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Décisions

CA Bordeaux, 3e ch. famille, 19 septembre 2023, n° 20/02414

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 20/02414

19 septembre 2023

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

3ème CHAMBRE FAMILLE

--------------------------

ARRÊT DU : 19 SEPTEMBRE 2023

N° RG 20/02414 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LTIV

[Z] [S]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/010362 du 03/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

[W] [L]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/020791 du 03/12/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

Nature de la décision : AU FOND

22G

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 mai 2020 par le Juge aux affaires familiales de LIBOURNE (cabinet A, RG n° 19/00911) suivant déclaration d'appel du 13 juillet 2020

APPELANT :

[Z] [S]

né le 08 Octobre 1958 à [Localité 5]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Christophe DOLEAC, avocat au barreau de LIBOURNE

INTIMÉE :

[W] [L]

née le 01 Juin 1956 à [Localité 4]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Sophie STAROSSE, avocat au barreau de LIBOURNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 juin 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

Président : Hélène MORNET

Conseiller: Danièle PUYDEBAT

Conseiller : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique DUPHIL

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Mme [W] [L] et M. [Z] [S] se sont mariés le 6 juillet 2002 à [Localité 5] sans contrat préalable.

Selon acte reçu par Me [F], notaire à [Localité 5], le 26 octobre 2006, M. [S] a fait donation à son épouse du tiers de ses droits en pleine propriété sur un immeuble d'habitation sis [Adresse 1] à [Localité 5]. L'acte précise que cet immeuble a été donné à M. [S] par sa mère Mme [U] [S], selon acte du 14 février 2002, donation réalisée à titre de partage anticipé et en avancement d'hoirie, avec une clause de retour légal en cas de pré-décès du gratifié. Cette clause de retour a été reprise dans l'acte du 26 octobre 2006.

Par jugement en date du 17 mars 2008, le divorce des époux a été prononcé et le Président de la chambre des notaires a été désigné afin de procéder aux opérations de liquidation-partage de la communauté. La cour d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement dans un arrêt du 4 février 2009.

Me [D] [X], notaire désigné, a dressé un procès-verbal de carence.

Par acte du 6 août 2019, Mme [W] [L] a assigné M. [Z] [S] devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Libourne aux fins de poursuite des opérations de liquidation-partage.

Par jugement en date du 29 mai 2020, le tribunal judiciaire de Libourne a :

- déclaré recevable l'action en liquidation-partage,

- dit valable et régulier l'acte de donation portant sur partie des droits de propriété sur un immeuble effectué par M. [S] au profit de Mme [L],

- rejeté la demande de révocation de cette donation,

- dit que M. [S] est redevable à l'indivision d'une indemnité de jouissance à compter du 1er août 2014 et que Mme [L] est redevable légalement des charges indivisaires correspondant à ses droits,

- renvoyé les parties devant Me [D] [X], notaire à [Localité 5] pour l'établissement du compte des parties et de l'acte de partage et désigné le président de la chambre de la famille du tribunal judiciaire de Libourne afin de suivre lesdites opérations,

Avant dire droit sur la valeur de l'immeuble et sur le montant de l'indemnité de jouissance,

- ordonné une expertise,

- désigné pour y procéder M. [J] [V], expert foncier, demeurant [Adresse 3], avec la mission, au contradictoire des parties de recueillir leurs dires, de visiter l'immeuble litigieux, de le décrire, de déterminer sa valeur ainsi que le montant d'une indemnité d'occupation à compter du 1er août 2014, de fournir tous éléments utiles à l'appréciation du litige en apurant les dires des parties,

- ordonné à Mme [L] de consigner la somme de 1.500 euros à valoir sur les honoraires de l'expert,

- dit ne pas y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- affecté les dépens jusqu'ici exposés en frais de partage.

