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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 15 novembre 2023, n° 22/01245

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Forecasting Services (SAS)

Défendeur :

Fibalko (SA), Newton Partners (SA), Arjil Capital (SAS), ACG (SA), ACG Holding (SA), Viveris Partenaires (SAS), Viveris Holding (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

Mme Brun-Lallemand, Mme Depelley

Avocats :

Me Lugosi, Me Beucher, Me Allerit, Me Honig

T. com. Paris, du 22 nov. 2021, n° 20200…

22 novembre 2021

FAITS ET PROCÉDURE

M. [M] [P] et Mme [W] [B], son épouse sont actionnaires majoritaires, administrateurs ou présidents des sociétés SA FIBALKO, SAS ARJIL CAPITAL, SA NEWTON PARTNERS, SA ACG, SA ACG HOLDING, SAS VIVERIS PARTENAIRES, SAS VIVERIS HOLDING qui ont pour activité le service financier et le conseil pour les affaires et la gestion.

M. [A] exerce une activité de conseil administratif et financier en entreprise.

Dès 2007, il a été sollicité en sa qualité d'entrepreneur indépendant, par M.et Mme [P] afin de réaliser différentes prestations de conseils pour leurs sociétés.

En 2016, la société Forecasting Services est créée pour permettre à M. [A] d'avoir un cadre administratif et juridique approprié aux travaux qu'il effectue pour le compte des époux [P] et de leurs sociétés (ci-après le groupe [P]).

La société Forecasting Services, qui a pour activité le conseil aux entreprises, effectue alors diverses missions en lien avec la signature d'un protocole d'accord en vue de la cession de la société ACG Management à la société CEPAC.

La nature de ces missions est contestée par les parties, notamment s'agissant du rôle joué par M. [A] auprès des actionnaires minoritaires avant la signature du protocole d'accord.

Le 15 juillet 2009, M. [P] est enregistré dans le cadre d'un appel téléphonique avec M. [A], dans lequel il évoque un moyen de remercier ce dernier pour son travail. L'interprétation de son contenu fait également débat dans la présente procédure.

A partir d'octobre 2019, la société Forecasting Services n'est plus missionnée par aucune des entités du groupe [P].

C'est dans ces conditions que, par actes des 16, 17 et 25 juin 2020, la société Forecasting Services assigne le groupe [P] devant le tribunal de commerce de Paris à l'effet de constater la rupture brutale, sans préavis, des relations commerciales établies et d'obtenir l'indemnisation de son préjudice économique subséquent, outre la condamnation au versement du montant d'une facture impayée du montant du success-fee promis le 15 juillet 2019.

Par jugement du 22 novembre 2021, le tribunal de commerce de Paris :

- Se déclare compétent vis-à-vis des époux [P],

- Dit qu'il n'y a pas lieu d'écarter les pièces n° 32 et 33 ;

- Condamne les époux [P], à payer en deniers et quittance la facture de la SAS Forecasting Services d'un montant de 5 760 € TTC,

- Condamne M. [M] [P], et Mme [W] [B] épouse [P] ainsi que la SA de droits suisse FIBALKO, la SAS ARJIL CAPITAL, la SA ACG, la SAS ACG HOLDING, la SA de droit luxembourgeois NEWTON PARTNERS, la SAS Vivéris Holding et la SAS Vivéris Partenaires à payer in solidum à la SAS Forecasting Services la somme de 10 000 euros,

- Déboute la SAS Forecasting Services de sa demande au titre d'une rupture brutale de relation commerciale établie,

- Déboute les époux [P] de leur demande au titre d'une procédure abusive,

- Condamne in solidum M. [M] [P] et Mme [W] [B] épouse [P] ainsi que les sociétés, la SA de droits suisse FIBALKO, la SAS ARJIL CAPITAL, la SA ACG, la SAS ACG HOLDING, la SA de droit luxembourgeois NEWTON PARTNERS, la SAS Vivéris Holding et la SAS Vivéris Partenaires à payer à la SAS Forecasting Services la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du CPC,

- Déboute les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires,

- Condamne in solidum M. [M] [P] et Mme [W] [B] épouse [P] ainsi que les sociétés, la SA de droits suisse FIBALKO, la SAS ARJIL CAPITAL, la SA ACG, la SAS ACG HOLDING, la SA de droit luxembourgeois NEWTON PARTNERS, la SAS Vivéris Holding et la SAS Vivéris Partenaires aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 242,97 € dont 40,28 € de TVA.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 11 janvier 2022, la société Forecasting Services interjette appel de ce jugement.

Au terme de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 27 juin 2023, la société Forecasting Services demande à la Cour de :

Vu les dispositions des articles 1103, 1231-1 du code civil, l'article L. 442-1 du code de commerce,

Dire et juger la société Forecasting Services recevable et bien fondée en son appel,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les époux [P] à payer en deniers et quittance la facture de la SAS Forecasting Services d'un montant de 5.760 euros TTC,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Forecasting Services au titre du "success-fee" promis le 15 juillet 2019, excédant la somme 10.000 euros ;

- Condamner Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding, NEWTON Partners, Vivéris Holding et Vivéris Partenaires à payer in solidum à la société Forecasting Services la somme de 200 000 euros HT, soit 240 000 euros TTC au titre du "success-fee" promis le 15 juillet 2019,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SAS Forecasting Services de sa demande au titre d'une rupture brutale de relation commerciale établie,

- Condamner Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding et NEWTON Partners à réparer le préjudice subi et à payer in solidum à la Forecasting Services la somme de 54.27075 euros en réparation de son préjudice économique pour rupture brutale sans préavis,

- Débouter Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding et NEWTON Partners, Vivéris Holding et Vivéris Partenaires de leur appel incident,

- Débouter Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding et NEWTON Partners, Vivéris Holding et Vivéris Partenaires de leurs demandes, fins et conclusions,

- Condamner Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding et NEWTON Partners, Vivéris Holding et Vivéris Partenaires à payer in solidum à la société Forecasting Services la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile devant le tribunal et devant la Cour.

- Condamner Monsieur et Madame [P] ainsi que les sociétés FIBALKO, ARJIL Capital (ex-ALTIUM Capital), ACG SA, ACG Holding et NEWTON Partners, Vivéris Holding et Vivéris Partenaires aux dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 22 juin 2023, les sociétés SA FIBALKO, SA ACG, SA ACG HOLDING, SAS ARJIL CAPITAL, SA NEWTON PARTNERS, SAS VIVERIS HOLDING, SAS VIVERIS PARTENAIRES, ainsi que Monsieur [M] [P] et Madame [W] [P] demandent à la Cour de :

STATUANT SUR L'APPEL D'UN JUGEMENT RENDU LE 22 NOVEMBRE 2021 PAR LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS ;

DECLARER la société Forecasting Services tant irrecevable que mal fondée en son appel ;

LA DEBOUTER de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

RECEVOIR les Sociétés FIBALKO, ACG, ACG HOLDING, ARJIL CAPITAL, NEWTON PARTNERS, VIVERIS HOLDING, VIVERIS PARTENAIRES, Monsieur et Madame [P] en leur appel incident,

Y FAISANT DROIT,

INFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a admis la validité des enregistrements téléphoniques et déclarer irrecevable la communication des pièces y afférant ;

STATUANT A NOUVEAU,

A TITRE PRINCIPAL,

REJETER les pièces résultant de ces enregistrements téléphoniques ;

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé condamnation au paiement d'une somme de 10.000 € au titre d'une promesse de rémunération non tenue ;

DEBOUTER la Société Forecasting Services de toutes demandes au titre au titre de la rémunération d'une promesse non tenue.

A TITRE SUBSIDIAIRE,

Si par impossible la Cour estimait devoir entre en voie de condamnation,

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a fixé le dédommagement à 10.000 €.

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté la Société Forecasting Services de sa demande au titre de la rupture des relations durables ;

CONDAMNER la Société Forecasting Services à payer aux Sociétés FIBALKO, ACG, ACG HOLDING, ARJIL CAPITAL, NEWTON PARTNERS, VIVERIS HOLDING, VIVERIS PARTENAIRES, Monsieur et Madame [P] la somme de 1.500 € chacun.

CONDAMNER la Société Forecasting Services aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Eric ALLERIT, membre de la SELARL TBA, admis à se prévaloir des dispositions de l'article 699 du CPC.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2023.

MOTIVATION

Sur la demande au titre des success-fee,

La société Forecasting Services soutient qu'un success-fee de 200 000 euros HT lui avait été promis par M. [P] dans le cadre de son intervention auprès des actionnaires minoritaires, ayant permis de réaliser la cession des actions de la société ACG Management à la CEPAC. A ce titre, la société appelante rejette toute intention de nuire de la part de l'associé minoritaire M.[K] qui confirme aussi bien l'engagement pris par M. [P] que le rôle joué par M. [A] dans le cadre de l'accord de cession. Elle assure que toutes les factures réglées sont la preuve qu'elle assurait les missions de directeur financier et non pas de simple expert-comptable. De plus, les "founds flow" établis par la société ont servi de base aux négociations et l'ensemble des études et travaux réalisés l'ont été à la demande du groupe [P].

Elle s'oppose à ce que soit écartée des débats, la pièce n° 32 sur la transcription par voie de procès-verbal d'huissier de justice d'une conversation téléphonique, faisant valoir que cette pièce est d'ordre purement professionnel et ne constitue pas l'écoute d'une conversation à caractère privé portant atteinte à la vie privée de M. [P].

Elle sollicite en ce sens la confirmation du jugement de première instance qui a établi que l'exclusion des débats de cette pièce porterait atteinte au principe de l'égalité des armes et donc d'une procédure équitable.

Par ailleurs, la société appelante conteste la somme de 10 000 euros allouée par le tribunal et demande à ce que le groupe [P] soit condamné in solidum à payer la somme de 240 000 euros TTC, correspondant au success-fee promis pour les prestations effectuées, en raison notamment de la longueur des pourparlers et conformément au chiffre promis par M. [P].

Le groupe [P] sollicite l'infirmation du jugement pour avoir retenu que la société Forecasting Services avait effectué une prestation d'intermédiation et pouvait donc prétendre à une rémunération. M. [P] conteste en effet l'utilisation des enregistrements téléphoniques effectués à son insu, comme preuve de son engagement d'une promesse formelle à titre professionnel, en l'occurrence la pièce n°32 qui retranscrit par voie de procès-verbal d'huissier de justice une conversation téléphonique, soutenant qu'il s'agit d'un moyen de preuve illicite relevant d'une conversation à caractère privé et ne constituant en tout état de cause, qu'une intention de sa part.

Le Groupe [P] conteste aussi la réalité de la prestation effectuée par la société Forecasting Services ainsi que son contenu, rendant injustifié le prix de la rémunération. Il pointe notamment l'absence de preuve ayant un caractère décisoire pour confirmer l'intervention de la société Forecasting Services, et demande de déclarer le témoignage de M. [K] irrecevable comme résultant d'une volonté de nuire. Il rejette également la position du tribunal ayant considéré que la société Forecasting Services a effectivement été en contact avec les minoritaires pour s'entremettre et négocier pour le compte du groupe [P], alors qu'aucune preuve n'est rapportée et que la présence aux réunions de Monsieur [A] pour l'année 2019 n'avait pour objet que de faire le point financier sur des documents comptables et non de participer à la négociation.

Enfin, dans l'hypothèse où la Cour venait à considérer que la société Forecasting Services a effectivement eu un rôle dans la négociation, le Groupe [P] demande à ce que la somme de 10 000 € représentant la valeur de la prestation soit confirmée.

Réponse de la Cour,

Au soutien de sa demande en paiement d'un succee-fee, la société Forecasting fait état de son intervention, à la demande des époux [P], pour concilier les positions des divergentes des associés minoritaires de la société ACG, préalable exigé par le cessionnaire avant de procéder à l'acquisition de cette société.

Il résulte des courriels produits que M [A] pour la société Forecasting Services a été à plusieurs reprises en contact avec les minoritaires de la société ACG avant la cession.

En outre, si l'attestation de M. [K] est dépourvue de force probante en raison de son manque de crédibilité au vu des relations conflictuelles opposant son auteur au groupe [P], le courriel de M. [F] [H], président de la société Arjil de mars 2018 à juin 2019, vient conforter ce rôle d'intermédiation joué par M [A] auprès des associés minoritaires de la société ACG. M [H] écrit ainsi à M. [X] [A] le 26 juin 2023 (pièce 45) : "c'est bien vous qui avez assuré durant de nombreux mois la communication entre les actionnaires et vous qui avez négocié et suggéré les termes de l'accord décisif finalement intervenu les 13 juillet 2019 avec les actionnaires minoritaires." et qui ajoute "J'ai bien été moi-même témoin de la promesse que vous a faite à plusieurs reprises devant moi M [M] [P] de vous verser, comme il était prévu de le faire avec les autres intervenants à la cession, un success-fee dans le cas où un accord pourrait intervenir avec les minoritaires, d'autant plus qu'un tel accord était un préalable incontournable à la finalisation de la cession de ACG Management".

Si la société appelante produit la retranscription par huissier de justice d'un enregistrement téléphonique du 13 juillet 2019 (pièce 32) de M [P] par lequel celui-ci se serait engagé à verser à M [A] un success-fee, un tel enregistrement à l'insu de l'intéressé ne peut constituer une preuve loyale, peu important que cet enregistrement ne porte pas atteinte à la vie privée de celui-ci (Cass., ass. Plén., 7 janv. 2011, n° 09-14.31). Ainsi, il convient de faire droit, infirmant le jugement, à la demande tendant à voir écarter les pièces 32 et 33 produites par l'appelante des débats.

Par ailleurs, il résulte des factures produites par le groupe [P] que des missions ponctuelles ont été confiées à la société Forecasting Services pour lesquelles elle a été rémunérée, notamment la facture 1810030 du 4 octobre 2018 libellée "Funds flow ACG Management" d'un montant de 3 000 € TTC(pièce 2 et 4), la facture 1811035 du 19 novembre 2018 libellée "Rapport valorisation ACGM" d'un montant de 2 112 € pour 2 "journée vacation",(pièce 5) et la facture 1812037 du 20 décembre 2018 libellée "2 journées vacation Négociations avec les minoritaires ACE" pour un montant de 1 440 € TTC (pièce 6).

Et il résulte du courrier de Me Laurent Cotret (pièce 39 du groupe [P]) intervenu en sa qualité de conseil pour l'ensemble des structures du groupe ACG au cours des années 2017, 2018 et 2019, notamment la cession de la société ACG Management que :

- cette opération s'est déroulée dans le cadre d'une conciliation homologuée par le tribunal de commerce de Marseille sous la houlette de M [Z] [T],

- ses interlocuteurs principaux ont été M [M] [P], son épouse et son conseiller M [J] [G],

- M [P] entretenait avec les actionnaires minoritaires du groupe ACG dont M [I] [K], des rapports conflictuels,

- Il n'a pas constaté que la société ou M [A] ait eu un rôle de négociateur ou de facilitateur dans ce dossier,

- Il n'a eu connaissance de leur présence uniquement comme conseil de M [I] [K] et tentant d'intervenir auprès des époux [P] pour leur faire accepter la version de la répartition des sommes prônées par M [K].

Au vu de l'ensemble de ces élements, la Cour retient que seules des missions ponctuelles ont été confiées à la société Forecasting Services par les époux [P] qui ont fait l'objet de factures payées, que la présence de M [A] aux réunions de 2019 s'explique par la nécessité de faire le point sur des documents comptables et qu'il a conseillé les minoritaires.

Cependant, M [P] s'étant engagé ainsi qu'il résulte du courriel de M [H], à verser un success-fee à M [A] pour son rôle dans l'accord trouvé avec les minoritaires, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à la société Forecasting Services une somme de 10 000 € à ce titre, somme justement évaluée au regard du rôle effectivement joué par la société Forecasting Services auprès des minoritaires en vue de la cession de la société ACG Management,

Sur la demande au titre de la rupture brutale des relatons commerciales établies,

La société Forecasting Services soutient que les relations commerciales étaient établies entre les parties et demande la réformation du jugement en ce qu'il a retenu qu'il s'agissait de relations ponctuelles et non suivies.

Elle fait état :

- de relations commerciales initiées en 2005 qui se sont poursuivies de manière constante et régulière jusqu'en octobre 2019, avec un point d'ancrage en 2016 marquant la création de la société Forecasting Services, sans qu'un contrat n'ait été conclu entre les parties,

- du fait que l'activité de la société a été dédiée de manière quasi-exclusive au service des époux [P] et des sociétés qu'ils contrôlent, dans le cadre de relations significatives et stables depuis 15 ans,

- dans l'hypothèse où les relations devraient être analysées à partir de la création de ladite société, d'une relation commerciale établie entre 2016 et 2019.

Elle assure que les relations commerciales ont cessé de manière unilatérale et brutale, à l'initiative des époux [P], sans préavis, alors que leurs sociétés étaient toujours en activité et n'avaient pas vocation à disparaître.

Elle soutient qu'au regard de l'ancienneté des relations, de leur qualité et de la dépendance économique totale dans laquelle elle se trouvait vis-à-vis du groupe [P], la durée du préavis aurait dû être d'une durée de 15 mois pour 15 ans de relations commerciales.

Le groupe [P] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la société Forecasting Services, faisant valoir que M. [A] a effectué des missions ponctuelles et intermittentes, rémunérées par des honoraires facturés au fur et à mesure par sa société et sans engagement de renouvellement de ces missions. Il ajoute que la relation n'est pas durable et n'a pas duré 15 ans mais seulement 5 ans de 2013 à 2018 et de façon intermittente, que les missions effectuées par M. [A] relèvent de l'assistance comptable, correspondant à celles d'un prestataire extérieur de l'entreprise faisant fonction d'assistant à la direction administrative et financière sans jamais avoir été missionné pour négocier l'accord de conciliation en mars 2019.

Il soutient également que la relation entre les parties n'était aucunement commerciale, puisque l'activité de M. [A] par le biais de sa société était de nature civile, à savoir juridique et comptable. Il en déduit que l'article L. 442-1, II du code de commerce ne peut trouver à s'appliquer, d'une part puisque M. [A] n'est pas habilité à exercer les prestations effectuées qui sont réservées aux experts comptables diplômés, et d'autre part, puisque les activités de conseil n'entrent pas dans le champ du texte.

Sur la brutalité de la rupture, il invoque au contraire une relation précaire, intermittente et non continue et dit par conséquent, que la rupture ne pouvait pas être brutale. Il ajoute M. [A] était sollicité pour des missions ponctuelles, que les sociétés ayant besoin d'assistance ont été cédées, démantelées ou mises en sommeil, de sorte qu'il y a eu simplement une cessation naturelle d'activité caractérisée par un arrêt total d'activité. Cette situation n'a plus permis de confier de nouvelles missions à ce prestataire extérieur.

Réponse de la Cour,

La SAS Forecasting Services a été immatriculée le 11 juin 2016 au registre du commerce et des sociétés avec pour activité : prestations de services et de conseils en matière de gestion et d'organisation.

Exerçant une activité de conseils en affaires, l'activité de l'appelante est libérale. Ainsi, l'article L.442-1, II du code de commerce ne peut trouver à s'appliquer et le tribunal doit être approuvé d'avoir débouté la société Forecasting Services de ses demandes sur ce fondement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

La SAS Forecasting Services M qui succombe en ses demandes, est condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Elle est condamnée en cause d'appel à verser à M.et Mme [P] ainsi qu'aux sociétés FIBALKO, ARJIL CAPITAL, ACG SA, ACG HOLDING et NEWTON PARTNERS la somme globale de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'écarter les pièces n° 32 et 33 ;

Statuant à nouveau de ce chef infirmé et y ajoutant :

Rejette les pièces 32 et 33 des débats ;

Déboute la société Forecasting Services de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

La condamne aux dépens d'appel et à verser à M.et Mme [P] ainsi qu'aux sociétés FIBALKO, ARJIL CAPITAL, ACG SA, ACG HOLDING et NEWTON PARTNERS la somme globale de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.