Décisions
CA Versailles, 3e ch., 5 octobre 2023, n° 21/04993
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50D
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 OCTOBRE 2023
N° RG 21/04993
N° Portalis DBV3-V-B7F-UVYF
AFFAIRE :
[Z] [W]
C/
[Y] [B]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Juillet 2021 par le TJ de NANTERRE
N° Chambre : 2
N° RG : 18/05616
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Catherine SCHLEEF
Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [Z] [W]
née le 27 juin 1974 à [Localité 10] (67)
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentant : Me Catherine SCHLEEF, Postulant/plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1909
APPELANTE
****************
Monsieur [Y] [B]
né le 09 Novembre 1949 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Madame [X] [V] épouse [B]
née le 13 Septembre 1943 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentant : Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, Postulant/plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire: 744
Monsieur [O] [J]
[Adresse 2]
[Localité 6]
défaillant
SDC DU [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 7]
défaillant
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président et Madame Gwenael COUGARD, Conseiller , chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence PERRET, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,
Madame Florence SCHARRE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme FOULON,
************
FAITS ET PROCEDURE :
Par acte authentique en date du 27 mars 2012, M. [O] [J] et Mme [Z] [N] [W] ont vendu à M. [Y] [B] et Mme [X] [V] épouse [B] un bien immobilier situé [Adresse 1] (92), au prix de 150 000 euros.
Peu de temps après son entrée dans les lieux, la fille des consorts [B] a constaté des problèmes d'humidité excessive et autres défauts du bien, consignés dans un procès-verbal de constat d'huissier en date du 27 avril 2012.
Par lettre en date du 29 mai 2012, les consorts [B] ont tenté de résoudre amiablement ce litige.
Le 11 mars 2013, les consorts [B] ont assigné en référé les consorts [J] [W]. Par ordonnance du 6 juin 2013, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [H], expert immobilier.
Le rapport déposé le 13 août 2018, conclut que: "J'ai constaté une forte humidité dans l'appartement tant en période d'occupation qu'en période de vacances. Selon moi, ce taux d'humidité rend l'appartement pratiquement impropre à sa destination. J'ai constaté que différents aménagements avaient été mis en place par les propriétaires successifs (faux plancher, doublage des murs, ventilation mécanique, prises d'air en façade...). Mais ceci sans résultat significatif (...). Au vu de ces causes, qui sont anciennes, il me semble techniquement impossible que M. [J] et Mme [W] aient pu ignorer le fort taux d'humidité de l'air et de leur appartement avant sa vente aux époux [B]. L'essentiel de ces causes pouvaient être constatées par un simple examen visuel, mais selon moi, elles ne pouvaient pas être interprétées par un non professionnel ce qui explique que les époux [B] n'aient découvert le problème qu'après leur aménagement".
Par acte d'huissier de justice en date du 4 juin 2018, les consorts [B] ont fait assigner les consorts [J] [W] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] en demandant un sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise judiciaire. Un procès-verbal de recherches infructueuses a été dressé le même jour concernant le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1].
Suivant ordonnance en date du 15 octobre 2019, le juge de la mise en état s'est déclaré incompétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action invoquée par Mme [W], de même que sur les demandes au fond formées subsidiairement par les parties.
En cours de procédure, M. [J] et Mme [W] se sont séparés.
Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la recevabilité de l'action de M. [B] et Mme [V] épouse [B], pour vices cachés, ceux ci ayant abandonné ce fondement juridique au profit du dol,
- dit que le bien immobilier situé [Adresse 1], acquis par M. [B] et Mme [V] épouse [B] était affecté, au moment de la vente, d'une humidité anormale, cette circonstance étant connue de M. [J] et Mme [W] qui l'ont dissimulée intentionnellement à leurs cocontractants,
- dit que M. [J] et Mme [W] sont auteurs d'un dol,
En conséquence,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B], les sommes suivantes, provisions non déduites, avec intérêt au taux légal àcompter de la décision déférée:
* au titre des travaux nécessaires à la suppression de l'humidité et à la remise en état de l'appartement.....................................................................................................57 109,80 euros,
* au titre de la ventilation mécanique controlée (VMC) installée dans la cuisine ... 153,85 euros
- débouté M. [B] et Mme [V] épouse [B], du surplus de leurs demandes indemnitaires,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- rejeté pour le surplus.
Par acte du 30 juillet 2021, Mme [W] a interjeté appel.
Par dernières écritures du 3 mars 2023, Mme [W] prie la cour de :
- réformer le jugement déféré, et statuant à nouveau:
In limine litis:
- juger prescrite l'action diligentée pour dol par M. [B] et Mme [V] épouse [B],
A défaut,
- juger M. [B] et Mme [V] épouse [B] mal fondés dans toutes leurs demandes,
En conséquence,
- débouter M. [B] et Mme [V] épouse [B] de leurs demandes au titre d'un prétendu dol,
En tout état de cause,
- juger que Mme [W] ne s'est pas rendue coupable d'un dol,
En conséquence,
- ordonner la désolidarisation de Mme [W] avec M. [J],
- condamner M. [B] et Mme [V] épouse [B] à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 7 mars 2023, M. [B] et Mme [V] épouse [B] prient la cour de :
- juger que l'action des époux [B] est recevable et non prescrite,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
*dit que le bien immobilier situé [Adresse 1], acquis par M. [B] et Mme [V] épouse [B] était affecté, au moment de la vente, d'une humidité anormale, cette circonstance étant connue de M. [J] et Mme [W] qui l'ont dissimulé intentionnellement à leurs cocontractants,
*dit que M. [J] et Mme [W] sont auteurs d'un dol,
En conséquence,
*condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B], les sommes suivantes, provisions non déduites, avec intérêt au taux légal à compter de la décision déféré:
' au titre des travaux nécessaires à la suppression de l'humidité et à la remise en état de l'appartement...............................................................................................57 109,80 euros,
' au titre de la ventilation mécanique controlée (VMC) installée dans la cuisine ..153,85 euros.
* condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné in solidum M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
A cause d'appel,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme [B] du surplus de leurs demandes,
- condamner M. [J] et Mme [W] au paiement de la somme de 700 euros par mois à compter du 1er septembre 2021 et jusqu'à la date à laquelle ils auront indemnisé les demandeurs de leur préjudice matériel pour leur permettre de remettre l'appartement en état,
- condamner M. [J] et Mme [W] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens.
Par ordonnance du 25 novembre 2021, le magistrat de la mise en état a prononcé la caducité partielle à l'égard de M. [J] et du syndicat du [Adresse 1] de la déclaration d'appel.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mars 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il sera rappelé que la caducité de la déclaration d'appel a été prononcée à l'égard de M. [J] et du syndicat des copropriétaires par ordonnance du 25 novembre 2021. En conséquence, les demandes présentées à leur encontre en cause d'appel ne sont pas recevables.
' sur la prescription de l'action des époux [B]
Mme [W] excipe de la prescription de l'action initiée par les époux [B], arguant du fait que le vice invoqué au soutien de l'action a été découvert après l'expiration du délai de prescription de droit commun de 5 ans, qui ne permet pas à l'acquéreur de mettre en oeuvre, même dans un délai de deux ans à compter de la découverte, la garantie des vices cachés. Elle affirme que l'action est prescrite quand bien même l'expert a attendu plus de 5 ans pour déposer son rapport, l'expertise n'ayant pas interrompu le délai de prescription de 5 ans visé à l'article 2224 du code civil.
Elle soutient également que les époux [B] ne peuvent pas non plus invoquer la date de l'ordonnance du 6 juin 2013, puisqu'un délai de 11 mois et 15 jours avait déjà couru entre l'acquisition du bien et l'assignation en référé. Elle ajoute que si les époux [B] entendent retenir la date du 6 juin 2013 pour faire courir le délai de 5 ans, il a expiré le 21 juin 2017 et non le 6 juin 2018, de sorte que l'assignation au fond aux fins de sursis à statuer est tardive.
Elle prétend que ce raisonnement s'applique également au dol, fondement qui sous-tend l'action des époux [B] désormais.
En réponse, les époux [B] affirment que l'instance introduite devant le tribunal de grande instance de Nanterre visait la garantie des vices cachés et le dol, que cette assignation a été délivrée avant le dépôt du rapport, assignation au terme de laquelle ils demandaient uniquement un sursis à statuer, se réservant la possibilité de formuler leurs demandes sur le fondement de la garantie des vices cachés ou du dol.
Ils soutiennent que leur action fondée sur le dol est soumise au délai de prescription quinquennale, et que le point de départ doit être fixé à la date de découverte du dol, qui est caractérisé le jour où les acheteurs se rendent compte de ce qui leur a été dissimulé. Ils disent avoir découvert les problèmes d'humidité peu après la vente, mais n'avoir compris l'importance des travaux nécessaires qu'à la date du dépôt du rapport, en août 2018. Ils observent qu'ils avaient assigné en référé expertise le 11 mars 2013, soit 11 mois 15 jours après la vente, de sorte qu'au jour du dépôt du rapport, il leur restait 5 ans pour agir moins ces 11 mois et 15 jours, soit un peu plus de 4 ans, de sorte qu'ils ne sont pas prescrits en leur action.
Ils ajoutent que l'action n'est pas plus prescrite si on estime que le point de départ est la date de signature de l'acte authentique. Ils indiquent que l'action fondée sur le dol est soumise à une prescription et non à un délai de forclusion, que la délivrance de l'assignation en référé a suspendu le délai de prescription et n'a recommencé à courir qu'en août 2018 date de dépôt du rapport.
Sur ce,
La vente est intervenue en 2012, de sorte que l'action est fondée sur les dispositions du code civil antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.
L'action initiée par les époux [B] est fondée à hauteur d'appel sur l'existence d'un vice du consentement, le dol, soumis à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.
Le délai pour agir a pour point de départ la date où l'existence du dol est découverte.
Ils disent avoir découvert l'étendue des désordres et donc la consistance du dol à la date du rapport d'expertise tandis que Mme [W] prétend qu'ils ont eu connaissance de l'état d'humidité dès leur entrée dans les lieux, à la date de signature de l'acte authentique.
Les époux [B] ont assigné en référé expertise le 11 mars 2013, soit 11 mois et 15 jours après la vente du bien immobilier, et le délai de prescription a ainsi été interrompu par application de l'article 2241 du code civil.
Le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise par ordonnance du 6 juin 2013, ce qui a suspendu le délai de prescription, par application de l'article 2239 du même code.
Le délai a recommencé à courir à la date du dépôt du rapport d'expertise intervenu le 13 août 2018.
A cette date, l'instance au fond, initiée aux fins de sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, et présentée sur le fondement de la garantie des vices cachés ou du dol, avait été introduite par assignation signifiée le 4 juin 2018.
L'action n'est pas prescrite, peu importe qu'il soit considéré que l'état d'humidité sur lequel est fondé l'action pour dol a été découvert rapidement après l'entrée dans les lieux ou seulement après le dépôt du rapport, quant à son étendue.
' sur le dol
Mme [W] critique le jugement d'avoir retenu l'existence de manoeuvres dolosives.
Elle s'appuie sur la clause de non garantie des vices insérée à l'acte de vente, conteste les conclusions du rapport d'expertise, au motif que l'expertise a duré 5 ans, que l'expert a faussé les conclusions de son expertise et ne s'est rendu que deux fois en 5 ans sur place. Elle reproche de plus à l'expert d'avoir été partial, observant que ses conclusions démontrent qu'elle ne pouvait pas connaître les vices de construction n'étant pas une professionnelle de la matière. Elle conteste toute dissimulation aux acquéreurs, ajoutant que le bien était loué et occupé à la période de la vente, le locataire n'ayant jamais signalé de sinistre au bailleur.
Elle observe que le diagnostiqueur n'a constaté aucune difficulté lors de sa mission, que l'attestation provenant de la voisine en conflit avec elle n'est pas recevable.
Elle dit sa bonne foi et demande la désolidarisation d'avec M. [J], qui n'a pas cru bon de se défendre ni en première instance ni en appel.
En réponse, les époux [B] concluent à la confirmation du jugement qui a retenu le dol.
Ils disent que dans le cas d'un vice caché affectant un bien immobilier et sciemment dissimulé par le vendeur, l'acheteur peut agir sur le fondement du dol. Ils exposent que le bien venait d'être repeint à neuf lors de l'achat, qu'il a été rapidement été affecté d'une humidité importante, les murs s'imprégnant d'humidité et les aménagements intérieurs se dégradant.
Ils indiquent que la clause de non garantie des vices cachés n'est pas applicable lorsque le vendeur est de mauvaise foi, à savoir celui qui avait connaissance du vice et l'a dissimulé se rendant auteur d'un dol. Ils affirment que les vendeurs ne pouvaient ignorer les infiltrations et la nécessité de procéder à d'importants travaux pour les supprimer, que leur propre vendeur les en avaient informés en 2002, que la voisine a attesté des multiples interventions rendues nécessaires par ces problèmes d'infiltrations, que son attestation n'a pas à être écartée au motif d'une inimitié alléguée. Ils prétendent que les vendeurs ont procédé à des travaux cosmétiques pour vendre au meilleur prix et ont sciemment dissimulé la situation, observant qu'ils n'auraient pas acquis ce bien s'ils avaient eu connaissance de son état.
Ils relèvent que les problèmes de remontées d'humidité et l'absorption d'humidité par les murs ne font en rien partie des points abordés par les diagnostiqueurs. Ils indiquent ne pas avoir été en mesure de découvrir les désordres résultant de l'humidité immédiatement après la vente et observent que l'absence de signalement par la locataire est sans incidence, puisqu'il s'agit de la mère de M. [J] et qu'on ignore son temps d'occupation des lieux. Ils réfutent les critiques formulées à l'égard du rapport d'expertise.
Sur ce,
L'action initiée par les époux [B] doit être examinée sur le fondement de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige.
Les premiers juges ont rappelé les conclusions de l'expert, qui a relevé un taux d'humidité rendant l'appartement impropre à sa destination, et en a analysé les causes multiples existant depuis l'origine, à savoir en substance l'orientation et la situation de l'immeuble, l'étroitesse du bâtiment et l'organisation de l'appartement, l'utilisation de certains matériaux pour la construction, l'absence d'enduit d'étanchéité sous le niveau du sol, tandis qu'au-dessus du sol, un enduit de façade étanche a été utilisé, empêchant l'humidité de s'évacuer.
L'expert a précisé que ces causes sont anciennes, avant d'estimer "techniquement impossible que M. [J] et Mme [W] aient pu ignorer le fort taux d'humidité de l'air de leur appartement avant sa vente aux époux [B]."
Il ajoute que l'essentiel des causes pouvait être constaté par un simple examen visuel mais ne pouvait pas être interprété par un non-professionnel.
Les premiers juges ont à juste titre considéré que les consorts [J] [W] avaient connaissance de l'importance des problèmes d'humidité, qu'ils en avaient même été avisés lorsqu'ils avaient fait l'acquisition du bien en mai 2002, et qu'ils avaient été contraints de procéder à de multiples interventions pour remédier à ces difficultés pendant les années où ils étaient propriétaires du bien, ce qui ressort d'attestations du précédent propriétaire et de la propriétaire du bien immobilier voisin.
Mme [W] ne développe pas de moyens nouveaux à hauteur de cour et se contente de reprendre la même argumentation, sans que la cour ait à entrer dans le détail de ses explications. Il sera observé que les attestations versées sont probantes et n'ont pas à être écartées, qu'en particulier celle rédigée par la voisine est étayée par les demandes d'autorisations de tour d'échelle présentées par les consorts [J] [W] pour procéder à diverses interventions depuis son fonds sur leur propre immeuble.
C'est par ailleurs de façon pertinente que les époux [B] relèvent que les diagnostics préalables à la vente ne portent pas sur l'état d'humidité du bien, de sorte qu'ils ne pouvaient prendre connaissance de la situation en faisant la lecture de ces pièces. Il est exact que les diagnostiqueurs n'ont pas décelé cette situation, qui ne relevait pas de leur mission. De plus, les intimés disent à raison que la clause de non garantie est applicable à une action en garantie des vices cachés, sur laquelle ils ne fondent pas leur action.
Comme devant le tribunal, l'appelante prétend mettre en cause les opérations d'expertise sans argumenter techniquement les critiques formulées, auxquelles il a d'ailleurs été répondu par les premiers juges.
Mme [W] ne peut pas prétendre s'appuyer sur la seule attestation de la locataire des lieux au moment de la mise en vente, la propre mère de M. [J] pour tenter de démontrer leur ignorance de la situation. Il sera rappelé que des travaux de remise en peinture avaient été effectués juste avant la vente, de sorte que l'importance des désordres provoqués par l'humidité était dissimulée aux yeux des visiteurs.
Pour solliciter la désolidarisation d'avec M. [J] avec qui elle a été condamnée in solidum en première instance, Mme [W] soutient avoir à titre personnel ignoré la situation. Cependant, elle ne verse aucun élément de nature à étayer cette affirmation selon laquelle elle aurait quant à elle complètement méconnu cette situation, quand seul M. [J] aurait eu la conscience de l'humidité et de la gravité des désordres qu'elle occasionnait. Elle ne prouve pas comment elle aurait échappé seule à la connaissance du désordre et sera déboutée de sa demande de désolidarisation.
La gravité de l'humidité constatée par l'expert telle qu'elle empêchait d'habiter le bien dans des conditions normales et l'importance des travaux nécessaires à la remise en état du bien sont suffisants à considérer que les époux [B] n'auraient pas fait l'acquisition de ce bien, ou à tout le moins à un tel prix, s'ils avaient été informés de son état.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu un dol et condamné in solidum les consorts [J] [W] à indemniser les époux [B].
' sur la réparation du préjudice subi
Les époux [B] demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné les vendeurs à leur payer les sommes de 57 109,80 euros et 153,85 euros.
Mme [W] ne formule pas de critique précise quant aux montants alloués par le tribunal.
Le jugement est confirmé quant au montant des dommages-intérêts alloués pour réparer le préjudice subi du fait des travaux de remise en état nécessaires.
En revanche, les époux [B] critiquent le tribunal d'avoir réduit le montant des dommages-intérêts pour le trouble de jouissance qu'ils disent avoir subi. Le tribunal a écarté cette demande, en considérant qu'ils ne démontraient pas avoir dû payer le loyer d'un appartement pris à bail pour reloger leur fille et son époux, pour lesquels ils avaient fait l'acquisition de ce bien.
Cependant, s'ils établissent que leur fille n'avait plus vocation à occuper ce bien à partir de la date à laquelle son époux a été muté et qu'elle l'a suivi sur son nouveau lieu d'affectation, ils ne versent aucune pièce démontrant leur intention relativement à ce bien, mais surtout aucune estimation de sa valeur locative. Ils ne démontrent pas en conséquence la consistance de la perte de chance alléguée et seront comme en première instance déboutés de leur demande de réparation du préjudice de jouissance.
' sur les autres demandes
Le jugement est confirmé en ses dispositions sur les dépens et l'indemnité de procédure.
Mme [W] qui échoue en son appel est condamnée à payer à M. et Mme [B] la somme de 2 000 euros d'indemnité de procédure.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déclare recevable l'action introduite par les époux [B] fondée sur le dol,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Mme [W] à payer à M. et Mme [B] la somme de 2 000 euros d'indemnité de procédure,
Condamne Mme [W] aux dépens exposés en appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Florence PERRET, Président et par Madame FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
DE
VERSAILLES
Code nac : 50D
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 OCTOBRE 2023
N° RG 21/04993
N° Portalis DBV3-V-B7F-UVYF
AFFAIRE :
[Z] [W]
C/
[Y] [B]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Juillet 2021 par le TJ de NANTERRE
N° Chambre : 2
N° RG : 18/05616
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Catherine SCHLEEF
Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [Z] [W]
née le 27 juin 1974 à [Localité 10] (67)
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentant : Me Catherine SCHLEEF, Postulant/plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1909
APPELANTE
****************
Monsieur [Y] [B]
né le 09 Novembre 1949 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Madame [X] [V] épouse [B]
née le 13 Septembre 1943 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentant : Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, Postulant/plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire: 744
Monsieur [O] [J]
[Adresse 2]
[Localité 6]
défaillant
SDC DU [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 7]
défaillant
INTIMES
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président et Madame Gwenael COUGARD, Conseiller , chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence PERRET, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,
Madame Florence SCHARRE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme FOULON,
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FAITS ET PROCEDURE :
Par acte authentique en date du 27 mars 2012, M. [O] [J] et Mme [Z] [N] [W] ont vendu à M. [Y] [B] et Mme [X] [V] épouse [B] un bien immobilier situé [Adresse 1] (92), au prix de 150 000 euros.
Peu de temps après son entrée dans les lieux, la fille des consorts [B] a constaté des problèmes d'humidité excessive et autres défauts du bien, consignés dans un procès-verbal de constat d'huissier en date du 27 avril 2012.
Par lettre en date du 29 mai 2012, les consorts [B] ont tenté de résoudre amiablement ce litige.
Le 11 mars 2013, les consorts [B] ont assigné en référé les consorts [J] [W]. Par ordonnance du 6 juin 2013, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [H], expert immobilier.
Le rapport déposé le 13 août 2018, conclut que: "J'ai constaté une forte humidité dans l'appartement tant en période d'occupation qu'en période de vacances. Selon moi, ce taux d'humidité rend l'appartement pratiquement impropre à sa destination. J'ai constaté que différents aménagements avaient été mis en place par les propriétaires successifs (faux plancher, doublage des murs, ventilation mécanique, prises d'air en façade...). Mais ceci sans résultat significatif (...). Au vu de ces causes, qui sont anciennes, il me semble techniquement impossible que M. [J] et Mme [W] aient pu ignorer le fort taux d'humidité de l'air et de leur appartement avant sa vente aux époux [B]. L'essentiel de ces causes pouvaient être constatées par un simple examen visuel, mais selon moi, elles ne pouvaient pas être interprétées par un non professionnel ce qui explique que les époux [B] n'aient découvert le problème qu'après leur aménagement".
Par acte d'huissier de justice en date du 4 juin 2018, les consorts [B] ont fait assigner les consorts [J] [W] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] en demandant un sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise judiciaire. Un procès-verbal de recherches infructueuses a été dressé le même jour concernant le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1].
Suivant ordonnance en date du 15 octobre 2019, le juge de la mise en état s'est déclaré incompétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action invoquée par Mme [W], de même que sur les demandes au fond formées subsidiairement par les parties.
En cours de procédure, M. [J] et Mme [W] se sont séparés.
Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la recevabilité de l'action de M. [B] et Mme [V] épouse [B], pour vices cachés, ceux ci ayant abandonné ce fondement juridique au profit du dol,
- dit que le bien immobilier situé [Adresse 1], acquis par M. [B] et Mme [V] épouse [B] était affecté, au moment de la vente, d'une humidité anormale, cette circonstance étant connue de M. [J] et Mme [W] qui l'ont dissimulée intentionnellement à leurs cocontractants,
- dit que M. [J] et Mme [W] sont auteurs d'un dol,
En conséquence,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B], les sommes suivantes, provisions non déduites, avec intérêt au taux légal àcompter de la décision déférée:
* au titre des travaux nécessaires à la suppression de l'humidité et à la remise en état de l'appartement.....................................................................................................57 109,80 euros,
* au titre de la ventilation mécanique controlée (VMC) installée dans la cuisine ... 153,85 euros
- débouté M. [B] et Mme [V] épouse [B], du surplus de leurs demandes indemnitaires,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- rejeté pour le surplus.
Par acte du 30 juillet 2021, Mme [W] a interjeté appel.
Par dernières écritures du 3 mars 2023, Mme [W] prie la cour de :
- réformer le jugement déféré, et statuant à nouveau:
In limine litis:
- juger prescrite l'action diligentée pour dol par M. [B] et Mme [V] épouse [B],
A défaut,
- juger M. [B] et Mme [V] épouse [B] mal fondés dans toutes leurs demandes,
En conséquence,
- débouter M. [B] et Mme [V] épouse [B] de leurs demandes au titre d'un prétendu dol,
En tout état de cause,
- juger que Mme [W] ne s'est pas rendue coupable d'un dol,
En conséquence,
- ordonner la désolidarisation de Mme [W] avec M. [J],
- condamner M. [B] et Mme [V] épouse [B] à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 7 mars 2023, M. [B] et Mme [V] épouse [B] prient la cour de :
- juger que l'action des époux [B] est recevable et non prescrite,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
*dit que le bien immobilier situé [Adresse 1], acquis par M. [B] et Mme [V] épouse [B] était affecté, au moment de la vente, d'une humidité anormale, cette circonstance étant connue de M. [J] et Mme [W] qui l'ont dissimulé intentionnellement à leurs cocontractants,
*dit que M. [J] et Mme [W] sont auteurs d'un dol,
En conséquence,
*condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B], les sommes suivantes, provisions non déduites, avec intérêt au taux légal à compter de la décision déféré:
' au titre des travaux nécessaires à la suppression de l'humidité et à la remise en état de l'appartement...............................................................................................57 109,80 euros,
' au titre de la ventilation mécanique controlée (VMC) installée dans la cuisine ..153,85 euros.
* condamné in solidum M. [J] et Mme [W] à payer à M. [B] et Mme [V] épouse [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné in solidum M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
A cause d'appel,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme [B] du surplus de leurs demandes,
- condamner M. [J] et Mme [W] au paiement de la somme de 700 euros par mois à compter du 1er septembre 2021 et jusqu'à la date à laquelle ils auront indemnisé les demandeurs de leur préjudice matériel pour leur permettre de remettre l'appartement en état,
- condamner M. [J] et Mme [W] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [J] et Mme [W] aux entiers dépens.
Par ordonnance du 25 novembre 2021, le magistrat de la mise en état a prononcé la caducité partielle à l'égard de M. [J] et du syndicat du [Adresse 1] de la déclaration d'appel.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mars 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il sera rappelé que la caducité de la déclaration d'appel a été prononcée à l'égard de M. [J] et du syndicat des copropriétaires par ordonnance du 25 novembre 2021. En conséquence, les demandes présentées à leur encontre en cause d'appel ne sont pas recevables.
' sur la prescription de l'action des époux [B]
Mme [W] excipe de la prescription de l'action initiée par les époux [B], arguant du fait que le vice invoqué au soutien de l'action a été découvert après l'expiration du délai de prescription de droit commun de 5 ans, qui ne permet pas à l'acquéreur de mettre en oeuvre, même dans un délai de deux ans à compter de la découverte, la garantie des vices cachés. Elle affirme que l'action est prescrite quand bien même l'expert a attendu plus de 5 ans pour déposer son rapport, l'expertise n'ayant pas interrompu le délai de prescription de 5 ans visé à l'article 2224 du code civil.
Elle soutient également que les époux [B] ne peuvent pas non plus invoquer la date de l'ordonnance du 6 juin 2013, puisqu'un délai de 11 mois et 15 jours avait déjà couru entre l'acquisition du bien et l'assignation en référé. Elle ajoute que si les époux [B] entendent retenir la date du 6 juin 2013 pour faire courir le délai de 5 ans, il a expiré le 21 juin 2017 et non le 6 juin 2018, de sorte que l'assignation au fond aux fins de sursis à statuer est tardive.
Elle prétend que ce raisonnement s'applique également au dol, fondement qui sous-tend l'action des époux [B] désormais.
En réponse, les époux [B] affirment que l'instance introduite devant le tribunal de grande instance de Nanterre visait la garantie des vices cachés et le dol, que cette assignation a été délivrée avant le dépôt du rapport, assignation au terme de laquelle ils demandaient uniquement un sursis à statuer, se réservant la possibilité de formuler leurs demandes sur le fondement de la garantie des vices cachés ou du dol.
Ils soutiennent que leur action fondée sur le dol est soumise au délai de prescription quinquennale, et que le point de départ doit être fixé à la date de découverte du dol, qui est caractérisé le jour où les acheteurs se rendent compte de ce qui leur a été dissimulé. Ils disent avoir découvert les problèmes d'humidité peu après la vente, mais n'avoir compris l'importance des travaux nécessaires qu'à la date du dépôt du rapport, en août 2018. Ils observent qu'ils avaient assigné en référé expertise le 11 mars 2013, soit 11 mois 15 jours après la vente, de sorte qu'au jour du dépôt du rapport, il leur restait 5 ans pour agir moins ces 11 mois et 15 jours, soit un peu plus de 4 ans, de sorte qu'ils ne sont pas prescrits en leur action.
Ils ajoutent que l'action n'est pas plus prescrite si on estime que le point de départ est la date de signature de l'acte authentique. Ils indiquent que l'action fondée sur le dol est soumise à une prescription et non à un délai de forclusion, que la délivrance de l'assignation en référé a suspendu le délai de prescription et n'a recommencé à courir qu'en août 2018 date de dépôt du rapport.
Sur ce,
La vente est intervenue en 2012, de sorte que l'action est fondée sur les dispositions du code civil antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.
L'action initiée par les époux [B] est fondée à hauteur d'appel sur l'existence d'un vice du consentement, le dol, soumis à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.
Le délai pour agir a pour point de départ la date où l'existence du dol est découverte.
Ils disent avoir découvert l'étendue des désordres et donc la consistance du dol à la date du rapport d'expertise tandis que Mme [W] prétend qu'ils ont eu connaissance de l'état d'humidité dès leur entrée dans les lieux, à la date de signature de l'acte authentique.
Les époux [B] ont assigné en référé expertise le 11 mars 2013, soit 11 mois et 15 jours après la vente du bien immobilier, et le délai de prescription a ainsi été interrompu par application de l'article 2241 du code civil.
Le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise par ordonnance du 6 juin 2013, ce qui a suspendu le délai de prescription, par application de l'article 2239 du même code.
Le délai a recommencé à courir à la date du dépôt du rapport d'expertise intervenu le 13 août 2018.
A cette date, l'instance au fond, initiée aux fins de sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, et présentée sur le fondement de la garantie des vices cachés ou du dol, avait été introduite par assignation signifiée le 4 juin 2018.
L'action n'est pas prescrite, peu importe qu'il soit considéré que l'état d'humidité sur lequel est fondé l'action pour dol a été découvert rapidement après l'entrée dans les lieux ou seulement après le dépôt du rapport, quant à son étendue.
' sur le dol
Mme [W] critique le jugement d'avoir retenu l'existence de manoeuvres dolosives.
Elle s'appuie sur la clause de non garantie des vices insérée à l'acte de vente, conteste les conclusions du rapport d'expertise, au motif que l'expertise a duré 5 ans, que l'expert a faussé les conclusions de son expertise et ne s'est rendu que deux fois en 5 ans sur place. Elle reproche de plus à l'expert d'avoir été partial, observant que ses conclusions démontrent qu'elle ne pouvait pas connaître les vices de construction n'étant pas une professionnelle de la matière. Elle conteste toute dissimulation aux acquéreurs, ajoutant que le bien était loué et occupé à la période de la vente, le locataire n'ayant jamais signalé de sinistre au bailleur.
Elle observe que le diagnostiqueur n'a constaté aucune difficulté lors de sa mission, que l'attestation provenant de la voisine en conflit avec elle n'est pas recevable.
Elle dit sa bonne foi et demande la désolidarisation d'avec M. [J], qui n'a pas cru bon de se défendre ni en première instance ni en appel.
En réponse, les époux [B] concluent à la confirmation du jugement qui a retenu le dol.
Ils disent que dans le cas d'un vice caché affectant un bien immobilier et sciemment dissimulé par le vendeur, l'acheteur peut agir sur le fondement du dol. Ils exposent que le bien venait d'être repeint à neuf lors de l'achat, qu'il a été rapidement été affecté d'une humidité importante, les murs s'imprégnant d'humidité et les aménagements intérieurs se dégradant.
Ils indiquent que la clause de non garantie des vices cachés n'est pas applicable lorsque le vendeur est de mauvaise foi, à savoir celui qui avait connaissance du vice et l'a dissimulé se rendant auteur d'un dol. Ils affirment que les vendeurs ne pouvaient ignorer les infiltrations et la nécessité de procéder à d'importants travaux pour les supprimer, que leur propre vendeur les en avaient informés en 2002, que la voisine a attesté des multiples interventions rendues nécessaires par ces problèmes d'infiltrations, que son attestation n'a pas à être écartée au motif d'une inimitié alléguée. Ils prétendent que les vendeurs ont procédé à des travaux cosmétiques pour vendre au meilleur prix et ont sciemment dissimulé la situation, observant qu'ils n'auraient pas acquis ce bien s'ils avaient eu connaissance de son état.
Ils relèvent que les problèmes de remontées d'humidité et l'absorption d'humidité par les murs ne font en rien partie des points abordés par les diagnostiqueurs. Ils indiquent ne pas avoir été en mesure de découvrir les désordres résultant de l'humidité immédiatement après la vente et observent que l'absence de signalement par la locataire est sans incidence, puisqu'il s'agit de la mère de M. [J] et qu'on ignore son temps d'occupation des lieux. Ils réfutent les critiques formulées à l'égard du rapport d'expertise.
Sur ce,
L'action initiée par les époux [B] doit être examinée sur le fondement de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige.
Les premiers juges ont rappelé les conclusions de l'expert, qui a relevé un taux d'humidité rendant l'appartement impropre à sa destination, et en a analysé les causes multiples existant depuis l'origine, à savoir en substance l'orientation et la situation de l'immeuble, l'étroitesse du bâtiment et l'organisation de l'appartement, l'utilisation de certains matériaux pour la construction, l'absence d'enduit d'étanchéité sous le niveau du sol, tandis qu'au-dessus du sol, un enduit de façade étanche a été utilisé, empêchant l'humidité de s'évacuer.
L'expert a précisé que ces causes sont anciennes, avant d'estimer "techniquement impossible que M. [J] et Mme [W] aient pu ignorer le fort taux d'humidité de l'air de leur appartement avant sa vente aux époux [B]."
Il ajoute que l'essentiel des causes pouvait être constaté par un simple examen visuel mais ne pouvait pas être interprété par un non-professionnel.
Les premiers juges ont à juste titre considéré que les consorts [J] [W] avaient connaissance de l'importance des problèmes d'humidité, qu'ils en avaient même été avisés lorsqu'ils avaient fait l'acquisition du bien en mai 2002, et qu'ils avaient été contraints de procéder à de multiples interventions pour remédier à ces difficultés pendant les années où ils étaient propriétaires du bien, ce qui ressort d'attestations du précédent propriétaire et de la propriétaire du bien immobilier voisin.
Mme [W] ne développe pas de moyens nouveaux à hauteur de cour et se contente de reprendre la même argumentation, sans que la cour ait à entrer dans le détail de ses explications. Il sera observé que les attestations versées sont probantes et n'ont pas à être écartées, qu'en particulier celle rédigée par la voisine est étayée par les demandes d'autorisations de tour d'échelle présentées par les consorts [J] [W] pour procéder à diverses interventions depuis son fonds sur leur propre immeuble.
C'est par ailleurs de façon pertinente que les époux [B] relèvent que les diagnostics préalables à la vente ne portent pas sur l'état d'humidité du bien, de sorte qu'ils ne pouvaient prendre connaissance de la situation en faisant la lecture de ces pièces. Il est exact que les diagnostiqueurs n'ont pas décelé cette situation, qui ne relevait pas de leur mission. De plus, les intimés disent à raison que la clause de non garantie est applicable à une action en garantie des vices cachés, sur laquelle ils ne fondent pas leur action.
Comme devant le tribunal, l'appelante prétend mettre en cause les opérations d'expertise sans argumenter techniquement les critiques formulées, auxquelles il a d'ailleurs été répondu par les premiers juges.
Mme [W] ne peut pas prétendre s'appuyer sur la seule attestation de la locataire des lieux au moment de la mise en vente, la propre mère de M. [J] pour tenter de démontrer leur ignorance de la situation. Il sera rappelé que des travaux de remise en peinture avaient été effectués juste avant la vente, de sorte que l'importance des désordres provoqués par l'humidité était dissimulée aux yeux des visiteurs.
Pour solliciter la désolidarisation d'avec M. [J] avec qui elle a été condamnée in solidum en première instance, Mme [W] soutient avoir à titre personnel ignoré la situation. Cependant, elle ne verse aucun élément de nature à étayer cette affirmation selon laquelle elle aurait quant à elle complètement méconnu cette situation, quand seul M. [J] aurait eu la conscience de l'humidité et de la gravité des désordres qu'elle occasionnait. Elle ne prouve pas comment elle aurait échappé seule à la connaissance du désordre et sera déboutée de sa demande de désolidarisation.
La gravité de l'humidité constatée par l'expert telle qu'elle empêchait d'habiter le bien dans des conditions normales et l'importance des travaux nécessaires à la remise en état du bien sont suffisants à considérer que les époux [B] n'auraient pas fait l'acquisition de ce bien, ou à tout le moins à un tel prix, s'ils avaient été informés de son état.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu un dol et condamné in solidum les consorts [J] [W] à indemniser les époux [B].
' sur la réparation du préjudice subi
Les époux [B] demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné les vendeurs à leur payer les sommes de 57 109,80 euros et 153,85 euros.
Mme [W] ne formule pas de critique précise quant aux montants alloués par le tribunal.
Le jugement est confirmé quant au montant des dommages-intérêts alloués pour réparer le préjudice subi du fait des travaux de remise en état nécessaires.
En revanche, les époux [B] critiquent le tribunal d'avoir réduit le montant des dommages-intérêts pour le trouble de jouissance qu'ils disent avoir subi. Le tribunal a écarté cette demande, en considérant qu'ils ne démontraient pas avoir dû payer le loyer d'un appartement pris à bail pour reloger leur fille et son époux, pour lesquels ils avaient fait l'acquisition de ce bien.
Cependant, s'ils établissent que leur fille n'avait plus vocation à occuper ce bien à partir de la date à laquelle son époux a été muté et qu'elle l'a suivi sur son nouveau lieu d'affectation, ils ne versent aucune pièce démontrant leur intention relativement à ce bien, mais surtout aucune estimation de sa valeur locative. Ils ne démontrent pas en conséquence la consistance de la perte de chance alléguée et seront comme en première instance déboutés de leur demande de réparation du préjudice de jouissance.
' sur les autres demandes
Le jugement est confirmé en ses dispositions sur les dépens et l'indemnité de procédure.
Mme [W] qui échoue en son appel est condamnée à payer à M. et Mme [B] la somme de 2 000 euros d'indemnité de procédure.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déclare recevable l'action introduite par les époux [B] fondée sur le dol,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Mme [W] à payer à M. et Mme [B] la somme de 2 000 euros d'indemnité de procédure,
Condamne Mme [W] aux dépens exposés en appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Florence PERRET, Président et par Madame FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,