Cass. 3e civ., 23 novembre 1988, n° 87-12.577
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Francon
Rapporteur :
Mme Giannotti
Avocat général :
M. Marcelli
Avocat :
SCP Boré et Xavier
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme Z..., qui avaient chargé MM. X... et A..., architectes, de la construction d'une maison, font grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 18 décembre 1986) de les avoir condamnés au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen, "que les architectes sont tenus à l'égard du maître de l'ouvrage d'un devoir de conseil ; qu'il résulte des conclusions du rapport d'expertise adopté par les juges du fond, que MM. X... et A..., dûment avisés de la date de caducité du premier permis de construire délivré au maître de l'ouvrage n'avaient pas utilement conseillé celui-ci sur la marche à suivre, ni même suggéré une demande de prorogation de permis ; qu'en ne recherchant pas si de ce fait les architectes n'avaient pas manqué à leur devoir de conseil en se bornant à estimer que les causes du retard apporté à l'édification de l'immeuble résidaient dans les modifications imposées par le maître de l'ouvrage et le changement de maître d'oeuvre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1992 du Code civil" ;
Mais attendu que la cour d'appel a légalement justifié sa décision en retenant que les mutiples modifications imposées par le seul M. Z... ont été, avec les changements des maîtres d'oeuvre, cinq au total, voulues par M. Z..., les seules causes des retards apportés à l'édification de l'immeuble ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles 1984, 1998 du Code civil, ensemble l'article 1202 de ce code ;
Attendu que pour condamner M. Z... à payer solidairement avec son épouse séparée de biens, des honoraires à MM. X... et A..., l'arrêt retient que M. Z... a agi en la qualité de mandataire apparent de son épouse ;
Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, que l'exécution des obligations contractuelles passées par un mandataire au nom et pour le compte de son mandant incombe à ce dernier seul, que, d'autre part, la solidarité ne se présume pas, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur les troisième, quatrième, cinquième et sixième moyens réunis :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour condamner M. Z... et Mme Z... solidairement à payer aux architectes la somme de 10 000 francs pour résistance injustifiée et leur allouer une même somme pour appel abusif, l'arrêt se borne à énoncer, d'une part, que la décision dont appel a justement constaté la résistance abusive que M. Z... a opposée à une demande en paiement d'honoraires parfaitement fondée et non exagérée, d'autre part, que si la résistance à la demande en paiement est abusive, l'appel l'est également ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser le comportement fautif des époux Z..., ni relever à leur encontre aucun fait de nature à faire dégénérer en abus leur droit à agir en justice, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit M. Z... solidairement tenu des honoraires dues par son épouse, et en ce qu'il a alloué aux architectes des dommages-intérêts pour résistance et appel abusif, l'arrêt rendu le 18 décembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.