Procédure d'appel :

Par déclaration du 13 juillet 2020, M. [S] a relevé appel limité de ce jugement en ce qu'il a déclaré valable et régulier l'acte de donation du 26 octobre 2006, rejeté la demande de révocation de cette donation et dit que M. [S] est redevable à l'indivision d'une indemnité de jouissance à compter du 1er août 2014.

Mme [L] a formé un appel incident relatif à l'indemnité de jouissance due par son ex époux.

Selon dernières conclusions du 30 janvier 2023, M. [S] demande à la cour de :

- réformer le jugement en date du 29 mai 2020,

Statuant à nouveau,

- déclarer irrecevable la demande de Mme [L] pour défaut d'intérêt à agir,

A titre reconventionnel,

- révoquer la donation en date du 26 octobre 2006 pour inexécution des conditions et pour cause d'ingratitude,

- condamner Mme [L] au versement de la somme de 6.739,23 euros au titre des charges relatives au bien indivis,

A titre subsidiaire,

- constater la révocation de plein droit de la donation du bien à venir par l'effet du divorce des époux,

En tout état de cause,

- condamner Mme [L] au versement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance.

Selon dernières conclusions du 1er octobre 2020, Mme [L] demande à la cour de :

- déclarer Mme [L] recevable et bien fondée en son action formée à l'encontre de M. [S] et en son appel incident,

- débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que M. [S] est redevable à l'indivision d'une indemnité de jouissance à compter du 1er août 2014 et que Mme [L] est redevable légalement des charges indivisaires correspondant à ses droits,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que M. [S] est redevable d'une indemnité d'occupation due à l'indivision à compter du 5 mars 2007,

- dire et juger que Mme [L] n'est redevable légalement des charges indivisaires que pour la période à compter du 1er août 2014, le surplus étant prescrit,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que M. [S] est redevable d'une indemnité de jouissance due à l'indivision à compter du 1er août 2014,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré recevable l'action en liquidation-partage,

- dit valable et régulier l'acte de donation portant sur partie des droits de propriété sur un immeuble effectué par M. [S] au profit de Mme [L],

- rejeté la demande de révocation de cette donation,

- renvoyé les parties devant Me [D] [X], notaire à [Localité 5] pour l'établissement du compte des parties et de l'acte de partage et désigné le président de la chambre de la famille du tribunal judiciaire de Libourne afin de suivre lesdites opérations,

Avant dire droit sur la valeur de l'immeuble et sur le montant de l'indemnité de jouissance,

- ordonné une expertise,

- désigné pour y procéder M. [J] [V], expert foncier, demeurant [Adresse 3], avec la mission, au contradictoire des parties de recueillir leurs dires, de visiter l'immeuble litigieux, de le décrire, de déterminer sa valeur ainsi que le montant d'une indemnité d'occupation, de fournir tous éléments utiles à l'appréciation du litige en apurant les dires des parties,

Y ajoutant,

- dispenser Mme [L] de consignation compte tenu de ce qu'elle bénéficie de l'aide juridictionnelle,

A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la révocation de la donation était ordonnée,

- débouter M. [S] de ses demandes relatives aux charges de l'indivision, ces dernières étant alors sans cause,

En tout état de cause,

- condamner M. [S] au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'intérêt à agir de Mme [L]

L'appelant ne conteste pas que Mme [L] a la qualité d'indivisaire sur l'immeuble d'habitation sis [Adresse 1] à [Localité 5] en vertu de la donation qu'il lui a consentie en date du 26 octobre 2006 mais soutient que la clause légale de retour prévue pour la donation que lui a fait sa propre mère sur ce bien empêche la liquidation de l'indivision sollicitée, car les droits sur ce bien ne sont pas actuels ne pouvant s'exercer qu'à l'extinction du droit de retour de Mme [U] [S], soit au décès de celle-ci. Il affirme donc que son ex épouse ne peut réclamer le paiement de sa part indivise tant qu'existent les droits de retour de sa mère et de lui même.

Il soutient également qu'elle n'est pas recevable à solliciter la licitation du bien immobilier litigieux car elle ne détient qu'un tiers des droits sur celui-ci alors que l'article 815-5-1 du code civil prévoit la possibilité d'autorisation d'une licitation d'un bien immobilier qu'à celui qui en possède les deux tiers.

Enfin il souligne que l'immeuble dont s'agit constituant le logement familial du foyer constitué avec sa nouvelle épouse, Mme [K] [H], celui-ci est protégé par les dispositions de l'article 215 du code civil.

L'intimée réplique que son droit est né et actuel car la donation produit ses effets immédiatement malgré la clause de retour conventionnel car M. [S] étant toujours en vie, le bien est dans son patrimoine. Le droit de retour de M. [S] ne s'exercerait que dans l'hypothèse où elle même viendrait à décéder sans postérité avant lui.

En application de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'intérêt à agir doit être né et actuel. Il s'apprécie au jour de l'introduction de la demande.

Ainsi que le soutient l'intimée, le retour conventionnel prévu par les articles 951 et 952 du code civil, qui se traduit par une clause assortissant une donation à un mécanisme qui permet au donateur de récupérer le bien donné au cas où le donataire décède avant lui, n'affecte pas la réalisation des effets de la donation. La donation consentie produit donc des effets identiques à toutes les donations.

Il en est de même pour le droit de retour légal des père et mère prévu à l'article 738-2 du code. L'article 938 du code civil dispose en effet que 'La donation dûment acceptée sera parfaite par le seul consentement des parties ; et la propriété des objets donnés sera transférée au donataire, sans qu'il soit besoin d'autre tradition.'

Lorsque la donation d'un bien est consentie sous condition résolutoire pour être assortie d'une clause de retour, le bien donné entre cependant dans le patrimoine du donataire qui peut en disposer sous la même condition.

Le droit de retour fait simplement naître une clause résolutoire avec pour évènement le pré-décès du donataire.

Ce n'est donc qu'en cas de réalisation de cet événement, soit le pré-décès du donataire, que la chose objet de la donation sortira du patrimoine du donataire pour réintégrer le patrimoine du donateur.

En l'espèce M. [S] étant toujours en vie, les conditions de la clause de retour légal figurant dans la donation consentie par sa mère ne sont pas remplies de sorte que le bien objet de la donation est toujours dans son patrimoine. Quant au droit de retour figurant dans l'acte de donation fait par l'appelant à l'intimée, celui-ci ne pourrait s'exercer que dans l'hypothèse du pré décès de Mme [L], ce qui n'est pas le débat dans le présent litige.

Par suite c'est à bon droit que le premier juge a pu affirmer que l'action engagée par l'intimée s'inscrivait dans le cadre d'une liquidation d'un régime matrimonial de communauté réduite aux acquêts résultant du mariage des parties le 6 juillet 2012 ; qu'elle portait sur des droits en indivision revendiqués par la demanderesse nés et actuels et que dès lors celle-ci avait un intérêt légitime au sens de l'article 31 susvisé, rendant recevable en la forme son action qui portera sur l'ensemble des biens actuellement détenus par les époux.

S'agissant des dires de l'appelant sur son opposition à toute licitation du bien, la cour relève que si l'intimée en avait fait une demande subsidiaire, en cause d'appel celle-ci ne renouvelle pas sa demande de sorte qu'à défaut de saisine, il n'y a pas lieu à statuer de ce chef.

Enfin, le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré que contrairement à ce que soutient M. [S] sur le fondement de l'article 1096 du code civil, le prononcé du divorce n'a pas eu pour effet de révoquer la donation dès lors que celle-ci a pris effet le 26 octobre 2006.

L'article 1096 dispose en effet que la donation de biens à venir faite entre époux pendant le mariage est toujours révocable. Qu'en revanche, la donation de biens présents qui prend effet au cours du mariage faite entre époux n'est révocable que dans les conditions prévues par les articles 953 à 958, soit pour cause d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite, pour cause d'ingratitude, et pour cause de survenance d'enfants. Qu'enfin les donations faites entre époux de biens présents ou de biens à venir ne sont pas révoquées par la survenance d'enfants.

Si antérieurement, les donations entre époux étaient révocables, la réforme du divorce de 2004 a donc rendu irrévocable la donation de biens qualifiés de présents.

L'acte de donation passé entre les époux a d'ailleurs précisé que celle-ci prend effet au jour de l'acte et qu'elle devient irrévocable par la lecture de l'article 1096 alinéa 2 du code civil résultant de la réforme législative du divorce le 26 mai 2004, loi entrée en vigueur le premier janvier 2005.

La donation consentie à l'épouse ne portant pas sur un bien à venir, celle-ci ayant produit ses effets immédiatement, en dépit de la clause de retour, c'est vainement que l'appelant tente de voir retenir le défaut d'intérêt à agir de l'intimée pour n'avoir aucun droit sur le bien considéré, objet de la demande de liquidation et partage.

Le jugement est confirmé de ces chefs.

Sur la révocation de la donation

A titre reconventionnel, l'appelant sollicite la révocation de la donation consentie en application des articles 953 à 958 du code civil.

- pour inexécution des charges :

L'appelant soutient que Mme [L] ne peut pas solliciter le paiement de sa part indivise sur le bien immobilier objet de la donation du 26 octobre 2006 car cette donation doit être révoquée faute pour son ex épouse d'avoir réglé sa part relative aux charges du bien et ce depuis son départ du domicile conjugal fin 2006. Il affirme en effet qu'elle ne s'est jamais acquittée de sa part de taxe foncière, d'assurance habitation et n'a jamais réglé les frais d'entretien de l'immeuble. Elle s'est totalement désintéressée des frais et impôts du bien dont elle réclame sa qualité de co-indivisaire.

C'est au total à ce jour une somme de 6739,23 euros qui seraient due par elle.

L'intimée ne nie pas ce non paiement de charges qui lui incombait mais oppose à l'appelant la prescription de son action pour ne pas lui avoir réclamé avant l'année 2019 le moindre paiement.

L'inexécution de la charge n'entraîne la révocation de la libéralité que si sont réunies deux conditions :

- la charge doit être la cause impulsive et déterminante de la libéralité, sauf si une clause avait prévue la résolution de plein droit,

- l'inexécution doit être grave.

Il est constant que Mme [L] n'a jamais réglé sa part relative aux charges du bien notamment la taxe foncière et l'assurance. Mais il est tout aussi constant, faute d'élément contraire apporté aux débats, que M. [S] n'a jamais sollicité le règlement des charges de l'immeuble, excepté par un courrier daté du 16 septembre 2019, soit en cours d'instance.

Il ne peut donc réclamer que les sommes dues à compter du 16 septembre 2014, toute demande antérieure étant prescrite, l'action en révocation pour inexécution des conditions de la donation étant désormais soumise à la prescription quinquennale de droit commun suite à la réforme de 2008.

Par ailleurs, si cette condition avait été essentielle à l'acte, M. [S] n'aurait pas hésité à engager une action en résolution dès le premier défaut de paiement, ce dont il s'est abstenu. Cette charge n'était donc pas déterminante de la libéralité et par ailleurs son défaut d'exécution ne revêt pas de caractère grave, le créancier lui même n'ayant pas jugé utile de la réclamer.

Par suite il convient de confirmer le jugement qui a écarté cette cause de révocation.

- pour ingratitude :

Aux termes de l'article 955 du code civil, la donation entre vifs ne pourra être révoquée pour cause d'ingratitude que dans les cas suivants :

1° si le donataire a attenté à la vie du donateur,

2° s'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves,

3° s'il lui refuse des aliments.

Pour justifier de ses demandes, l'appelant indique que Mme [L] aurait eu depuis le départ du domicile conjugal en 2006, un comportement dénigrant et injurieux qui a été la source d'un préjudice moral.

L'intimée lui oppose la prescription de son action et au fond l'absence de gravité.

Aux termes de l'article 957 du Code civil, la demande en révocation pour cause d'ingratitude doit être formée dans l'année, à compter du jour du délit imputé par le donateur au donataire, ou du jour que le délit aura pu être connu par le donateur.

La demande en révocation de la donation faite par l'appelant sur la base d'un comportement injurieux qui aurait trouvé son expression dès l'année 2006 doit être déclarée prescrite faute d'avoir été engagée dans l'année qui a suivi le comportement reproché mais uniquement à l'occasion de l'action engagée par Mme [L] le 6 août 2019 par conclusions en réplique.

Le jugement est également confirmé de ce chef.

Sur l'indemnité d'occupation

L'article 815-9 alinéa 2 du code civil dispose que que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

L'article 815-10 prévoit une prescription de cinq ans pour la rechercher des fruits et revenus des biens indivis.

Aux termes de l'ordonnance de non conciliation rendue le 5 mars 2007 la jouissance du logement conjugal a été attribuée à l'époux qui en a usé de manière privative et exclusive depuis. Ce bien initialement propre à ce dernier est devenu indivis à compter de la donation du 26 octobre 2006, Mme [L] s'étant vue accorder le tiers des droits sur celui-ci.

- Sur la prescription de la demande :

En application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Dans le cas d'une indivision post communautaire comme en l'espèce, le délai de cinq ans ne court qu'à compter du jour où le jugement de divorce est passé en force jugée, soit le 4 février 2009 date de l'arrêt confirmant le divorce des époux, ainsi que l'ont justement souligné les premiers juges.

Le jugement affirme avec la même pertinence que la prescription n'a été interrompue que par l'introduction de la présente instance soit par l'assignation d'août 2019 délivrée par Mme [L].

Certes s'il ressort du procès verbal de défaut établi par le notaire le 3 septembre 2012, lequel est interruptif de prescription comme le soutient l'intimée, que la demande d'indemnité d'occupation avait été présentée dès cette date devant le notaire, l'assignation en partage n'ayant été délivrée que sept années plus tard, c'est avec justesse que la décision entreprise a fixé au premier août 2014 la date à laquelle peut être réclamée l'indemnité pour occupation privative par l'appelant.

Le jugement est confirmé.

- Sur le montant de l'indemnité :

Les parties sont en profond désaccord sur la valeur du bien et donc sur sa valeur locative.

Par suite, par motifs adoptés, le jugement est confirmé en ce qu'il a ordonné une expertise pour déterminer les valeurs.

En revanche il sera réformé en ce qu'il a mis à la charge de Mme [L] une consignation alors que celle-ci démontre bénéficier d e'laide juridictionnelle.

Sur les charges indivisaires

Par motifs adoptés, et en application des règles de prescription rappelées, la décision est confirmée en ce qu'elle a dit que Mme [L] n'était redevable des charges indivisaires correspondant à ses droits qu'à compter du 1er août 2014.

Sur les frais et dépens

Echouant pour l'essentiel, M. [S] sera condamné aux dépens exposés en cause d'appel, ceux de premier instance devant être considérés comme exposés en frais privilégiés de partage ainsi qu'en a décidé le jugement entrepris.

Il sera en outre condamné à verser à Mme [L] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu en date du 29 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Libourne sauf en ce qu'il a mis à la charge de Mme [L] la consignation pour frais d'expertise ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à mettre à la charge de Mme [L] la consignation pour frais d'expertise celle ci bénéficiant de l'aide juridictionnelle ;

Condamne M. [Z] [S] aux dépens exposés en cause d'appel ;

Condamne M. [Z] [S] à verser à Mme [W] [L] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Hélène MORNET, présidente, et par Véronique DUPHIL, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,