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Décisions

CA Montpellier, 3e ch. civ., 14 septembre 2023, n° 20/01130

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 20/01130

14 septembre 2023

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/01130 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OQ5I

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 10 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 17/06408

APPELANT :

Monsieur [E] [N]

né le 27 Juillet 1946 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Hervé POQUILLON de la SELARL HP AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Sarah CHARBONNIER-JAMET, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Madame [X] [M] épouse [Y]

née le 15 Mars 1953 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

et

Monsieur [T] [Y]

né le 24 Août 1954 à [Localité 6] (ALLEMAGNE)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentés par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Isabelle GUILLOT, avocat au barreau de PARIS

Ordonnance de clôture du 22 Mai 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Par compromis de vente en date du 21 octobre 2016, Monsieur [E] [N] a vendu à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] une maison à usage d'habitation située [Adresse 2], pour le prix de 888 000 euros. La vente définitive est intervenue le 27 janvier 2017.

Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M], constatant des désordres affectant le réseau des eaux usées, ont assigné, par acte en date du 29 novembre 2017, Monsieur [E] [N] devant le tribunal de grande instance Montpellier aux fins de le voir condamner à les indemniser de leurs préjudices.

Par jugement en date du 10 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Montpellier a :

- condamné Monsieur [E] [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 1287 euros à titre de remboursement du coût des travaux réalisés ;

- condamné Monsieur [E] [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 29 074,10 euros au titre du coût des travaux réparatoires, avec réactualisation à l'indice BT01 au jour de l'exécution du présent jugement ;

- condamné Monsieur [E] [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 2500 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance ;

- condamné Monsieur [E] [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Monsieur [N] aux entiers dépens avec distraction aux avocats qui y ont droit ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 24 février 2020, Monsieur [E] [N] a interjeté appel du jugement rendu le 10 décembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier.

Vu les conclusions de Monsieur [E] [N] remises au greffe le 14 mai 2020;

Vu les conclusions de Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] épouse [M]-[Y] remises au greffe le 27 mars 2023 ;

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Au préalable, il convient de constater que l'appel est cantonné aux montants des différents préjudices retenus par le tribunal, Monsieur [N] acquiescant au jugement entrepris en ce qu'il a retenu sa responsabilité pour vice caché.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur le remboursement du coût des travaux déjà réalisés:

Il ressort des factures versées aux débats que les époux [Y] ont été contraints à trois reprises de faire intervenir la société Fon pour déboucher leurs canalisations, et ce pour un montant total de 1287 euros .

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur le remboursement des sommes que les époux [Y] ont été contraints d'exposer depuis la décision de première instance :

Depuis le jugement, les époux [Y] justifient par les factures qu'ils versent aux débats avoir fait intervenir un plombier pour déboucher le réseau d'eaux usées le 13 septembre 2020 (407 euros TTC), le 23 décembre 2020 (1 144 euros TTC), le 24 août 2021 (279,40 euros TTC), le 2 août 2022 (210,65 euros TTC) et le 7 février 2023 (264,77 euros TTC), pour un montant total de 2 305,82 euros .

Force est de constater que Monsieur [N] ne discute ni la réalité ni le montant des préjudices invoqués à ce titre.

Par conséquent, il sera condamné à payer aux époux [Y] une somme de 2 305,82 euros.

Sur les travaux réparatoires :

En l'espèce, si les époux [Y] avaient produit en première instance un devis de la société Pro Thermic du 19 avril 2017 d'un montant de 29 074,10 euros , devis retenu par le tribunal, il résulte d'une inspection vidéo réalisée le 6 janvier 2021 par la société Somes, spécialisée dans l'assainissement, que des travaux de réfection complète du réseau sont indispensables, le réseau ne pouvant fonctionner correctement dans cet état là, ce qui est confirmé par les multiples interventions sur ce dernier depuis le premier jugement.

Or, ni le devis produit par les époux [Y] en première instance, ni à fortiori le devis produit en cause d'appel par Monsieur [N] à hauteur de 4 631 euros ne prévoient la réfection totale du réseau, étant relevé que ce dernier devis ne prévoit que des travaux a minima et que la société GDIE a réalisé ce devis sur plan, sans se rendre sur place.

Si Monsieur [N] sollicite en appel, à titre subsidiaire, la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire, faisant valoir qu'une telle mesure permettrait d'éclairer la cour sur l'étendue des travaux à réaliser, leur durée ainsi que leur montant, il convient de lui rappeler qu'il s'était opposé en première instance à une telle mesure alors sollicitée par les époux [Y], invoquant les dispositions de l'article 146 qui peuvent lui être aujourd'hui opposées, une mesure d'instruction, qu'il avait la possibilité d'obtenir devant le tribunal, n'ayant pas vocation à suppléer en cause d'appel sa carence dans l'administration de la preuve, étant enfin relevé que la cour, comme le tribunal, s'estime en l'espèce suffisamment informé sur le bien fondé de la demande formée au titre des travaux réparatoires.

La demande d'expertise judiciaire sera donc rejetée.

Par conséquent, Monsieur [N] sera condamné, suivant devis de la société Somes du 15 avril 2021, à payer aux époux [Y] la somme de 44 308 euros TTC au titre des travaux réparatoires avec actualisation sur l'indice BT01 au jour de l'exécution du présent arrêt.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le préjudice de jouissance :

Monsieur [N] conteste le principe d'un préjudice de jouissance, faisant valoir que la villa dispose d'un autre sanitaire de sorte que le dysfonctionnement de l'un des WC ne saurait suffire à rendre le bien impropre à sa destination.

Il conclut que les époux [Y] pourront donc parfaitement habiter le bien immobilier durant la réalisation des travaux.

Or, il convient de rappeler à Monsieur [N] que l'ensemble du réseau est défectueux de sorte que les désordres affectent non seulement les deux WC, qui ne peuvent recevoir de papier hygiénique, mais également le lave linge, l'évier de la cuisine et tous les lavabos, ce qui caractérise une véritable impropriété à destination de l'immeuble.

Par conséquent, le préjudice de jouissance des acquéreurs, qui a pour origine la mauvaise foi de Monsieur [N] qui avait parfaitement connaissance des vices affectant son bien, est en l'espèce particulièrement caractérisé.

Sur la base de la valeur locative du bien estimé par une agence immobilière entre 1 800 euros et 2200 euros par mois et d'une durée des travaux pouvant être raisonnablement estimée, compte tenu de leur ampleur, à plusieurs semaines, le préjudice de jouissance des époux [Y] sera fixé à la somme de 6000 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [E] [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 29 074,10 euros au titre du coût des travaux réparatoires, avec réactualisation à l'indice BT01 au jour de l'exécution du présent jugement et condamné Monsieur [N] à verser à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] la somme de 2500 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne Monsieur [E] [N] à payer à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] épouse [M]-[Y] la somme de 2 305,82 euros au titre des sommes que les époux [Y] ont été contraints d'exposer depuis la décision de première instance ;

Condamne Monsieur [E] [N] à payer à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] épouse [M]-[Y] la somme de 44 308 euros TTC au titre des travaux réparatoires avec actualisation sur l'indice BT01 au jour de l'exécution du présent arrêt ;

Déboute Monsieur [E] [N] de sa demande d'expertise judiciaire ;

Condamne Monsieur [E] [N] à payer à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] épouse [M]-[Y] la somme de 6000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

Condamne Monsieur [E] [N] à payer à Monsieur [T] [Y] et Madame [X] [M] épouse [M]-[Y] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en appel ;

Condamne Monsieur [E] [N] aux entiers dépens d'appel, avec autorisation de recouvrement direct au profit de Maître Guillaume Barnier.

Le greffier, Le président,