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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 14 novembre 2023, n° 21/07416

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Les Cuisines de Retz (SARL)

Défendeur :

Raison Home (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Conseillers :

Mme Clément, Mme Jeorger-le Gac

Avocats :

Me Dutto, Me Gardette

CA Rennes n° 21/07416

13 novembre 2023

FAITS

Le 11 septembre 2006, la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME et la société CUISINES SATISFACTION, dirigées par M. [X] [B] ont régularisé un contrat de franchise dans le cadre duquel la société CUISINES RAISON a concédé à la société CUISINES SATISFACTION le droit d'utiliser son système de distribution de produits sous l'enseigne CUISINES RAISON sur le secteur géographique d'exclusivité suivant :

[Localité 6],[Localité 9],[Localité 14],[Localité 15],[Localité 7],[Localité 10], [Localité 16], [Localité 17],[Localité 18],[Localité 21],[Localité 24],[Localité 23]-Centre,[Localité 23]-Centre-Ouest,[Localité 23]-Centre-Sud,[Localité 23]-[Localité 12],[Localité 23]-Nord,[Localité 23]-Nord-Ouest,[Localité 23]-Sud-0uest,[Localité 25].

M.[B] s'est porté fort de l'exécution par la société CUISINES SATISFACTION du contrat de franchise.

Le contrat comportait notamment des obligations de non-concurrence et de secret, sanctionnées par des clauses pénales.

Il a été signé pour une période de 5 ans renouvelable annuellement par tacite reconduction.

Le 30 octobre 2011 les parties ont signé une Lettre Accord pour renouveler le contrat de franchise et définir un nouveau secteur géographique d'exclusivité :

[Localité 23], [Localité 23], [Localité 19], [Localité 16], [Localité 7], [Localité 17] et [Localité 18].

M. [B] a fait immatriculer une société CUISINES DE RETZ le 16 octobre 2017 ayant pour activité la conception, vente et pose de cuisines, salles de bains, placards et aménagements intérieurs ainsi que la fourniture des appareils électroménagers, dans la région de [Localité 22] où elle a son siège social.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 février 2018, la société CUISINES RAISON a informé la société CUISINES SATISFACTION, de la résiliation du contrat de franchise, en raison du non-paiement des redevances de franchise pour un montant de 9 531,31 euros et de la somme de 30 551,86 euros à la société DOM'CUISINES, une filiale.

Le 7 mars 2018, elle a mis en demeure la société CUISINES SATISFACTION de lui régler la somme de 25 249,47 euros TTC au titre des royalties du contrat de franchise et la somme de 30 551,86 euros TTC à la société DOM'CUISINES

Elle reprochait également à M. [B] sa mauvaise gestion et une concurrence déloyale via sa société CUISINES DE RETZ.

La société CUISINES RAISON a obtenu une ordonnance aux fins de procéder à un constat pour établir les manquements du franchisé, directement ou indirectement par l'intermédiaire de la société LES CUISINES DE RETZ.

Les opérations de constat se sont déroulées le 23 octobre 2018.

Par jugement en date du 27 février 2019, le tribunal de commerce de Rennes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société CUISINES SATISFACTION et désigné Maître [M] [L] es-qualités de liquidateur judiciaire.

La société CUISINES RAISON a déclaré sa créance pour un montant de 8 676,71 euros, laquelle a été admise au passif de la procédure collective.

Par ordonnance du 9 octobre 2019, le juge commissaire a relevé la société DOM'CUISINES de la forclusion et l'a autorisée à produire sa créance pour un montant de 30 551,81 euros.

La société DOM'CUISINES a déclaré sa créance, admise au passif de la procédure collective.

Par jugement du 9 décembre 2019, le tribunal de commerce de Rennes a prononcé la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société CUISINES SATISFACTION pour insuffisance d'actifs.

Le 13 janvier 2020 la société CUISINES RAISON a mis en demeure la société CUISINES DE RETZ de lui régler les sommes de 50 000 euros au titre de la clause pénale du contrat de franchise et la somme de 30 551,81 euros au titre des sommes engagées par sa filiale la société DOM'CUISINES pour réparer les défauts générés par la société CUISINES SATISFACTION.

