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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 24 août 2023, n° 21/05007

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 21/05007

24 août 2023

4ème Chambre

ARRÊT N° 189

N° RG 21/05007

N°Portalis DBVL-V-B7F-R47R

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 AOUT 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Guillaume FRANCOIS, Conseiller, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de Rennes en date du 11 Mai 2023,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats, et Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Mai 2023, devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, magistrat rapporteur, entendue en son rapport, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Août 2023 par mise à disposition au greffe, date indiquée à l'issue des débats : 06 Juillet 2023, prorogée au 24 Août 2023

****

APPELANTS :

Monsieur [VD] [VS] [JI] [VV]

né le 17 Avril 1959 à [Localité 7] (14)

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Christophe SOURON de l'ASSOCIATION SOURON-HAUPAIS-SOLASSOL, Plaidant, avocat au barreau de CAEN

Monsieur [VG] [JJ] [VT] [IN]

né le 12 Mai 1959 à [Localité 5] (14)

[Adresse 13]

[Localité 6]

Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Christophe SOURON de l'ASSOCIATION SOURON-HAUPAIS-SOLASSOL, Plaidant, avocat au barreau de CAEN

Madame [JH], [VZ], [JA], [JD] [JE] épouse [IN]

née le 11 Novembre 1966 à [Localité 9] (50)

[Adresse 13]

[Localité 6]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Christophe SOURON de l'ASSOCIATION SOURON-HAUPAIS-SOLASSOL, Plaidant, avocat au barreau de CAEN

INTIMÉS :

Monsieur [M] [VK] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCCV ORSON sise [Adresse 2]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Céline DENIS de la SELARL DENIS & HERREMAN-GAUTRON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES COTES D'ARMOR (CRCAM 22)

société coopérative de crédit prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 8]

Représentée par Me Philippe GUILLOTIN de la SELARL GUILLOTIN, LE BASTARD ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Charlotte GARNIER de la SELARL GUILLOTIN, LE BASTARD ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Exposé du litige :

En 2006, la SCCV Orson a entrepris, avec le concours de M. [IO] [G], architecte, la réalisation d'un ensemble immobilier, la [Adresse 11], situé [Adresse 4] à [Localité 12], composé outre les espaces communs de huit pavillons, huit parkings aériens, d'un bâtiment A constitué de vingt logements et d'un bâtiment B de dix-sept logements, vendus en l'état futur d'achèvement.

La SCCV Orson a bénéficié de l'appui financier de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Côtes d'Armor ci-après CRCAM 22.

L'opération a fait l'objet d'une garantie intrinsèque d'achèvement au sens de l'article R261-18 du code de la construction et de l'habitation.

Le chantier a été ouvert le 4 septembre 2006.

M. [VD] [VV] a acquis en l'état futur d'achèvement par acte au rapport de Maître [JF] du 2 juin 2007 les lots 50 et 56 (appartements), 69 et 71(garages), 10 et 23 (parkings). L'achèvement de l'immeuble était fixé au second semestre 2007.

M et Mme [IN] ont acquis selon les mêmes modalités par acte du 28 mai 2007 au rapport du même notaire dans le bâtiment B un appartement lot 47, un garage lot 72 et un parking lot 86, avec la même date d'achèvement des travaux.

L'opération de construction n'a pas été achevée.

Par ordonnances du juge des référés du tribunal de grande instance de Lisieux du 15 octobre 2009, la SCCV Orson a été condamnée à verser à M. [VV] une provision de 27793,769€ et à M et Mme [IN] une provision de 19482,76€, au titre des intérêts intercalaires et de la perte de loyers.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 24 mai 2011, le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 11] a mis en demeure la SCCV Orson de terminer les travaux en remédiant aux non-façons et anomalies des bâtiments.

Par actes d'huissier des 20, 21 et 22 juin 2011, le syndicat des copropriétaires a fait assigner la SCCV Orson, M. [G] et son assureur la MAAF, Mes [JF] et [IZ] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Malo afin de voir ordonner une expertise.

Par ordonnance du 3 novembre 2011, le juge des référés a ordonné une expertise confiée à M. [VN] [B]. Les opérations d'expertise ont par la suite été étendues aux entreprises, à la Caisse Régionale de crédit Agricole Mutuel des Côtes d'Armor, à la société Gan, assureur de la SCCV et assureur dommages ouvrage, puis à Me [VK] liquidateur judiciaire de la SCCV Orson, suivant jugement du tribunal de commerce de Lisieux du 15 octobre 2013.

En cours d'expertise, M. [VD] [VV] et M et Mme [IN], ainsi que M et Mme [IU] [VV] et Mme [VL] [VP] ont saisi par acte du 18 juin 2013 le tribunal de grande instance de St Malo d'une demande contre Maître [JF], la SCCV Orson et son mandataire judiciaire en indemnisation de leurs préjudices (111722,52€ pour M. [VV] et 62470,39€ pour les époux [IN]) et fixation pour la SCCV. Cette procédure a été enregistrée sous le n° RG 13/1064.

Maître [JF] a fait assigner M. [G] et la CRCAM 22 en garantie procédure enregistrée sous le n° RG 13/1128.

Par ordonnance du 13 septembre 2013, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures, l'instance se poursuivant sous le n° RG 13/1064.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 10 avril 2014.

Le syndicat de copropriété de la résidence [Adresse 11] et les copropriétaires du Bâtiment B ont saisi le tribunal de grande instance de Saint-Malo à jour fixe selon assignation délivrées les 16,17,18 septembre et 1er octobre 2014 afin d'obtenir le paiement du coût d'achèvement des travaux et l'indemnisation de préjudices annexes, procédure enregistrée sous le RG n° 14/1498.

Les copropriétaires du bâtiment A sont intervenus volontairement à la procédure en cours d'instance afin d'obtenir une provision sur l'indemnisation de leurs préjudices. Me [VK], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Orson n'a pas comparu.

Le juge de la mise en état, par ordonnance du 19 novembre 2015 a sursis à statuer dans la procédure 13/1064 dans l'attente du jugement dans la procédure engagée à jour fixe par le syndicat des copropriétaires.

Par jugement réputé contradictoire du 9 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Saint-Malo dans la procédure RG 14/1498 a :

- débouté la CRCAM 22 de son exception de nullité de l'assignation ;

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la CRCAM 22 concernant l'action du syndicat au titre des parties privatives ;

- débouté la CRCAM 22 de son exception de litispendance ;

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la CRCAM 22 concernant les interventions volontaires des copropriétaires du bâtiment A ;

- déclaré irrecevables les interventions volontaires des sociétés Berru et Roussel BTP

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la CRCAM 22 et Me [JF],

- condamné la CRCAM 22 à payer au syndicat des copropriétaires, à M. [CW] [Z], la société BBC Loc, M. [VH] [O], Mme [IJ] [O] née [CS], M. [IT] [CY] et Mme [Y] [N], M. [H] [I], M. [VY] [A], M. et Mme [R], M. et Mme [F], Mme [DD] [V], M. [VA] [V], M. [D] [IV], M. [VD] [VV], M. [IU] [VV], Mme [CR] [VV], Mme [S] [IY], M. [W] [VO], Mme [E] [VO], M. [IR] [IX], Mme [VR] [IX], M. [VN] [WB], Mme [D] [WB], M. [VW] [JC], Mme [VR] [JC], M. et Mme [VM] [VU]., M. et Mme [VG] [IN], Mme [P] [WA], M. [IS] [VE], M. et Mme [D] [IM], M. [IW] [JB], Mme [DC] [JB], Mme [X] [IK], M. [II] [IK], M. et Mme [WE], la SCI Stfmat, M. [U] [VX], Mme [JG] [WG], Mme [VL] [UY], M. [L] [CM], Mme [J] [VF], M. [VY] [VF], M. [T] [CL], Mme [K] [CL], solidairement, à titre provisionnel, la somme de 1.188.836,66 euros HT outre la TVA, avec indexation sur l'évolution de l'indice BT 01 entre le 10 avril 2014 et la date du jugement, avec cette précision que la société SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme ;

- fixé la créance à titre provisionnel du syndicat de copropriété, ainsi que des différents copropriétaires, au passif de la liquidation judiciaire de la société SCCV Orson à la somme de 1 188 836,66 euros outre la TVA, avec indexation sur l'évolution de l'indice BT01 entre le 10 avril 2014 et la date du jugement, avec cette précision que la société SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme avec la CRCAM 22 ;

- débouté les demandeurs de leurs prétentions dirigées contre Me [IZ], Me [JF] et la compagnie Gan Assurances ;

- débouté le syndicat de copropriété de ses demandes de dommages intérêts au titre du préjudice de jouissance concernant les parties privatives ;

- débouté M. [Z], M. [CM], M. [VX], la SCI BBC Loc de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance ;

- condamné la CRCAM 22 à payer à :

( copropriétaires du bâtiment A)

- M. et Mme [O] une indemnité provisionnelle de 472,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. [I] une indemnité provisionnelle de 389,56 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [V] une indemnité provisionnelle de 389,56 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [VV] une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [WB], une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [JC], une indemnité provisionnelle de 468,95 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. [VE] une indemnité provisionnelle de 469,78 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [JB] une indemnité provisionnelle de 368,75 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [IK] une indemnité provisionnelle de 492,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- Mme [UY] une indemnité provisionnelle de 492,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [VF] une indemnité provisionnelle de 469,78 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [CL] une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- condamné la CRCAM 22 à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts, avec cette précision que la SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme ;

- fixé la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la liquidation judiciaire de la SCCV Orson à la somme de 10 000 euros, avec cette précision que la SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme avec la CRCAM 22 ;

- condamné la CRCAM 22 à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 800 euros de dommages intérêts au titre des frais exposés, avec cette précision que la société SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme;

- Fixé la créance du syndicat au passif de la liquidation judiciaire de la SCCV à ce titre à la somme de 800 euros, avec cette précision que la société SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme avec la CRCAM 22 ;

- débouté la CRCAM 22 de sa demande de garantie formée à l'encontre de Me [IZ] et Me [JF] ;

- fixé dans leurs rapports entre elles, les responsabilités de la SCCV Orson à 60% et celles de la CRCAM à 40 % ;

- dit que la SCCV Orson est tenue de garantir la CRCAM 22 de toutes condamnations en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens qui excéderaient cette proportion et fixe en conséquence cette créance au passif de la liquidation judiciaire de la SCCV ;

- condamné la CRCAM 22 aux dépens de l'instance comprenant les frais de référés ainsi que les frais d'expertise, avec cette précision que la SCCV Orson est débitrice in solidum de ces dépens,

- fixé la créance du syndicat des copropriétaires au titre des dépens de l'instance, comprenant les frais de référés ainsi que les frais d'expertise, au passif de la liquidation judiciaire de la SCCV Orson, avec cette précision que la SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme avec la CRCAM 22;

- dit que les parties succombant supporteront la charge des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus aux articles L111-8 et L124-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamné la CRCAM 22 à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles, avec cette précision que la SCCV est condamnée in solidum au paiement de cette somme ;

- fixé la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la liquidation judiciaire de la SCCV Orson , à la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles avec cette précision que la SCCV Orson est débitrice in solidum de cette somme avec la CRCAM 22 ;

- débouté le GAN, Me [IZ] et Me [JF] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire à hauteur des ¿ de la condamnation prononcée au profit du syndicat des copropriétaires au titre de l'inachèvement pour un montant de 1 188 836,66 euros HT outre TVA et indexation ;

- ordonné l'exécution provisoire des autres condamnations prononcées ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La CRCAM 22 a interjeté appel de ce jugement le 04 février 2016, intimant le syndicat de copropriété, l'ensemble de copropriétaires, Me [VK], ès qualités, Me [IZ], Me [JF]. Le syndicat de copropriété et les copropriétaires ont assigné le Gan en appel provoqué.

Par un arrêt du 17 mai 2018, la cour d'appel de Rennes a :

- réformé partiellement le jugement entrepris ;

Reprenant le dispositif pour le tout pour une meilleure compréhension ;

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance ;

- rejeté la fin de non-recevoir concernant l'action du syndicat au titre des parties privatives ;

- rejeté l'exception de litispendance s'agissant des demandes formées par les époux [IU] [VV] et Mme [VL] [UY] ;

- rejeté la fin de non-recevoir concernant les interventions volontaires des copropriétaires du bâtiment A ;

- déclaré irrecevables les interventions volontaires des sociétés SAS Berru et SAS Roussel BTP ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes au titre des parties privatives ;

- rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise judiciaire de M. [B];

- condamné in solidum la SCCV Orson, représentée par Me [VK], en qualité de liquidateur judiciaire, par fixation au passif de la liquidation judiciaire, et la CRCAM 22, à payer au syndicat des copropriétaires, à M. [CW] [Z], la société BBC LOC, M. [VH] [VJ] [O], Mme [IJ] [C] [CX] [O] née [CS], M. [IT] [CY] et Mme [Y] [N], M. [H] [I], M. [VY] [A], M. et Mme [R], M. et Mme [F], Mme [DD] [V], M. [VA] [V], M. [D] [IV], M. [VD] [VV], M. [IU] [VV], Mme [CR] [VV], Mme [S] [IY], M. [W] [VO], Mme [E] [VO], M. [IR] [IX], Mme [VR] [IX], M. [VN] [WB], Mme [D] [WB], M. [VW] [JC], Mme [VR] [JC], M. et Mme [VM] [VU], M. [IP] M. et Mme [VG] [IN] , Mme [P] [WA], M. et Mme [IS] [VE], M. et Mme [D] [IM], M. [IW] [JB], Mme [DC] [JB], Mme [X] [IK], M. [II] [IK], M. et Mme [WE], la SCI Stefmat, M. [U] [VX], Mme [JG] [WG], Mademoiselle [VL] [UY], M. [L] [CM], Mme [J] [VF], M. [VY] [VF], M. [T] [CL], Mme [K] [CL], solidairement, à titre provisionnel, la somme de 1 426 603,99 euros TTC, au titre du coût d'achèvement de l'opération, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- rejeté les demandes dirigées à l'encontre de Me [IZ], de Me [JF] et de la société Gan Assurances ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes de dommages intérêts au titre du préjudice de jouissance concernant les parties privatives;

- débouté M. [Z], M. [CM], M. [VX], la SCI BBC Loc de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance ;

- condamné la CRCAM 22 à payer, au titre du retard d'achèvement, à :

- M. et Mme [O] une indemnité provisionnelle de 472,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. [I] une indemnité provisionnelle de 389,56 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [V] une indemnité provisionnelle de 389,56 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [VV] une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [WB], une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

M. et Mme [JC], une indemnité provisionnelle de 468,95 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. [VE] une indemnité provisionnelle de 469,78 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [JB] une indemnité provisionnelle de 368,75 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- M. et Mme [IK] une indemnité provisionnelle de 492,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

Mme [UY] une indemnité provisionnelle de 492,30 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

M. et Mme [VF] une indemnité provisionnelle de 469,78 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

M. et Mme [CL] une indemnité provisionnelle de 536,19 euros par mois pour la période du 1er avril 2008 à la date du jugement ;

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement et ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- condamné la CRCAM 22 à payer, au titre du retard d'achèvement, à :

- M. et Mme [O] une indemnité provisionnelle complémentaire de 472,30 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. [I] une indemnité provisionnelle complémentaire de 389,56 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [V] une indemnité provisionnelle complémentaire de 389,56 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [VV] une indemnité provisionnelle complémentaire de 536,19 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [WB], une indemnité provisionnelle complémentaire de 536,19 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

M. et Mme [JC], une indemnité provisionnelle complémentaire de 468,95 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. [VE] une indemnité provisionnelle complémentaire de 469,78 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

M. et Mme [JB] une indemnité provisionnelle complémentaire de 368,75 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [IK] une indemnité provisionnelle complémentaire de 492,30 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- Mme [UY] une indemnité provisionnelle complémentaire de 492,30 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [VF] une indemnité provisionnelle complémentaire de 469,78 euros par mois, de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- M. et Mme [CL] une indemnité provisionnelle complémentaire de 536,19 euros par mois de la date du jugement à celle de l'arrêt ;

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt et ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- rejeté les demandes de la SCCV Orson au titre de son préjudice de jouissance en qualité de copropriétaire ;

- condamné in solidum la SCCV Orson, représentée par Me [VK], en qualité de liquidateur judiciaire, par fixation au passif de la liquidation judiciaire, et la CRCAM 22, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts au titre de son préjudice de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- condamné in solidum la SCCV Orson, représentée par Me [VK] par fixation au passif de la liquidation judiciaire, et la CRCAM 22 à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 800 euros au titre des frais de gestion du syndic, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- rejeté la demande au titre du coût des travaux urgents ;

- rejeté les demandes de garantie dirigées contre Me [IZ], Me [JF] et la société Gan Assurances ;

- fixé, dans leurs rapports entre elles, la part de responsabilité de la SCCV Orson à 60 % et celle de la CRCAM 22 à 40 % ;

- dit que la CRCAM 22 est tenue de garantir la SCCV Orson de toutes condamnations en principal, intérêts, frais irrépétibles, et dépens qui excéderaient cette proportion ;

- débouté la CRCAM 22 de sa demande de garantie formée contre la SCCV Orson et de sa demande de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire ;

- condamné in solidum Me [VK] et la CRCAM 22 aux dépens de première instance, incluant les frais de référé et d'expertise judiciaire, et aux dépens d'appel, à l'exception de ceux des appels provoqués du Gan, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats qui le demandent ;

- dit que le syndicat de copropriété et les 50 copropriétaires, Me [IZ] et Me [JF], conserveront à leur charge les dépens des appels provoqués ;

- dit que les parties succombant supporteront la charge des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus aux articles L111-8 et L124-1 du code des procédures d'exécution ;

- condamné in solidum Me [VK], es qualité de liquidateur de la SCCV Orson, et la CRCAM 22, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 13 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

- rejeté les autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par un arrêt du 24 octobre 2019, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société CRCAM 22 .

La procédure RG 13/1064 a été reprise devant le tribunal judiciaire de Saint-Malo.

Par un jugement en date du 31 mai 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Malo a :

- débouté M. [VD] [VV], M. [VG] [IN], M. et Mme [IU] [VV], et Mme [VL] [VP] épouse [UY] de leurs demandes ;

- débouté Me [JF] et la CRCAM de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné in solidum MM. [VD] et [IU], et Mme [CR] [VV], Mme [VL] [VP], M. [VG] et [AM] [IN] et Me [VK], en qualité de liquidateur de la SCCV Orson, aux entiers dépens.

M. [VD] [VV], M. [VG] [IN] et Mme [AM] [IN] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 2 août 2021, intimant Me [VK] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SCCV Orson et la CRCAM 22.

Dans leurs dernières conclusions transmises le 24 avril 2023, M. [VD] [VV], M. [VG] [IN] et Mme [JH] [IN] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- débouté M. [VD] [VV], M. et Mme [IN], de leurs demandes;

- condamné M. [VD] [VV], M. et Mme [IN], aux entiers dépens ;

Statuant à nouveau,

- condamner la SCCV Orson et Me [VK] en sa qualité de liquidateur judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de cette société, la CRCAM 22, à verser in solidum à M. [VD] [VV] la somme totale de 98 045,17 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la décision jusqu'à parfait paiement, décomposée de la manière suivante :

- condamnations non réglées : 28 793,76 euros (ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Lisieux en date du 15 octobre 2009) ;

- intérêts dus à compter du 11 mai 2009 : 8 238,37 euros ;

- frais de procédure et dépens : 71,24 euros ;

- frais d'exécution : 308,44 euros ;

- frais d'inscription d'hypothèque judiciaire : 286,88 euros ;

- pertes de loyers à compter de l'ordonnance de référé : 18 890, 24 euros ;

- installation de porte de garage : 508,30 euros ;

- défaut de réduction fiscale : 49 187,00 euros ;

- condamner la SCCV Orson et Me [VK] en sa qualité de liquidateur judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de cette société, la CRCAM 22, à verser in solidum à M. et Mme [IN] la somme totale de 58 001,58 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la décision jusqu'à parfait paiement, décomposée de la manière suivante :

- condamnations non réglées : 20 482,76 euros (ordonnance de référé du TGI de Lisieux en date du 15 octobre 2009) ;

- intérêts dus à compter du 11 mai 2009 : 5 775,05 euros ;

- frais de procédure et dépens : 71,24 euros ;

- frais d'exécution : 506,38 euros ;

- frais d'inscription d'hypothèque judiciaire : 161,85 euros ;

- pertes de loyers à compter de l'ordonnance de référé : 8 768 euros;

- installation de porte de garage : 508,30 euros ;

- défaut de réduction fiscale : 21 728,00 euros ;

- fixer les créances de M. [VD] [VV], et M. et Mme [IN] sur la procédure de liquidation judiciaire de la SCCV Orson aux sommes en cause;

- condamner la SCCV Orson et Me [VK], en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidateur judiciaire de cette société, ainsi que la CRCAM 22 à verser in solidum à M. [VD] [VV], à M. et Mme [IN], la somme de 5 000 euros chacun conformément à l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SCCV Orson et Me [VK], en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidateur judiciaire de cette société, et la CRCAM 22, in solidum, aux entiers dépens avec recouvrement par Me Bourges, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions transmises le 15 mai 2023, Me [VK] ès qualités demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- débouté M. [VD] [VV], M. et Mme [IN] de leurs demandes;

- condamné M. [VD] [VV], M. et Mme [IN], aux entiers dépens ;

En tout état de cause,

- débouter M. [VV] et M. et Mme [IN] et la CRCAM du surplus de leurs demandes contraires et plus amples en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de Me [VK], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCCV Orson ;

- condamner M. [VV] et M. et Mme [IN] in solidum à verser à Me [VK], es qualité de liquidateur judiciaire de la SCCV Orson, la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum M. [VV] et M. et Mme [IN] aux entiers dépens d'appel.

Dans ses dernières conclusions transmises le 10 mai 2023, la société CRCAM 22 demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, à l'exception des dispositions relatives aux frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau sur ce point,

- condamner in solidum M. [VD] [VV] et M. et Mme [IN] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;

- en conséquence, débouter [VD] [VV] et M. et Mme [IN] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires aux présentes ;

Y additant,

-condamner in solidum M. [VD] [VV] et M. et Mme [IN] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrrépétibles d'appel outre les entiers dépens de l'instance.

L'instruction a été clôturée le 16 mai 2023.

Motifs :

-Sur la recevabilité des demandes de M. [VD] [VV] et M et Mme [IN] au regard de l'autorité de la chose jugée:

Les appelants soutiennent que ne peut leur être opposée l'autorité de la chose jugée des décisions rendues dans la procédure à jour fixe à l'initiative du syndicat de copropriété et des copropriétaires.

Se fondant sur l'article 1351 du code civil, ils rappellent que l'autorité de la chose jugée d'une décision suppose une identité de parties, d'objet et de cause. Ils font observer que la procédure à jour fixe n'avait pas pour objet de les indemniser de leurs pertes de loyers, de leur frais d'exécution de l'ordonnance de référé de 2009, de leur préjudice fiscal, préjudices qu'ils n'ont jamais renoncés à voir indemniser. Ils en déduisent qu'il n'existe pas d'identité d'objet entre les deux procédures.

La SCCV Orson représentée par Maître [VK], comme la CRCAM 22 soutiennent que les demandes sont irrecevables du fait de l'autorité de la chose jugée liée aux décisions des 9 décembre 2015 et 17 mai 2018.

Elles relèvent que tant M. [VD] [VV] que M et Mme [IN] étaient demandeurs à l'instance aux côtés du syndicat des copropriétaires, qu'ils ont formulé des demandes d'indemnisation du préjudice subi du fait du défaut de livraison des logements à la date prévue aux actes de vente.

La CRCAM 22 ajoute qu'ils ont renoncé à ces demandes comme les autres copropriétaires de ce bâtiment quand il leur a été opposé que le bâtiment B dans lequel se situaient leurs appartements avait fait l'objet d'une livraison en 2009 et que les lots étaient occupés. Elle en déduit qu'ils ont renoncé à ces prétentions, ce qui constitue un aveu judiciaire que le bâtiment B était bien occupé.

Par application de l'article 1351 devenu l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et formées par elles et contre elles en la même qualité.

Il s'en déduit que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a été débattu et tranché dans le dispositif de la première décision à l'occasion d'une instance présentant une identité de parties, d'objet et de cause.

En l'espèce, M. [VD] [VV] et les époux [IN] étaient parties aux côtés du syndicat des copropriétaires à la procédure qui a donné lieu au jugement du 9 décembre 2015 puis à l'arrêt du 17 mai 2018, diligentée entre autres contre la SCCV Orson et la banque.

La CRCAM 22 produit l'assignation à jour fixe délivrée le 17 septembre 2014, dans laquelle M [VD] [VV] et M et Mme [IN] apparaissent en qualité de requérants pour obtenir paiement par la banque, les notaires et le GAN, pour le premier, d'une indemnité de 908,24€ par mois du 30 mars 2008 à la date du jugement et, pour les seconds, d'une indemnité de 493,70 € par mois sur la même période. Le syndicat des copropriétaires demandait pour sa part l'indemnisation du coût d'achèvement de l'ensemble immobilier contre ces mêmes parties et la fixation de sa créance au passif de la liquidation de la SCCV.

L'énoncé des conclusions récapitulatives des demandeurs du 9 juin 2015 repris dans le jugement du tribunal de St Malo du 9 décembre 2015 montre que les copropriétaires de l'immeuble B ayant initialement saisi la juridiction dont M. [VV] et les époux [IN] comme les copropriétaires de l'immeuble A intervenus volontairement ultérieurement se sont associés à la demande d'indemnisation du coût d'achèvement des travaux de construction présenté par le syndicat des copropriétaires. En revanche, il n'était plus demandé au tribunal de statuer sur l'indemnisation des autres préjudices supportés par les copropriétaires du bâtiment B effectivement achevé en 2009 comme le rappellent les appelants en page 3 de leurs écritures. Seuls les copropriétaires du bâtiment A qui n'était pas achevé et ne pouvait être livré ont maintenu ces prétentions indemnitaires.

M. [VV] et les époux [IN] ont donc effectivement modifié leurs demandes et renoncé dans cette instance à l'indemnisation de leurs préjudices distincts du coût d'achèvement de l'ensemble immobilier. Toutefois, cette situation ne peut être analysée comme une décision dépourvue d'équivoque de leur part de renoncer à toute action au titre des préjudices subis du fait du retard d'achèvement de l'immeuble dans lequel étaient situés les appartements acquis, ce d'autant qu'est demeurée pendante devant la juridiction de St Malo l'instance qu'ils avaient introduite dès 2013, procédure ayant donné lieu à un sursis à statuer prononcé par le juge de la mise en état par ordonnance du 19 novembre 2015.

Ni le tribunal, ni la cour d'appel n'ont donc examiné et statué dans le dispositif de leur décision sur les conséquences préjudiciables pour les appelants du retard d'achèvement de l'immeuble B. Dès lors, n'est pas caractérisée une identité d'objet entre les deux instances, de sorte que les intimés ne peuvent invoquer la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée. Les demandes de M. [VD] [VV] et des époux [IN] sont recevables. Le jugement est infirmé de ce chef.

-Sur l'irrecevabilité de la demande au regard de la procédure collective de la SCCV :

Maître [VK],liquidateur de la SCCV soutient que les demandes des appelants sont irrecevables comme se heurtant aux dispositions des articles L 622-21 et L 641-3 du code de commerce, en ce que le jugement d'ouverture de la procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme relative à des créances antérieures à l'ouverture de la procédure et qui ont été déclarées au passif. Il fait valoir que le créancier après avoir déclaré sa créance ne peut en faire constater le principe et fixer le montant qu'en suivant la procédure de vérification de créances.

Les appelants ne développent pas d'argumentation en réponse.

Selon l'article L 622-21 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige, le jugement d'ouverture de la procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L 622-17 (créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour le besoin du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie par le débiteur pendant cette période) et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

Selon l'article L 622-22 du code de commerce sous la même rédaction, sous réserve des dispositions de l'article L 625-3 relatif aux instances prud'homales, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

Il s'en déduit qu'en l'absence d'instance en cours à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, le créancier après avoir déclaré sa créance, ne peut en faire constater le principe et fixer le montant qu'en suivant la procédure de vérification des créances.

En l'espèce, Maître [VK] rappelle, sans être contredit que la SCCV Orson a été placée en redressement judiciaire par jugement du 26 avril 2013, procédure convertie en liquidation judiciaire le 15 octobre suivant. Il apparaît que les appelants ont déclaré leurs créances le 19 juin 2013. En l'absence d'instance relative à l'indemnisation de leurs préjudices en cours à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, leurs créances devaient être soumises pour la reconnaissance de leur principe comme pour la fixation de leur montant à la procédure de vérification des créances par le juge commissaire. En conséquence, leur demande de fixation de créance est irrecevable.

-Sur la responsabilité du CRCAM 22 :

M. [VV] et les époux [IN] font valoir que, comme l'a montré l'expert, la banque n'a pas vérifié la faisabilité économique initiale du projet et a accordé à la SCCV un financement sans en vérifier l'utilisation, notamment en ce qui concerne les frais de commercialisation, dont il est apparu qu'ils dépassaient largement les pratiques habituelles puisqu'ils représentaient 25% du total du prix de vente du programme.

Ils ajoutent que comme l'a relevé l'arrêt du 17 mai 2018, la SCCV Orson s'était engagée à livrer les maisons à la fin du second trimestre 2007, tandis que les bâtiments devaient être livrés pour la fin du premier trimestre 2008 ; que la banque a attesté de l'existence de crédits confirmés pour un montant de 1 400 000€, alors qu'il s'est avéré que cette somme était composée d'une ouverture de crédit de 600000€ et d'un prêt de 800000 € remboursables au 30 novembre 2007 donc avant la fin de l'opération, de sorte qu'ils ne pouvaient constituer des crédits confirmés au sens du code de la construction et de l'habitation. Ils relèvent que ces attestations erronées ont permis la rédaction par Maître [JF] le 2 juin 2007 de l'acte constatant la réalisation de la condition suspensive d'obtention de la garantie intrinsèque prévue dans les actes de vente et la réalisation de l'opération de construction. Ils estiment que les fautes de la banque sont directement à l'origine de leurs préjudices, peu important que d'autres intervenants à l'opération aient également commis des manquements y ayant également contribué.

La CRCAM 22 conteste les fautes qui lui sont reprochées.

Elle fait observer que n'ayant pas de lien contractuel avec les appelants, elle n' était débitrice à leur égard d'aucune obligation de conseil, qu'à l'égard de son seul cocontractant la SCCV Orson, le principe de non immixtion lui imposait de ne pas intervenir dans la gestion de l'opération à raison de décisions de celle-ci qu'elle estimait inopportunes.

Elle ajoute que lors de la présentation du projet, la SCCV lui avait remis une étude de faisabilité économique établie le 7 février 2006 par le maître d'œuvre qui mettait en évidence l'équilibre de cette opération et sa rentabilité ; qu'au regard des coûts analysés par le sapiteur de l'expert la difficulté d'achèvement du programme résulte d'un défaut de trésorerie en rapport avec des commissions excessives versées à la société en charge de la commercialisation, ce qui ne lui est pas imputable n'ayant pas à vérifier l'affectation des fonds prêtés.

Elle fait par ailleurs observer qu'elle a respecté ses engagements concernant les ouvertures de crédit qui ont été consenties et partiellement amorties par le produit des ventes réalisées.

