Cass. com., 12 juillet 2011, n° 09-70.956
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Petit
Avocats :
SCP Gaschignard, SCP Hémery et Thomas-Raquin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2009) que M. X..., gérant de la société Maxim's Limited qui avait autorisé la société Y... communication, exploitant un fonds de commerce d'agence de voyages sis 5 rue Royale à Paris 8e, à faire usage de l'appellation Maxim's voyages à titre de nom commercial et d'enseigne, a, par lettre du 3 décembre 2004, demandé à M. Y..., gérant de la société Y... communication, de ne plus utiliser la marque Maxim's voyages en tant que dénomination sociale ou nom commercial ; que contestant la validité de cette lettre et estimant qu'ils pouvaient prétendre à un préavis de deux ans ainsi qu'au paiement de dommages-intérêts, M. Y... et la société Y... communication ont assigné la société Maxim's Limited, laquelle a reconventionnellement sollicité la condamnation de ces derniers pour contrefaçon de la marque " Maxim's voyages " ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... et la société Y... communication font grief à l'arrêt d'avoir écarté des débats les conclusions qu'ils avaient signifiées le 16 juin 2009, jour de l'ordonnance de clôture, alors, selon le moyen :
1°/ que sont recevables les conclusions déposées le jour de la clôture avant le prononcé de l'ordonnance de clôture sauf à ce qu'il soit établi que leur dépôt caractérise une atteinte aux droits de la défense ; que la cour d'appel, qui a écarté des débats les conclusions déposées par la société Y... communication et M. Y... le jour de la clôture sans rechercher si ces conclusions nécessitaient une réponse ni caractériser les circonstances qui auraient empêché le respect du principe de la contradiction, a privé de base légale sa décision au regard des articles 15, 16, 779 et 783 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il incombe au juge de faire observer le principe de la contradiction tandis que les parties peuvent conclure jusqu'à la date de la clôture ; qu'en écartant des débats les conclusions déposées par la société Y... communication et M. Y... le jour de la clôture, au motif que ces parties n'établissaient pas avoir satisfait aux exigences de l'article 15 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé les articles 15, 16, 779 et 783 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a souverainement retenu que les conclusions signifiées le 16 juin 2009, jour de l'ordonnance de clôture, n'avaient pas été produites en temps utile au sens des articles 15 et 16 du code de procédure civile pour permettre le respect du principe de la contradiction ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Y... communication font encore grief à l'arrêt d'avoir dit que la résiliation du contrat de licence conclu entre la société Maxim's Limited et la société Y... communication avait pris effet le 6 juin 2005 et qu'en poursuivant, postérieurement à cette date, l'exploitation de son agence de voyage sous l'enseigne " Maxim's voyages ", la société Y... communication s'était rendue coupable d'actes de contrefaçon par reproduction de la marque " Maxim's voyages " dont la société Maxim's Limited est titulaire et d'avoir condamné la société Y... communication à payer des dommages-intérêts à la société Maxim's Limited, alors, selon le moyen :
1°/ que le droit tant sur le nom commercial que sur l'enseigne s'acquiert par le premier usage public ; qu'à partir de cette date il constitue une priorité d'usage sur une marque enregistrée postérieurement ; que l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe comme nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est antérieure à l'enregistrement ; que saisie par M. Y... et la société Y... communication de conclusions faisant valoir que la société Y... communication avaient exploité une agence de voyage à l'enseigne Maxim's voyages à compter de 1994 avant de déposer l'appellation en tant que marque le 15 avril 1999, puis de céder cette marque à la société Maxim's Limited le 4 août 1999 de sorte qu'en application de l'article L. 713-6 a) du code de la propriété intellectuelle, elle ne pouvait se voir imputer la contrefaçon de la marque cédée à la société Maxim's Limited dès lors qu'elle bénéficiait d'une priorité d'usage sur l'appellation en cause, la cour d'appel qui a interdit à la société Y... communication de faire usage de l'appellation Maxim's voyages à titre d'enseigne et l'a condamnée pour atteinte au droit à la marque, sans rechercher si cette société ne bénéficiait pas d'une priorité d'usage sur la marque enregistrée et cédée postérieurement, a privé sa décision de base légale au regard des article L. 711-4 et L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que la société Y... communication faisait valoir que l'autorisation d'utiliser l'appellation Maxim's Voyages à titre de nom commercial et d'enseigne que lui avait conférée M. X... n'avait été révoquée par lettre du 3 décembre 2004 que pour l'utilisation de la marque Maxim's voyages en tant que dénomination sociale et nom commercial, et que l'interdiction d'utiliser l'appellation à titre d'enseigne ne lui avait été notifiée que le 18 mai 2005 ; que la cour d'appel, qui a jugé que la résiliation du contrat de licence avait pris effet le 6 juin 2005 au terme du préavis de six mois prévu au contrat, sans rechercher à quelle date M. X... avait fait interdiction à la société Y... communication d'utiliser l'appellation Maxim's voyages à titre d'enseigne, a privé de base légale sa décision au regard de l'article 1134du code civil ;
3°/ que tout jugement doit être motivé ; que la cour d'appel, qui a laissé sans réponse les conclusions de la société Y... communication faisant valoir que la société Maxim's Limited ne justifiait d'aucun préjudice causé par l'atteinte porté à sa marque Maxim's voyages, qu'en effet, Maxim's Limited ne justifiait ni de l'exploitation de cette marque sous quelque forme que ce soit, ni de l'intention de l'exploiter, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que M. Y... et la société Y... communication n'avaient utilisé l'appellation Maxim's voyages, même avant qu'elle ne soit enregistrée en tant que marque, que dans le cadre d'une autorisation accordée par l'une des sociétés dirigées par M. X..., la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le contrat du 9 août 1999 autorisait la société Y... communication à utiliser l'appellation Maxim's voyages à titre de nom commercial et d'enseigne ; qu'il retient que ce contrat a été valablement résilié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 3 décembre 2004 à M. Y... représentant légal de la société Y... communication, reçue le 6 décembre suivant par son destinataire et que la résiliation a pris effet le 6 juin 2005 au terme du préavis de six mois prévu au contrat ; que la cour d'appel a par là-même, implicitement mais nécessairement, retenu que l'interdiction d'usage de l'enseigne avait été notifiée le 3 décembre 2004 et ne résultait pas d'une lettre du 18 mai 2005 ;
Attendu, enfin, que l'arrêt ayant relevé que les actes de contrefaçon s'étaient poursuivis après le jugement, le moyen, pris en sa troisième branche, ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain des juges du fond d'apprécier l'importance du préjudice qui en est résulté ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Y... communication font enfin grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que le caractère brutal de la résiliation d'un contrat à exécution successive à durée indéterminée s'apprécie au moment de la rupture ; que la société Y... communication soutenait que l'abus de droit commis par la société Maxim's Limited résultait de ce que celle-ci n'avait pas respecté le préavis de six mois tel que contractuellement fixé par les parties, puisqu'au contraire, dans sa lettre notifiée le 6 décembre 2004, M. X... avait imparti un délai expirant au 31 décembre 2004 pour quitter les locaux prêtés et cesser d'utiliser la marque Maxim's voyages ; qu'en retenant en l'espèce que la rupture du contrat de licence dont bénéficiait la société Y... communication depuis dix ans, notifiée par lettre du 3 décembre 2004 n'était pas brutale puisqu'il était permis de retenir que la rupture devait prendre effet au 6 juin 2005, sans rechercher si la brièveté du délai imparti ne caractérisait pas par elle-même la brutalité de la rupture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil et L. 442-6 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la rupture notifiée le 3 décembre 2004 devait prendre effet le 6 juin 2005 et non le 31 décembre 2004, la cour d'appel n'avait pas à faire une recherche que ses constatations rendaient inopérantes ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.