Par actes du 6 mars 2020 la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME a fait assigner M. [B] et la société LES CUISINES DE RETZ devant le tribunal de commerce de Saint-Nazaire aux fins d'obtenir leur condamnation à paiement à son bénéfice et à celui de sa filiale leur reprochant des actes de concurrence déloyale et s'agissant de M. [B], une faute consistant à faire prévaloir les intérêts de sa société LES CUISINES DE RETZ sur ceux des sociétés CUISINES RAISON et DOM'CUISINES.

Par jugement du 8 septembre 2021 le tribunal de commerce de Saint- Nazaire a :

- Débouté Monsieur [B] et la société CUISINES DE RETZ de leur demande de, avant-dire droit, condamner la société CUISINES RAISON à produire la liste de l'ensemble de ses franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat avec la société CUISINE SATISFACTION;

- Dit la société CUISINES RAISON recevable en ses demandes dirigées à l'encontre de M. [B] ;

- Dit la société CUISINES RAISON irrecevable en ses demandes dirigées à l'encontre de la société CUISINES DE RETZ;

- Débouté la société CUISINES RAISON de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société CUISINES DE RETZ;

- Dit la société DOM'CUISINES irrecevable en ses demandes, pour défaut de lien de droit à l'encontre de Monsieur [B] et de la société CUISINES DE RETZ;

- Débouté la société DOM'CUISINES de toutes ses demandes, fins et conclusions;

- Dit que la responsabilité de Monsieur [B] est engagée en tant que porte fort de la société CUISINES SATISFACTION en toutes ses charges et obligations vis-à-vis de la société CUISINES RAISON au titre du contrat de franchise ;

- Condamné Monsieur [B] à régler à la société CUISINES RAISON la somme de 8 676,71 euros;

- Condamné Monsieur [B] à payer à la société CUISINES RAISON la somme de 50 000 euros au titre de la clause pénale;

- Débouté la société CUISINES RAISON du surplus de sa demande;

- Débouté Monsieur [B] et la société CUISINES DE RETZ de toutes leurs demandes, fins et conclusions;

- Condamné Monsieur [B] à payer à la société CUISINES RAISON la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement au titre de l'article 515 du code de procédure civile;

- Condamné Monsieur [B] aux entiers dépens au titre de l'article 696 du code de procédure civile, dont les frais de greffe liquidés a la somme de cent cinq euros et soixante centimes dont TVA dix-sept euros et soixante centimes.

M. [B] et la société LES CUISINES DE RETZ ont fait appel du jugement le 26 novembre 2021.

Par ordonnance du 15 juillet 2022 le premier président de la cour d'appel de Rennes a arrêté l'exécution provisoire du jugement sauf en ce qu'il a condamné M. [X] [B] à verser à la société CUISINES RAISON la somme de 8 676,71 euros (à laquelle l'exécution provisoire est cantonnée)

L'ordonnance de clôture est en date du 19 septembre 2023.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans leurs écritures notifiées le 23 août 2022 M. [B] et la société LES CUISINES DE RETZ demandent à la cour au visa des articles 1103, 1204, 1231-1 et 1240 du code civil, 11 et 32-1 du code de procédure civile, de :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Saint-Nazaire en date du 8 septembre 2021,

A titre principal,

- Avant-dire droit, condamner la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME à produire la liste de l'ensemble de ses franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat de la société CUISINES SATISFACTION, en précisant l'adresse de leur siège social, leur zone d'exclusivité, leur numéro de RCS, et d'en justifier, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard,

- Réserver l'exécution de l'astreinte au juge de l'exécution,

- Débouter la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME de ses demandes, fins et conclusions,

- Constater le caractère tant irrecevable qu'infondé des demandes de la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME

- Condamner la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME à verser à M. [B] et la société LES CUISINES DE RETZ la somme de 15.000 euros au titre de l'abus du droit d'agir ;

A titre subsidiaire, en cas de condamnation de Monsieur [B] et/ou de la société LES CUISINES DE RETZ ;

- Ramener le montant de la clause pénale à hauteur de 1euros ,

- Constater la prescription des redevances de franchise et, à tout le moins, porter le montant des condamnations à hauteur du montant Hors Taxe des factures.

En toute hypothèse,

- Condamner la SAS CUISINES RAISON devenue RAISON HOME à verser tant à Monsieur [X] [B] qu'à la SARL LES CUISINES DE RETZ, la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance parmi lesquels seront compris l'ensemble des frais d'exécution (y compris les émoluments de l'huissier par application de l'article A444-32 du Code de commerce).

Dans ses écritures notifiées le 12 septembre 2023 la société RAISON HOME demande à la cour au visa des articles 1120, 1134 et 1147 dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, 1240 du code civil, L. 223-22 du code de commerce, de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur [X] [B] à verser à la société RAISON HOME ANCIENNEMENT CUISINES RAISON la somme de 50 000 euros et 8.676,71 euros ainsi qu'en ce qu'il a débouté ce dernier et la société LES CUISINES DE RETZ de leurs demandes de production de pièces et de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Réformer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la société LES CUISINES DE RETZ, a débouté la société RAISON HOME ANCIENNEMENT CUISINES RAISON de ses demandes indemnitaires contre la société LES CUISINES DE RETZ, ainsi que de ses demandes au titre du parasitisme, de l'atteinte au réseau et du trouble commercial,

Jugeant à nouveau de ces chefs,

- Condamner la société LES CUISINES DE RETZ in solidum avec Monsieur [B] à verser à la société RAISON HOME ANCIENNEMENT CUISINES RAISON la somme de 50 000 euros et 8.676,71 euros,

- Condamner Monsieur [X] [B] et la société LES CUISINES DE RETZ in solidum à verser à la société CUISINE RAISON la somme de la somme de 30 000 euros au titre du trouble commercial et de l'atteinte à l'image du réseau, et 20.000 euros au titre de la perte de rémunération au titre des redevances de gestion et des redevances qui auraient dues être versées au titre de l'exploitation du concept par suite du parasitisme commis,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur [X] [B] à verser la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 en première instance et le réformer pour déclarer que cette condamnation sera prononcée in solidum avec la Société LES CUISINES DE RETZ,

- Condamner in solidum Monsieur [B] et la société LES CUISINES DE RETZ à verser à la Société RAISON HOME ANCIENNEMENT CUISINES RAISON la somme de 5.000 euros en cause d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la présente instance.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

DISCUSSION

La production de la liste de l'ensemble de ses franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat

Les appelants sollicitent la production de la liste des franchisés de la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME aux fins d'établir que le franchiseur ne respecte pas la zone d'exclusivité territoriale figurant au contrat.

La société RAISON HOME fait valoir que cette demande est irrecevable aux motifs que la société CUISINES SATISFACTION liquidée, pourrait seule présenter cette demande.

Elle ajoute que cette demande est sans objet puisque la zone réservée à la société CUISINES SATISFACTION a été modifiée en août 2011, M. [B] ayant en outre sollicité lui-même l'intervention d'une autre franchisée sur la zone (Mme [W]).

La société CUISINES SATISFACTION qui a régularisé le contrat de franchise a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire clôturée le 9 décembre 2019 pour insuffisance d'actifs. Elle n'est pas à la procédure et ne peut donc plus formuler aucune demande au titre du contrat de franchise.

Néanmoins M. [B] est susceptible d'être condamné en raison de la clause de porte-fort figurant au contrat, y compris in solidum avec la société CUISINES DE RETZ si une concurrence déloyale était établie.

La demande tendant à la communication de la liste des franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat de franchise, n'est donc pas irrecevable.

En revanche les appelants ne versent aucun élément justifiant ce versement.

En effet un mail du 5 mars 2015 démontre que M.[B] était en relation amicale avec [F] [W].

Dans cet échange il lui demande son avis sur un message qu'il souhaite faire parvenir au représentant de CUISINES RAISON :

Coucou Anne

Je pense envoyer ceci ce matin à [V]. Qu'en pense tu ' BisesXAv

Bonjour

Peux-tu m'envoyer les plans de zone

Je suis avec [F] toute la journée de vendredi à la maison.

Je vais essayer de trouver un terrain d'entente afin que le 12 soit une réunion constructive et non pas une foire d'empoigne

Il est clair que l' arrivée de [E] n'est pas du tout la bienvenue, surtout de la façon dont cela c'est passé. Il y a moyen de travailler je pense en tout harmonie en fonction des zones de chacun.

A la base et lors de notre dernier entretien, je gardais ma zone extérieure de [Localité 23], [F] celle extérieure de [Y] [K] et [Localité 23] était divisé sans zone entre moi et [F] et [R] de [H].

Je pense qu'il serait bon que [F] conserve l'exclusivité de sa commune [Localité 20] Ceci étant logique. Ecole de ses enfants, sa boulangerie, sport ETC... Elle était arrivée avant [E]

Je peux aussi lâcher [Localité 17] et quelques autres communes, ceci afin de pouvoir faire venir un Franchisé sur ce secteur. Le secteur Nord de [Localité 23] étant aussi dispo. Cela fait 2 nouveaux Franchisés potentiel. Ceci afin de concentrer [F], [A] et [H] sur [Localité 23] coeur et périphérie limitrophe. Nous avons déjà des idées avec [F] sur divers animations.

[F] et moi nous entendons très bien et avons confiance l'un en l'autre. Ce qui permet d'avancer sereinement sur notre développement commun. L'arrivée d'une autre personne sur [Localité 23] et non voulue risquerai de créer une très mauvaise ambiance.

Les appelants reprochent au franchiseur d'avoir installé sur le territoire de [Localité 23] trois autres franchisés, [F] [W], [H] et [I] [U]. Mais M. [B] était avisé de l'intervention probable des deux premiers.

Ils reproduisent dans leurs écritures un extrait d'une page de Google s'agissant de M. [I] [U] :

Cuisine mat contemporain à [Localité 23] Raison Home

3 juill 2015 - Découvrez une réalisation de RAISON HOME avec la solution appportée par [U] [I], notre cuisiniste à [Localité 23] et la photo de la cuisine mat...

Cet affichage succint et publicitaire ne permet pas de déterminer exactement la zone d'intervention de M. [U], étant noté au demeurant que le territoire de [Localité 23] a été divisé entre plusieurs autres franchisés dès 2011. Les nouvelles répartitions qui seraient intervenues en 2015 l'ont été, en tout état de cause au su de M. [B], comme le démontrent les échanges visés plus haut.

Les courriels démontrent que malgré l'exclusivité qui lui avait été accordée, M. [B] et la société CUISINES SATISFACTION avaient manifestement accepté le partage de la zone de [Localité 23].

Par conséquent la demande tendant à voir condamner la société CUISINES RAISON devenue RAISON HOME à produire la liste de l'ensemble de ses franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat de la société CUISINES SATISFACTION sous astreinte de 200 euros par jour de retard est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

La créance d'un montant de 8 676,71 euros.

Les appelants considèrent que les demandes à l'encontre de M. [B] au titre de la créance de 8 676,71 euros sont irrecevables puisqu'il n' est pas partie au contrat de franchise. Ils ajoutent que M. [B] ne saurait être condamné en sa qualité de porte-fort, à défaut pour RAISON HOME d'avoir un titre exécutoire et/ou une créance à l'égard de la société CUISINES SATISFACTION, motivant l'appel en garantie du porte-fort.

Le contrat de franchise régularisé entre la société CUISINES RAISON et la société CUISINES SATISFACTION porte la mention manuscrite de M. [B] :

Je soussigné [X] [B] me porte fort par la présente de la parfaite exécution par la société Cuisines Raison du contrat signé ce jour en toutes ses charges et obligations de quelque nature que ce soit y compris et plus spécialement du paiement qui pourrait être dû à la société Cuisines Raison par application dudit contrat.

M. [B] n'a pu s'engager que pour la parfaite exécution du contrat par sa société, la société CUISINES SATISFACTION, franchisée.

C'est donc par une erreur de plume que la mention manuscrite vise la parfaite exécution par la société Cuisines Raison.

Le tribunal et les parties reconnaissent bien que M. [B] s'est engagé au titre des obligations de la société CUISINES SATISFACTION.

La promesse de porte-fort possède un caractère autonome de sorte que la société RAISON HOME peut exiger son application indépendamment de l'existence d'un titre exécutoire à l'encontre de la société CUISINES SATISFACTION débiteur principal.

Les appelants font également valoir que la créance est prescrite aux motifs que la majorité des factures qui la justifie datent de 2013.

Il apparaît cependant que la somme réclamée correspond au solde du décompte des factures restant impayées à la date de la mise en demeure du 27 février 2018. C'est à cette date qu'a été caractérisé le manquement de M. [B] à son engagement de garantir l'exécution par la société CUISINES SATISFACTIONS de ses propres engagements.

M. [B] a été assigné moins de cinq années après ce manquement de sa part. Les demandes formées contre lui au titre du non-respect de son engagement ne sont pas prescrites.

La créance de la société RAISON HOME a été déclarée entre les mains du mandataire qui indique que la société CUISINES SATISFACTION (débitrice) a porté à sa connaissance la somme de 8 326 euros. Elle a donc reconnu l'existence de sa dette pour ce montant et la société RAISON HOME n'établit pas que sa créance aurait été admise pour un montant de 8 676,71 euros.

Au regard de son engagement de porte-fort M. [B] est donc tenu de régler à la société RAISON HOME la somme de 8 326 euros, somme non soumise à la TVA s'agissant de dommages-intérêts.

La demande de condamnation in solidum de la société CUISINES DE RETZ est irrecevable cette créance étant sans lien avec les actes de concurrence déloyale qui lui sont également reprochés.

Le jugement est infirmé s'agissant du montant de la somme à verser à la société RAISON HOME.

La concurrence déloyale,

La société RAISON HOME fait valoir que M. [B] doit répondre d'actes de concurrence déloyale en sa qualité de porte-fort de la société CUISINES SATISFACTION, in solidum avec la société CUISINES DE RETZ, complice de ces manquements.

Pour obtenir la condamnation in solidum du porte-fort et de la société CUISINE DE RETZ encore faut-il que la société RAISON HOME établisse les manquements de la société CUISINES SATISFACTION au contrat de franchise et que la société CUISINES DE RETZ ait le vecteur de ces manquements en connaissance de cause.

Le contrat de franchise comporte une clause de non-concurrence :

L'activité du franchisé Cuisines RAISON est la conception-ventes de cuisines aménagées sans magasin. Le franchiseur doit protéger son activité ainsi que celle de ses franchisés.

11-1 Pendant toute la durée du présent contrat, le franchisé s'interdit (lui-même et/ou son conjoint éventuel) de créer, participer ou s'intéresser directement ou indirectement, par lui-même ou par personne interposée, à toute entreprise ou société concurrente du franchiseur et du réseau « Cuisines RAISON».

11-2 A la cessation du présent contrat et pour quelque cause que ce soit, le franchisé ne pourra s'affilier, adhérer ou participer de quelque manière que ce soit, à une chaine concurrente du franchiseur, ou en créer lui-même et plus généralement se lier à tout groupement, organisme ou entreprise directement concurrent du franchiseur.

Cette interdiction sera valable pendant un (1) an et dans un rayon de 100 km autour de son siège social stipulé dans l'article 1 et couvrant la zone d'exclusivité stipulée dans ce même article.

11-3 A la cessation du présent contrat en cas de résiliation anticipée et pour quelque cause que ce soit, le franchisé ne pourra exploiter ou participer de quelque manière, directement ou par personne interposée, à l'exploitation, la gestion, l'administration, le contrôle d'un fonds de commerce ou d'une société ayant une activité identique ou similaire à celle des franchisés "Cuisines RAISON".

Cette interdiction sera valable pendant un (1) an et dans un rayon de 100 km autour de son siège social stipulé dans l'article 1 et couvrant la zone d'exclusivité stipulée dans ce même article.

114 A la cessation du présent contrat survenant à la fin de la période stipulée dans l'article 2, le franchisé ne pourra exploiter ou participer de quelque manière, directernent ou par personne interposée, à l'exploitation, la gestion, l'administration, le controle d'un fonds de commerce ou d'une société ayant une activité identique ou similaire à celle des franchisés Cuisines RAISON, Cette interdiction sera valable pendant un (1) an et dans un rayon de 100 km autour de son siège social stipulé dans l'article 1 et couvrant la zone d'exclusivité stipulée dans ce même article.

Toutefois, le franchisé qui ne souhaite pas renouveler son contrat de franchise et uniquement dans ce cas précis, pourra se libérer de cette interdiction en versant la franchise Cuisines RAISON une indemnité de 20.000 euros.

Par ailleurs, le franchisé ne pourra plus travailler avec les fabricants référencés par la franchise au moment de la fin du contrat dans la catégorie Mobilier et cela sur tout le territoire francais et pendant un (1) an. ll ne sera pas possible au franchisé de se libérer de cette interdiction.

11-5 A la cessation du présent contrat survenant à la fin de la période stipulée dans l'article 2 plus deux années, le franchisé ne pourra travailler avec les fabricants référencés par la franchise dans la categorie Mobilier et cela sur tout le territoire frangais et pendant un (1) an.

En cas de non-respect de l'une ou l'autre de ces obligations, le franchisé s'engage à payer au franchiseur, à titre de clause pénale, une somme de 50 000 euros, sans préjudice de tous autres droits et recours du franchiseur.

En outre, le franchise s'engage à ne pas porter directement ou indirectement atteinte au renom de marque et de l'enseigne et à la notoriété du réseau ou à la réputation du franchiseur sous peine de poursuite en concurrence déloyale.

En considération de la clause de non-concurrence, pendant l'exécution du contrat la société CUISINES SATISFACTION avait interdiction par personne interposée de créer, participer ou s'intéresser directement ou indirectement à toute entreprise ou société concurrente du franchiseur et du réseau Cuisines RAISON.

La clause ne vise cependant que le franchisé, ici une personne morale, et non pas son dirigeant. Elle n'était donc pas applicable à M. [B].

Il n'est pas établi que la société CUISINES SATISFACTION ait participé à la création de la société CUISINES DE RETZ par personne interposée. Le fait que M. [B] ait pu y participer ne caractérise pas l'intervention de la société CUISINE SATISFACTION dans l'opération, même par personne interposée.

En tout état de cause, l'extrait Kbis de la société CUISINES DE RETZ mentionne une immatriculation le 16 octobre 2017 et un commencement d'activité le 15 septembre 2017.

Elle est spécialisée dans la conception la vente et la pose de cuisines salles de bain placard ...et aménagements intérieurs ainsi que la fourniture des appareils életroménagers et tout le matériel se rapportant à ces activités.

L'extrait internet du 6 février 2018 relevé par constat d'huissier confirme que la société CUISINES DE RETZ fonctionne selon un service clé en main qui se déplace au domicile des clients.

Le contrat de franchise précise que la société franchiseur est spécialisée dans la conception et la ventes de cuisines aménagées, sans magasin.

Les appelants ne démontrent pas que la société CUISINES DE RETZ aurait débuté son activité après la résiliation du contrat de franchise le 27 février 2018.

Le constat d'huissier réalisé sur ordonnance de requête le 23 octobre 2018 établit que la messsagerie [Courriel 13] abrite des courriels antérieurs au 27 février 2018 relatifs à des commandes. Ces pièces démontrent que la société CUISINES DE RETZ était active avant cette date.

La clause de non-concurrence vise également deux conditions cumulatives pour considérer qu'il y violation :

Cette interdiction sera valable pendant un (1) an et dans un rayon de 100 km autour de son siège social stipulé dans l'article 1 et couvrant la zone d'exclusivité stipulée dans ce même article.

Il faut que :

- la société nouvelle ait son siège dans un rayon de moins de 100 km du siège de la société CUISINES SATISFACTION ;

- et que ses clients aient un domicile dans la zone d'exclusivité accordée à la société CUISINE SATISFACTION.

L'extrait Kbis de la société CUISINES SATISFACTION fixe son siège social au [Adresse 5] à [Localité 23]. Celui de la société CUISINES DE RETZ se situe [Adresse 4] à [Localité 22] soit à 115,53 Km du siège de la société CUISINES SATISFACTION à vol d'oiseau, au-delà des 100 km visé au contrat.

Depuis 2011 la zone d'exclusivité de la société CUISINES SATISFACTION était circonscrite à [Localité 23], [Localité 23], [Localité 19], [Localité 16], [Localité 7], [Localité 17] et [Localité 18].

La société RAISON HOME signale que le procès-verbal de constat réalisé sur ordonnance sur requête montre bien que la société CUISINES DE RETZ a réalisé des commandes pour les clients de la société CUISINES SATISFACTION, à savoir les époux [P] (facture du 9 juillet 2018).

Leur domicile se situe à [Localité 8] qui ne se trouve pas dans la zone d'exclusivité de la société CUISINES SATISFACTION.

Les deux conditions ne sont pas réunies.

Au surplus il n'est pas non plus rapporté que la société CUISINES DE RETZ via M. [B] ait violé l'article 12 du contrat de franchise en pillant le savoir-faire de la société CUISINES RAISON et violé l'article 12 du contrat de franchise :

Le franchisé et ou son dirigeant ou la personne désignée au contrat s'engage, tant pour la durée du contrat que pendant 10 ans après sa cessation pour quelque cause que ce soit, à ne pas communiquer, divulguer ou exploiter pour son propre compte ou pour le bénéfice d'un tiers,

Personne physique ou morale quelconque, toute information connaissance ou savoir-faire confidentiels, concernant les méthodes d'exploitation de la franchise Cuisines RAISON qui pourraient lui être communiquées ou dont il aurait eu connaissance en raison de l'exploitation de la franchise, objet du présent contrat.

Seront considérés comme confidentiels au sens du présent contrat, toute information, connaissance, savoir-faire communiqués au franchise par le franchiseur pour l'exploitation du concept Cuisines RAISON et tous éléments compilés dans le Manuel Opératoire, de même que le contenu des présentes.

Sera considérée comme une violation de la présente clause, la tentative par le franchis ou un dirigeant majoritaire ou non d'exploiter le système Cuisines RAISON en tout ou partie dans son ou ses autres entreprises, ou l'entreprise de son conjoint éventuel dans l'hypothèse ou un contrat de franchise Cuisines RAISON ne serait pas conclu pour l'exploitation de cette ou ces entreprise(s).

Le franchise et/ou la personne désignée au contrat se porte fort du respect de la même obligation par son personnel ou ses intervenants externes qui ont des fonctions proches de la direction ou accès aux informations confidentielles. En cas de non-respect de l'une ou l'autre de ces obligations, le franchise s'engage à payer au franchiseur à titre de clause pénale, une somme de 50 000 euros sans préjudice de tous autres droits et recours du franchiseur.

Outre que le Manuel opératoire n'est pas versé aux débats, la société RAISON HOME ne peut considérer que la vente à domicile d'éléments de cuisine constitue un concept original mis au point sur la base d'informations confidentielles et d'un savoir-faire spécifique. Ce type de commerce sans espace de vente ne requière pas du franchiseur une haute technicité notamment en l'absence de magasin.

La société CUISINES DE RETZ ne fait que reproduire des méthodes très répandues sans qu'elle ait eu besoin de copier un concurrent.

Les faits de pillage voire de parasitisme ne sont pas établis.

Par ailleurs le constat du 23 octobre 2018 démontre que la société CUISINES DE RETZ s'adressait aux fournisseurs avec lesquels la société CUISINES SATISFACTION travaillait.

Toutefois l'interdiction de commercer avec les fournisseurs visés à l'article 11-4 du contrat de franchise n'est pas applicable en cas de résiliation anticipée comme en l'espèce puisqu'en renvoyant à l'article 2, il concerne uniquement le cas où le contrat de franchise a pris fin à son terme.

La société RAISON HOME doit donc être déboutée de toutes ses demandes au titre de la concurrence déloyale.

Le jugement est infirmé de ce chef.

La faute du gérant

Au visa de l'article L 223-22 du code de commerce la société RAISON HOME considère que M. [B] a commis une faute de gestion engageant sa responsabilité personnelle en faisant prévaloir les intérêts de la société CUISINES DE RETZ sur ceux de la société CUISINES SATISFACTION.

Cette affirmation n'est pas établie.

Il n'est pas démontré que M. [B] ait à dessein favorisé les intérêts de la société CUISINES DE RETZ au détriment de la société franchisée. M. [B] a quitté la franchise en raison de la résiliation à l'initiative du franchiseur. Les mails de 2017 montrent qu'il souhaitait dans un premier temps obtenir un autre poste au sein du réseau (mail du 8 février 2017).

La procédure abusive,

L'article 32-1 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur depuis le 11 mai 2017 et applicable en l'espèce, dispose :

Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

Lorsqu'il est établi que la partie qui exerce l'action a fait preuve de légèreté blâmable, une telle faute est de nature à caractériser une action abusive.

Il n'est pas établi que la société RAISON HOME ait agit dans un autre but que de faire valoir ses droits.

La demande de M. [B] et de la société CUISINES DE RETZ est donc rejetée.

Les demandes annexes

Il n'est pas inéquitable de rejeter les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société RAISON HOME est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour :

- Confirme le jugement en qu'il a débouté M. [B] et la société CUISINES DE RETZ de leur demande avant-dire droit de condamner la société CUISINES

RAISON à produire la liste de l'ensemble de ses franchisés entrés dans le réseau à compter de la signature du contrat avec la société CUISINE SATISFACTION ;

- Infirme le jugement pour le reste.

Statuant à nouveau :

- Dit irrecevables les demandes formées par la société RAISON HOME à l'encontre de la société CUISINES DE RETZ concernant le paiement de la somme de 8.676,71 euros,

- Condamne M. [B] à régler à la société RAISON HOME la somme de 8.326 euros ;

- Condamne la société RAISON HOME aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Rejette les autres demandes des parties.