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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 8 novembre 2023, n° 22/00296

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sidobre Optic (SARL), ST CYP Optic (SARL), Optic Abaret (SARL)

Défendeur :

Opticeo France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Salmeron

Conseillers :

Mme Martin de La Moutte, Mme Norguet

Avocats :

Me Dessart, Me Benoit-Daief

T. com. Toulouse, du 13 déc. 2021, n° 20…

13 décembre 2021

Faits et procédure :

Les 30 novembre 2006 et 28 novembre 2016, [G] [C] a crée les Sarlu Sidobre Optic et Optic Abaret, dont il était le gérant, aux fins d'exploitation de magasins d'optique à [Localité 10] et [Localité 8] sous l'enseigne Atol.

[Z] [Y], président de la SAS Opticeo France, exploite par l'intermédiaire d'une filiale, la SASU Qs.t, dix établissements sous l'enseigne Opticeo dont un local commercial [Adresse 9] à [Localité 10].

Le 23 janvier 2017, la société Qs.t a donné congé à son bailleur, libérant le local commercial situé [Adresse 9].

Le 1er juin 2017, [G] [C] a signé pour les sociétés Optic Abaret et Sidobre Optic un document d'information précontractuelle destiné aux candidats concessionnaires de la marque Opticéo. Le 19 juin 2017, il a signé un document identique pour la Sarlu St Cyp Optic, en cours de formation.

Le 21 juin 2017, les Sarlu Optic Abaret et Sidobre Optic ont signé deux demandes d'adhésion à la concession de la marque Opticeo, d’une durée de 3 an renouvelable, avec prise d'effet au 1er janvier 2019.

Le 7 juillet 2017, la Sarlu St Cyp Optic a été créée par [G] [C] pour exploiter le local situé [Adresse 9] à [Localité 10]. Elle a signé également une demande d'adhésion à la concession. Le contrat de concession de licence de marque a prévu là aussi une prise d'effet au 1er septembre 2017 pour une durée de 3 an renouvelable.

Le même jour, la SAS Opticeo France a donné son accord aux trois demandes d'adhésion en signant les contrats d'adhésion à la concession, le fonds de commerce du local [Adresse 9] étant mis à disposition gratuitement.

La Sarlu ST Cyp Optic était immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juillet 2017.

Les Sarlu Optic Abaret et Sidobre Optic, du fait de leur ancienne adhésion à la coopérative Atol, étaient liées par une clause de non-affiliation d'une durée d'une année courant jusqu'au 31 décembre 2018. Du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018, une convention d'assistance et de prestations de services a été conclue entre la SAS Opticéo France et les deux Sarlu.

Par deux lettres recommandées avec accusés de réception du 28 juin 2018, [G] [C] a manifesté son souhait de ne plus devenir concessionnaire de la licence de marque Opticeo pour les magasins exploités par les Sarlu Optic Abaret et Sidobre Optic ainsi que son souhait de mettre un terme à la convention d'assistance et de prestations de services.

Le 17 juillet 2018, la SAS Opticeo France a refusé la rupture de ces trois contrats.

Le 30 septembre 2018, [G] [C] a procédé à la dissolution anticipée de la Sarlu St Cyp Optic entraînant sa liquidation amiable au 10 décembre 2018.

Par acte d'huissier de justice en date du 2 octobre 2018, [G] [C] à titre personnel et en qualité de gérant des Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Opic a assigné la SAS Opticéo France devant le Tribunal de Grande Instance de Toulouse aux fins de voir prononcer la nullité des contrats de licence pour vice du consentement et de voir la SAS Opticéo condamnée au paiement de dommages et intérêts pour les divers préjudices ainsi subis.

Le 10 mai 2019, le Tribunal de Commerce de Castres a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sarlu Sidobre Optic, convertie le 6 mars 2020 en liquidation judiciaire. Le 2 juillet 2019, la SAS Opticéo a fait une déclaration de créance de factures impayées de 157 556,36 euros au passif de la liquidation pour laquelle le juge commissaire a renvoyé à l'examen du juge du fond compte tenu du litige en cours.

Par ordonnance du 11 juillet 2019, le Tribunal de Grande Instance de Toulouse, saisi sur assignation, s'est déclaré incompétent et a renvoyé au Tribunal de commerce de Toulouse pour connaître du litige.

Le 17 décembre 2019, par acte d'huissier signifié à personne la SAS Opticeo France a appelé Maître [T], en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarlu Sidobre Optic en la cause.

Le 13 décembre 2021, le Tribunal de commerce de Toulouse, a :

joint les procédures initiale et en intervention forcée du mandataire liquidateur,

dit que la Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C] était recevable en ses demandes,

débouté [G] [C], la Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C], la Sarlu Optic Abaret, et Me [T], es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarlu Sidobre Optic, de leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité pour dol des contrats d'adhésion à la concession de marque et des conventions d'assistance conclus avec la SAS Opticeo,

déclaré la nullité du contrat de concession de marque de la Sarlu St Cyp Optic avec la SAS Opticeo pour absence de capacité à contracter,

débouté la SAS Opticeo de sa demande subsidiaire à l'encontre de [G] [C] de condamnation à assumer les obligations résultantes du contrat de concession signé par la Sarlu St Cyp Optic avec la SAS Opticeo,

condamné la SAS Opticeo à régler la somme de 2 263,61 euros à la Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C] assortie des intérêts au taux légal a compter du 2 octobre 2018,

débouté la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 1 296,12 euros et la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 3 603,28 euros,

débouté les Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C], Optic Abaret, Me [T] es qualité de liquidateur, judiciaire de Sidobre Optic et [G] [C] de leurs demandes d'indemnités au titre du préjudice moral et du préjudice financier,

condamné la Sarlu Optic Abaret à verser la somme de 12 001 euros à la SAS Opticeo assortie des intérêts au taux légal a compter du 17 décembre 2019 et débouté la SAS Opticeo du surplus de sa demande,

constaté et 'xé la créance de la SAS Opticeo au passif de la Sarlu Sidobre Optic à la somme de 12 001 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019,

débouté la SAS Opticeo de ses demandes a titre de dommage et intérêts,

dit que chacune des parties supporterait la charge des frais irrépétibles engagés du fait de la procédure,

ordonné l'exécution provisoire,

dit que les dépens seraient supportés pour moitié d'une part solidairement en proportion d'un quart par les parties demanderesses et d'autre part par la SAS Opticeo. La quote-part de Sidobre Optic étant passée en frais privilégiés de la procédure collective dont elle est l'objet.

Par déclaration en date du 14 janvier 2022, la Sarlu St Cyp Optic, Me [T], en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarlu Sidobre Optic, la Sarlu Optic Abaret et [G] [C] ont relevé appel du jugement du Tribunal de commerce aux fins d'en voir réformés les chefs de dispositif ayant débouté [G] [C], les Sarlu, St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C], Optic Abaret et Me [T], es qualités, de leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité pour dol des contrats d'adhésion à la concession de marque et des conventions d'assistance conclus avec la SAS Opticeo, débouté la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 1 296,12 euros et la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 3 603,28 euros, débouté les Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C], Optic Abaret, Me [T], es qualités, et [G] [C] de leurs demandes d'indemnité au titre du préjudice moral et du préjudice financier, condamné la Sarlu Optic Abaret à verser la somme de 12 001 euros à la SAS Opticeo assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019, constaté et fixé la créance de la SAS Opticeo au passif de la Sarlu Sidobre Optic à la somme de 12 001 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019, dit que chacune des parties supporterait la charge des frais irrépétibles engagés du fait de la présente procédure, dit que les dépens seront supporté pour moitié d'une part solidairement en proportion d'un quart par les parties demanderesses et d'autre part par Opticeo, la quote-part de Sidobre optic étant passée en frais privilégiés de sa procédure collective.

Par voie de conclusions, la SAS Opticéo a fait appel incident de l'ensemble des autres chefs de dispositif ainsi que de la diminution de l'indemnisation de son préjudice issu de la rupture unilatérale des contrats à un euro pour chaque société.

La clôture est intervenue le 29 mai 2023.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les dernières conclusions notifiées le 26 juillet 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, [G] [C], la Sarlu St Cyp Optic, Me [T], es qualités, la Sarlu Sidobre Optic et la Sarlu Optic Abaret demandent, au visa des articles 1101 à 1104, 1128, 1137, 1139, 1240, 1842 du Code civil, L210-6, L237-2, L441-9 du Code de commerce et 114, 115, 648 et 700 du code de procédure civile :

la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :

joint les instances enrôlées sous les n°2019J00685 et n°2019J00913 et rendu un seul et même jugement,

dit la Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C] recevable en ses demandes,

déclaré la nullité du contrat de concession de marque de la Sarlu St Cyp Optic avec la SAS Opticeo pour absence de capacité à contracter,

débouté la SAS Opticeo de sa demande subsidiaire à l'encontre de [G] [C] de condamnation à assumer les obligations résultantes du contrat de concession signé par la Sarlu St Cyp Optic avec la SAS Opticeo,

condamné la SAS Opticeo à régler la somme de 2 263,61 euros à la Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C] assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2018,

l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :

débouté [G] [C], les Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable [G] [C], Optic Abaret et Me [T], en qualité de liquidateur judiciaire de Sidobre Optic de leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité pour dol des contrats d'adhésion à la concession de marque et des conventions d'assistance conclus avec la SAS Opticeo,

débouté la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 1 296,12 euros et la Sarlu Optic Abaret de sa demande de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 3 603,28 euros,

débouté les Sarlu St Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable, [G] [C], Optic Abaret, Me [T] en qualité de liquidateur judiciaire de Sidobre Optic et [G] [C] de leurs demandes d'indemnités au titre du préjudice moral et du préjudice financier,

condamné la Sarlu Optic Abaret à verser la somme de 12 001 euros à la SAS Opticeo assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019,

constaté et fixé la créance de la SAS Opticeo au passif de la Sarlu Sidobre Optic à la somme de 12 001 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019,

dit que chacune des parties supporterait la charge des frais irrépétibles engagés du fait de la présente procédure,

dit que les dépens seront supportés pour moitié d'une part solidairement en proportion d'un quart par les parties demanderesses et d'autre part par Opticeo. La quote-part de Sidobre Optic étant passée en frais privilégiés de la procédure collective dont elle est l'objet.

et statuant à nouveau, la reconnaissance que la SAS Opticeo France s'est livrée à des manœuvres dolosives par l'intermédiaire de son dirigeant Monsieur [Y] ayant vicié le consentement des Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Optic lors de la conclusion des contrats d'adhésion à la concession et des conventions d'assistance,

le prononcé de la nullité des contrats d'adhésion à la concession de licence de marque Opticeo conclus par les Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Optic, ainsi que des conventions d'assistance conclues par les Sarlu Optic Abaret et Sidobre Optic,

la condamnation de la SAS Opticeo France à restituer la somme de 1 296,12 euros à Me [T], es qualités, et la somme de 3 603,28 euros à la Sarlu Optic Abaret,

la condamnation de la SAS Opticeo France à verser la somme de 24 235,75 euros à [G] [C] en qualité de liquidateur amiable de la Sarlu St Cyp Optic, la somme de 8 200,43 euros à la Sarlu Optic Abaret, la somme de 6 336,65 euros à Me [T] es qualités et la somme de 69 201,18 euros à [G] [C] en réparation du préjudice financier subi par chacun d'entre eux,

la condamnation de la SAS Opticeo France à verser la somme de 10 000 euros à la Sarlu Optic Abaret, à [G] [C] en qualité de liquidateur amiable de la Sarlu St Cyp Optic et à Me [T] es qualités ainsi que la somme de 20 000 euros à [G] [C] en réparation du préjudice moral subi par chacun,

à titre subsidiaire, la reconnaissance que la SAS Opticeo France a fait preuve de mauvaise foi dans la formation et dans l'exécution des contrats signés par les Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Optic,

le rejet de l'ensemble des demandes de la SAS Opticeo,

la condamnation de la SAS Opticeo France à garantir les Sarlu Cyp Optic prise en la personne de son liquidateur amiable, Optic Abaret, Sidobre Optic prise en la personne de son liquidateur judiciaire et [G] [C] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au profit de la SAS Opticeo France.

en toute hypothèse, la condamnation de la SAS Opticeo France à payer à chacune des Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Optic ainsi qu'à [G] [C], la somme de 6. 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamnation de la SAS Opticeo France aux entiers dépens en ce compris ceux de première instance.

Vu les dernières conclusions notifiées le 9 juin 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, la SAS Opticeo France sollicite, au visa des articles 31, 32 et 117 du code de procédure civile :

la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :

rejeté purement et simplement les demandes formulées par la Sarlu St Cyp Optic ainsi que les Sarlu Sidobre Optic et Optic Abaret pour être parfaitement infondées,

jugé plus particulièrement que le dol n'est pas prouvé et qu'aucune manœuvre visant à tromper [G] [C] sur l'intérêt économique de souscrire les contrats litigieux n'est avérée,

condamné la Sarlu Optic Abaret à verser la somme de 12 000 euros à la SAS Opticeo assortie des intérêts à taux légal à compter du 17 décembre 2019,

condamné et fixer la créance de la SAS Opticeo au passif de la Sarlu Sidobre Optic à la somme de 12 000 euros assortie des intérêts à taux légal à compter du 17 décembre 2019,

l'infirmation du surplus et rejugeant, sur l'irrecevabilité, qu'il soit reconnu que l'assignation en justice signifiée à la demande de la Sarlu St Cyp Optic est nulle et de nul effet dans la mesure où l'action a été engagée alors même que la société était en dissolution, qu'elle ne faisait pas mention de l'état de liquidation de la société et que l'action a été introduite au nom et pour le compte de la Sarlu St Cyp Optic par son « gérant », alors même que celui-ci n'avait plus vocation à la représenter la société, que cette irrégularité de fond est insusceptible de régularisation a posteriori,

qu'il soit donc constaté que les demandes formulées au nom et pour le compte de la Sarlu St Cyp Optic par son ancien gérant seront déclarées irrecevables pour défaut d'intérêt à agir ainsi que les demandes de la Sarlu St Cyp Optic irrecevables,

sur les demandes initiales des demandeurs, qu'il soit reconnu qu'aucune nullité n'est encourue pour défaut de capacité à contracter de la Sarlu St Cyp Optic,

que les demandes formulée par les Sarlu St Cyp Optic, Optic Abaret et Sidobre Optic soient rejetées soit les demandes de restitution des sommes versées au titre des contrats, les demandes de condamnation au titre de l'indemnisation des préjudices moraux et financiers subis par les sociétés demanderesses,

que [G] [C] soit reconnu irrecevable et infondé à solliciter d'être indemnisé personnellement, faute de preuve de l'existence d'un quelconque préjudice personnel et qu'en conséquence ses demandes d'indemnisation soient rejetées,

sur les demandes reconventionnelles, la condamnation de la Sarlu St Cyp Optic au paiement des sommes de :

- 12 000 euros au titre de la redevance initiale forfaitaire,

- 21 000 euros reste due au titre de la Redevance Annuelle à la Marque,

- 7 980 euros et 71,50 euros au titre du système informatique,

- 14,47 euros au titre de la redevance annuelle à la Promotion des ventes,

- 558,50 euros au titre du matériel,

- 132 euros au titre d'indemnités et pénalités de retard,

- 12 736 euros au titre de l'utilisation frauduleuse de la marque,

- 100 000 euros à titre de dommages et intérêts.

La reconnaissance que cette créance devra être inscrite dans les comptes de la liquidation amiable ou au passif d'une éventuelle procédure de liquidation judiciaire de la Sarlu St Cyp Optic, et qu'à défaut d'inscription de ladite créance, et en cas de clôture des opérations de liquidation, [G] [C] soit condamné personnellement en sa qualité de liquidateur amiable de la Sarlu St Cyp Optic à payer à la SAS Opticeo France la même somme,

subsidiairement, si la cour venait à considérer que le contrat de concession conclu entre la SAS Opticeo France et la Sarlu St Cyp Optic était nul pour défaut de capacité à contracter, que [G] [C] soit condamné personnellement à assumer les conséquences de l'acte litigieux,

la condamnation de la Sarlu Optic Abaret à payer et fixer au passif de la Sarlu Sidobre Optic les sommes suivantes, en sus de la somme de 12 000 euros due et confirmée au titre de la redevance initiale forfaitaire :

- 21 600 euros reste due au titre de la Redevance Annuelle à la Marque,

- 18 144 euros au titre du système informatique,

- 4 320 euros au titre des formations,

- 100 000 euros à titre de dommages et intérêts.

en tout état de cause, la condamnation de [G] [C], la Sarlu Optic Abaret, la Sarlu Sidobre Optic et la Sarlu St Cyp Optic à payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

la condamnation de [G] [C], la Sarlu Optic Abaret, la Sarlu Sidobre Optic et la Sarlu St Cyp Optic aux entiers dépens, la reconnaissance que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Benhamou pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

MOTIFS

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

La cour constate que les chefs de dispositif du jugement entrepris ayant joint les instances enrôlées sous les n°2019J00685 et n°2019J00913 et rendu un seul et même jugement n'est pas remis en cause par l'appel principal, ni par l'appel incident.

La jonction des deux dossiers, procédure initiale et intervention forcée du mandataire liquidateur, est donc définitive. La cour est saisie pour l'ensemble des parties désignées.

Sur la capacité de la Sarlu St Cyp Optic

- quant à l'assignation délivrée en son nom le 2 octobre 2018 :

Il est de jurisprudence constante que la personnalité morale d'une société dissoute subsiste aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés, lesquels doivent cependant préexister à la dissolution pour pouvoir être invoqués par ou contre la société liquidée.

La Sarlu St Cyp Optic formule des prétentions en lien avec les contrats conclus le 7 juillet 2017, soit antérieurement à sa dissolution amiable intervenue par assemblée générale extraordinaire du 30 septembre 2018.

Le contentieux en cours sur lesdits contrats établit que les les droits et obligations à caractère social de la Sarlu St Cup Optic ne sont pas liquidés et partant que celle-ci est recevable à ester en justice en demande ou en défense relativement à ceux-ci.

Les appelantes produisent des pièces établissant l'absence de clôture à ce jour de la liquidation de la Sarlu St Cyp Optic, ce que la SAS Opticéo ne conteste pas. Dès lors, [G] [C] était bien en capacité de la représenter en justice en tant que liquidateur amiable lors de la délivrance de l'assignation.

L'intimée soutient ensuite que l'assignation initiale délivrée le 2 octobre 2018 au nom de la Sarlu St Cyp Optic devait, à peine de nullité non susceptible de régularisation, porter mention de ce qu'elle était une société en dissolution et indiquer le nom du liquidateur désigné.

L'appelante soutient, elle, qu'il ne s'agit que d'un vice de forme régularisable, ce qu'elle a fait dans son premier jeu de conclusions responsives notifié à l'intimée.

Aux termes des articles 114 et 115 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

En application des articles L 237-1 et R237-1 du code de commerce, la dénomination sociale d'une société en liquidation doit être suivie de la mention « société en liquidation » ainsi que du nom du ou des liquidateurs. Ces mentions doivent figurer sur tous les actes et documents émanant de la société, émis à destination des tiers.

En l'espèce, l'assignation initiale délivrée le 2 octobre 2018 à la SAS Opticéo, ne comprend aucune de ces mentions s'agissant de la Sarlu St Cyp Optic. En revanche, les conclusions en demande échangées en vue de l'audience devant le Tribunal de commerce précisent dans leur en-tête que la Sarlu St Cyp Optic est une société « en liquidation amiable » et qu'elle est prise en la personne de « son liquidateur amiable, Monsieur [G] [C] ».

Il y a donc bien eu régularisation en cours de procédure par les appelantes et cette régularisation ne laisse subsister aucun grief pour la SAS Opticéo.

Dès lors, la nullité pour vice de forme est bien couverte et le jugement de première instance sera confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a déclaré recevables les demandes formulées par la Sarlu St Cyp Optic.

- quant à la conclusion du contrat d'adhésion à la concession du 7 juillet 2017 :

Selon les articles 1842 et 1843 du code civil et l'article L210-6 du code de commerce, les sociétés jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation. Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant l'immatriculation sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société.

Les appelantes soutiennent que la Sarlu St Cyp Optic, non encore immatriculée, n'avait pas la capacité de s'engager au moment de la signature du contrat de concession et que celui-ci ne mentionne pas que [G] [C] a signé les contrats en son nom et pour son compte. Dès lors, le contrat est vicié d'une nullité absolue qui ne peut être couverte par des actes d'exécution postérieurs.

L'intimée affirme que le contrat a bien été signé par [G] [C] pour le compte de la Sarlu St Cyp Optic en cours de formation et non par la société directement, que les mentions querellées sont de simples maladresses d'écriture et que l'acte n'est pas nul pour défaut de capacité. Elle affirme que les actes d'exécution postérieurs accomplis par la Sarlu St Cyp Optic démontrent bien qu'elle a entendu reprendre le contrat une fois immatriculée.

Il ressort des pièces du dossier que la Sarlu St Cyp Optic a été créée pour gérer le magasin de la [Adresse 9] à [Localité 10]. Ses statuts ont été signés le 17 juillet 2017. Elle a été immatriculée le 19 juillet 2017.

Le contrat d'adhésion à la concession la concernant a été signé le 7 juillet 2017 avant sa constitution et son immatriculation, avec prise d'effet au 1er août 2017. La cour constate que le contrat de concession a été signé avant même que les statuts de la Sarlu St Cyp Optic ne le soient.

Les parties produisent en pièces 6 et 7 le même ensemble de documents matérialisant l'engagement de celle-ci dans le réseau Opticéo et comprenant un document d'information précontractuelle, un contrat de concession de licence de marque et une demande d'adhésion à la concession de marque Opticéo.

Pour la Sarlu St Cyp Optic, dans le contrat, et dans le paragraphe sur la désignation des parties, il est mentionné : « ET la société ST CYP OPTIC, [..], En cours d'immatriculation au Registre du commerce et des Sociétés de Toulouse, représentée par Monsieur [G] [C], ayant tous pouvoirs à l'effet des présentes » ainsi que, plus loin, « ET la société ST CYP OPTIC, [..], En cours d'immatriculation au Registre du commerce et des Sociétés de Toulouse, représentée par Monsieur [G] [C], ayant tous pouvoirs à l'effet des présentes ».

Les deux autres documents cités présentent des mentions similaires.

Il est de jurisprudence constante que les mentions figurant dans un acte passé par une société en formation doivent indiquer scrupuleusement que la société n'est pas le cocontractant et que l'acte est passé par une personne physique agissant au nom et pour le compte de la société en formation.

Dès lors, les mentions selon lesquelles l'acte a été passé par une société en cours d'immatriculation, par le biais de son gérant, sont insuffisantes à établir que l'acte est bien passé non par la société elle-même, dépourvue de toute personnalité juridique, mais par l'un de ses fondateurs, agissant au nom et pour le compte de la société alors en formation.

Au vu des mentions relevées, le contrat de concession signé le 7 juillet 2017 est affecté d'une nullité absolue pour défaut de capacité juridique de sa signataire et ne pouvait faire l'objet d'une reprise après immatriculation.

Le jugement de premier instance sera confirmé en ce qu'il a jugé que le contrat de concession du 7 juillet 2017 était nul pour défaut de capacité à contracter de la Sarlu St Cyp Optic et qu'il a débouté la SAS Opticéo de ses demandes de dommages et intérêts pour rupture abusive de ce contrat.

Sur la responsabilité personnelle et solidaire de [G] [C] du fait des actes signés par la Sarlu St Cyr Optic, société en formation

Les mentions de l'acte étant insuffisantes à établir que [G] [C] agissait bien au nom et pour le compte de la Sarlu St Cyp Optic, les dispositions de l'article L210-6 du code de commerce ne sont pas plus applicables.

Le jugement de premier instance sera confirmé en ce qu'il a débouté la SAS Opticéo de sa demande subsidiaire visant à reconnaître [G] [C] tenu des engagements en lieu et place de la Sarlu St Cyp Optic.

Sur les conséquences de la nullité du contrat conclu par la Sarlu St Cyp Optic et les demandes reconventionnelles de la SAS Opticéo à son encontre

Aux termes de l'article 1178 du code civil, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord. Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé. Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

La nullité du contrat d'adhésion à la concession conclu par la Sarl St Cyp Optic entraîne la remise des parties dans leur état initial.

Cela implique pour la SAS Opticéo le remboursement des sommes versées à ce titre par la Sarl St Cyp Optic que celle-ci établit, par la production des factures afférentes en pièces 25 à 27, à la somme de 2 263,61 euros, ce que l'intimée ne conteste pas. La Sarlu St Cyp Optic demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a assorti cette somme des intérêts au taux légal à compter de l'assignation initiale.

La SAS Opticéo ne formule aucune prétention découlant de la reconnaissance de la nullité dudit contrat, notamment quant à le restitution de son matériel, et n'émet aucune observation sur l'adjonction d'intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2018.

Elle formule en revanche des demandes reconventionnelles, de paiement des redevances et frais dus, en cas de reconnaissance du caractère valide de ce contrat, lesquelles ne pourront dès lors qu'être rejetées.

Ainsi, ses demandes de paiement des sommes de 12 000 euros au titre de la redevance initiale forfaitaire, 21 000 euros au titre de la redevance annuelle à la marque, de 7 980 euros et 71,50 euros au titre du système informatique, de 14,47 euros au titre de la redevance annuelle à la promotion des ventes, de 558,50 euros au titre du matériel, de 132 euros au titre d'indemnités et pénalités de retard et de 12 736 euros au titre de l'utilisation frauduleuse de la marque, sont rejetées en ce qui concerne la Sarlu St Cyp Optic.

De même, la demande de la SAS Opticéo d'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 100 000 euros par la Sarlu St Cyp Optic du fait de la non exécution des obligations contractuelles découlant du contrat annulé ne peut être accueillie, le préjudice d'image et moral invoqué étant par ailleurs non établi et non justifié.

De même, les demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et préjudice moral formulées par la St Cyp Optic fondées sur l'éventuelle annulation du contrat d'adhésion à la concession sur le fondement du dol sont rejetées du fait de la reconnaissance de la nullité du contrat pour défaut de capacité à agir.

Le jugement de première instance est donc confirmé en ce qu'il a condamné la SAS Opticéo à verser à la Sarl Sy Cyp Optic, prise en la personne de son liquidateur amiable, [G] [C], la somme de 2 263,61 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation soit du 2 octobre 2018, qu'il a débouté la SAS Opticéo de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la Sarlu St Cyp Optic et débouté la Sarlu St Cyp Optic de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et préjudice moral.

Il est constaté que quoique le jugement du Tribunal de commerce ait bien conclu dans sa motivation au rejet des demandes de paiement des divers frais et redevances formulées par la SAS Opticéo à l'encontre de la Sarlu St Cyp Optic, son dispositif n'en fait pas mention. La cour prononcera donc le rejet de ces demandes de l'intimée.

Sur la nullité des contrats d'adhésion à la concession de marque et des conventions d'assistance conclus par les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic

Aux termes des articles 6 et 9 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder. Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Selon les articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Selon l'article 1137 du code civil, dans sa version applicable aux contrats en cause, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Aux termes de l'article L330-3 du code de commerce, dans sa version applicable aux contrats en cause, toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause. Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. Lorsque le versement d'une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d'une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit. Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours au minimum avant la signature du contrat ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l'alinéa précédent.

L'article R330-1 du code de commerce détaille les informations devant être contenues dans le document d'information précontractuelle et qui sont de quatre ordres, celles relatives au franchiseur, celles relatives au marché général et local, celles relatives au réseau et celles relatives au contrat.

L'engagement dans un contrat de licence de marque suppose une information claire et sincère du concessionnaire par le concédant.

C'est à celui qui excipe d'un manquement à cette obligation spécifique d'information comme du dol ayant vicié son consentement qu'il revient de les prouver.

En l'espèce, la Sarl Optic Abaret et la Sarl Sidobre Optic affirment que la SAS Opticéo leur a communiqué sciemment des chiffres mensongers sur la rentabilité du commerce situé [Adresse 9], dans le but de vicier leur consentement et de les déterminer à signer l'ensemble des trois contrats d'adhésion à la concession et des deux conventions d'assistance. Ce faisant, la SAS Opticéo n'a pas respecté son obligation de leur fournir des informations sincères leur permettant de s'engager dans les contrats de concession en toute connaissance de cause.

En réplique, la SAS Opticéo indique que les chiffres qui leur ont été communiqués ne l'étaient qu'à titre indicatif, sans garantie qu'ils puissent être atteints au cours de leur propre exploitation, ce d'autant que la Sarlu St Cyp Optic qui devait le reprendre débutait une toute nouvelle activité. L'intimée affirme avoir respecté son obligation de fournir un document informatif préalable et produit à ce titre les documents joints aux contrats en cause en pièces 7 à 11.

La cour constate que pour les contrats de concession signés par les trois entités le 7 juillet 2017, une exclusivité est prévue à l'article 2.1. Ces contrats relèvent donc bien des dispositions de l'article L330-3 du code de commerce.

Chacun d'entre eux comprend un « document d'information précontractuelle » faisant explicitement référence à l'obligation d'information précontractuelle du cocontractant prévue à l'article L330-3 du code de commerce. L'examen de ces documents, de 9 pages chacun, met en évidence que les informations prévues par le texte ont été fournies notamment quant à la santé de la Sas Opticéo, et notamment ses deux derniers bilans comptables, l'état général du marché d'optique sur le territoire national, ainsi ainsi que des données indicatives sur le chiffre d'affaires mensuel moyen réalisé par les 10 premiers membres du réseau Opticéo outre le détails des divers frais et redevances.

Les articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce n'imposent pas au franchiseur la fourniture d'une étude du marché local ou des chiffres prévisionnels de l'une de ses enseignes spécifiques. La SAS Opticéo a donc respecté les obligations imposées par les articles L330-3 et R330-1 du code de commerce.

Cependant, il est de jurisprudence constante que le franchiseur qui procède de son plein gré à la communication des comptes prévisionnels d'un magasin franchisé spécifique est astreint à fournir au candidat franchisé des comptes présentant un caractère sérieux, sincère et loyal.

C'est au franchisé qui s'en plaint de rapporter la preuve que les chiffres transmis n'étaient pas sérieux, sincères et loyaux.

Les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic affirment que c'est la communication des informations relatives à la rentabilité du fonds de commerce situé au [Adresse 5], transmises par la SAS Opticéo dans son mail du 30 mai 2017, qui constitue les mensonges les ayant déterminées à conclure l'ensemble des contrats et ayant donc vicié leur consentement.

Au soutien de leurs dires, elles produisent la pièce 3 matérialisant la transmission par la SAS Opticéo du chiffre d'affaires réalisé par le magasin de la [Adresse 9] pour les années 2014, 2015 et 2016 et d'une évaluation des charges annuelles à 34 000 euros.

L'examen de cette pièce permet de constater qu'il ne s'agit pas de la communication de comptes prévisionnels au sens strict. Ne figure dans le corps du mail qu'un unique tableau listant les chiffres d'affaires mensuels et annuels du magasin ainsi que la mention d'un montant approximatif de charges annuelles évalué à 34 000 euros correspondant au solde de la balance générale des charges du magasin pour les années 2015 et 2016 transmis en pièce jointe et figurant dans le constat d'huissier produit par les appelantes en pièce 21.

Sur cette base, [G] [C] a fait réaliser de son propre chef une étude prévisionnelle de la rentabilité du magasin de la [Adresse 9] par le cabinet comptable Gexco Fid'oc, produite en pièce 18, lequel a avancé des chiffres d'affaires potentiels de 140 000 euros, puis 150 000 et 160 000 pour les trois premières années d'exercice.

Les appelantes soutiennent le caractère non sérieux et sincères des chiffres transmis par la SAS Opticéo en produisant dans le même constat d'huissier des liasses de reconstitution du chiffre d'affaires réalisé par le magasin de la [Adresse 9] sur les années concernées par addition des facturations mémorisées dans le logiciel informatique acquis avec la concession.

Les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic en concluent que les chiffres fournis par la SAS Opticéo sont mensongers en ce que la Sarlu St Cyp Optic n'a pu atteindre qu'un chiffre d'affaires de 56 598 euros sur 15 mois d'exploitation comme en atteste la production de sa liasse fiscale pièce 54 alors que le chiffre d'affaires annuel le plus bas annoncé se montait à 97 753 euros.

Cependant, si l'obligation d'information précontractuelle est absolue et bénéficie à tout franchisé quelles que soient ses compétences, l'appréciation du vice du consentement résultant d'un défaut d'information ou d'une mauvaise information procède d'une appréciation in concreto, tenant notamment compte des compétences particulières du franchisé.

Il est établi qu'à l'époque de la conclusion des contrats, [G] [C] gérait deux magasins d'optique, dont l'un depuis plus de dix ans, sous une autre franchise, Atol. Il exerçait donc dans ce même secteur, dans la même zone géographique et dans le même cadre d'un contrat d'adhésion à une franchise. Il en ressort qu'il était à même de se faire une représentation réaliste du potentiel de l'activité dont la reprise lui était proposée, sur la base des chiffres communiqués par la SAS Opticéo et compte tenu de ses propres connaissances.

Si la rentabilité d'un commerce est un élément important dans le choix du repreneur de l'acquérir, l'erreur sur les possibilités de rentabilité ne peut emporter vice du consentement et nullité du contrat qu'à la condition que cet élément soit entré dans le champ contractuel liant les deux parties et notamment que le cocontractant à qui la manœuvre est reprochée ait su que cette information était déterminante du consentement pour son partenaire.

Les appelantes ne rapportent pas la preuve que la question de la rentabilité du magasin de la [Adresse 9], et plus encore de la possibilité pour [G] [C] d'atteindre voire de dépasser les chiffres d'affaires communiqués soit bien entrée dans le champ contractuel et que la SAS Opticéo ait bien su que ceux-ci étaient un élément déterminant de son choix de reprendre ce magasin et plus encore de faire passer les deux autres déjà possédés sous enseigne Opticéo.

Au contraire, les mails produits par les appelantes en pièces 1 et 2, échangés entre [Z] [Y] et [G] [C], entre le 6 avril et le 31 mai 2017, attestent que le projet de passer les deux premières Sarl de [G] [C] sous enseigne Opticéo était bien antérieur à la transmission des chiffres du magasin de la [Adresse 9] dont la reprise n'a d'ailleurs pas été immédiatement envisagée par celui-ci.

En l'absence de preuve rapportée dans le dossier d'une garantie faite à [G] [C] et aux Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic de pouvoir atteindre ou dépasser les chiffres d'affaires communiqués, la reprise du commerce de la [Adresse 9] a été accepté avec l'existence d'une incertitude quant à la possibilité pour une société débutante de pouvoir atteindre ce potentiel.

Tout chiffre d'affaire prévisible contient en lui-même une part d'aléa que doit intégrer celui qui se dit victime d'une manœuvre dolosive pour établir l'erreur sur les montants de chiffre d'affaire qu'il dénonce, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Le vice du consentement n'est dès lors pas établi par les appelantes et il n'y a pas lieu à annulation des contrats d'adhésion à la concession.

Le sort des conventions d'assistance étant pour les appelantes, lié au sort des contrats principaux d'adhésion à la concession, il n'y a pas non plus lieu à annulation de ceux-ci.

C'est à juste titre que le Tribunal de commerce a rejeté de ce même chef les demandes de restitution des sommes versées au titre de ces contrats formulées par les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic ainsi que les demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et préjudice moral découlant des tromperies alléguées, en ce compris le préjudice moral distinct avancé par [G] [C] en son nom personnel.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a débouté [G] [C], les Sarlu Sidobre Optic et Abaret Optic et Me [T], es qualités, de leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité pour dol des contrats d'adhésion à la concession de marque et des conventions d'assistance conclus avec la SAS Opticeo, de leurs demandes de restitution par la SAS Opticeo de la somme de 1 296,12 euros et de la somme de 3 603,28 euros, de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice financier et pour préjudice moral.

Sur les demandes reconventionnelles de la Sas Opticéo du fait de la rupture unilatérale des contrats par les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Selon l'article 1212 du code civil, lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme.

L'abus ne se réduit pas à la caractérisation d'une volonté de nuire du cocontractant mais doit être recherché dans les circonstances qui accompagnent le prononcé de la résiliation et qui révèlent un usage désinvolte ou excessif de cette prérogative.

En l'espèce, les contrats d'adhésion à la concession conclus le 7 juillet 2017 étaient des contrats à durée déterminée dont l'entrée en vigueur était fixée au 1er janvier 2019 et devant se poursuivre jusqu'au 31 août 2020.

Entre temps, ont été conclues le même jour les deux conventions d'assistance qui prévoyaient, de manière transitoire entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018 et dans l'attente de l'entrée en vigueur des contrats précités au 1er janvier 2019, des prestations d'assistance à la promotion et diverses prestations et formations informatiques fournies par la SAS Opticéo aux deux Sarl.

La rupture des contrats à l'initiative des Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic a été faite par courriers recommandés en date du 28 juin 2018, motivés ainsi : « je fais suite à [..] votre désintérêt à me voir rester au sein de votre enseigne. Passé un délai de réflexion de quelques jours, je vous confirme mon souhait de ne pas devenir concessionnaire de la licence de marque Opticéo ».

Il n'est aucunement rapporté la preuve par les appelantes du désintérêt supposé de l'intimée à leur maintien dans le réseau.

Si les contrats d'adhésion à la concession ne prévoyaient qu'une entrée en vigueur au 1er janvier 2019, ils ne prévoyaient aucunement la possibilité pour les candidats concessionnaires, une fois signés, de refuser de donner suite à leur entrée dans le réseau à la date contractuellement prévue.

Les appelantes mettent en avant le dol suspecté de la part d'Opticéo, et qu'elles auraient découvert uniquement à cette période par l'examen de la mémoire des logiciels informatiques, pour justifier leur décision de rupture unilatérale.

L'absence de caractérisation du dol en l'espèce ôte tout caractère légitime à la rupture des contrats ainsi opérée.

La faute des Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic dans l'exécution de leurs obligations contractuelles sera donc reconnue.

A titre de réparation des préjudices en découlant, la SAS Opticéo sollicite tout d'abord la condamnation des deux Sarl à lui payer 12 000 euros au titre des Redevances initiales forfaitaires dues à la signature des contrats d'adhésion à la concession.

Les appelantes contestent devoir cette redevance en raison des mentions exonératoires figurant dans les conventions d'assistance transitoires.

L'article 10 des contrats d'adhésion en cause prévoit qu'en contrepartie de l'exclusivité territoriale, le concessionnaire s'engage à verser au concédant, à la signature du contrat, un « droit d'entrée » soit une redevance initiale forfaitaire « payée d'avance » et « ne pouvant donner lieu à remboursement » en cas de rupture du contrat, d'un montant de 10 000 euros HT.

Les conventions d'assistance, elles, étaient bien en vigueur au moment de leur rupture abusive par les deux Sarl. Elles prévoyaient dans leurs article 3 et 4 relatifs aux redevances qu'il est contractuellement convenu entre les parties de ramener à 0%, pendant la période transitoire soit jusqu'au 31 décembre 2018, les redevances à la Marque ainsi qu'à 0 euro la Redevance Initiale forfaitaire prévue à l'article 10 des contrats d'adhésion.

L'article 5 immédiatement postérieur rappelle que le contenu de ces conventions est transitoire et s'applique du 1er janvier au 31 décembre 2018.

La combinaison des ces différents articles aboutit à ne rendre exigible la Redevance initiale forfaitaire de 10 000 euros prévue dans les deux contrats d'adhésion qu'au 1er janvier 2019, à leur entrée effective en vigueur.

Les contrats ayant été rompus avant que cette entrée en vigueur n'intervienne, cette redevance initiale n'est pas due par les deux Sarl.

Le jugement de première instance sera donc infirmé en ce qu'il a accueilli la demande de la SAS Opticéo de voir les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic condamnées à lui verser ces sommes découlant directement de la signature des contrats et due dès le 7 juillet 2017, ce avec intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019.

La SAS Opticéo met ensuite en avant, du fait de la rupture de leur relation contractuelle par les appelantes, une perte de chance de développer sa marque et de percevoir les redevances calculées sur les parties variables. Elle sollicite à ce titre le versement des sommes suivantes, calculées chacune sur 36 mois de poursuite des contrats jusqu'à leur terme et pour les deux sociétés, 21 600 euros au titre de la redevance annuelle à la marque, 18 144 euros au titre du système informatique, 4 320 euros au titre des formations, soit une somme totale de 44 064 euros.

Or la perte de chance de réaliser ces gains ne peut équivaloir à la totalité des sommes que la SAS Opticéo avait vocation à percevoir pendant toute la durée d'exécution du contrat à durée déterminée, dans la mesure où il n'existait aucune garantie pour l'intimée, même en cas de volonté des Sarl de poursuivre lesdits contrats, que ceux-ci se déroulent sans aucun obstacle jusqu'au 31 août 2020.

Dans la mesure où l'intimée ne justifie pas en quoi la rupture de ces contrats par les deux Sarl l'empêchait, entre le 28 juin 2018 et le 31 août 2020 de trouver un nouveau repreneur pour le magasin de la [Adresse 9] et de faire entrer deux nouveaux concessionnaires dans le réseau en lieu et place des appelantes, elle ne rapporte pas la preuve que sa perte de chance puisse équivaloir le montant maximal des sommes non perçues.

Du fait de la rupture des contrats d'adhésion avant même leur entrée en vigueur effective, la perte de chance de réaliser ces gains sera fixée à 20%.

Il sera donc alloué à la SAS Opticéo la somme de 8 812,80 euros à ce titre que les Sarl Optic Abaret et Sidobre Optic seront condamnées d'acquitter chacune par moitié, la somme incombant à la Sarl Sidobre Optic étant fixée au passif de sa procédure collective.

Enfin, la SAS Opticéo sollicite la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice « d'image certain, outre un préjudice moral important ».

Aucun de ces deux préjudices n'étant explicité ou justifié, cette demande sera rejetée.

Tout comme les demandes formulées en miroir par les appelantes de fixation d'un montant identique de dommages et intérêts en leur faveur en cas d'accueil de cette prétention.

L'absence de dol caractérisé à l'encontre de la SAS Opticéo ne permet pas d'accueillir la demande reconventionnelle des appelantes de relevé de garantie par l'intimée des condamnations financières mises à la charge des deux Sarl. Leur demande sera donc rejetée.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formulées par la SAS Opticéo.

Il sera infirmé sur la condamnation des appelantes à verser à la SAS Opticéo 12 000 euros au titre des redevances initiales, lesquelles seront condamnées, avec fixation au passif de sa procédure collective pour la Sarl Sidobre Optic, à verser chacun 4 406,40 euros à la SAS Opticéo au titre de sa perte de chance.

Sur les frais irrépétibles,

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a dit que les dépens de première instance seraient supportés pour moitié d'une part solidairement en proportion d'un quart par les parties demanderesses et d'autre part par la SAS Opticeo et que la quote-part de la Sarlu Sidobre Optic serait passée en frais privilégiés de la procédure collective dont elle est l'objet.

Pour les dépens d'appel, [G] [C], la Sarlu Optic Abaret, la Sarlu Sidropre Optic prise en la personne de Me [T], es qualités, parties succombantes au principal, seront condamnés aux dépens d'appel divisés en trois parts égales.

La part supportée par la Sarlu Sidobre Optic sera passée en frais privilégiés de sa procédure collective.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à l'exception du chef de dispositif ayant condamné la Sarlu Optic Abaret à verser la somme de 12 001 euros à la SAS Opticeo assortie des intérêts au taux légal a compter du 17 décembre 2019 et débouté la SAS Opticeo du surplus de sa demande ainsi que de celui ayant constaté et fixé la créance de la SAS Opticeo au passif de la Sarlu Sidobre Optic à la somme de 12 001 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019,

Et, statuant à nouveau, sur les deux chefs infirmés,

Condamne la Sarl Optic Aabaret à verser à la SAS Opticéo la somme de 4 406,40 euros au titre de sa perte de chance,

Fixe au passif de la procédure collective de la Sarl Sidobre Optic, prise en la personne de Me [T], en qualité de liquidateur judiciaire, la somme de 4 406,40 euros allouée au bénéfice de la SAS Opticéo,

Y ajoutant,

Déboute la SAS Opticéo de l'ensemble de ses demandes en paiement des divers redevances et frais à l'encontre de la Sarlu St Cyp Optic,

Condamne [G] [C], la Sarlu Optic Abaret, la Sarlu Sidropre Optic prise en la personne de Me [T], en qualité de liquidateur judiciaire, aux dépens d'appel divisés en trois parts égales.

Dit que la part supportée par la Sarlu Sidobre Optic sera passée en frais privilégiés de procédure,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.