Cass. 3e civ., 11 janvier 1995, n° 93-11.361
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
M. Villien
Avocat général :
M. Vernette
Avocats :
SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article 1998 du même Code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 24 septembre 1992), qu'en 1988, la société civile immobilière de l'Archet (la SCI), maître de l'ouvrage, a chargé la société Bénodet Décor, entrepreneur principal, de l'édification d'un groupe d'immeubles sous la maîtrise d'oeuvre de M. Y..., architecte ; que cet entrepreneur a sous-traité à M. Kerc'hrom les travaux de revêtements de sols ; qu'après mise en liquidation judiciaire de la société Bénodet Décor, le sous-traitant a réclamé à la SCI, le paiement du prix de ses ouvrages ;
Attendu que, pour accueillir la demande de M. Kerc'hrom, l'arrêt retient que l'architecte de l'opération avait reçu de la SCI une mission générale de maîtrise d'oeuvre incluant l'aspect financier et comptable de l'opération et lui conférant directement mandat de régler les entreprises, que c'est en vertu de ce mandat que l'architecte a signé et approuvé, pour le compte du maître de l'ouvrage, la facture établie par M. Kerc'hrom, qu'un agrément du sous-traitant a été ainsi donné par l'intermédiaire de l'architecte, que la réalité de cet agrément est confortée par différents courriers de M. Y..., adressés à la gérante de la SCI pour obtenir règlement de la facture en cause, auxquels cette dernière n'a pas répondu, que, par son silence et son inaction, la SCI a tacitement ratifié le prétendu dépassement par M. Y... de sa mission ou de ses pouvoirs et que, par son attitude, elle a, à tout le moins, laissé croire que son architecte agissait sur la base d'un mandat de sa part et dans les limites de celui-ci ;
Qu'en statuant, ainsi, alors que le contrat d'architecte conclu entre la SCI et M. Y... ne conférait à ce dernier aucun mandat d'agréer les entrepreneurs ou sous-traitants, mais seulement mission de vérifier les décomptes présentés par eux et de soumettre des propositions de règlement au maître de l'ouvrage, sans caractériser aucun acte positif manifestant sans équivoque la volonté du maître de l'ouvrage de ratifier le dépassement de mandat de son architecte et alors que l'existence d'un mandat apparent ne pouvait être justifiée par des faits postérieurs à l'agrément allégué, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 septembre 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.