Décisions
CA Metz, 3e ch., 26 octobre 2023, n° 22/01377
METZ
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/01377 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FX46
Minute n° 23/00284
[J]
C/
[G]
Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de METZ, décision attaquée en date du 13 Mai 2022, enregistrée sous le n° 11-21-829
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2023
APPELANT :
Monsieur [V] [J]
[Adresse 2]
Représenté par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-000304 du 27/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉE :
Madame [U] [B] épouse [G]
[Adresse 1]
Représentée par Me Alain MORHANGE, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant M. MICHEL,Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.
A l'issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller
M. KOEHL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Stéphanie PELSER, Greffier placé
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte d'huissier du 21 juillet 2021, Mme [U] [B] épouse [G] a fait citer M. [V] [J] devant le tribunal judiciaire de Metz aux fins de voir annuler le contrat de bail portant sur les locaux sis [Adresse 2] (3ème étage) prétendument consenti par M. [P] [G] au profit de M. [J], ordonner l'expulsion de M. [J] et le condamner à lui payer une indemnité mensuelle d'occupation de 700 euros à compter du 1er août 2019 et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [J] qui s'est opposé à ces prétentions a demandé au tribunal de condamner Mme [G] à lui payer une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 13 mai 2022, le tribunal a :
- annulé le contrat de bail signé le 1er août 2019 portant sur le logement au 3ème étage, la cave et le garage n°5 situés [Adresse 2]
- ordonné en conséquence l'expulsion de M. [J] de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef, des locaux situés [Adresse 2], et ce au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier
- condamné M. [J] à payer à Mme [G] une indemnité d'occupation de 700 euros, à compter du 1er août 2019 jusqu'à libération effective des lieux et la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens
- débouté les parties de toute autre demande.
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 30 mai 2022, M. [J] a interjeté appel de toutes les dispositions du jugement.
Au termes de ses dernières conclusions du 10 mai 2023, il demande à la cour d'infirmer le jugement, lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, débouter Mme [G] de l'ensemble de ses prétentions et la condamner aux entiers frais et dépens des deux instances.
L'appelant expose que M. [G] lui a confié courant 2006 la gestion des 5 appartements et 6 garages de l' immeuble situé [Adresse 2] lui appartenant, qu'il a rédigé seul l'ensemble des baux des appartements et garages et assuré le suivi des travaux nécessaires, qu'il a établi les décomptes de charges et que faute de mandat écrit, il a signé pendant toutes ces années au lieu et place de M. [G] à sa demande. Il précise qu'en 2015 M. [G] lui a loué un appartement qui s'était libéré pour le remercier de son aide, que le bail était verbal et qu'en 2019 il a établi un contrat de bail écrit qu'il a signé comme d'habitude pour le compte de M. [G]. Il ajoute que le 7 octobre 2019 Mme [G], a confié la gestion de l'immeuble à un professionnel et qu'elle a prétendu que son mari avait fait l'objet d'un abus de faiblesse. Il conteste les allégations adverses selon lesquelles M. [G] s'est toujours occupé de la gestion de l'immeuble jusqu'à ce que ses facultés cognitives déclinent, environ trois ou quatre ans avant son décès, alors que c'est lui qui s'en est occupé intégralement à compter de 2007 comme en attestent d'anciennes locataires. Il observe que l'intimée n'est pas en mesure de produire des documents relatifs aux baux conclus au cours de toutes ces années qu'il n'aurait pas signés pour le compte de M. [G] et souligne que grâce à son activité, celui-ci a pu bénéficier de tous les fruits de son immeuble.
L'appelant fait valoir que l'existence d'un bail verbal n'a jamais été contestée et que la seule annulation du contrat de location qu'il a signé pour le compte de M. [G] ne doit pas entraîner l'annulation du bail verbal antérieur qui reste valable, même si la loi du 6 juillet 1989 prévoit que le bail est conclu par écrit. Il précise avoir procédé au paiement de tous les loyers appelés par le mandataire de Mme [G], que ces appels sont postérieurs au jugement déféré ce qui vaut confirmation du contrat de bail et renonciation aux moyens et exceptions par application de l'article 1182 du code civil.
Subsidiairement, sur le montant de l'indemnité d'occupation, l'appelant soutient que la valeur locative de l'appartement n'est pas démontrée, que la propriétaire ne peut se prévaloir de l'attestation non circonstanciée de la société gestionnaire du bien, qu'une expertise privée ne peut à elle seule justifier une demande de condamnation et prétend que l'indemnité d'occupation ne peut qu'être fixée au montant du loyer, payé et encaissé chaque mois. Il précise avoir quitté le logement le 7 mars 2023 de sorte que la demande d'expulsion n'a plus d'objet.
Au termes de ses dernières conclusions du 2 juin 2023, Mme [G] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, débouter M. [J] de toutes ses prétentions et le condamner à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.
Elle expose que la SCI Frama est nue propriétaire de l'immeuble dont elle est usufruitière, que M. [G] qui est décédé le [Date décès 3] 2020, s'est toujours occupé de la gestion de cet immeuble jusqu'à ce que ses facultés cognitives déclinent, environ trois ou quatre ans avant son décès et qu'il s'est alors appuyé sur l'un de ses locataires, M. [J], pour le gérer. Elle indique que le 7 novembre 2019, avec son mari, ils ont donné une procuration générale de gestion de l'immeuble à leurs enfants qui se sont alors aperçus des abus de faiblesse et de confiance dont ils avaient été victimes et notamment du fait que le bail afférent au logement occupé par M. [J] est faux, la signature du bailleur ayant été imitée par celui-ci qui l'a expressément reconnu.
L'intimée soutient que le contrat de bail ne comprend pas de mention du mandat de gestion allégué, que l'appelant a grossièrement imité la signature de son époux, qu'il ne justifie pas d'un mandat de gestion d'immeubles qui est réglementé par la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, que la preuve formelle du consentement du propriétaire pour le mandat n'est pas rapportée, les attestations produites indiquant simplement qu'il s'occupait de l'entretien courant ou des charges mais nullement de la gestion locative. Elle ajoute que M. [J] a toujours revendiqué l'existence et l'application du bail écrit du 1er août 2019 comme constituant son titre locatif lequel a donc nécessairement mis fin au prétendu bail verbal préexistant dont il n'est pas justifié et que l'annulation du contrat de location frauduleusement obtenu ne saurait potentiellement faire revivre ce bail verbal.
Elle fait valoir que l'encaissement des loyers postérieurement au jugement du 13 mai 2022 n'est pas constitutif d'une confirmation de sa part du contrat de location dès lors, qu'en application de l'article 539 du code de procédure civile, le délais de recours et le recours sont suspensifs. Elle ajoute que la nullité qui n'est pas à ce jour confirmée, anéantit l'acte pour l'avenir et qu'il ne peut lui être fait grief de ne pas tirer de potentielles conséquences de cette nullité, l'exécution du bail se poursuivant.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'annulation du contrat de bail du 1er août 2019 et l'expulsion
Il résulte de l'article 1128 du code civil que le consentement des parties, leur capacité de contracter et un contenu licite et certain, sont nécessaires à la validité d'un contrat.
L'article 1372 du même code dispose que l'acte sous signature privée, reconnu par la partie à laquelle on l'oppose ou légalement tenu pour reconnu à son égard, fait foi entre ceux qui l'ont souscrit et à l'égard de leurs héritiers et ayant cause.
L'acte sous seing privé n'est soumis à aucune autre condition de forme que la signature de celui-ci qui l'oblige.
Il résulte par ailleurs de l'article 1724 du code civil qu'on peut louer par écrit ou verbalement. L'article 1728 précise que le preneur est tenu de deux obligations principales, user de la chose louée en bon père de famille et payer le prix du bail aux termes convenus.
En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge a estimé que le contrat de location sous seing privé du 1er août 2019 n'est pas valide. En effet, M. [J] reconnaît dans ses écritures avoir non seulement signé l'acte en qualité de locataire mais aussi au lieu et place de M. [P] [G], en tant que bailleur, dont il a imité la signature. Il n'est démontré ni que le propriétaire avait demandé à l'appelant de le représenter à l'acte, la signature apposée en son nom étant d'ailleurs exclusive d'un mandat de représentation, ni qu'il lui avait donné son accord pour cette imitation. L'intervention de M. [J] dans l'immeuble pour superviser des travaux, louer d'autres appartements, ou encore rédiger des contrats de location et même les signer comme en attestent plusieurs locataires, ne permet pas d'en déduire qu'il avait l'autorisation spécifique de conclure son propre contrat de location et d'imiter pour ce faire la signature du bailleur. Il est relevé en outre que si les témoins évoquent les pratiques de l'appelant au sein de l'immeuble, aucun d'entre eux en revanche n'a constaté qu'un tel comportement recueillait l'accord du bailleur. La preuve de la réalité du consentement de M. [G] au contrat de location du 1er août 2019 n'est donc pas rapportée.
Il n'est pas davantage démontré qu'indépendamment de cet acte, les parties ont conclu un bail verbal. L'existence d'un tel contrat ne saurait résulter de la simple occupation du bien sans que celui qui s'en prévaut ne rapporte la preuve de l'exercice des droits et de l'accomplissement des obligations s'attachant à un bail. Les différentes pièces du dossier en particulier l'avis d'imposition démontrent tout au plus que M. [J] a occupé un appartement dans l'immeuble situé [Adresse 2]. En revanche, il n'est pas établi que l'appelant s'est acquitté d'un loyer quelconque avant la présente procédure, les seuls règlements dont il est rapporté la preuve étant postérieurs au jugement déféré ayant prononcé la nullité du bail, l'expulsion de l'intéressé et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation. Le fait que par son activité, M. [G] ait pu bénéficier des fruits de son immeuble, ne peut être valablement considéré comme la contrepartie du paiement des échéances locatives, étant observé que l'accord du bailleur pour procéder à ce type de compensation n'est pas établi.
C'est par ailleurs en vain que l'appelant soutient que l'encaissement des loyers dont il s'acquitte depuis le jugement déféré ferait obstacle au prononcé de la nullité du bail. En effet, si comme le prévoit l'article 1182 du code civil, une exécution volontaire du contrat en connaissance de cause de la nullité vaut confirmation, cette renonciation à la nullité est conditionnée non seulement par la connaissance du vice affectant l'acte mais aussi par la volonté de le réparer. Cette volonté n'est pas démontrée en l'espèce et ne peut simplement se déduire de la perception par la propriétaire des règlements de M. [J] au titre de son occupation au cours de la procédure d'appel alors que l'intimée sollicite expressément la nullité du bail sur laquelle se fonde l'occupation. La confirmation est d'autant moins caractérisée en l'espèce qu'en application de l'article 514 du code de procédure civile, la décision dont appel condamne l'appelant au paiement d'une indemnité d'occupation et qu'elle est assortie de droit de l'exécution provisoire.
Il s'ensuit que le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de location daté du 1er août 2019 et ordonné l'expulsion de M. [J].
Sur l'indemnité d'occupation
L'ancien article 1382 du code civil (devenu article 1240) dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'occupation sans droit, ni titre de l'appartement litigieux est constitutive d'une faute au sens de ces dispositions et il appartient dès lors à M. [J] de réparer le préjudice causé au propriétaire du fait de cette occupation. L'indemnisation du dommage doit être évaluée en fonction de la valeur locative des locaux et non du montant du loyer figurant dans le contrat de location annulé puisqu'il résulte des développements qui précèdent que le consentement du propriétaire à ce bail n'est pas établi et que l'appelant reconnaît dans ses écritures qu'il a été consenti à des 'conditions avantageuses'. Au regard des éléments dont dispose la cour, respectivement la localisation de l'immeuble, sa consistance (F4), sa taille (85 m2) ses installations, ses accessoires (garage et cave) tels qu'il ressortent de l'acte du 1er août 2019, il apparaît que le premier juge a justement estimé cette valeur locative à la somme de 700 euros par mois. Le jugement est confirmé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les dépens et les frais irrépétibles sont confirmées.
M. [J], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel. Il est en outre condamné à payer à Mme [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme mise à sa charge à ce titre en première instance.
Par décision rendue le 27 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Metz a accordé à M. [J] le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur l'aide juridictionnelle provisoire.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [V] [J] à payer à Mme [U] [B] épouse [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE M. [V] [J] de sa demande tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire ;
CONDAMNE M. [V] [J] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/01377 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FX46
Minute n° 23/00284
[J]
C/
[G]
Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de METZ, décision attaquée en date du 13 Mai 2022, enregistrée sous le n° 11-21-829
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2023
APPELANT :
Monsieur [V] [J]
[Adresse 2]
Représenté par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-000304 du 27/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉE :
Madame [U] [B] épouse [G]
[Adresse 1]
Représentée par Me Alain MORHANGE, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant M. MICHEL,Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.
A l'issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller
M. KOEHL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Stéphanie PELSER, Greffier placé
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte d'huissier du 21 juillet 2021, Mme [U] [B] épouse [G] a fait citer M. [V] [J] devant le tribunal judiciaire de Metz aux fins de voir annuler le contrat de bail portant sur les locaux sis [Adresse 2] (3ème étage) prétendument consenti par M. [P] [G] au profit de M. [J], ordonner l'expulsion de M. [J] et le condamner à lui payer une indemnité mensuelle d'occupation de 700 euros à compter du 1er août 2019 et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [J] qui s'est opposé à ces prétentions a demandé au tribunal de condamner Mme [G] à lui payer une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 13 mai 2022, le tribunal a :
- annulé le contrat de bail signé le 1er août 2019 portant sur le logement au 3ème étage, la cave et le garage n°5 situés [Adresse 2]
- ordonné en conséquence l'expulsion de M. [J] de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef, des locaux situés [Adresse 2], et ce au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier
- condamné M. [J] à payer à Mme [G] une indemnité d'occupation de 700 euros, à compter du 1er août 2019 jusqu'à libération effective des lieux et la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens
- débouté les parties de toute autre demande.
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 30 mai 2022, M. [J] a interjeté appel de toutes les dispositions du jugement.
Au termes de ses dernières conclusions du 10 mai 2023, il demande à la cour d'infirmer le jugement, lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, débouter Mme [G] de l'ensemble de ses prétentions et la condamner aux entiers frais et dépens des deux instances.
L'appelant expose que M. [G] lui a confié courant 2006 la gestion des 5 appartements et 6 garages de l' immeuble situé [Adresse 2] lui appartenant, qu'il a rédigé seul l'ensemble des baux des appartements et garages et assuré le suivi des travaux nécessaires, qu'il a établi les décomptes de charges et que faute de mandat écrit, il a signé pendant toutes ces années au lieu et place de M. [G] à sa demande. Il précise qu'en 2015 M. [G] lui a loué un appartement qui s'était libéré pour le remercier de son aide, que le bail était verbal et qu'en 2019 il a établi un contrat de bail écrit qu'il a signé comme d'habitude pour le compte de M. [G]. Il ajoute que le 7 octobre 2019 Mme [G], a confié la gestion de l'immeuble à un professionnel et qu'elle a prétendu que son mari avait fait l'objet d'un abus de faiblesse. Il conteste les allégations adverses selon lesquelles M. [G] s'est toujours occupé de la gestion de l'immeuble jusqu'à ce que ses facultés cognitives déclinent, environ trois ou quatre ans avant son décès, alors que c'est lui qui s'en est occupé intégralement à compter de 2007 comme en attestent d'anciennes locataires. Il observe que l'intimée n'est pas en mesure de produire des documents relatifs aux baux conclus au cours de toutes ces années qu'il n'aurait pas signés pour le compte de M. [G] et souligne que grâce à son activité, celui-ci a pu bénéficier de tous les fruits de son immeuble.
L'appelant fait valoir que l'existence d'un bail verbal n'a jamais été contestée et que la seule annulation du contrat de location qu'il a signé pour le compte de M. [G] ne doit pas entraîner l'annulation du bail verbal antérieur qui reste valable, même si la loi du 6 juillet 1989 prévoit que le bail est conclu par écrit. Il précise avoir procédé au paiement de tous les loyers appelés par le mandataire de Mme [G], que ces appels sont postérieurs au jugement déféré ce qui vaut confirmation du contrat de bail et renonciation aux moyens et exceptions par application de l'article 1182 du code civil.
Subsidiairement, sur le montant de l'indemnité d'occupation, l'appelant soutient que la valeur locative de l'appartement n'est pas démontrée, que la propriétaire ne peut se prévaloir de l'attestation non circonstanciée de la société gestionnaire du bien, qu'une expertise privée ne peut à elle seule justifier une demande de condamnation et prétend que l'indemnité d'occupation ne peut qu'être fixée au montant du loyer, payé et encaissé chaque mois. Il précise avoir quitté le logement le 7 mars 2023 de sorte que la demande d'expulsion n'a plus d'objet.
Au termes de ses dernières conclusions du 2 juin 2023, Mme [G] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, débouter M. [J] de toutes ses prétentions et le condamner à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.
Elle expose que la SCI Frama est nue propriétaire de l'immeuble dont elle est usufruitière, que M. [G] qui est décédé le [Date décès 3] 2020, s'est toujours occupé de la gestion de cet immeuble jusqu'à ce que ses facultés cognitives déclinent, environ trois ou quatre ans avant son décès et qu'il s'est alors appuyé sur l'un de ses locataires, M. [J], pour le gérer. Elle indique que le 7 novembre 2019, avec son mari, ils ont donné une procuration générale de gestion de l'immeuble à leurs enfants qui se sont alors aperçus des abus de faiblesse et de confiance dont ils avaient été victimes et notamment du fait que le bail afférent au logement occupé par M. [J] est faux, la signature du bailleur ayant été imitée par celui-ci qui l'a expressément reconnu.
L'intimée soutient que le contrat de bail ne comprend pas de mention du mandat de gestion allégué, que l'appelant a grossièrement imité la signature de son époux, qu'il ne justifie pas d'un mandat de gestion d'immeubles qui est réglementé par la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, que la preuve formelle du consentement du propriétaire pour le mandat n'est pas rapportée, les attestations produites indiquant simplement qu'il s'occupait de l'entretien courant ou des charges mais nullement de la gestion locative. Elle ajoute que M. [J] a toujours revendiqué l'existence et l'application du bail écrit du 1er août 2019 comme constituant son titre locatif lequel a donc nécessairement mis fin au prétendu bail verbal préexistant dont il n'est pas justifié et que l'annulation du contrat de location frauduleusement obtenu ne saurait potentiellement faire revivre ce bail verbal.
Elle fait valoir que l'encaissement des loyers postérieurement au jugement du 13 mai 2022 n'est pas constitutif d'une confirmation de sa part du contrat de location dès lors, qu'en application de l'article 539 du code de procédure civile, le délais de recours et le recours sont suspensifs. Elle ajoute que la nullité qui n'est pas à ce jour confirmée, anéantit l'acte pour l'avenir et qu'il ne peut lui être fait grief de ne pas tirer de potentielles conséquences de cette nullité, l'exécution du bail se poursuivant.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'annulation du contrat de bail du 1er août 2019 et l'expulsion
Il résulte de l'article 1128 du code civil que le consentement des parties, leur capacité de contracter et un contenu licite et certain, sont nécessaires à la validité d'un contrat.
L'article 1372 du même code dispose que l'acte sous signature privée, reconnu par la partie à laquelle on l'oppose ou légalement tenu pour reconnu à son égard, fait foi entre ceux qui l'ont souscrit et à l'égard de leurs héritiers et ayant cause.
L'acte sous seing privé n'est soumis à aucune autre condition de forme que la signature de celui-ci qui l'oblige.
Il résulte par ailleurs de l'article 1724 du code civil qu'on peut louer par écrit ou verbalement. L'article 1728 précise que le preneur est tenu de deux obligations principales, user de la chose louée en bon père de famille et payer le prix du bail aux termes convenus.
En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge a estimé que le contrat de location sous seing privé du 1er août 2019 n'est pas valide. En effet, M. [J] reconnaît dans ses écritures avoir non seulement signé l'acte en qualité de locataire mais aussi au lieu et place de M. [P] [G], en tant que bailleur, dont il a imité la signature. Il n'est démontré ni que le propriétaire avait demandé à l'appelant de le représenter à l'acte, la signature apposée en son nom étant d'ailleurs exclusive d'un mandat de représentation, ni qu'il lui avait donné son accord pour cette imitation. L'intervention de M. [J] dans l'immeuble pour superviser des travaux, louer d'autres appartements, ou encore rédiger des contrats de location et même les signer comme en attestent plusieurs locataires, ne permet pas d'en déduire qu'il avait l'autorisation spécifique de conclure son propre contrat de location et d'imiter pour ce faire la signature du bailleur. Il est relevé en outre que si les témoins évoquent les pratiques de l'appelant au sein de l'immeuble, aucun d'entre eux en revanche n'a constaté qu'un tel comportement recueillait l'accord du bailleur. La preuve de la réalité du consentement de M. [G] au contrat de location du 1er août 2019 n'est donc pas rapportée.
Il n'est pas davantage démontré qu'indépendamment de cet acte, les parties ont conclu un bail verbal. L'existence d'un tel contrat ne saurait résulter de la simple occupation du bien sans que celui qui s'en prévaut ne rapporte la preuve de l'exercice des droits et de l'accomplissement des obligations s'attachant à un bail. Les différentes pièces du dossier en particulier l'avis d'imposition démontrent tout au plus que M. [J] a occupé un appartement dans l'immeuble situé [Adresse 2]. En revanche, il n'est pas établi que l'appelant s'est acquitté d'un loyer quelconque avant la présente procédure, les seuls règlements dont il est rapporté la preuve étant postérieurs au jugement déféré ayant prononcé la nullité du bail, l'expulsion de l'intéressé et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation. Le fait que par son activité, M. [G] ait pu bénéficier des fruits de son immeuble, ne peut être valablement considéré comme la contrepartie du paiement des échéances locatives, étant observé que l'accord du bailleur pour procéder à ce type de compensation n'est pas établi.
C'est par ailleurs en vain que l'appelant soutient que l'encaissement des loyers dont il s'acquitte depuis le jugement déféré ferait obstacle au prononcé de la nullité du bail. En effet, si comme le prévoit l'article 1182 du code civil, une exécution volontaire du contrat en connaissance de cause de la nullité vaut confirmation, cette renonciation à la nullité est conditionnée non seulement par la connaissance du vice affectant l'acte mais aussi par la volonté de le réparer. Cette volonté n'est pas démontrée en l'espèce et ne peut simplement se déduire de la perception par la propriétaire des règlements de M. [J] au titre de son occupation au cours de la procédure d'appel alors que l'intimée sollicite expressément la nullité du bail sur laquelle se fonde l'occupation. La confirmation est d'autant moins caractérisée en l'espèce qu'en application de l'article 514 du code de procédure civile, la décision dont appel condamne l'appelant au paiement d'une indemnité d'occupation et qu'elle est assortie de droit de l'exécution provisoire.
Il s'ensuit que le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de location daté du 1er août 2019 et ordonné l'expulsion de M. [J].
Sur l'indemnité d'occupation
L'ancien article 1382 du code civil (devenu article 1240) dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'occupation sans droit, ni titre de l'appartement litigieux est constitutive d'une faute au sens de ces dispositions et il appartient dès lors à M. [J] de réparer le préjudice causé au propriétaire du fait de cette occupation. L'indemnisation du dommage doit être évaluée en fonction de la valeur locative des locaux et non du montant du loyer figurant dans le contrat de location annulé puisqu'il résulte des développements qui précèdent que le consentement du propriétaire à ce bail n'est pas établi et que l'appelant reconnaît dans ses écritures qu'il a été consenti à des 'conditions avantageuses'. Au regard des éléments dont dispose la cour, respectivement la localisation de l'immeuble, sa consistance (F4), sa taille (85 m2) ses installations, ses accessoires (garage et cave) tels qu'il ressortent de l'acte du 1er août 2019, il apparaît que le premier juge a justement estimé cette valeur locative à la somme de 700 euros par mois. Le jugement est confirmé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les dépens et les frais irrépétibles sont confirmées.
M. [J], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel. Il est en outre condamné à payer à Mme [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme mise à sa charge à ce titre en première instance.
Par décision rendue le 27 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Metz a accordé à M. [J] le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur l'aide juridictionnelle provisoire.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [V] [J] à payer à Mme [U] [B] épouse [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE M. [V] [J] de sa demande tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire ;
CONDAMNE M. [V] [J] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT