Cass. com., 19 octobre 1960, n° 58-11.922
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lescot
Rapporteur :
M. Giacobbi
Avocat général :
M. De Bonnefoy Des Aulnais
Avocats :
Me Croquez, Me Brouchot
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (BORDEAUX, 28 AVRIL 1958) QUE LA SOCIETE Z... ET EMILE Z... AYANT DEMANDE AUX CONSORTS Y... LE RENOUVELLEMENT DU BAIL ORIGINAIREMENT CONSENTI A EMILE Z..., DES LOCAUX A USAGE DE CHARCUTERIE OU CETTE SOCIETE EXPLOITAIT SON COMMERCE, L'ARRET ATTAQUE LES A DEBOUTES DE LEUR DEMANDE ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A CETTE DECISION D'AVOIR DECLARE QUE L'APPORT A LA SOCIETE Z..., DES DROITS D'EMILE Z..., A L'ENCONTRE DES CONSORTS Y... N'ETAIT PAS OPPOSABLE A CES DERNIERS, FAUTE DE LEUR AVOIR ETE SIGNIFIE CONFORMEMENT A L'ARTICLE 1690 DU CODE CIVIL, ALORS D'UNE PART QUE Z... ET LA SOCIETE LAURENT ET CIE INVOQUAIENT LE FAIT QUE L'APPORT EN SOCIETE DONT S'AGIT NE CONCERNAIT PAS UNE SIMPLE CREANCE MAIS UNE UNIVERSALITE DE BIENS, LE FONDS DE COMMERCE DANS TOUS SES ELEMENTS, ET ALORS D'AUTRE PART, QUE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 1690 DU CODE CIVIL QUI VISENT A PORTER A LA CONNAISSANCE DU DEBITEUR CEDE LA CESSION DE CREANCE EFFECTUEE PAR SON CREANCIER A UN TIERS, LE CESSIONNAIRE, NE SAURAIENT A LA LETTRE ET EN ESPRIT, ETRE APPLICABLES A UN APPORT EN SOCIETE D'UN DROIT DE CREANCE, LEQUEL APPORT EST L'OBJET D'UNE PUBLICITE ERGA OMNES QUI INFORME NECESSAIREMENT LE DEBITEUR CEDE ;
MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR RAPPELE LES TERMES DU BAIL CONSENTI A EMILE Z... ET SUIVANT LEQUEL LE PRENEUR S'INTERDISAIT, DE CEDER OU DE SOUS-LOUER SANS AUTORISATION DU BAILLEUR SON DROIT AU BAIL A D'AUTRES QU'A SON SUCCESSEUR DANS LE MEME COMMERCE, ET S'OBLIGEAIT A NE CONSENTIR AUCUNE CESSION OU SOUS-LOCATION, QUE PAR ACTE AUTHENTIQUE AUQUEL LE BAILLEUR SERAIT APPELE A CONCOURIR, L'ARRET ATTAQUE ENONCE QUE, SUIVANT ACTE DES 2, 8, 10 ET 21 JUILLET 1953, EMILE Z... ET SES FILS CONSTITUERENT UNE SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE A LAQUELLE E Z... FIT APPORT DE SON FONDS DE COMMERCE DE CHARCUTERIE ET DU DROIT AU BAIL, QUE CET APPORT DU DROIT AU BAIL QUI, DANS LES RAPPORTS ENTRE Z... ET LES BAILLEURS DOIT ETRE SEPARE DES AUTRES ELEMENTS COMPOSANT LE FONDS, A ETE FAIT A LA PERSONNE MORALE DE LA SOCIETE QUI POSSEDE UNE INDIVIDUALITE DISTINCTE DE LA SIENNE ;
QU'IL CONSTITUE UNE CESSION A TITRE ONEREUX RENDANT APPLICABLE LA SECONDE PARTIE DE LA CLAUSE DE L'ARTICLE 5 QUI OBLIGEAIT LE PRENEUR A APPELER LES BAILLEURS A CONCOURIR A L'ACTE AUTHENTIQUE DESTINE A CONSTATER TOUTE CESSION DE BAIL A UN TIERS, QUE CELLE-CI SOIT OU NON ACCOMPAGNEE D'UNE CESSION DE L'ENSEMBLE DU FONDS DE COMMERCE ;
QUE CETTE CLAUSE AYANT POUR FIN DE PREVENIR LES BAILLEURS DE LA CESSION ET DE LEUR PROCURER UN TITRE EXECUTOIRE A L'EGARD DU CESSIONNAIRE, SON EXECUTION PRESENTAIT POUR CEUX-CI UN INTERET ESSENTIEL ;
QUE CETTE OMISSION QUI, SELON LA CLAUSE RESOLUTOIRE DE PLEIN DROIT INSCRITE DANS LE BAIL, DOIT ETRE SANCTIONNEE PAR LA RESILIATION CONSTITUE A FORTIORI UN GRAVE ET LEGITIME MOTIF DE REFUS DE RENOUVELLEMENT ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS QUI, ABSTRACTIONS FAITES D'UN MOTIF QUI PEUT ETRE TENU POUR SURABONDANT, REPONDAIENT AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE LA COUR N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION EN DECIDANT QUE LA DEMANDE DE RENOUVELLEMENT DEVAIT ETRE REJETEE ;
QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE DEUXIEME ET LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN LEURS DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR ADMIS QUE REVET UN CARACTERE DE LEGITIMITE ET DE GRAVITE SUFFISANT LE MOTIF TIRE PAR LES CONSORTS X... DU FAIT QU'ILS N'AVAIENT PAS ETE APPELES A L'ACTE D'APPORT EN SOCIETE ET N'EN ONT PAS RECU UNE GROSSE OFFERTE POSTERIEUREMENT A LEUR REFUS DE RENOUVELLEMENT MALGRE CETTE DOUBLE CONDITION PREVUE AU BAIL LORS DE CESSION, SANS AVOIR EGARD A TROIS MOYENS SOULEVES PAR LA SOCIETE Z..., ALORS QUE SA REPONSE POUVAIT MODIFIER TOTALEMENT SON APPRECIATION DES MOTIFS GRAVES ET LEGITIMES INVOQUES PAR LES BAILLEURS ET QUI TENAIENT : 1° AU FAIT QUE LE BAILLEUR AVAIT ETE A L'ORIGINE EGALEMENT LE VENDEUR DU FONDS DE COMMERCE ;
2° AU FAIT QUE LA SOCIETE Z... AVAIT UNE PERSONNALITE QUASI CONFONDUE AVEC CELLE DU PRENEUR ORIGINAIRE EN RAISON DE SON CARACTERE DE FAMILLE ET DE LA TRES GROSSE MAJORITE DES PARTS DETENUES PAR EMILE Z... QUI, DE SURCROIT EN ASSURAIT LA GESTION ;
3° AU FAIT QUE LES BAILLEURS N'AVAIENT SUBI AUCUN PREJUDICE PAR LE DEFAUT DE REMISE D'UNE GROSSE DE L'ACTE D'APPORT EN SOCIETE, N'AYANT JAMAIS EU A SE PLAINDRE NI D'UN DEFAUT DE PAYEMENT NI D'UN MANQUEMENT QUELCONQUE AUX OBLIGATIONS QUI IMCOMBAIENT A LA SOCIETE LOCATAIRE, ALORS D'AUTRE PART, QUE Z... ET LA SOCIETE Z... INVOQUAIENT LA QUASI-CONFUSION DE LEUR PERSONNALITE ET QU'ENFIN, LE CONTRAT DE BAIL PREVOYAIT LA SOLIDARITE ENTRE Z... ET SES CESSIONNAIRES EVENTUELS, CE QUI AVAIT POUR EFFET DE RENDRE PLUS INDIFFERENTS AUX BAILLEURS LA SUBSTITUTION, SEULEMENT JURIDIQUE, DES PERSONNALITES DE Z... ET DE LA SOCIETE DONT Z... ETAIT LA SUBSTANCE ESSENTIELLE PAR SA PERSONNE, ET, A LA FOIS, L'AME ET LE REPRESENTANT ;
MAIS ATTENDU D'UNE PART QUE LA COUR QUI N'ETAIT PAS TENUE DE SUIVRE LES PARTIES DANS LE DETAIL DE LEUR ARGUMENTATION A CONSTATE D'UNE PART QUE L'APPORT EN SOCIETE AVAIT EU POUR EFFET DE TRANSMETTRE LE DROIT AU BAIL A UNE PERSONNE MORALE DISTINCTE DE LA PERSONNALITE DU BAILLEUR ORIGINAIRE ET, D'AUTRE PART, QUE CE DERNIER AVAIT MANQUE A SES OBLIGATIONS CONTRACTUELLES, QU'ELLE A AINSI REPONDU AU MOINS IMPLICITEMENT, MAIS NECESSAIREMENT AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE, D'OU IL SUIT QUE LES DEUXIEME ET TROISIEME MOYENS SONT SANS FONDEMENT ET QUE L'ARRET ATTAQUE, DUMENT MOTIVE, A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 28 AVRIL 1958, PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX.