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Décisions

CA Rouen, ch. civ. et com., 14 septembre 2023, n° 21/04099

ROUEN

Arrêt

Autre

CA Rouen n° 21/04099

13 septembre 2023

N° RG 21/04099 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I5FU

COUR D'APPEL DE ROUEN

CH. CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

2021/242

Tribunal judiciaire d'Evreux du 06 juillet 2021

APPELANTS :

Monsieur [A] [M]

né le 23 juin 1971 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 7]

représenté et assisté par Me Mathieu BOMBARD de la SELARL MB AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

Madame [B] [M]

née le 02 octobre 1942 à [Localité 9] (Maroc)

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Mathieu BOMBARD de la SELARL MB AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

Madame [S] [M]

née le 17 mai 1965 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée et assistée par Me Mathieu BOMBARD de la SELARL MB AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

INTIMEE :

S.A.R.L. CATAULY

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Sébastien FERIAL, avocat au barreau de l'Eure

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :

Madame FOUCHER-GROS, présidente

M. URBANO, conseiller

Mme MENARD-GOGIBU, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme RIFFAULT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 21 mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 8 juin 2023 puis prorogé à ce jour

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 14 septembre 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Mme FOUCHER-GROS, présidente et par Mme RIFFAULT, greffière

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 29 août 2000, Monsieur [X] [M] a cédé à la SARL CFL, un fonds de commerce de lingerie situé au [Adresse 6] à [Localité 4] et lui a consenti le même jour, un bail commercial d'une durée de neuf années qui a commencé à courir le 1er septembre 2000 pour se terminer le 1er septembre 2009.

Le 26 juillet 2006, la SARL CFL a cédé à Madame [S] [V] son fonds de lingerie en celui-ci compris le droit au bail. Cette cession a été agréé par Mme [B] [P] veuve [M], Mme [S] [M], Monsieur [A] [M], en qualité d'ayants droits de M. [M].

Le 13 février 2012, Madame [V] a notifié aux ayants droits de Monsieur [X] [M], une demande de renouvellement de bail pour le 31 mars 2012.

Le 22 octobre 2013, les consorts [M] et Madame [V] ont régularisé un acte de renouvellement de bail pour une nouvelle durée de neuf années.

Madame [V] a fait constater des dégâts des eaux en novembre et décembre 2017, avril 2018, février 2019.

A la demande de la compagnie d'assurance de Mme [V], le cabinet Elex a réalisé une expertise et a remis son rapport le 2 mai 2019.

Les 21 et 24 mai 2019, Madame [V] a fait assigner en référé l'indivision [M] à l'effet d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire avec pour principale mission de donner son avis sur la nature et le coût des travaux nécessaires pour mettre fin aux infiltrations et désordres constatés.

Par acte sous seing privé du 27 juin 2019, Madame [V] a cédé à compter du 1er juin 2019 à la SARL Catauly son fonds de commerce de vente de lingerie connu sous le nom commercial ''charme absolu''. Par acte du même jour, en l'étude de Me [U], notaire à [Localité 4], Madame [V] a réitéré la cession de droit au bail à la société Catauly représentée à l'acte par son gérant, M. [I]. Il est noté à l'acte que par courrier officiel du 24 juin 2019 de Me Emanuelli, avocat à Paris, le bailleur a déclaré ne pas s'opposer à la cession du fonds et la réitération

Le 21 août 2019, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise judiciaire. L'expert a déposé son rapport le 19 décembre 2020.

Le 29 septembre 2020, les consorts [M] ont fait délivrer à la SARL Catauly, un « congé avec refus de renouvellement pour motif grave et légitime » sans offre d'indemnité d'éviction.

Le 30 décembre 2020, Monsieur [T], expert judiciaire, a remis son rapport.

Par acte d'huissier délivré le 16 mars 2021, la SARL Catauly a fait assigner Madame [B] [P] veuve [M], [S] et [A] [M], devant le tribunal judiciaire d'Evreux aux fins de les voir enjoindre à procéder aux réparations sous astreinte et de les voir condamner à réparer son préjudice.

Par jugement du 6 juillet 2021, le tribunal judiciaire d'Evreux a :

- invalidé le congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly par Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M],

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M] de leurs demandes tendant à l'expulsion de la SARL Catauly des locaux loués en vertu du bail commercial du 29 août 2000,

- dit que Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], sont tenus de payer à la SARL Catauly l'indemnité d'éviction, qui sera fixée selon les dispositions de l'article L.145-14 du code de commerce,

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande de paiement de la somme de 28 803,45 euros, formée au titre d'un arriéré de loyer sur l'occupation de la cave,

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la SARL Catauly de faire procéder à la pose d'un store sur la devanture de la boutique,

- enjoint la SARL Catauly de faire procéder aux travaux de dépose du climatiseur fixé au mur donnant sur la cour extérieure ainsi qu'à la remise en état des murs,

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte,

- autorisé la SARL Catauly à faire réaliser les travaux réparatoires des désordres affectant la boutique sise au rez de chaussée,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly la somme de 8 247,22 euros, à titre d'avance sur la réalisation de ces travaux,

- enjoint à Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], d'effectuer auprès de la copropriété les démarches nécessaires pour effectuer les travaux réparatoires préconisés par l'expert pour remédier aux désordres en sous sol,

- débouté la SARL Catauly de sa demande tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly à payer à la SARL Catauly la somme de 850 euros, en réparation du préjudice de jouissance et des préjudices économiques et commerciaux soufferts du fait des infiltrations,

- dit que Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M] sont tenus de payer à la SARL Catauly une indemnité d'éviction fixée selon les dispositions de l'article L.145-14 du code de commerce,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise réalisée en exécution de l'ordonnance de référé du 21 août 2019,

- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire.

Par jugement du 14 septembre 2021, le tribunal judiciaire d'Evreux a :

- ordonné la rectification du jugement n°2021/242 rendu le 6 juillet 2021 par le tribunal judiciaire d'Evreux opposant la SARL Catauly à [A] [M], [B] [P] veuve [M] et [S] [M],

- remplacé en pages 3 à 16 « SARL Cautaly » par « SARL Catauly »,

- dit que le présent jugement rectificatif sera porté en marge de la minute du jugement du 6 juillet 2021 n°2021/242 ainsi que sur les expéditions de celui-ci.

Monsieur [A] [M], Madame [B] [M] et Madame [S] [M] ont interjeté appel du jugement du 6 juillet 2021 par déclaration du 26 octobre 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 mars 2023.

EXPOSE DES PRETENTIONS

Vu les conclusions du 7 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Monsieur [A] [M], Madame [B] [M] et Madame [S] [M] (les consorts [M]) qui demandent à la cour de :

A titre principal,

- constater que les conclusions d'intimé ne saisissent pas la cour d'un appel incident et en conséquence, ne statuer que sur l'appel principal des consorts [M],

- réformer le jugement du tribunal judiciaire d'Evreux dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

- enjoint la SARL Catauly de faire procéder aux travaux de dépose du climatiseur fixé au mur donnant sur la cour extérieure ainsi qu'à la remise en état des murs ;

Statuant à nouveau,

- débouter la SARL Catauly de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- constater la validité du congé portant refus de renouvellement et de non paiement d'indemnité d'éviction en date du 29 septembre 2020, la légitimité et la gravité de ses motifs,

- constater les violations commises par la SARL Catauly au titre de son occupation postérieure à l'expiration du bail, et notamment les travaux non autorisés, l'absence de paiement des charges et le refus de laisser le bailleur visiter les lieux,

- ordonner l'expulsion de la SARL Catauly, ainsi que celle de toutes personnes et de tous biens se trouvant dans les lieux de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et un serrurier, en tant que de besoin, ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets garnissant les lieux loués de son même chef, le tout dans le mois de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- ordonner à la SARL Catauly de procéder aux travaux de remise en état et à ce titre :

- faire procéder à la pose d'un store en façade par un professionnel du secteur,

- faire procéder à l'enlèvement de la climatisation fixée au mur et donnant sur la cour intérieure et faire procéder au rebouchage du trou, par un professionnel du secteur,

- le tout sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard qui débutera le 31ème jour suivant la signification de la décision à intervenir,

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement du tribunal judiciaire d'Evreux en ce qu'il a :

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly à payer à la SARL Catauly la somme de 850 euros, en réparation du préjudice de jouissance et des préjudices économiques et commerciaux soufferts du fait des infiltrations,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire,

- constater les violations commises par la SARL Catauly au titre de son occupation postérieure à l'expiration du bail, et notamment les travaux non autorisés, l'absence de paiement des charges et le refus de laisser le bailleur visiter les lieux,

Statuant à nouveau,

- ordonner avant dire droit une expertise et désigner tel expert qu'il plaira à la Cour aux fins de vérifier la persistance de fuite provenant du toit terrasse en mettant à la charge de la SARL Catauly la provision à valoir sur la rémunération de l'expert et subsidiairement,

- ordonner l'expulsion de la cave située en sous-sol de la SARL Catauly, ainsi que celle de toutes personnes et de tous biens se trouvant dans les lieux de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et un serrurier, en tant que de besoin, ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets garnissant les lieux loués de son même chef, le tout dans le mois de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- dire et juger que la SARL Catauly ne peut prétendre au paiement d'une indemnité d'éviction compte tenu des violations liées à son occupation postérieure à l'expiration du bail,

A titre infiniment subsidiaire,

- réformer le jugement du Tribunal judiciaire d'Evreux en ce qu'il a :

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande de paiement de la somme de 28 803,45 euros, formée au titre d'un arriéré de loyer sur l'occupation de la cave,

Statuant à nouveau,

- condamner la SARL Catauly au paiement d'un arriéré de loyer sur l'occupation de la cave à hauteur de 28 803,45 euros,

- dire et juger qu'il y a lieu de ne pas assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire,

A titre de dernier subsidiaire,

- dire et juger que la SARL Catauly a violé les dispositions des clauses et conditions du bail commercial,

- dire et juger que la SARL Catauly n'a plus droit au maintien dans les locaux,

- ordonner l'expulsion de la SARL Catauly ainsi que celle de toutes personnes et de tous biens se trouvant dans les lieux de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et un serrurier, en tant que de besoin, ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets garnissant les lieux loués de son même chef, le tout dans le mois de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- juger que la SARL Catauly est privée du droit au paiement d'une indemnité d'éviction et ne peut donc y prétendre,

En tout état de cause,

- condamner la SARL Catauly au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL Catauly aux entiers dépens, en ce compris les frais liés à l'expertise menée par Monsieur [T],

Vu les conclusions du 28 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la SARL Catauly qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 6 juillet 2021 rectifié le 14 septembre 2021 en toutes ses dispositions, à l'exception de celles relatives aux motifs du congé délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly sur le stationnement d'un véhicule dans la cour commune et les travaux de dépose du climatiseur et ses dispositions relatives au montant des dommages-intérêts alloués à la SARL Catauly au titre du préjudice de jouissance et des préjudices économique et commercial,

- infirmer par conséquent le jugement dont appel en ses dispositions relatives aux motifs du congé délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly sur le stationnement d'un véhicule dans la cour commune et les travaux de dépose du climatiseur et ses dispositions relatives au montant des dommages et intérêts alloués à la SARL Catauly au titre des préjudices de jouissance et préjudice économique et commercial,

Y ajoutant,

- voir constater que la SARL Catauly a exécuté les travaux réparatoires conformément aux préconisations de l'expert judiciaire et ce, à l'aide des sommes auxquelles les consorts [M] ont été condamnés,

- constater que la SARL Catauly a réglé aux entreprises concernées, au titre des travaux réparatoires préconisés par l'expert judiciaire, une somme de 9 388,04 euros,

- condamner en conséquence, in solidum les consorts [M] à rembourser à la SARL Catauly, la somme de 1 140,82 euros, restés à la charge de la concluante et ce, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

- débouter les consorts [M] de leur demande tendant à obtenir sous astreinte la condamnation de la SARL Catauly à déposer le climatiseur et à faire interdiction à l'intimée de stationner un véhicule dans la cour commune,

- débouter les consorts [M] du surplus de leurs demandes,

- condamner solidairement les consorts [M] à payer à la SARL Catauly une indemnité de 12 000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice de jouissance et des préjudices économique et commercial,

- condamner solidairement les consorts [M] à payer à la SARL Catauly une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [M] aux entiers dépens de la procédure d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION

Au préalable, aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, (') La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.''

En pages 19 et 26 de leurs conclusions, les consorts [M] se prévalent du défaut d'intérêt à agir de la société Catauly. A défaut de reprendre cette fin de non-recevoir dans le dispositif de leurs conclusions, il ne sera pas statué sur ces développements.

Sur la recevabilité de l'appel incident formé par la société Catauly

Les consorts [M] soutiennent que le dispositif des conclusions de la société Catauly ne contiennent pas de demande de réformation ou d'infirmation d'un quelconque élément du dispositif du jugement entrepris.

Réponse de la cour

L'article 542 du code de procédure civile dispose que ''l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.''

En application des dispositions de l'article 954 du même code, (...) '' les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. (')''

En demandant dès le dispositif de ses premières conclusions du 15 avril 2022 ''la confirmation du jugement du 6 juillet 2021 (') en toutes ses dispositions'', ''à l'exception de celles'' relatives aux motifs du congé (') sur le stationnement d'un véhicule dans la cour commune et les travaux de dépose du climatiseur et ses dispositions relatives au montant des dommages-intérêts alloués à la SARL Catauly au titre du préjudice de jouissance et des préjudices économique et commercial, la société Catauly sollicite l'infirmation des chefs du jugement critiqués qui sont expressément énoncés de sorte que la cour est valablement saisie de l'appel incident.

Sur le congé donné par le bailleur

Moyens des parties

Les consorts [M] soutiennent que :

* le 30 septembre 2020, il a été mis fin au bail par l'effet d'un congé avec refus de renouvellement sans paiement d'indemnité d'éviction ; la société Catauly se trouve dépourvue de tout droit au maintien dans le local puisqu'elle n'a pas formulé de demande de paiement d'indemnité d'éviction ;

* Madame [M] craint pour sa sécurité lorsqu'elle aborde le local, si bien qu'elle se fait accompagner ; Monsieur [A] [M] a fait l'objet de violences de la part du gérant ; ce comportement soit cesser ; le non renouvellement du bail le permet ;

* le loyer correspond à une surface n'incluant pas la cave qui ne fait pas partie du bail ce qui a été régulièrement rappelé à la société Catauly ;

* différents travaux non autorisés par le bailleur ou la copropriété ont été réalisés par le preneur ainsi la dépose du store et la pose de la climatisation ; le bailleur doit faire respecter le règlement de copropriété par son locataire ; madame [V] stationne son véhicule dans la cour commune ; l'entretien de la façade relève de la responsabilité du preneur ;

* le renouvellement du bail a pris effet au 1er avril 2012 et le commandement relatif à la dépose du store a été délivré le 9 juin 2012 ; le tribunal ne pouvait donc pas considérer que le renouvellement impliquait une renonciation des bailleurs alors que ledit renouvellement a eu lieu par l'effet de la loi antérieurement à la connaissance des bailleurs de ladite infraction ;

* les infractions commises par Madame [V] pourront être reprises durant le temps d'occupation de la SARL Catauly car Madame [V] demeure associée de la société et est présente sur les lieux loués en qualité de préposé/fondée de pouvoir ;

* ils maintiennent l'ensemble des griefs qui sont motivés dans le congé avec refus de renouvellement.

La société Catauly réplique que :

* en sollicitant de voir constater la validité du congé délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly, les consorts [M] ont provoqué de la part de la concluante, une contestation de ce congé et de ses motifs ;

* seuls peuvent être invoqués contre le locataire, des manquements qu'il a lui-même perpétrés à l'exclusion de ceux de son prédécesseur ;

* le rez-de-chaussée du local commercial correspond à une superficie de 49,61 m² ; le bail commercial porte à la fois sur le local du rez-de-chaussée à usage de boutique et sur le sous-sol qui a toujours servi de réserve aux commerçants qui se sont succédés dans les lieux ;

* la prétendue difficulté sur l'étendue du bail n'est survenue que lors des opérations d'expertise judiciaire et les conclusions établies dans l'intérêt des consorts [M] devant le juge des référés ne font nullement état de cette difficulté.

* le renouvellement du bail en pleine connaissance de cause de la faute contractuelle du preneur prive le bailleur de la possibilité d'invoquer celle-ci ultérieurement pour contester le droit du preneur au paiement d'une indemnité d'éviction ainsi pour l'enlèvement du store ;

* le grief portant sur le climatiseur ne concerne pas le local loué. Le climatiseur est posé sur le mur d'un local qui lui appartient et qui ne fait pas partie de la copropriété. Il ne concerne pas le local appartenant aux consorts [M]. Le grief lié à ''l'ouverture d'une porte vitrée, depuis le magasin Mephisto donnant sur la cour commune, sans autorisation de la copropriété'' n'a pas été repris par les consorts [M] dans leurs conclusions d'appelants ; le grief portant sur le stationnement dans la cour commune du véhicule ne concerne que la copropriété ; le bail autorise la société Catauly à occuper un neuvième de la cour commune de 145 m² ;

* pour échapper à leur responsabilité, les bailleurs ont fait intervenir l'entreprise Renard le 17 novembre 2020 ; compte tenu des opérations d'expertise en cours, il aurait été légitime pour la locataire de refuser l'accès au toit terrasse mais cela n'a pas été le cas ; le motif lié aux prétendus actes de harcèlement et de violences manque en fait ;

* le renouvellement de bail régularisé par les parties en octobre 2013 n'autorise plus les appelants à se prévaloir du grief tiré du ''défaut de règlement du loyer et charges dans les formes et à la date convenues entre 2007 et 2019'', si celui-ci était démontré ;

* le grief lié au ''défaut de justification spontané d'une assurance et du ramonage de la chaudière'' n'est pas justifié ; à supposer qu'il le soit, il ne pourrait jamais constituer un motif grave et légitime de non renouvellement du bail ;

* les locaux loués sont en bon état de réparation locative.

Réponse de la cour

En application des dispositions de l'article L 145-9 dernier alinéa du code de commerce, le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné.

Le refus de renouvellement du bail pour motif grave et légitime a été signifié à la société Catauly le 29 septembre 2020 avec effet au 31 mars 2021, date à laquelle le congé a été donné.

Dans le cadre de la présente procédure initiée par la société Catauly le 16 mars 2021 aux fins de condamnation des consorts [M] à procéder à des réparations et à indemniser son préjudice, les consorts [M] ont, par conclusions du 12 mai 2021, demandé à titre reconventionnel la validation du congé délivré le 29 septembre 2020. Par conclusions du 18 mai 2021 qui valent demande en justice, la société Catauly a sollicité l'invalidation des motifs du congé et la condamnation des consorts [M] à lui payer une indemnité d'éviction.

Il s'ensuit que la société Catauly a présenté, dans le délai de deux ans édicté par le texte, une indemnité d'éviction.

Sur la légitimité du congé :

Aux termes de l'article L145-17 I 1° du code de commerce ''le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'une indemnité : 1° s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit de l'inexécution d'une obligation, (') l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser les motifs invoqués et reproduire les termes du présent alinéa ; (') ''

Seuls peuvent être invoqués contre le locataire des manquements qu'il a lui-même perpétrés, à l'exclusion de ceux de son prédécesseur. Sont assimilés au locataire sortant les membres de sa famille, préposés, sous-locataires, locataire-gérant ou copreneur.

Le 27 juin 2019, Madame [V] a cédé à la SARL Catauly son fonds de commerce de vente de lingerie. Madame [V] a été la gérante de cette société jusqu'au 11 juin 2019, date à laquelle son fils, [C] [I] est devenu le représentant. Il ressort de l'acte de réitération de cession du droit au bail du 27 juin 2019 que Madame [V] et son fils sont les deux associés de ladite société. Outre que, dans le constat du 22 avril 2021, fait à la demande de la société Catauly, l'huissier a noté que la société Catauly était représentée par Mme [V] en qualité de « responsable du magasin », Mme [V] est de la même famille que le gérant.

Il s'ensuit que les consorts [M] sont bien fondés à invoquer des manquements imputés à Madame [V].

Les bailleurs ont, par acte d'huissier délivré le 4 août 2020, mis en demeure la SARL Catauly de :

- repeindre la devanture du magasin conformément aux dispositions du bail ;

- remettre un store sur le mur de la devanture ;

- déposer le climatiseur posé sur un mur extérieur et remettre le mur en état ;

- laisser libre le sous-sol de toute occupation ;

- ne pas stationner de véhicule dans la cour ;

- laisser l'accès au magasin au bailleur accompagné si nécessaire des entrepreneurs de son choix ;

- cesser les actes de harcèlement, les propos insultants ou provocants à l'égard du bailleur ;

- respecter la date du 1er de chaque mois pour le règlement du loyer et charges et le paiement par virement ;

- justifier spontanément une fois par an dans les délais du bail de l'assurance du local et du ramonage de la chaudière et non pas sur relance du bailleur.

Par acte d'huissier délivré à la société Catauly le 29 septembre 2020, les bailleurs lui ont signifié un congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction aux motifs suivants :

- de l'occupation indue du sous-sol pendant 14 années ;

- de la réalisation de travaux (enlèvement d'un store, pose d'un climatiseur, ouverture d'une porte vitrée depuis le magasin Méphisto) sans autorisation du bailleur ;

- du stationnement systématique et quotidien dans la cour commune du responsable du magasin au mépris du règlement de copropriété ;

- du refus d'accès au magasin opposé aux bailleurs et aux entreprises mandatées par elle pour la réalisation d'expertises ainsi que pour la réalisation de travaux ;

- d'actes de harcèlement et de violence à l'encontre de Madame [B] [M] ;

- du défaut de règlement du loyer et des charges dans la forme et à la date convenues entre 2007 et 2019 ;

- du défaut de justification spontanée d'une assurance et du ramonage de la chaudière ;

- de l'absence d'entretien des locaux.

* Sur l'occupation du sous-sol

Le contrat de bail du 29 août 2000 désigne les lieux loués comme suit :

''1°un local à usage de boutique élevée sur sous-sol situé à [Localité 4] [Adresse 6], édifié sur une parcelle de terrain figurant au cadastre rénové de ladite ville sous le n°145 de la section XD pour une contenance de 62 m².

2° et le un/neuvième (1/9ème) de la cour commune de 145 m²(...)

Tels que lesdits locaux existent, s'étendent, se poursuivent et comportent avec toute leurs aisances, et dépendances, sans aucune exception ni réserve et sans qu'il soit nécessaire d'en faire une plus ample désignation, à la demande du « preneur » qui déclare parfaitement les connaître pour les avoir vus et visités en vue des présentes, et contracter en pleine connaissance de cause.''

L'acte de cession reprend la description des lieux fait au bail du 29 août 2000, soit le local à usage de boutique et les 1/9ème de la cour commune.

La société Catauly utilise le sous-sol comme réserve ainsi que les clichés photographiques le montrent et auquel elle a accès par un escalier depuis le magasin ainsi que constaté le 28 novembre 2017 par maître [G], huissier de justice. Le 2 mai 2019, la société ELEX, mandatée par la compagnie d'assurances de Mme [V] a rendu son rapport sur le sinistre du 31 mai 2018. L'expert a réalisé ses opérations en présence de Mme [B] [M]. Il ressort de ce rapport que le « sinistre dégât des eaux (avait) pour origine des infiltrations d'eaux pluviales au travers les murs enterrés où se situe la réserve des locaux commerciaux occupés par Mme [V]. » L'expert souligne que la responsabilité de Mme [M], propriétaire non occupant est engagée. Mais relève dans son rapport « A la lecture du bail signé entre les parties, il y est indiqué la non responsabilité du bailleur en cas de dégât aux lieux loués et au marchandises en cas de dégât des eaux. Pas de recours envisageable dans ce dossier ». Les consorts [M] n'ont pas, à l'occasion de ce rapport, fait valoir que la cave n'était pas comprise dans le bail.

Dans leurs conclusions du 21 juin 2019 devant le juge des référés, ils ont décliné leur garantie, en faisant valoir ce que la société ELEX avait relevé dans son rapport, mais n'ont pas fait état de ce que la cave n'est pas comprise dans les lieux loués.

Ainsi, cette utilisation du sol par le preneur était connue du bailleur n'a jamais été remise en cause par ce dernier avant le dire du 12 mars 2020 adressé à l'expert judiciaire désigné par ordonnance de référé du 21 août 2019.

Les consorts [M], ne justifient pas d'une protestation émise au titre de cette utilisation avant le mois de mars 2020. Ces protestations sont toutes contemporaines du présent litige et sont matérialisées par des dires et courriers de leurs conseils émis à compter de cette date.

L'argument tiré de la superficie indiquée dans le bail soit 62 m2 correspondant à la surface plancher louée selon les appelants n'est pas pertinent dès lors que la mesure prise le 22 avril 2021 par Maître [G], huissier de justice, mentionne une superficie de la boutique au rez-de-chaussée vitrines incluses de 49,61 m2.

Il s'ensuit que c'est par des motifs pertinents que le premier juge a, d'une part, relevé que le sous-sol, mentionné dans le bail par l'expression ''élevé sur sous-sol'' est utilisé comme dépendance à usage de réserve de la boutique depuis la conclusion du bail sans contestation du bailleur autre que celle formulée dans le cadre du présent litige et a, d'autre part, retenu que le bail comprend le droit pour le preneur d'utiliser ce sous-sol, lequel constitue une dépendance du local commercial.

Par conséquent, ce motif n'est pas un motif grave et légitime de congé sans indemnité d'éviction.

* Sur l'ouverture d'une porte vitrée

Ce motif n'est pas légitime dès lors que n'étant pas mentionné dans la mise en demeure du 4 août 2020, les consorts [M] ne peuvent s'en prévaloir.

* Sur le refus d'accès aux locaux

Il ressort du courrier du 26 juin 2020 émanant de la société Renault, chauffagiste, que le 23 juin 2020, Madame [V] s'est opposée à la présence de cette entreprise mandatée par les bailleurs aux fins d'effectuer un devis de dépose de chauffage (pièce 10 appelants). Le 17 novembre 2020, la société Renard a pu intervenir afin de réparer la fuite d'étanchéité malgré la réticence de la locataire (pièce 22 appelants). Si Madame [V] s'est opposée à la venue de l'entreprise Socotec prévue le 26 octobre 2021, il est précisé dans le constat d'huissier du même jour qu'elle s'y est opposée sur conseil de son avocat, les travaux réparatoires n'ayant pas encore été effectués.

Il s'ensuit ainsi que retenu par le premier juge, que la société Catauly n'ayant pas définitivement fait obstacle à l'entrée dans les locaux des bailleurs, ce grief n'est pas un motif grave et légitime de congé.

* Sur l'absence d'entretien des locaux

Le bail met à la charge du preneur l'entretien de la devanture étant stipulé que ''le tout devra être maintenu constamment en parfait état de propreté et les peintures extérieures et intérieures en état de fraîcheur.''

Par mise en demeure du 4 août 2020, il a été fait sommation à la société Catauly d'avoir à repeindre, conformément aux dispositions du bail, la devanture du magasin.

Par un courrier du 4 septembre 2013, Madame [M] a été invitée par la ville d'[Localité 4] à procéder aux travaux nécessaires à la rénovation de la façade de l'immeuble situé au [Adresse 6]. Le 8 juin 2012, maître [J] a fait remarquer à Madame [V] le manque d'entretien, celle-ci ayant répondu ''qu'elle allait faire réaliser un joint et passer une couche de peinture''.

Dans un courrier du 6 avril 2017 du conseil des appelants adressé au conseil de la société Catauly, le conseil des appelants indique que madame [V] s'est abstenue, pendant de nombreuses années, d'entretenir la façade du magasin, mais il ajoute que les travaux ont été finalement réalisés en 2017 de sorte que le grief manque en fait. De surcroît, les clichés photographiques joints au rapport d'expertise judiciaire et au constat d'huissier de justice du 27 janvier 2020 établi par maître [O] illustrent une devanture en bon état.

Les observations du bailleur sur un manque d'entretien du preneur s'agissant notamment de la toiture terrasse sont sans lien avec les termes de la mise en demeure du 4 août 2020. Par ailleurs, il ne ressort pas du congé que le défaut d'entretien vise d'autres faits que ceux relatifs à peinture de la devanture du magasin.

Il résulte de tout ceci que le défaut d'entretien visé dans le congé ne peut être qualifié de motif légitime.

* Sur la dépose du store de la devanture

Les consorts [M] ne peuvent se prévaloir d'un grief que si les faits reprochés ont été commis par la société Catauly.

La lettre de mise en demeure du 4 août 2020 est rédigée ainsi : 'réalisation des travaux sans autorisation du bailleur et notamment enlèvement d'un store (...)

Je vous fais sommation d'avoir à :

- remettre un store sur le mur de la devanture (...)'

Par acte d'huissier du 9 juin 2012, le bailleur avait fait commandement à Mme [V], alors titulaie du bail, de procéder à la remise en état du store dans le délai d'un mois à peine de résiliation du bail. Le bail litigieux initialement conclu le 29 août 2000, a été renouvellement le 22 octobre 2013 pour une nouvelle durée de neuf années sans que cette réparation demandée par le bailleur n'ait été réalisée. Ainsi, le bailleur a renoncé à se prévaloir de cette infraction et le bail a été renouvelé sans que le store soit remis en état.

Il en résulte que l'enlèvement litigieux du store n'est pas le fait de la société Catauly qui a pris les locaux à bail au mois de juin 2019.

Ce motif de congé n'est pas légitime.

* Sur le défaut de règlement du loyer et des charges à la date et dans la forme convenues entre 2007 et 2019

Le bail prévoit que le loyer doit être versé d'avance le premier de chaque mois par virement bancaire.

Dans leur mise en demeure du 4 août 2020, le bailleur a demandé à la SARL Catauly de respecter la date du 1er de chaque mois pour le règlement du loyer et charges et le paiement par virement.

La société Catauly n'étant devenue locataire qu'à compter du 1er juin 2019, les consorts [M] ne peuvent invoquer utilement à son encontre de faits antérieurs à cette date.

Dans une lettre officielle du 20 juin 2012, le conseil des consorts [M] a écrit à celui de Mme [V] : « J'ajoute que le paiement du loyer intervient toujours et systématiquement avec retard.

Cette difficulté pourrait être réglée si Madame [V] acceptait de régler à Madame [M], le loyer par prélèvement automatique. »

Répondant à cette lettre le 30 août 2012, le conseil de Mme [V] a écrit « (') moyennant la conclusion du renouvellement, elle accepterait de mettre en place le paiement des loyers par virement automatique donnant ainsi sur ce point satisfaction à vos mandantes »

Dans une lettre officielle du 7 juillet 2020, le conseil des consorts [M] a écrit à celui de la SARL Catauly : « Jusqu'à ce que la locataire consente au principe du règlement par prélèvement à compter du 5 décembre 2013, Mme [V] ('.) a, systématiquement réglé son loyer avec retard (') en dépit de ce règlement par prélèvement, de nouveaux retards de paiement se sont produits en 2019, les loyers de février et de mars n'ayant été réglés qu'en avril (...) »

Il ressort de cet échange que la forme de paiement a toujours été respectée par la société Catauly. Par ailleurs, le bailleur supporte la charge de la réalité des faits qu'il invoque. Alors qu'il lui serait aisé au moyen d'un relevé bancaire de rapporter la preuve d'un retard de paiement postérieur au mois de juin 2019, il ne justifie d'aucun éléments en ce sens.

Il en résulte que les consorts [M] ne justifient pas sur ce point d'un motif grave et légitime de congé sans indemnité d'éviction.

* Sur le défaut de justification spontanée d'une assurance et du ramonage de la chaudière :

Le bail ne prévoit pas que le preneur doit justifier spontanément de l'entretien de la chaudière. Par voie de conséquence, aucun manquement ne peut être reprocé de ce chef à la SARL Catauly .

L'acte de réitération de cession de droit au bail rappel que le bail prévoit que le preneur « devra adresser au bailleur dans les quinze jours des présentes, une attestation détaillée des polices d'assurance souscrites. »

Dans sa lettre du 7 juillet 2020, le conseil des consorts [M] a précisé à celui de la SARL Catauly que l'attestation d'assurance n'était jamais adressée spontanément. Il ressort du courrier du 20 juillet 2021 du conseil des consorts [M] à celui de la société Catauly que cette attestation a été communiquée au mois de juillet 2021.

La SARL Catauly ne justifie pas d'avoir déféré à cette obligation avant cette date. En l'absence de communication d'une attestation d'assurance, le bailleur n'est pas en mesure de savoir si le preneur a effectivement souscrit les assurances nécessaires à la prise en charge de dommages subi par le bien donné en location. Mais dès lors qu'il n'est ni justifié ni même allégué que les assurances n'ont pas été souscrites, ce manquement n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier le congé sans indemnité d'éviction.

* Sur la pose du climatiseur

En application de l'article 13 de la loi du 10 juillet 1965, le règlement de copropriété est opposable aux ayants cause à titre particulier des copropriétaires et ses clauses le sont au locataire d'un copropriétaire bailleur. Par ailleurs, il est stipulé dans le bail commercial au paragraphe ''jouissance des lieux'' que le preneur devra (') se conformer aux dispositions du règlement de copropriété (').

Le copropriétaire-bailleur peut agir, dans le cadre de l'exécution du bail, pour obtenir du locataire le respect du règlement de copropriété.

Mme [V] oppose que l'appareil n'a pas été posé sur le mur du local loué mais sur celui d'un bien lui appartenant.

Il ressort du dire n°2 adressé à l'expert judiciaire le 12 mars 2020 par les appelants que la pompe à chaleur a été installée pour le magasin de la société Catauly « mitoyen de celui des consorts [M] dans la cour commune, sans autorisation des copropriétaires ».

Maître [O], huissier de justice, a constaté les 27 janvier 2020 (pièce E 3 communiquée à l'expert) et 20 septembre 2020 que dans la cour du [Adresse 6] à [Localité 4], ''est fixé au mur extérieur un module de type pompe à chaleur, à gauche de la porte vitrée permettant l'accès au magasin voisin (enseigne Méphisto)''. (') une gaine coudée PVC y est reliée (').

Dans un constat du 17 septembre 2020, Me [O] a relaté qu'elle s'était rendue à [Localité 4], 50, rue du Docteur Oursel, magasin « charme absolu » « là où étant j'ai constaté ce qui suit :

Je constate la présence dans la cour de l'immeuble d'un véhicule (')

Dans cette cour, je constate qu'est fixé au mur extérieur un module de type Pompe à chaleur, gauche de la porte vitrée permettant l'accès au magasin voisin (enseigne Méphisto) »

Il ressort de la photo jointe au constat que le climatiseur se trouve à l'angle formé par deux murs mitoyen.

Dans sa lettre adressée le 7 juillet 2020 au conseil de la société Catauly, le conseil des consorts [M] écrit que le climatiseur est 'accolé' au mur arrière du magasin. Dans son dire à expert du 23 novembre 2020, il emploie l'expression 'climatisation mitoyenne, obstruant un pan du mur arrière du local'.

Par courrier du 4 mars 2021, madame [V] a été invitée, par le syndic, la société Foncia Normandie [Localité 4], gérant la copropriété à déposer l'appareillage installé au dos de sa boutique sans l'accord des copropriétaires de la cour. S'il est ainsi rapporté la preuve que le mur sur lequel l'appareillage est adossé donne sur la cour commune au local loué par la société Catauly aux consorts [M], il n'est pas justifié que l'infraction au règlement de copropriété a été effectué à partir de ce local.

Il en résulte que l'existence du motif grave et légitime de congé n'est pas démontré.

* Sur le stationnement dans la cour commune du véhicule du responsable du magasin

Si le bail commercial, au titre des lieux loués, confère au preneur l'usage d'un neuvième de la cour commune, il ne comporte aucune stipulation accordant expressément à la société Catauly le droit d'y stationner un véhicule.

Ainsi qu'il a été exposé plus haut, le bail précise que ''le preneur devra (') se conformer aux dispositions du règlement de copropriété (').''

Le copropriétaire-bailleur peut agir, dans le cadre de l'exécution du bail, pour obtenir du locataire le respect du règlement de copropriété.

Par courrier de son conseil du 30 août 2012, (pièce 36 [M]) madame [V], alors titulaire du bail, avait pris acte des dispositions du règlement de copropriété qui ne permettent pas le stationnement prolongé des véhicules dans la cour et précisé qu'elle se conformera à cette solution.

Or le 10 septembre 2020, la présence du véhicule de Madame [V] dans la cour commune a été constatée par maître [O], huissier de justice.

Par le courrier du 4 mars 2021 ci-avant cité du syndic de copropriété, la société Catauly a été mise en demeure de ne plus stationner dans la cour, ce stationnement gênant les manœuvres des propriétaires des garages.

Ainsi l'infraction au règlement de copropriété qui s'est poursuivie plusieurs mois plus d'un mois après la mise en demeure délivrée le 4 août 2020, et qui a occasionné une gêne tangible aux autres occupants des lieux est de nature à exposer le bailleur à une action intentée par les copropriétaires. Elle constitue ainsi un motif grave et légitime de congé sans indemnité d'éviction.

* Sur les faits de harcèlement et de violence à l'encontre de Madame [B] [M]

Les fautes extra contractuelles tenant au comportement du preneur peuvent être retenues comme motif légitime du congé dès lors qu'elles revêtent un caractère suffisamment grave et qu'elles ont un lien suffisant avec l'exécution du bail. Il en est ainsi des violences physiques et verbales exercées par le locataire sur un bailleur ou ses proches.

Les faits survenus postérieurement au congé peuvent être invoqués par le bailleur pour conforter le congé précédent.

Tant dans la mise en demeure du 4 août 2020 que dans le congé du 29 septembre 2020 les bailleurs ont reproché au locataire de tenir des propos insultants ou provocants à l'égard du bailleur et encore de faire preuve d'actes de violence à l'encontre de Madame [M].

Le 27 février 2021, [A] [M] a déposé plainte à l'encontre de Monsieur [I], pour des menaces de mort à son encontre. Il relate dans le procès verbal que ce même jour, jour de marché alors qu'il accompagnait sa mère, Monsieur [I], fils de Mme [V], s'est tenu face à cette dernière dans une posture menaçante, qu'il s'en prenait à sa mère, était menaçant physiquement ''en se penchant sur moi et en avançant pour m'impressionner''. Il ajoute avoir entendu que Monsieur [I] les '' traitaient de merdes'' disait ''je vais te retrouver'', que son attitude était constamment menaçante. Il a déclaré que sa mère a déjà subi des pressions, des violences de la part de Madame [V] et des menaces de mort, qu'elle n'a jamais déposé plainte car elle a peur et se trouve seule à [Localité 4].

L'existence d'un comportement agressif des représentants de la société locataire est corroborée par l'attestation du 6 septembre 2019 de Monsieur [D]. Monsieur [D] déclare avoir accompagné Madame [M] lors d'une expertise des locaux le 11 décembre 2018, atteste avoir constaté l'agressivité verbale de Madame [V] à l'encontre de Madame [M] quelques jours avant l'expertise, celle-ci ayant ''été chassée'' par la première ''de la cour attenante au magasin''. Il ajoute que le 11 décembre 2018, Madame [M] a été empêchée par Madame [V] de vérifier la totalité du sous-sol ''en s'interposant devant elle'' alors que les experts étaient présents.

Il ressort du rapport du cabinet d'expertise Elex qu'un rendez-vous d'expertise a effectivement été organisé le 11 décembre 2018 en présence de Mmes [V] et [B] [M].

L'attestation de Monsieur [D] corroborent les propos de Monsieur [M] dans son dépôt de plainte. Ils établissent la réalité d'un comportement agressif inadmissible du preneur à l'encontre de son bailleur, que l'existence d'un différend ne suffit pas à justifier. Ces faits constituent un motif grave et légitime qui justifie la délivrance d'un congé sans indemnité d'éviction.

Il résulte de ce qui précède que les faits de violence de la part de Mme [V] et l'occupation de la cour commune sans autorisation de la copropriété pendant plusieurs mois sont chacun à eux seuls d'une gravité qui justifie le congé sans indemnité d'éviction.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a invalidé le congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly par Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M].

Le congé sans indemnité d'éviction sera validé. Il en résulte que le bail a expiré le 31 mars 2021, et qu'il sera ordonné à la société Catauly, sans droit ni titre, de laisser les locaux libre de toute occupation dans le délai de mois à compter de la signification du présent arrêt.

Les consorts [M] ne démontrent pas que la société Catauly ne se conformera pas à l'exécution de cet arrêt. Dès lors, il n'y a pas lieu d'assortir la mesure d'expulsion d'une astreinte.

Le congé sans indemnité d'occupation étant validé, et le locataire ne pouvant se maintenir dans les lieux, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté les consorts [M] de leurs demandes tendant à l'expulsion de la SARL Catauly des locaux loués en vertu du bail commercial du 29 août 2000, et en ce qu'il a dit qu'ils sont tenus de payer à la SARL Catauly l'indemnité d'éviction, qui sera fixée selon les dispositions de l'article L.145-14 du code de commerce.

L'expulsion de la SARL Catauly sera ordonnée, la SARL Catauly sera déboutée de sa demande d'indemnité d'éviction et son expulsion sera ordonnée.

Par voie de conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a enjoint aux consorts [M], d'effectuer auprès de la copropriété les démarches nécessaires pour effectuer les travaux réparatoires préconisés par l'expert pour remédier aux désordres en sous sol. La société Catauly sera déboutée de ce chef de demande.

En outre, dès lors qu'il a été fait droit à la demande principale des consorts [M], la demande subsidiaire tendant au paiement d'une somme de 28 803,45 € au titre de l'occupation de la cave est devenue sans objet. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté les consorts [M] de cette demande et il sera dit que cette demande est sans objet.

Sur les travaux de remise en état :

La SARL Catauly a fait poser un store au mois d'octobre 2022.

La SARL Catauly devant aux termes du bail, remettre les locaux en l'état, et ne justifiant pas qu'elle a fait poser le store dans les règles de l'art, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté les consorts [M], de leur demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la SARL Catauly de faire procéder à la pose d'un store. La société Catauly sera condamnée à faire procéder à cette pose par un professionnel du secteur. Pour les mêmes motifs que ceux exposés plus haut, il n'y a pas lieu d'assortir ces condamnations d'une astreinte.

A défaut de preuve de ce que le climatiseur est posé sur le mur du local des époux [M], le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a enjoint la SARL Catauly de faire procéder aux travaux de dépose du climatiseur fixé au mur donnant sur la cour extérieure ainsi qu'à la remise en état des murs. Les consorts [M] seront déboutés de ce chef de demande.

Sur les demandes relatives aux travaux de réfection des locaux

Moyens des parties

Les consorts [M] font valoir que dès lors que la SARL Catauly n'a pas droit au maintien dans les lieux à compter du 31 mars 2021, sa demande de condamnation pour l'avenir est vouée à l'échec.

Réponse de la cour :

La société Catauly avait demandé au premier juge de condamner les consorts [M] à lui à lui payer une somme de 8 247,22 euros au titre des travaux réparatoires chiffrés par l'expert.

Le premier juge a fait droit à cette demande et a autorisé la SARL Catauly à faire réaliser les travaux réparatoires des désordres affectant la boutique sise au rez de chaussée, et condamné les consorts [M] à payer à la SARL Catauly la somme de 8 247,22 euros, à titre d'avance sur la réalisation de ces travaux,

Mais la société Catauly étant sans droit ni titre depuis le 31 mars 2021, elle ne peut que succomber en sa demande tendant à faire effectuer des travaux réparatoires aux frais des bailleurs.

Le jugement entrepris sera infirmé en ces dispositions, la société Catauly sera déboutée de ce chef de demande et déboutée de sa demande de restitution de la somme de

1 140,82 €.

Sur la demande d'indemnisation des préjudice de jouissance, économique et commercial

La société Catauly fait valoir que :

* en cédant son fonds de commerce à la société Catauly, madame [V] lui a transféré les droits et obligations attachés à ce fonds de commerce et notamment le droit au bail ; elle est donc fondée à se prévaloir d'un préjudice antérieur à la cession du fonds à son profit soit depuis mai 2016 ;

* le fait d'être régulièrement perturbé après chaque épisode pluvieux, impacte l'activité commerciale ; la fermeture du magasin pour les travaux de rénovation a entraîné une perte du chiffre d'affaire de 8556 euros.

Les consorts [M] réplique que :

* le bail contient une clause excluant la responsabilité du bailleur à raison du dégât des eaux ;

* il résulte des stipulations du bail que le locataire est tenu d'entretenir les locaux en bon état de réparations locatives ou de menu entretien ; la société Catauly n'a versé aucune pièce ni aucun élément justifiant le moindre entretien ; l'expert retient une part de responsabilité du locataire dans l'existence des différents désordres :« l'entretien de la toiture incombe au locataire, l'entretien de la descente d'eau incombe au locataire »

* faute de précision suffisante de l'expert, la cour retiendra subsidiairement, si elle le devait, une imputabilité à parts égales du preneur et du bailleur dans le préjudice subi par le preneur ;

* il n'existe plus de fuite depuis l'intervention de l'entreprise Renard ;

* La société Catauly n'est devenue propriétaire du fonds de commerce qu'en juin 2019, le droit à indemnisation doit être limité à sa période d'exploitation.

Réponse de la cour

L'article 1134 du code civil, dans sa version applicable à la cause, dispose que 'les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu'elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise'.

Selon les dispositions de l'article 1147 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit en raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n' y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L'acte de réitération de cession de droit au bail par madame [V] à La société Catauly daté du 27 juin 2019 ne comporte aucune clause de transmission des actions en réparation des dommages réalisés avant ladite cession.

Le préjudice réparable est celui subi par la seule société Catauly dans le cadre de l'occupation du local qu'elle loue depuis la cession du droit au bail à compter du 1er juin 2019. La SARL Catauly ne justifie d'aucun préjudice économique et commercial pour la période antérieure au 31 mars 2021, date de l'expiration du bail.

Sur le préjudice de jouissance :

En application des dispositions des articles 1719 du code civil, le bailleur est tenu d'une obligation de délivrance de la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée.

Aux termes de l'article 1720 du même code, le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire, pendant toute la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives.

La règle selon laquelle toutes les réparations autres que locatives sont à la charge du bailleur n'est pas d'ordre public et il peut y être dérogé par des stipulations expresses du contrat de bail commercial.

Le contrat de bail comporte une clause intitulée ''Entretien-Réparation'' qui stipule que : ''le preneur entretiendra les lieux loués en bon état de réparations locatives ou de menu entretien conformément aux dispositions de l'article 1754 du code civil (') Les réparations dites locatives sont celles régies par l'accord de la commission Delmon de novembre 1975 et celles issues de la jurisprudence. Il ne pourra exiger du bailleur aucune réparation autres que celles nécessaires à la toiture et aux gros murs. Il supportera toutes réparations qui deviendraient nécessaires par suite (') de défaut d'exécution des réparations locatives ('). Ces réparations ne sont pas à sa charge quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure. ('). Il aura entièrement à sa charge, sans aucun recours contre le bailleur, l'entretien complet de la devanture et des fermetures des locaux d'exploitation (') toutes les réparations grosses et menues, et même les réfections et remplacements qui deviendraient nécessaires au cours du bail aux devantures, vitrine, glaces, et vitres, volets ou rideaux de fermeture s'ils existent, des locaux d'exploitation seront à sa charge exclusive (').

La clause 'Obligation du bailleur' stipule que celui-ci ''s'oblige à tenir les lieux loués clos et couverts selon l'usage, sans déroger toutefois aux obligations mises à la charge du preneur aux termes des présentes. (').''

Le contrat de bail comporte enfin une clause de non responsabilité du bailleur, ainsi stipulée : 'Le bailleur ne garantit pas le preneur et, par conséquent, décline toute responsabilité dans les cas suivants (...) d) en cas de dégâts causés aux lieux loués et aux objets et marchandises s'y trouvant par suite de fuite, infiltration, humidité ou refoulement des canalisations souterraines (...)'. Cette clause ne fait pas obstacle à l'engagement essentiel pris par le bailleur d'assurer le clos et le couvert et elle ne peut par conséquent l'exonérer des conséquences dommageables des dégâts des eaux imputables à des défauts de structure de l'immeuble loué.

L'expert judiciaire a constaté l'humidité du plafond du magasin situé en dessous de la toiture terrasse, ainsi que des coulures dans la trappe en bois, coté vitrine et déterminé que les désordres affectant la boutique trouvent leur origine dans des infiltrations d'eau par les toitures et les descentes d'eaux pluviales.

La réfection de l'étanchéité d'une toiture qui vise à préserver la structure d'un bien immobilier ne fait pas partie des réparations locatives ou de menu entretien et elle relève de l'obligation qui pèse sur le bailleur de tenir les lieux loués clos et couverts et de procéder aux réparations nécessaires pour ce faire. Il en résulte que les preneurs n'ont pas à leur charge l'entretien de la toiture et que le bailleur est tenu de réparer ces désordres qui affectent la structure de l'immeuble. Les descentes d'eaux pluviales ne sont pas incluses dans la structure de l'immeuble, de sorte que leur entretien incombe au preneur. Il en résulte que la responsabilité de la SARL Catauly dans la survenance du dommage est engagée à hauteur d'un quart.

Il est attesté par Madame [Z], salariée de La société Catauly, que l'humidité sur les murs provoque une situation désagréable pour présenter de la lingerie. L'humidité dans un local qui reçoit du public constitue un préjudice de jouissance.

L'expert au terme d'une analyse circonstanciée a relevé que le préjudice de jouissance concernant l'exploitation de la boutique se matérialise par des infiltrations par temps de pluie et après un temps de saturation important et propose de fixer l'indemnisation à la somme à 50 euros par mois. Il retient ce même chiffrage pour l'exploitation du sous sol. Cette base d'indemnisation sera retenue. Compte tenue de la part de responsabilité de la SARL Catauly dans la survenance du dommage, elle ne peut prétendre qu'à une indemnisation de 37,50 € par mois.

Les constatations de l'expert ont été faites le 17 décembre 2019.

Les consorts [M] produisent aux débats une lettre de la société Renard qui déclare être intervenu le 17 novembre 2020 et avoir fait une réparation de fuite d'étanchéité sur la terrasse. A supposer que les infitrations aient cessé à compter de cette date, cette intervention n'a pas mis un terme à l'humidité présente dans les murs.

Le droit à indemnisation du préjudice de jouissance portera sur la période allant du mois de juillet 2019 jusqu'au 31mars 2021 soit durant 21 mois.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné les consorts [M], à payer à la SARL Catauly à payer à la SARL Catauly la somme de 850 euros, en réparation du préjudice de jouissance et des préjudices économiques et commerciaux soufferts du fait des infiltrations, les consorts [M] seront condamnés au paiement d'une somme de 787,50 €.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Dit recevable l'appel incident formé par la société Catauly ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- invalidé le congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly par Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M],

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M] de leurs demandes tendant à l'expulsion de la SARL Catauly des locaux loués en vertu du bail commercial du 29 août 2000,

- dit que Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], sont tenus de payer à la SARL Catauly l'indemnité d'éviction, qui sera fixée selon les dispositions de l'article L.145-14 du code de commerce,

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande de paiement de la somme de 28 803,45 euros, formée au titre d'un arriéré de loyer sur l'occupation de la cave,

- débouté Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], de leur demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la SARL Catauly de faire procéder à la pose d'un store sur la devanture de la boutique,

- enjoint la SARL Catauly de faire procéder aux travaux de dépose du climatiseur fixé au mur donnant sur la cour extérieure ainsi qu'à la remise en état des murs,

- autorisé la SARL Catauly à faire réaliser les travaux réparatoires des désordres affectant la boutique sise au rez de chaussée,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly la somme de 8 247,22 euros, à titre d'avance sur la réalisation de ces travaux,

- enjoint à Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], d'effectuer auprès de la copropriété les démarches nécessaires pour effectuer les travaux réparatoires préconisés par l'expert pour remédier aux désordres en sous sol,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly à payer à la SARL Catauly la somme de 850 euros, en réparation du préjudice de jouissance et des préjudices économiques et commerciaux soufferts du fait des infiltrations,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], à payer à la SARL Catauly la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], en leur qualité d'héritiers indivisaires de Monsieur [X] [M], aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise réalisée en exécution de l'ordonnance de référé du 21 août 2019,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire.

Statuant à nouveau :

Valide le congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction délivré le 29 septembre 2020 à la SARL Catauly par Madame [S] [M], Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M] ;

Déboute la SARL Catauly de sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction ;

Ordonne à la SARL Catauly de laisser les lieux libres de toute occupation de son chef et de tous biens lui appartenant dans le délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt ; et à défaut ordonne l'expulsion de la SARL Catauly, ainsi que celle de toutes personnes et de tous biens se trouvant dans les lieux de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et un serrurier, en tant que de besoin, ordonne le transport et la séquestration des meubles et objets garnissant les lieux loués de son même chef, le tout dans le mois de la décision à intervenir,

Dit n'y avoir lieu à assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte ;

Ordonne à la SARL Catauly de faire procéder à la pose d'un store en façade par un professionnel du secteur ;

Dit n'y avoir lieu à assortir cette disposition d'une astreinte ;

Déboute les consorts [M] de leur demande tendant à faire procéder à l'enlèvement du climatiseur ;

Constate que la demande subsidiaire des consorts [M] tendant au paiement d'une somme de 28 803,45 € au titre de l'occupation de la cave est sans objet ;

Déboute la SARL Catauly de sa demande tendant à voir enjoindre aux consorts [M] d'effectuer auprès de la copropriété les démarches nécessaires pour effectuer les travaux réparatoires préconisés par l'expert pour remédier aux désordres en sous sol. La société Catauly sera déboutée de ce chef de demande.

Déboute la SARL Catauly de sa demande en paiement d' une somme de 8 247,22 euros au titre des travaux réparatoires ;

Déboute la SARL Catauly de sa demande en paiement d'une somme de 1 140,82 euros ;

Condamne les consorts [M] à payer à la société Catauly la somme de 787,50 € et la déboute du surplus de sa demande indemnitaire ;

Y ajoutant ;

Condamne la SARL Catauly aux dépens de première instance et d'appel, à l'exception des frais d'expertise qui seront supportés à hauteur d'un quart par la SARL Catauly et de trois quarts par les consorts [M] ;

Déboute la SARL Catauly de sa demande au titre des frais irrepétibles ;

Condamne la SARL Catauly à payer au consorts [M] la somme de 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

La greffière, La présidente,