Il est constant que faute de lien contractuel entre les appelants et la banque, la responsabilité de cette dernière ne peut être recherchée que sur un fondement délictuel au titre de l'article 1382 devenu l'article 1240 du code civil, ce qui implique de démontrer sa faute à l'origine du préjudice allégué.

En l'espèce, il ne peut être reproché à la CRCAM 22 de ne pas avoir vérifié l'utilisation des fonds octroyés à la SCCV Orson pour réaliser l'opération de construction et notamment surveiller la part affectée aux frais de commercialisation.

Toutefois, les ventes étaient conclues sous la condition suspensive que le vendeur justifie satisfaire aux conditions de garantie d'achèvement définies par l'article R 261-18b du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction applicable en 2007. Le vendeur devait donc bénéficier d'un financement assuré à hauteur de 75% du prix des ventes, par les fonds appartenant au vendeur déjà investis dans l'opération ou disponibles pour la financer à l'exclusion des dations en paiement ou des fonds issus d'emprunts ; par le montant des prix de ventes déjà conclues et pour lesquelles l'acquéreur a fourni une attestation bancaire précisant qu'il dispose des fonds ou valeurs nécessaires à l'achat ou d'un crédit confirmé ; par les crédits confirmés par les banques ou établissements financiers habilités à faire des opérations de crédit immobilier, crédits qui devaient être certains, irrévocables et maintenus jusqu'à l'achèvement de l'opération.

Il est établi que le notaire a rédigé le 2 juin 2007 un acte constatant la réalisation de la condition suspensive de justification de financement à hauteur de 75% du prix des ventes, sur la base d'attestations de la banque en date du 11 janvier et du 15 mai 2007d'un montant de crédits confirmés de 1 400 000€. Or, alors que l'opération devait être achevée au 1er trimestre 2008, l'ouverture de crédit de 600000€ du 16 mai 2006 avait une durée de 18 mois et le prêt de 800000€ du 31 mai 2007 avait une durée de six mois, de sorte que ces financements étaient uniquement assurés jusqu'au 30 novembre 2007 et, n'intégrant pas l'échéance de l'opération, ne pouvait constituer des crédits confirmés, ce que l'intimée ne discute pas.

L'établissement et la remise de ces attestations inexactes ont permis la levée de la condition suspensive et la réalisation de l'opération alors que les conditions de la garantie n'étaient pas réunies, ce qui caractérise une faute de la banque directement à l'origine de l'inachèvement de l'opération et des conséquences préjudiciables supportées par les acquéreurs, peu important que d'autres intervenants lors de cette opération aient également commis des fautes ayant contribué à ces préjudices. La responsabilité de la CRCAM 22 est en conséquence établie.

-Sur le préjudice des acquéreurs :

M. [VV] comme M et Mme [IN] demandent les condamnations provisionnelles accordées par le juge des référés en 2009 et non réglées, respectivement à hauteur de 28793,76€ et 20482,76€, ainsi que les intérêts et les frais d'exécution.

Ils demandent également les pertes de loyers à compter de l'ordonnance de référé, le coût de la pose d'une porte de garage ainsi que la perte de réduction fiscale qui avait été calculée lors de l'acquisition.

La CRCAM 22 sollicite le rejet de ces demandes. Elle fait observer que les frais d'exécution de l'ordonnance de référé procèdent d'une décision provisoire qui ne lui est pas opposable intéressant uniquement la SCCV, qu'ils ne constituent pas un préjudice indemnisable.

Concernant le préjudice de jouissance, elle observe que les appartements situés dans l'immeuble B ont été livrés et occupés ou donnés en location en fonction du marché locatif local, aucun engagement contractuel n'ayant été pris sur un montant de location. Elle ajoute que les appelants ne peuvent demander des pertes de loyer à compter de l'ordonnance de référé d'octobre 2009 alors qu'ils justifient de baux conclus en juillet et septembre de la même année, ce d'autant qu'il n'est justifié d'aucun décompte précis. La banque fait observer que les appelants restent débiteurs du solde du prix des appartements et que l'indemnisation des pertes de loyers impose de prendre en compte l'économie de charges variables et d'imposition réalisées.

L'intimée conteste la demande au titre du préjudice fiscal au motif que la perte définitive de l'avantage fiscal n'est pas démontrée et qu'il n'est produit aucune pièce relative à l'imposition des appelants.

*Les condamnations non réglées, les intérêts et les frais de procédure et d'exécution :

Les acquéreurs demandent les condamnations prononcées par le juge des référés en 2009, non réglées, ce qui revient à demander de condamner la banque à les indemniser des préjudices invoqués dans ces procédures provisoires, lesquels se rapportaient aux intérêts intercalaires réglés par les acquéreurs et l'impossibilité de percevoir des loyers .

Comme il a été indiqué, la livraison des biens acquis devait intervenir pendant le second semestre 2007, soit au plus tard le 31 décembre de cette année. Les appelants qui ne produisent pas de procès-verbal de livraison, précisent dans leurs écritures en page 3 que l'immeuble B a été achevé en février 2009, ce que confirme le courrier que leur a adressé la SCCV Orson le 10 février 2009 rappelant l'attestation de l'architecte sur ce niveau d'avancement du bâtiment au sens des actes de vente, pour solliciter le paiement du solde du prix.

S'agissant des intérêts intercalaires, aucune pièce n'est produite devant la cour à ce titre, de sorte que ces demandes respectivement de 12682,76€ pour les époux [IN] et de 15793,76€ pour M. [VV] ne peuvent être accueillies.

En revanche, du fait de l'inachèvement de l'immeuble à la date prévue, imputable aux fautes de la banque, les acquéreurs ont été privés de la jouissance de leurs biens, notamment pour le donner en location de janvier 2008 à février 2009, pendant 14 mois.

M. [VV] a acquis un appartement T1 bis au 1er étage et un appartement T3 au second étage. Au regard de la valeur locative établie par leur location ultérieure à hauteur de 800€, son préjudice conséquence du retard d'achèvement sera fixé à 11200€.

M et Mme [IN] ont acquis un appartement T2 au rez de chaussée. Sur la base d'une valeur locative de 400 à 425€, leur préjudice sera fixé à 5800€.

La CRCAM 22 observe à juste titre qu'elle n'était pas partie aux procédures de référé devant le tribunal de Lisieux et que les intérêts de sommes auxquelles avait été condamnée la seule SCCV Orson ne peuvent être mis à sa charge, étant sans lien avec les fautes qui lui sont reprochées. Il en est de même s'agissant des frais de procédure et d'exécution de ces ordonnances engagés par les appelants.

*Les pertes de loyer à compter des ordonnances de référé :

Les appelants se prévalent de l'évaluation du montant mensuel de location réalisée par la société FDSA Conseil en charge de la commercialisation du programme, supérieure aux loyers prévus dans les baux effectivement souscrits et invoquent une perte. Cependant, comme le fait remarquer justement la banque, le montant des loyers est fixé en fonction du marché locatif local et ne peut être déterminé de façon certaine par anticipation lors de la mise en vente du programme de construction. En outre, la location continue d'un logement suite à sa livraison ne présente non plus aucun caractère de certitude.

M. [VV] verse une attestation d'une agence immobilière de 2011 témoignant des difficultés à louer l'appartement T3 situé au second étage du fait des travaux restant à réaliser sur les parties communes .

Cependant, ce document ne fournit aucune précision sur le montant du loyer alors demandé et sur l'offre locale de logements à cette époque. Il est par ailleurs établi que ce logement a été loué à compter du 5 avril 2012 pour un loyer de 500€ dont il n'est pas démontré qu'il est notablement inférieur aux loyers pratiqués usuellement à [Localité 12] pour ce type de logement et alors qu'aucune pièce n'établit que les parties communes et les équipements communs avaient été alors très sensiblement améliorés par rapport à leur description dans l'attestation de 2011.

Par ailleurs, les appelants ne justifient pas par un décompte précis de l'indemnisation sollicitée. Leur demande dans ces conditions ne peut être accueillie.

*Le défaut de réduction fiscale :

Les appelants versent aux débats une étude personnalisée du projet de M. [VV] et de M et Mme [IN], dans le cadre d'un investissement locatif sous le régime De Robien recentré, qui met en évidence une économie d'impôt évaluée à 49187€ pour M. [VV] et de 10864€ pour les époux [IN].

Toutefois, ces demandes ne peuvent prospérer en l'absence de production des avis d'imposition des parties pendant les neuf années à compter de 2009, permettant de confirmer la constance de leur revenu imposable sur laquelle était fondé le calcul. En outre, le bénéfice de ces dispositions impliquait pour le propriétaire de souscrire un engagement de louer pendant neuf ans, dont il n'est pas non plus justifié alors que les logements ont été mis à disposition des acquéreurs en février 2009 et louer pour deux d'entre eux en août ( T1 Bis de M. [VV]) et septembre 2009 (T2 de M et Mme [IN]).

De la même façon, l'attestation non datée de son expert comptable produite par M. [VV] qui énonce un montant de réduction perdue sans justification par le moindre calcul effectué sur la base des revenus effectifs de l'appelant ne peut permettre de caractériser la réalité de son préjudice.

*Sur le paiement de la porte des garages :

Seul M. [VV] justifie de l'installation pour un montant de 508,30€ d'une porte destinée à clore un des garages, permettant de louer l'appartement dont il constitue l'accessoire. Cet équipement, prévu sur la notice descriptive des lots n'a pu être réalisé du fait de l'achèvement partiel de l'immeuble B imputable aux fautes de la banque. En conséquence, M. [VV] est fondé à obtenir paiement de cette somme.

-Sur les demandes annexes :

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont infirmées.

La CRCAM 22 sera condamnée à verser tant à M. [VV] qu'à M et Mme [IN] une indemnité de 4000€. Les autres demandes à ce titre sont rejetées.

Elle supportera les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée opposée par la Caisse régionale de crédit agricole mutuelle des Côtes d'Armor et Maître [VK] ès qualités,

Déclare irrecevables les demandes de M. [VD] [VV] et M et Mme [IN] contre la SCCV Orson représentée par Maître [VK] en qualité de liquidateur judiciaire,

Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Côtes d'Armor à verser :

A M. [VD] [VV] la somme de 11200€ au titre du préjudice lié au retard de livraison et 508,30€ au titre du paiement de la porte de garage,

A M et Mme [IN] la somme de 5800€ au titre du préjudice lié au retard de livraison,

Déboute M. [VV] et les époux [IN] du surplus de leurs demandes indemnitaires,

Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Côtes d'Armor à verser tant à M. [VV] qu'à M et Mme [IN] une indemnité de 4000€ au titre des frais irrépétibles,

La condamne aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,