal d'huissier du justice du 23 octobre 2020 n'a pas de force probante puisqu'il n'est pas possible d'identifier les locuteurs et que rien ne permet d'établir l'existence d'un loyer de 300 euros par mois en contrepartie de l'occupation des lieux.
A compter du mois de janvier 2020, Monsieur et Madame [N] ont adressé des chèques de 300 euros, tout d'abord à Madame [Y] épouse [A] puis à Madame [A] née [C]. Dès le 11 juillet 2011, l'épouse de Monsieur [N] savait que soeur, Madame [H] [Y] épouse [A] donnait cette maison en pleine propriété à sa fille, Madame [A] épouse [C] (pièces 1 et 2 de Madame [A] épouse [C]).
Le 09 mars 2020, Madame [A] épouse [C] a envoyé une lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur et Madame [N] aux termes de laquelle elle indiquait réitérer les termes de sa correspondance du 28 janvier 2020, n'avoir pas l'intention d'encaisser les deux chèques qui lui avaient été transmis et les leur adresser en retour avec la mention 'annulé'. Elle ajoutait (s'adressant en réalité à Monsieur [N]) ' je t'indique par ailleurs que l'agence Fleurot immobilier de [Localité 12] doit se mettre en relation avec toi en vue de la signature, si tu le souhaites, d'un contrat de location à usage d'habitation principale'.
Par une lettre recommandée du 22 avril 2020, Madame [A] épouse [C] indiquait à Monsieur [N] qu'elle regrettait le fait qu'il fasse état d'accords qui n'avaient jamais existé, qu'il feignait d'ignorer la teneur de ses lettres et persistait à solliciter une quittance, demande sans objet puisqu'il aucun loyer n'avait jamais été ni sollicité ni réglé en contre-partie de l'occupation de la maison de [Localité 12]. Elle renvoyait le chèque de 300 euros établi le premier avril 2020.
Enfin, Monsieur [N] produit une attestation d'hébergement émanant de Madame [A] née [Y], du 02 juillet 1991, aux termes de laquelle cette dernière (alors propriétaire du bien), attestait héberger Monsieur et Madame [N] dans sa propriété de [Localité 12]. Par ailleurs, Madame [A] née [Y], qui ne conteste pas être le rédacteur de l'attestation du 02 juillet 1991, énonce dans ses conclusions n'avoir jamais perçu un loyer mensuel de 300 euros en espèces depuis 1987.
A partir du mois de mai 2020, une agence immobilière a envoyé un projet de bail moyennant un loyer mensuel de 375 euros à Monsieur et Madame [N], refusé par ces derniers.
C'est dans ce cadre que Madame [D] [A] épouse [C] a fait délivrer le 28 août 2020 à Monsieur et Madame [N] un commandement de payer d'avoir à payer la somme de 18.000 euros, correspondant à un impayés locatifs pour des loyers de 300 euros par mois à compter du premier août 2015.
Or, elle ne peut se contredire en faisant état d'un bail verbal moyennant un loyer mensuel de 300 euros revendiqué par Monsieur [N] alors qu'elle avait envoyé auparavant des lettres faisant état d'une occupation gratuite et qu'elle avait refusé d'encaisser les chèques qui lui avaient été adressés depuis le mois de janvier 2020. Monsieur [N] de son côté ne démontre pas l'existence d'un bail verbal qui aurait auparavant lié les parties avec le paiement d'une somme mensuelle de 300 euros.
Il ressort en revanche des pièces produites qu'à compter de la délivrance du commandement de payer, alors que Monsieur [N] continuait à envoyer des chèques depuis le premier janvier 2020, Madame [A] épouse [C] a établi au profit de ce dernier des quittances de loyer et a encaissé les chèques, pour les périodes suivantes :
mai, juillet, août, septembre et octobre 2020 (pièce 9 de Madame [A] épouse [C]).
En acceptant d'encaisser les chèques envoyés par Monsieur [N] et en lui remettant des quittances de loyer, pour un montant mensuel de 300 euros, il est démontré qu'il existe à compter du mois de mai 2020 une commune des parties de se lier par un bail moyennant un loyer mensuel de 300 euros.
Sur la demande de résiliation judiciaire du bail
Selon l'article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut provoquer la résolution du contrat.
Monsieur [N] ne peut revendiquer la protection du locataire âgé de plus de 65 ans visée par l'article 15 III de la loi du 06 juillet 1989 puisque Madame [A] épouse [C] sollicite la résiliation judiciaire du bail pour impayés locatifs et non dans le cadre de la validation d'un congé.
Il a été jugé qu'il existe un bail verbal liant les parties à compter du premier mai 2020 portant sur le bien actuellement occupé par Monsieur [N], moyennant la somme mensuelle de 300 euros.
Madame [A] épouse [C] sollicite la confirmation du jugement déféré qui a condamné Monsieur [N] au versement de la somme de 17.400 euros, correspondant à l'arriéré locatif pour une période courant du premier août 2015 au mois de juin 2020 inclus.
Elle ne sollicite pas subsidiairement le versement d'autres loyers, pour des périodes postérieures.
Il est établi que Madame [A] épouse [C] a délivré une quittance de loyer pour le mois de mai. Monsieur [N] ne démontre pas avoir payé le loyer du mois de juin 2020. Ce seul impayé n'est pas un manquement suffisamment grave justifiant le prononcé de la résiliation judiciaire du bail.
Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
En l'absence de résiliation du bail, il n'y a donc pas lieu de prononcer la condamnation de Monsieur [N] au versement d'une indemnité d'occupation et d'ordonner son expulsion.
Monsieur [N] sera condamné à verser à Madame [A] épouse [C] la somme de 300 euros au titre de l'impayé locatif du mois de juin 2020.
Compte tenu du montant de cette somme, il sera débouté de sa demande de délais de paiement.
Il sera débouté de sa demande tendant à être remboursé de la somme de 2400 euros pour la période de janvier 2020 à août 2020. En effet, il ne justifie pas avoir payé la somme mensuelle de 300 euros pour la période de janvier à avril 2020 (la simple production de chèques, sans justificatif d'encaissement, ne vaut pas paiement). Pour la période débutant en mai 2020, le loyer est dû.
Monsieur [N], qui ne démontre aucune faute commise par Madame [Y] épouse [A] à son encontre, sera débouté de sa demande d'appel en garantie à l'encontre de cette dernière. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C]
Monsieur [N] ne démontre pas que ces dernières auraient commis des fautes à son encontre (ni contractuelle, ni extra-contractuelle). Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la demande d'amende civile formée par Monsieur [N] à l'encontre de Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C]
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
Même si la procédure intentée par Madame [A] épouse [C] n'a pas abouti, il n'apparaît pas que son action en justice ait dégénéré en abus de droit, d'autant moins que Monsieur [N], qui revendiquait un bail verbal depuis plusieurs années, conclut dans le même temps à une occupation gratuite jusqu'en août 2020.
Il n'y a pas lieu de condamner Madame [Y] épouse [A] et Madame [A] épouse [C] à une amende civile. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes de dommages et intérêts formée par Madame [A] épouse [C] à l'encontre de Monsieur [N] pour résistance abusive et appel abusif et sur la demande de dommages et intérêts de Madame [Y] épouse [A] pour procédures abusives
Il a été jugé que l'occupation de Monsieur [N] du bien appartenant à Madame [A] épouse [C] avait été gratuite jusqu'en avril 2020 inclus et que la relation locative n'avait été nouée entre les parties qu'à compter du mois de mai 2020. Il a également été jugé que le seul impayé locatif pour la période sollicitée datait du mois de juin 2020 et qu'aucune résiliation judiciaire du bail n'était encourue. Dès lors, il ne peut être reproché à Monsieur [N] une résistance abusive. Madame [A] épouse [C] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement sera infirmé sur ce point.
L'appel formé par Monsieur [N] à l'encontre de la décision entreprise n'a pas dégénéré en abus de droit. Madame [A] épouse [C] sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Madame [Y] ne justifie pas d'une action abusive intentée par Monsieur [N] à son encontre qui aurait dégénéré en abus de droit. Le jugement déféré qui a rejeté sa demande à ce titre sera confirmé. Sa demande de dommages et intérêts au titre d'un appel abusif formé par Monsieur [N] n'est pas plus justifiée. Elle en sera déboutée.
Sur la demande de Monsieur [N] tendant à être remboursé de la somme de 22.898, 04 euros
Il appartient aux parties d'exécuter les termes de cet arrêt et d'en tirer toutes conséquences financières. Monsieur [N] sera débouté de sa demande de remboursement.
Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
Chaque partie est en partie succombante. Dès lors, il convient de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement déféré qui a condamné Monsieur [N] aux dépens et à verser à Madame [A] épouse [C] et Madame [Y] épouse [A] des indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile sera infirmé.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe
REFORME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'appel en garantie formée par Monsieur [W] [N], sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts et d'amende civile formées par Monsieur [W] [N], sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Madame [H] [Y] épouse [A]
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
DIT que Monsieur [W] [N] et Madame [D] [A] épouse [C] sont liés depuis le mois de mai 2020 par un bail verbal portant sur les locaux occupés par Monsieur [N] au [Adresse 6] à [Localité 12] moyennant un loyer mensuel de 300 euros,
CONDAMNE Monsieur [W] [N] à verser à Madame [D] [A] épouse [C] la somme de 300 euros au titre du loyer du mois de juin 2020,
REJETTE la demande de Madame [D] [A] épouse [C] tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du bail,
REJETTE les demandes de dommages et intérêts formées par Monsieur [W] [N], Madame [H] [Y] épouse [A] et Madame [D] [A] épouse [C],
REJETTE la demande de Monsieur [W] [N] tendant à être remboursé des sommes de 2400 euros et 22.898, 04 euros, les parties devant faire leur compte en exécutant le présent arrêt,
DIT que les parties supporteront la charge des dépens qu'ils ont exposés en première instance et en appel,
DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,