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Décisions

CA Chambéry, 3e ch., 5 septembre 2023, n° 22/00206

CHAMBÉRY

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CA Chambéry n° 22/00206

5 septembre 2023

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

3ème Chambre

Arrêt du Mardi 05 Septembre 2023

N° RG 22/00206 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G5B4

Décision attaquée : jugement du juge aux affaires familiales de THONON LES BAINS en date du 17 Janvier 2022, RG 20/01012

Appelant

M. [Z], [S] [T]

né le 24 Janvier 1968 à [Localité 5] (PORTUGAL), demeurant [Adresse 2] (SUISSE)

Représenté par Me Laurence BAQUE-WILLIAMS de la SAS MERMET & ASSOCIES, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

Intimée

Mme [R] [W]

née le 26 Avril 1975 à [Localité 7], demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Lionel FALCONNET, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 20 juin 2023 avec l'assistance de Madame Laurence VIOLET, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- Mme Catherine LEGER, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désignée par ordonnance de Madame La Première Présidente,

- Mme Esther BISSONNIER, Conseiller,

- Mme Hélène SOULAS, Vice-Présidente placée,

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FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [Z] [T], né le 24 janvier 1968 à Do Zezere Pampilhosa Da Serra (Portugal) et Mme [R] [W], née le 26 avril 1975 à [Localité 7] (38) se sont mariés le 4 mai 2013 à [Localité 4] (74), sans contrat de mariage préalable.

Par une ordonnance de non-conciliation en date du 3 mars 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a notamment attribué la jouissance du domicile conjugal à l'époux à titre onéreux, désigné l'époux pour le remboursement provisoire des crédits, fixé une pension alimentaire au devoir de secours au profit de l'épouse de 400 euros et a attribué à l'épouse la jouissance du véhicule.

Par un arrêt en date du 3 juillet 2017, la cour d'appel de Chambéry a confirmé cette ordonnance de non conciliation, sauf en ce qui concerne la demande de pension alimentaire de Mme [R] [W] et la provision pour frais d'instance, lui attribuant à ce titre 600 euros par mois au titre du devoir de secours et 1500 euros au titre de la provision pour frais d'instance.

Par un jugement en date du 26 juin 2000, le juge aux affaires familiales de Thonon-les-Bains a prononcé le divorce des époux, fixé la date des effets au 5 novembre 2015 et rejeté les demandes de Mme [R] [W] au titre de sa demande d'avance sur liquidation et de rétroactivité de l'indemnité d'occupation due par M. [Z] [T].

Par un acte en date du 12 juin 2020, Mme [R] [W] a fait assigner M. [Z] [T] en partage.

Par un jugement en date du 17 janvier 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a :

' déclaré recevable la demande de Mme [R] [W],

' ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision entre Mme [R] [W] et M. [Z] [T],

' désigné pour y procéder Me [X] [C] demeurant [Adresse 3],

' dit qu'en cas d'empêchement du notaire mandaté, il sera pourvu à son remplacement par simple ordonnance du juge commis, sur requête de la partie la plus diligente,

' désigné le juge chargé du suivi des dossiers de liquidation partage, à l'effet de surveiller les opérations conformément aux articles 1364 et suivants du code de procédure civile,

' dit que le solde du prix de vente du bien immobilier indivis sera réparti par moitié entre les parties,

' fixé à la somme de 10'650 euros au total l'indemnité d'occupation due par M. [Z] [T] à l'indivision,

' fixé la créance de M. [Z] [T] à l'égard de l'indivision à la somme de 5560,60 euros pour les travaux de reprise,

' dit que le véhicule Volkswagen est un bien commun dont la valeur sera à évaluer dans le cadre de la liquidation, de même que l'indemnité de jouissance,

' rejeté les demandes plus amples ou contraires,

' rejeté les demandes des parties relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

' dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties et seront employés en frais privilégiés de partage et au besoin les y a condamnées.

Par une déclaration en date du 7 février 2022, M. [Z] [T] a relevé appel de ce jugement en le limitant aux dispositions relatives au fait que le solde du prix de vente du bien immobilier indivis soit réparti par moitié entre les parties, à la fixation à la somme de 10'650 de l'indemnité d'occupation qu'il doit à l'indivision et à la fixation de sa créance à l'égard de l'indivision à la somme de 5550,60 euros au titre des travaux de reprise.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 5 septembre 2022, M. [Z] [T] demande à la cour de :

' confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux de Mme [R] [W] et de M. [Z] [T] et désigné tel notaire pour y procéder ;

- fixé à la somme de 10.650 euros l'indemnité d'occupation due à l'indivision post communautaire due par M. [Z] [T] à l'indivision ;

' pour le reste, infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- ordonné le partage du prix de vente du bien indivis par moitié ;

- fixé la créance de M. [Z] [T] à l'égard de l'indivision à la somme de 5 550,60 euros ;

' et ce faisant :

- fixer les droits des parties dans la liquidation de la communauté à la somme de 33 240,57 euros chacune ;

- fixer à 23 596,57 euros la créance de M. [Z] [T] sur l'indivision post communautaire au titre du remboursement du prêt et des travaux de reprise ;

- fixer à la somme de 10 650 euros l'indemnité d'occupation due à l'indivision post communautaire due par M. [Z] [T] à l'indivision (confirmation du jugement pour rappel sur ce point) ;

- en conséquence, fixer la créance de M. [Z] [T] sur l'indivision à la somme de 125 173,00 euros ;

- ce faisant, fixer les droits des parties dans l'indivision à 8 644,00 euros chacune ;

- et encore : fixer les droits des parties aux montants finaux suivants :

- M. [Z] [T] : 148.769,57 euros,

- Mme [R] [W] : 23.596,57 euros,

- attribuer le véhicule VOLKSWAGEN d'une valeur de 24 000 euros à Mme [R] [W] ;

- attribuer le solde du compte de Mme [R] [W] d'un montant de 595,50 euros à Mme [R] [W] ;

- dire et juger que Mme [R] [W] est redevable envers M. [Z] [T] d'une soulte finale d'un montant de 998,93 euros et la condamner à payer ce montant à M. [Z] [T] ;

' débouter Mme [R] [W] de toutes ses demandes au titre de son appel incident ;

' condamner Mme [R] [W] à payer à M. [Z] [T] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' dire et juger que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

A l'appui de ses demandes, M. [Z] [T] expose que le couple a acquis durant leur concubinage le 13 février 2013 un terrain à [Localité 6] ; que le prix d'achat, soit 150 000 euros, a été intégralement financé par ses soins à la suite de la vente d'un bien propre. Il indique que le terrain a été vendu le 6 octobre 2016 pour la somme de 500 000 euros ; que le solde de la vente (137 116,92 euros) est restée consignée chez le notaire. M. [Z] [T] indique encore que le couple a souscrit avant le mariage deux crédits auprès du Crédit Mutuel pour financer la construction de la maison ; qu'il a remboursé seul les échéances jusqu'au mariage. Il estime dès lors qu'il bénéficie de droits égaux à la valeur du terrain et au remboursement du prêt. Il réfute toute intention libérale de sa part au profit de Mme [R] [W], affirmant qu'il avait été convenu qu'il financerait seul l'acquisition du terrain puisqu'il disposait alors de liquidités, mais que Mme [R] [W] devait rembourser les crédits pour un montant identique après la vente de biens propres lui appartenant. Il estime que Mme [R] [W] l'a trompé quant à ses réelles intentions, rappelant que l'intention libérale ne se présume pas.

Concernant la période de communauté, M. [Z] [T] indique qu'il ne détient pas de troisième pilier. Il fait état de l'actif de communauté, comprenant notamment le véhicule Volskwagen, contestant que ce bien ait été acquis par Mme [R] [W] à l'aide de fonds propres, rappelant que la réservation a été faite à son nom et affirmant que la communauté a financé l'achat. Concernant son second pilier, M. [Z] [T] indique qu'il ne s'agit pas d'un bien commun et que les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour connaître de son partage. Il détaille encore le passif, composé notamment de la diminution du solde de son compte UBS, affirmant que la somme a profité à la communauté.

Concernant l'indivision post communautaire, M. [Z] [T] indique que le bien immobilier a été vendu le 6 octobre 2016 ; qu'il ne conteste pas le montant de l'indemnité d'occupation fixée par le premier juge.

Concernant les opérations de liquidation, M. [Z] [T] affirme qu'il a seul permis l'acquisition et la conservation du bien indivis après la séparation, de sorte que Mme [R] [W] n'a aucun droit sur le prix de vente ; que le partage se limite à l'indemnité d'occupation et à ses créances sur l'indivision ; qu'il estime dans ces conditions que les droits des parties s'élevent pour chacune à 8 644 euros.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 11 avril 2022, Mme [R] [W] demande à la cour de :

' confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains le 17 janvier 2022, en ce qu'il a :

- dit que le solde du prix de vente du bien immobilier indivis sera réparti par moitié entre les parties ;

- fixé la créance de M. [Z] [T] à l'égard de l'indivision à la somme de 5 550,60 € pour les travaux de reprise ;

' dire et juger que Mme [R] [W] est recevable et bien fondée en son appel incident ;

' réformer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que le véhicule Volkswagen est un bien commun dont la valeur sera évaluée dans le cadre de la liquidation, de même que l'indemnité de jouissance ;

' statuant à nouveau, dire que le véhicule Volkswagen est un bien propre appartenant à Mme [R] [W] ;

' débouter M. [Z] [T] de son appel ;

' condamner M. [Z] [T] à payer Mme [R] [W] une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de Maître Falconnet, conformément à l'article 699 du code de procédure civile et, subsidiairement, dire et juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

A l'appui de ses demandes, Mme [R] [W] expose concernant le bien immobilier que l'acte d'achat du terrain du 13 février 2013 précise qu'il a été effectué par chaque époux à concurrence de la moitié en pleine propriété ; elle estime que le fait que M. [Z] [T] ait choisi de financer intégralement le prix constitue la preuve de son intention libérale à son égard ; qu'il ne peut revenir sur son intention initiale et que le prix de vente doit être partagé par moitié. Elle conteste tout accord sur le fait qu'elle se serait engagée à rembourser les prêts, relevant par ailleurs que les fonds versés pour l'acquisition l'ont été au nom des deux concubins.

Concernant les avoirs bancaires, Mme [R] [W] expose que le projet d'état liquidatif est à parfaire, au regard des soldes des différents comptes des époux et des deuxième et troisième piliers de M. [Z] [T], qui n'en a pas justifié. Elle conteste d'ailleurs la créance revendiquée par M. [Z] [T] au titre du solde de son compte UBS, en relevant qu'il ne produit pas l'intégralité de ses relevés de comptes, qu'il faisait preuve d'une grande confusion comptable, effectuant de multiples mouvements de fonds entre ses différents comptes. Elle précise encore qu'elle revendique la moitié des second et troisième piliers cotisés par M. [Z] [T] durant l'union.

Concernant l'indemnité d'occupation, Mme [R] [W] constate que les parties s'accordent sur le montant de la valeur locative et au final n'ont pas contesté les dispositions du jugement attaqué.

Concerant le passif indivis, Mme [R] [W] estime que M. [Z] [T] ne peut prétendre à titre de créances qu'au remboursement des prêts immobiliers à compter du 5 novembre 2015 et jusqu'au 6 octobre 2016, soit la somme de 20638 euros.

Concernant les travaux effectués après la séparation, Mme [R] [W] sollicite le rejet des demandes formées par M. [Z] [T] à ce titre, soit 7150 euros, contestant leur réalité et nécessité.

Concernant son appel incident relatif au véhicule Volkswagen, Mme [R] [W] rappelle que la jouissance de ce véhicule lui a été attribuée par le juge conciliateur, affirmant qu'elle a financé son acquisition à l'aide de fonds propres, à savoir le solde du prix de vente de son précédent véhicule.

La clôture est intervenue par ordonnance en date du 15 mai 2023.

SUR QUOI, LA COUR :

Pour un plus ample exposé des faits, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées et régulièrement communiquées.

L'appel principal et l'appel incident ayant été formés selon les formes et dans les délais prévus par la loi, ils seront déclarés recevables.

A titre liminaire, il y a lieu de constater que M. [Z] [T] ne conteste plus le montant de l'indemnité d'occupation mise à sa charge par lepremier juge ; ces dispositions seront dès lors confirmées.

Il est rappelé aussi que les parties ne remettant pas en cause la désignation d'un notaire pour procéder aux opérations de liquidation et de partage, il n'appartient pas à la cour de chiffrer précisément les droits des parties à l'issue de l'intégralité des opérations de liquidation et de partage (étant observé que des éléments doivent être précisés, notamment concernant les comptes bancaires) ni de procéder aux attributions, mais seulement de trancher les différents existants entre les parties afin de permettre au notaire d'effectuer sa mission en tenant compte des différents déjà tranchés par la présente décision.

Sur l'indivision pré communautaire

- sur la nature du bien et les droits des parties

Il est de jurisprudence constante que la nature d'un bien et, dès lors, les droits de chaque co-indivisaire découle du titre, peu important la réalité du financement (Civ. 1re, 31 mai 2005).

En l'espèce, il est constant que le terrain ayant servi à l'édification d'un immeuble a été acquis le 13 février 2013, soit antérieurement au mariage, M. [Z] [T] et Mme [R] [W] étant alors des concubins. Le terrain, et dès lors la construction édifiée par la suite au cours du mariage (du fait de l'accession), sont par conséquent des biens indivis.

Il découle encore de l'acte notarié dressé le 13 février 2013 que le bien a été acquis par chacun des indivisaires à hauteur de la moitié en pleine propriété pour chacun. Il en résulte qu'ils ont tous deux des droits équivalents sur le bien et dès lors sur le prix de vente, ce dernier devant être partagé de manière égalitaire, chacun ayant droit théoriquement à la moitié, sous réserve cependant des éventuelles récompenses et créances réclamées.

- sur la créance revendiquée par M. [Z] [T] au titre du financement du terrain

Le terrain ayant été acquis par moitié indivisise par les parties, il en découle qu'ils étaient tenus corrélativement au paiement du prix selon les mêmes proportions.

Il n'est pas contesté que le prix d'achat du terrain a été intégralement financé par M. [Z] [T] à l'aide de fonds personnels provenant de la vente antérieure, le 28 décembre 2012, d'un bien immobilier lui appartenant ce dont il justifie pleinement par la production de l'acte de vente dudit bien et des relevés bancaires établissant le virement par ses soins des fonds au notaire à partir de son compte personnel.

Il est donc en droit de réclamer une créance à l'encontre de Mme [R] [W] au titre du paiement de sa part, soit la moitié des fonds initialement investis, en l'espèce 75 000 euros (150000/2).

Mme [R] [W] s'y oppose en faisant valoir que M. [Z] [T] était alors animé d'une intention libérale qui ressortirait de l'acte notarié lui-même.

Il convient de rappeler que l'intention libérale ne se présumme pas et qu'elle doit être établie par celui qui s'en prévaut.

En l'espèce, il est constant que M. [Z] [T] a financé l'intégralité du prix d'achat du terrain tout en acceptant en connaissance de cause que l'acquisition se fasse par moitié indivise; qu'il n'a pas exigé l'établissement d'un écrit de type reconnaissance de dette par sa compagne ; qu'aucune clause particulière quant au paiement du prix n'a été inséré dans l'acte notarié et qu'aucune convention n'a été établie à ce titre par les concubins; que l'acte notarié indique ainsi que le prix a été versé par 'les acquéreurs' sans autre précision, le relevé de compte du notaire faisant apparaître les noms des deux concubins. Les attestations succinctes des proches de M. [Z] [T], qui décrivent au cours de simples conversations les engagements verbaux de Mme [R] [W] à financer ultérieurement la construction de la maison au moyen du prix de vente de biens propres, ne suffisent pas à caractériser l'absence d'intention libérale de M. [Z] [T] au moment de l'achat du terrain, ni l'existence d'un véritable accord entre les indivisaires au sujet du financement des travaux qui en réalité l'ont été à l'aide de deux crédits souscrits en commun. L'intention libérale de M. [Z] [T] se déduit également du fait qu'il n'est pas contesté que le projet de construction était destiné à fournir un logement au couple et qu'il a également payé seul jusqu'au mariage les échéances des crédits immobiliers pourtant souscrits par les deux indivisaires.

La demande de créance de M. [Z] [T] au titre du paiement du prix du terrain et du remboursement des crédits jusqu'au mariage sera donc rejetée.

Sur la communauté

- sur les deuxième et troisième piliers de M. [Z] [T]

M. [Z] [T] affirme ne pas détenir de troisième pilier ; Mme [R] [W] n'en démontre pas l'existence.

M. [Z] [T] détient un deuxième pilier dont le partage éventuel relève de la compétence exclusive des juridictions suisses.

- la créance de la communauté au titre du paiement des crédits immobiliers

Les parties ne contestent pas que les crédits souscrits avant le mariage aient été remboursés durant ce dernier à l'aide de fonds communs. La communauté est dès lors créancière à l'égard de l'indivision à ce titre.

- les soldes des comptes bancaires

Les soldes des comptes bancaires de chacun des époux à la date du 5 novembre 2015 constituent également des éléments d'actif qui devront être précisés dans l'acte liquidatif dressé par le notaire, en l'absence de contestation élevées par les parties à ce stade. Mme [R] [W] affirme que l'ensemble des soldes des comptes de M. [Z] [T] ne sont pas connus; les parties devront en justifier devant le notaire commis.

M. [Z] [T] revendique que la différence des soldes de son compte personnel ouvert auprès d'UBS lui ouvre droit à récompense à l'encontre de la communauté. Il est constant que le solde de ce compte a été amputé durant le mariage de la somme de 23191 euros; que ces fonds sont présummés avoir bénéficié à la communauté; il sera donc fait droit à sa demande.

- le véhicule Volkswagen

Mme [R] [W] conteste que le véhicule Volkswagen ait été acquis à l'aide de fonds communs, affirmant l'avoir acquis à la suite de la vente de son précédent véhicule qui était un bien propre, ce que conteste M. [Z] [T], qui fait valoir que la réservation du véhicule a été payée par M. [Z] [T] et Mme [R] [W] le 7 septembre 2013 et que les fonds ayant servi au paiement provenaient du compte joint du couple.

Il découle de l'article 1401 du code civil que la communauté se compose activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres.

En l'espèce, il est constant que le vehicule a été acquis postérieurement au mariage et que la présomption d'acquêts s'applique. Néanmoins, il s'agit d'une présomption simple.

Mme [R] [W] produit le certificat d'immatriculation à son nom, mais il est constant que ce document ne peut à lui seul établir le caractère propre d'un bien.

Elle verse encore divers documents attestant qu'elle avait acquis avant le mariage (bon de commande daté du 21 octobre 2010) un véhicule Seat Ibiza au prix de 19 059 euros, dont elle justifie de la revente en produisant une déclaration de cession le 30 août 2013 au profit de M. [U] [M]. Elle affirme avoir perçu à ce titre 11 790 euros et produit effectivement un chèque émis le 13 septembre 2013 par l'acquéreur à l'ordre de M. [Z] [T], lequel a été encaissé sur le compte joint le 17 septembre 2013.

Elle justifie encore des conditions d'acquisition du véhicule Volkswagen auprès de M. [O] pour un montant de 24 500 euros, avec versement de 1 500 euros le 7 septembre 2013 à titre de réservation puis de 23 000 euros, les fonds en cause ayant été payés par chèques tirés sur le compte commun les 11 et 12 septembre 2013.

Il doit être déduit de l'ensemble de ces éléments que la vente du véhicule appartenant à Mme [R] [W] pour un montant de 11 790 euros (peu important que le chèque ait éméis émis à l'odre de son époux) a été concommitante avec l'acquisition du véhicule Volkswagen Golf pour un prix de 24500 euros ; que si ce bien peut être considéré comme un bien commun pour avoir été acquis durant le mariage à l'aide d'une plus forte proportion de fonds communs, il n'en demeure pas moins que les fonds propres de Mme [R] [W] ont effectivement été déposés sur le compte joint mais simultanément utilisés pour financer partiellement le nouveau véhicule ; que dès lors Mme [R] [W] établit bien l'enrichissement de la communauté, ce qui lui ouvre droit à récompense à hauteur de 11 790 euros.

Comme précisé par le premier juge, la valeur de ce bien ainsi que le montant de l'indemnité de jouissance devront être évalués dans le cadre des opérations de liquidation et de partage devant le notaire commis, sous le contrôle du juge.

Sur l'indivision post communautaire

- sur la créance revendiquée par M. [Z] [T] au titre du compte d'administration durant l'indivision post communautaire

Il découle de l'article 815-13 du code civil que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [Z] [T] a remboursé les crédits immobiliers postérieurement au 5 novembre 2015 et jusqu'à la vente du bien intervenue le 6 octobre 2016.

Il est en droit de réclamer une créance à l'encontre de l'indivision à hauteur des échéances ainsi remboursées, ce qui n'est pas contesté par Mme [R] [W]. Le premier jugement a retenu la somme de 20 638 euros à ce titre.

M. [Z] [T] réclame en outre la somme de 7 150 euros au titre de la remise en état du logement à la suite de la séparation en vue de sa mise en vente. Comme relevé par le premier juge, M. [Z] [T] produit un constat d'huissier daté du 9 novembre 2015 lequel décrit notamment l'absence de vasque dans la salle de bain, l'arrachage des meubles muraux ayant laissé des trous dans le carrelage mais aussi l'absence de l'électroménager encastré de la cuisine. Mme [R] [W] ne conteste pas la somme retenue par le premier juge, sollicitant le rejet du devis relatif aux travaux de la salle de bains. Il découle des éléments produits que les travaux de remise en état de la salle de bain ont été visiblement réalisés mais M. [Z] [T] ne produit toujours pas en appel la preuve de leur paiement, ne versant qu'un simple devis. La décision attaquée sera donc confirmée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas inéquitable de rejeter les demandes formées en appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel qui seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats publics, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare l'appel recevable en la forme,

Au fond,

Confirme le jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains en date du 17 janvier 2022 en toutes ses dispositions dans la limite de l'appel entrepris,

Y ajoutant,

Rejette la créance revendiquée par M. [Z] [T] au titre du financement du terrain et du remboursement des crédits immobiliers avant le mariage,

Dit que la communauté a droit à récompense à l'encontre de l'indivision au titre du remboursement des échéances des crédits immobiliers remboursés à compter du mariage et jusqu'au 5 novembre 2015,

Dit que les soldes des comptes bancaires des époux au 5 novembre 2015 constituent des actifs de communauté et qu'ils doivent en justifier devant le notaire,

Dit que M. [Z] [T] dispose d'une récompense à l'encontre de la communauté au titre du solde de son compte UBS à hauteur de 23191 euros,

Dit que Mme [R] [W] dispose d'une récompense à l'encontre de la communauté à hauteur de 11790 euros au titre des fonds propres utilisés pour l'acquisition du véhicule Volkswagen,

Dit que M. [Z] [T] dispose d'une créance à l'égard de l'indivision post-communautaire au titre du remboursement des crédits immobiliers du 5 novembre 2015 au 6 octobre 2016 pour un montant de 20638 euros,

Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel qui seront employés en frais privilégiés de partage.

Ainsi rendu le 05 septembre 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Esther BISSONNIER, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Laurence VIOLET, Greffier.

La Greffière La Présidente