Cass. 1re civ., 18 novembre 1964, n° 60-12.865
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Blin
Rapporteur :
M. Thirion
Avocat général :
M. Lindon
Avocats :
Me Désaché, Me Giffard, Me Defrénois
SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QU'IGNACIO X..., DE NATIONALITE VENEZUELIENNE A, AVANT DE REGAGNER SON PAYS D'ORIGINE, CONSTITUE POUR MANDATAIRE EN VERTU D'UNE PROCURATION DRESSEE LE 15 SEPTEMBRE 1953 PAR UN NOTAIRE DE SAINT-SEBASTIEN (ESPAGNE) SON PREPOSE, VINCENTE B..., A L'EFFET D'ADMINISTRER LE DOMAINE DE BEAUMONT A CUSSAC, QU'IL AVAIT ACQUIS EN 1932 ET DE FAIRE DES DEMARCHES EN VUE DE SA VENTE;
QUE SUIVANT UN ACTE SOUS SEING PRIVE PORTANT LA DATE DU 4 NOVEMBRE 1954, MAIS QUI N'A ETE ENREGISTRE QUE LE 8 FEVRIER 1955, VINCENTE B... A DONNE A BAIL A BOUVIER O'COTTEREAU, POUR UNE DUREE DE TROIS, SIX OU NEUF ANNEES RENOUVELABLES AU GRE DU PRENEUR ET MOYENNANT UN FERMAGE ANNUEL DE 200.000 ANCIENS FRANCS, L'ENTIER DOMAINE SUR LEQUEL IL A, EN OUTRE, CONSENTI UNE PROMESSE DE VENTE A CELUI-CI;
QU'IGNACIO ANDRADE ET SON FILS VINCENTE, DEVENUS CO-PROPRIETAIRES INDIVIS DU DOMAINE, APRES LE DECES SURVENU A CARACAS, LE 6 NOVEMBRE 1954, DE DAME X... LEUR EPOUSE COMMUNE EN BIENS ET MERE, ONT INTRODUIT CONTRE BOUVIER O'COTTEREAU UNE ACTION TENDANT A LA NULLITE DU BAIL;
QU'IL A ETE FAIT DROIT A CETTE DEMANDE;
ATTENDU QU'IL EST TOUT D'ABORD FAIT GRIEF A L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR, POUR ADMETTRE LA RECEVABILITE DE L'ACTION ENTREPRISE PAR ANDRADE Z... Y... AVEC SON C..., CONSIDERE QUE LE DOMAINE DE BEAUMONT FAISAIT PARTIE DE LA COMMUNAUTE DE BIENS AYANT EXISTE ENTRE IGNACIO X... ET SON EPOUSE ET ETAIT, APRES LA MORT DE CELLE-CI, TOMBE EN INDIVISION ENTRE ANDRADE C... ET Z..., ALORS QUE BOUVIER O'COTTEREAU AVAIT SOUTENU, DANS DES CONCLUSIONS LAISSEES, SELON LE MOYEN, SANS REPONSE QUE, LES EPOUX X..., ETANT DE NATIONALITE ETRANGERE ET S'ETANT MARIES A L'ETRANGER, LEUR REGIME MATRIMONIAL DEPENDAIT, A DEFAUT DE CONTRAT DE MARIAGE, DE LA LOI DU PAYS OU ILS AVAIENT, APRES LEUR MARIAGE, FIXE LE FOYER CONJUGAL ET QUE CE PAYS N'AVAIT PAS ETE PRECISE;
MAIS ATTENDU QUE C'EST AU VU NOTAMMENT DE L'ACTE DE MARIAGE DES EPOUX X... DRESSE A CARACAS (VENEZUELA) PAYS OU ILS ETAIENT DOMICILIES, D'UN CERTIFICAT DE COUTUME ATTESTANT QU'A DEFAUT DE CONTRAT PEALABLE A LEUR UNION, CEUX-CI SE TROUVAIENT MARIES SOUS LE REGIME DE LA COMMUNAUTE, DE LA TRADUCTION CONFORME ENFIN DE LA DECLARATION DE SUCCESSION SOUSCRITE AUX AUTORITES FISCALES DE CARACAS, FAISANT APPARAITRE QU'ANDRADE C... ET Z... ETAIENT LES SUCCESSEURS DIRECTS DE DAME X..., DECEDEE AB INTESTAT, QUE LE JUGEMENT DONT L'ARRET ATTAQUE ADOPTE LES MOTIFS A CONSIDERE QUE LES DROITS D'ANDRADE A..., LES JUGES DU FOND QUI N'AVAIENT PS A RECHERCHER QUEL POUVAIT ETRE LE REGIME MATRIMONIAL DES EPOUX X..., MAIS SEULEMENT SI ANDRADE Z... JUSTIFIAIT D'UN INTERET DANS LA CAUSE, ONT REPONDU AUX CONCLUSIONS DONT ILS ETAIENT SAISIS ET QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE;
SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES TROIS PREMIERES BRANCHES : ATTENDU QUE LE POURVOI REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR ANNULE LE BAIL LITIGIEUX, AUX MOTIFS QUE LE MANDATAIRE DU PROPRIETAIRE AVAIT OUTREPASSE LES TERMES DE SON MANDAT ET QU'EN OUTRE L'ACTE DU BAIL, ANTIDATE, SE SITUAIT EN REALITE A UNE DATE OU LE DOMAINE ETAIT DEVENU INDIVIS ENTRE ANDRADE C... ET Z... ET QUE CE DERNIER N'AVAIT PAS RATIFIE LA PROCURATION DONNEE PAR SON C..., ALORS, D'UNE PART, QUE VINCENTE B... AVAIT RECU LES POUVOIRS D'ADMINISTRATION LES PLUS ETENDUS, LESQUELS COMPRENAIENT, PAR DEFINITION CELUI DE LOUER LE FONDS GERE, ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA DATE PORTEE A L'ACTE FAIT FOI ENTRE LES PARTIES, QUE LA PREUVE DE L'ANTIDATE NE RESSORT PAS DES MOTIFS DES JUGES DU FOND ET QUE BOUVIER O'COTTEREAU SE SERAIT EXPRESSEMENT PREVALU DANS SA CORRESPONDANCE AVEC ANDRADE C... DE SA QUALITE DE FERMIER, ALORS, ENFIN, QUE LE DECES DE DAME X... N'AURAIT PAS MIS FIN AU MANDAT DONNE PAR SON EPOUX ET QUE CE MANDAT AVAIT ETE RATIFIE APRES LE DECES, PAR LES COPROPRIETAIRES INDIVIS;
MAIS ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND AYANT PROCEDE A L'ANALYSE DU CONTENU DE LA PROCURATION DONNEE A VINCENTE B... ET RELEVE QU'ELLE COMPORTAIT UNE LIMITATION DE SES POUVOIRS AUX ACTES DE GESTION STRICTEMENT INDISPENSABLES A LA CONSERVATION DU DOMAINE, ONT, PAR UNE INTERPRETATION NECESSAIRE DE CET ACTE, EXCLUSIVE DE DENATURATION, SOUVERAINEMENT ESTIME QUE LE MANDATAIRE AVAIT OUTREPASSE SON MANDAT ET N'AVAIT PU ENGAGER SON MANDANT;
D'OU IL SUIT QU'ABSTRACTION FAITE DES AUTRES MOTIFS VAINEMENT CRITIQUES PAR LE POURVOI, QI SONT SURABONDANTS, L'ARRET ATTAQUE EST, SUR CE POINT JUSTIFIE ET QUE LE MOYEN EST DONC, DANS SES TROIS PREMIERES BRANCHES, SANS AUCUN FONDEMENT;
ET SUR LA QUATRIEME BRANCHE DU SECOND MOYEN : ATTENDU QUE, NON MOINS VAINEMENT, BOUVIER 0'COTTEREAU REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR LAISSE SANS REPONSE DES CONCLUSIONS, PAR LESQUELLES IL FAISAIT VALOIR QUE, MEME EN L'ABSENCE D'UN MANDAT VALABLE, LE MANDATAIRE AVAIT AGI COMME GERANT D'AFFAIRE ET QUE LES ACTES PAR LUI ACCOMPLIS EN CETTE QUALITE ENGAGEAIENT LES CONSORTS X... A RAISON, D'UNE PART DE LEUR UTILITE RECONNUE, A RAISON, D'AUTRE PART DE LA RATIFICATION DES ACTES DU GERANT PAR LES MAITRES DE L'AFFAIRE;
ATTENDU, EN EFFET, QU'APPRECIANT LE COMPORTEMENT DE B..., LA COUR D'APPEL DECLARE QUE CELUI-CI "APPARAIT COMME UN MANDATAIRE OU UN GERANT D'AFFAIRE NON SEULEMENT ABUSIF MAIS ENCORE INFIDELE";
QU'ELLE AJOUTE "QUE LA COLLUSION ENTRE O'COTTEREAU ET B..., SPECULANT SUR L'ELOIGNEMENT DU PROPRIETAIRE EST DONC MANIFESTE ET QU'ELLE A ETE DOLOSIVE POUR X..., DES LORS QU'ELLE DONNAIT A O'COTTEREAU UN TITRE SUBSIDIAIRE POUR SE MAINTENIR SUR LE DOMAINE, S'IL SE TROUVAIT DANS L'IMPOSSIBILITE DE TROUVER LES FONDS POUR PAYER SON ACQUISITION";
QU'EN OUTRE, LE PREMIER JUGE, AYANT ESTIME QUE LA PREUVE N'ETAIT PAS RAPPORTEE D'UNE RATIFICATION DES ACTES ACCOMPLIS EN VERTU DU MANDAT OUTREPASSE, LA COUR D'APPEL, EN ADOPTANT CE MOTIF A REPONDU AUX CONCLUSIONS PRETENDUMENT DELAISSEES;
D'OU IL SUIT QUE CETTE DERNIERE BRANCHE DU MOYEN N'EST PS MIEUX FONDEE QUE LES PRECEDENTES ET QUE L'ARRET, MOTIVE, A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 25 MAI 1960 PAR LA COUR D'APPELR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX.