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Décisions

CA Bordeaux, 4e ch. com., 28 novembre 2023, n° 23/02835

BORDEAUX

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

L'Atelier Charentaises (SARL)

Défendeur :

ADL (SARL), Lagarde (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Franco

Conseillers :

Mme Goumilloux, Mme Masson

Avocats :

Me Janoueix, Me Descours, Me Pechier

T. com. Angoulême, du 8 juin 2023, n° 20…

8 juin 2023

EXPOSE DU LITIGE : 

La société Lagarde est spécialisée dans la commercialisation d'articles chaussants.

Elle exploite trois établissements à [Localité 9], [Localité 5] et [Localité 6].

Jusqu'au 14 décembre 2016, elle avait pour associés les personnes suivantes :

[A] [X]

[S] [X]

[W] [X]

[Y] [X]

La société La financière de la Forge (société ayant elle-même pour associés [F] [X], [D] [X], [C] [K] épouse [X] et Mme [N] [X]).

La société Jeva-[X], immatriculée le 21 mai 1954, avait pour activité la fabrication des mêmes articles chaussants (charentaises).

Elle avait pour associés:

- [Z], [D], [S], [F], [N], [B] [O], [C], [W] et [Y] [X], ainsi que la société Financière de la Forge.

Par acte en date du 14 décembre 2016, les associés de la société Lagarde, ont cédé la totalité des actions qu'ils détenaient dans le capital de cette personne morale à la société ADL, représentée par M. [R] [M], au prix de 636.274,11euros.

L'acte de cession contenait en son article 5 une clause de non-concurrence à la charge des cédants.

Le même jour, la société Lagarde désormais représentée par M. [R] [M], a signé avec la société Jeva-[X], en renouvellement de contrats déjà en cours :

- un contrat de licence de marque portant sur les marques [X], Jeva, rd Confort [X], Rd Confort, la Ptite fabrique, [Localité 12] Couture, Comme Pépé... par [X] pour une durée de 6 années,

- un contrat de distribution sélective pour une durée de 6 années,

- un bail commercial portant sur un immeuble à usage de magasin à [Localité 6],

Par jugement du 1er février 2018, le tribunal de commerce d'Angoulême a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Jeva-[X].

Le 18 mai 2018, le Tribunal de Commerce d"Angoulême a arrêté le plan de cession de la société Jeva-[X] au bénéfice de la société Chateaubriant Investissement pour un prix de 172.000 euros.

Aux repreneurs désignés dans le jugement s'est substituée la société La Manufacture Charentaise.

Par un jugement du 05 juillet 2018, le Tribunal de Commerce d'Angoulême a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Jeva-[X].

Le 15 novembre 2018, la société Manufacture Charentaise a signé l'acte de cession.

Le 19 novembre 2018, la société Manufacture Charentaise a mis en demeure la société Lagarde de cesser d'utiliser les deux marques Jeva et [X] considérant que l'utilisation de celles-ci constituait des faits de contrefaçon de marque en application des articles L. 713-2 et L. 713-3 du Code de Propriété Intellectuelle.

Le 25 janvier 2019, la SELARL Hirou, liquidateur de la société Jeva-[X], a déposé une requête devant le juge commissaire afin qu'il prononce la résiliation du contrat de licence de marque signé, le 14 décembre 2016, entre la société Lagarde et la société Jeva-[X].

Par une ordonnance du 24 juillet 2019, le juge-commissaire a débouté la SELARL Hirou de l'ensemble de ses demandes considérant notamment que le contrat de licence de marque avait été transféré avec les marques à la société Manufacture Charentaise, ce contrat constituant l'accessoire de l'actif cédé.

Le 15 novembre 2019, la société Manufacture Charentaise a été placée en liquidation judiciaire.

Le 27 mai 2020, la société Atelier Charentaises s'est vu attribuer les actifs de la société Manufacture Charentaise au prix de 205.000 euros.

Le 06 novembre 2020, la société Lagarde, par l'intermédiaire de son conseil, a écrit à la société l'Atelier Charentaises afin de lui rappeler les termes de la clause de non-concurrence figurant dans l'acte de cession ainsi que les termes des contrats de licence de marque et de distribution signés le 14 décembre 2016.

Le 17 décembre 2020, le conseil de la société l'Atelier Charentaises écrivait au conseil de la société Lagarde pour lui indiquer qu'une commande, que celle-ci venait de lui passer, n'avait pas pu être honorée du fait d'un problème de confirmation de commande et d'un défaut de stock.

La société Lagarde a par la suite effectué de nouvelles commandes auprès de la société Atelier Charentaises et s'est plainte de l'absence de réponse et de livraison.

Par une lettre recommandée en date du 11 juin 2021, la société Atelier Charentaises a notifié à la société Lagarde son intention de ne pas renouveler le contrat de licence de marque à l'issue de sa période initiale, soit le 14 décembre 2022.

Par acte du 29 novembre 2021 les sociétés Lagarde et ADL ont assigné l'Atelier Charentaise, [F] [X] et [L] [V] afin qu'ils soient condamnés à respecter les termes de la clause de non-concurrence figurant dans l'acte de cession du 14décembre 2016 et subsidiairement les termes du contrat de licence de marque et du contrat de distribution.

Par jugement en date du 8 juin 2023, le tribunal de commerce d'Angoulême a statué comme suit :

Vu les articles 1102, 1103, 1104, 1217, 1231-2, 2224 du code Civil,

Vu l'article 5 du l'acte de cession du 14 décembre 2016,

Déclare irrecevable l'action en nullité de la clause de non-concurrence,

Dit et juge que la clause de non-concurrence insérée à l'acte de cession du 14 décembre 2016 est applicable et opposable à la SARL Atelier charentaise, à M. [F] [X] et à M. [L] [V]

Constate la violation de la clause de non-concurrence par la SARL Atelier charentaise, M. [F] [X] et M. [L] [V] ,

Condamne in solidum la SARL atelier charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer à la SARL ADL et à la SAS Lagarde la somme de 679.886,50 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2021,

Rejette la demande en indemnisation au titre du préjudice moral,

Condamne la SARL Atelier charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à cesser immédiatement la fabrication et la commercialisation d'articles chaussants sur l'ensemble du territoire, exception faite de [Localité 12] intra-muros, et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande subsidiaire,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la SARL Atelier Charentaise, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer à la SARL A.D.L. et la SAS Lagarde la somme de l0.000 euros,

Vu l'article 696 du Code de Procédure Civile,

Condamne in solidum la SARL Atelier Charentaise, M. [F] [X] et M. [L] [V] à tous les dépens,

Liquide les dépens du présent jugement à la somme de 129,83euros,

Vu l''article 514 nouveau du code de procédure civile,

Dit que l'exécution provisoire de la décision est de droit y compris dans ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

Par déclaration en date du 14 juin 2023, la SARL Atelier Charentaises et MM. [X] et [V] ont régulièrement interjeté appel de ce jugement intimant les sociétés ADL et Lagarde.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par dernières conclusions notifiées le 2 octobre 2023, la société L'atelier charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] les appelants demandent à la cour de :

Vu le jugement du 8 juin 2023,

Vu l'article 9 du Code de procédure civile,

Vu l'article 1185, 1199 et 1231-1 et suivants, not. 1240 du Code civil,

Vu l'article 1842 du Code civil,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable l'action en nullité de la clause de non-concurrence ;

- dit et jugé que la clause de non-concurrence insérée dans l'acte de cession du 14 décembre 2016 est applicable et opposable à la SARL Atelier Charentaises, à M. [F] [X] et à M. [L] [V] ;

- constaté la violation de la clause de non-concurrence par la SARL Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V];

- condamné in solidum la SARL Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer à la SARL A.D.L et à la SAS Lagarde la somme de 679.886,50 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2021,

- condamné SARL Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à cesser immédiatement la fabrication et la commercialisation d'articles chaussants sur l'ensemble du territoire, exception faite de [Localité 12] intra-muros, et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande subsidiaire ;

- Vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamné in solidum la SARL Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer à la SARL A.D.L et la SAS Lagarde la somme de 10.000 euros ;

- condamné in solidum la SARL Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à tous les dépens ;

- liquidé les dépens du jugement à la somme de 129,83 euros ;

- dit que l'exécution provisoire de la décision est de droit y compris dans ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

Statuant à nouveau,

- Juger que la clause de non-concurrence insérée à l'acte de cession du 14 décembre 2016 n'est ni applicable, ni opposable à la société Atelier Charentaises et à Messieurs [F] [X] et [L] [V];

Prononcer la nullité de la clause de non-concurrence insérée à l'acte de cession du 14 décembre 2016.

Dès lors,

- juger que la société Atelier Charentaises et Messieurs [F] [X] et [L] [V] n'ont pas engagé leur responsabilité délictuelle au titre de la clause de non-concurrence stipulée à l'acte de cession du 14 décembre 2016,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés Lagarde et A.D.L. de leur demande indemnitaire au titre d'un prétendu préjudice moral.

Statuer sur la demande subsidiaire constituant appel incident des sociétés intimées.

Dès lors,

- juger que les contrats de licence de marque et de distribution sélective du 14 décembre 2016 n'ont pas été transférés à la société Atelier Charentaises et qu'ils ne sont ni applicables, ni opposables à la société Atelier Charentaises et à Messieurs [F] [X] et [L] [V];

- juger que la société Atelier Charentaises était bien fondée à ne pas livrer la société Lagarde,

- juger que la société Atelier Charentaises n'a pas engagé sa responsabilité contractuelle au titre des contrats de licence de marque et de distribution sélective du 14 décembre 2016,

En conséquence,

- débouter les sociétés Lagarde et A.D.L de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, à titre principal comme subsidiaire ;

- condamner in solidum les sociétés Lagarde et A.D.L à verser chacune à chacun des concluants, au titre de la procédure d'appel, la somme de 25.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par leurs dernières conclusions notifiées le 2 octobre, la société ADL et la société Lagarde demandent à la cour :

Vu les articles 1709 et s. du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu l'article 1231-1 et suivants du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces versées aux débats,

- déclarer les sociétés ADL et Lagarde recevables et bien fondées en leur appel incident,

Y faisant droit,

A TITRE PRINCIPAL :

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême le 8 juin 2023 en ce qu'il a condamné in solidum la société Atelier Charentaises, M. [F] [X], M. [L] [V] à payer aux sociétés ADL et Lagarde la somme de 679.886, 50 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les sociétés Lagarde et ADL du fait de la violation de la clause de non-concurrence contenue dans l'acte de cession du 14 décembre 2016 ;

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême le 8 juin 2023 en ce qu'il a rejeté la demande en indemnisation au titre du préjudice moral ;

STATUANT A NOUVEAU DE CES CHEFS DE JUGEMENT CRITIQUES :

- condamner la société Atelier Charentaises, M. [F] [X], et M. [L] [V] in solidum à payer aux sociétés ADL et Lagarde la somme de 879.886, 50 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les sociétés LAGARDE et ADL du fait de la violation de la clause de non-concurrence contenue dans l'acte de cession du 14 décembre 2016 ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême en ce qu'il a condamné la société Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à cesser immédiatement la fabrication et la commercialisation d'articles chaussants sur l'ensemble du territoire, exception faite de Paris intra-muros, et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision,

SUBSIDIAIREMENT, si la cour venait à rejeter les demandes de condamnation formées par les sociétés Lagarde et ADL sur le fondement de la clause de non-concurrence :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande subsidiaire,

STATUANT A NOUVEAU DE CE CHEF DE JUGEMENT CRITIQUE :

- condamner la société Atelier Charentaises à payer à la société Lagarde la somme de 750.000 euros HT à titre dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil du fait du non-respect des termes des contrats de licence de marque et de distribution;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné in solidum la société Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer à la société ADL et à la société Lagarde la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens ;

Et Y AJOUTANT :

- condamner la société Atelier Charentaises, M. [F] [X] et M. [L] [V] à payer aux sociétés Lagarde et ADL la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel,

- condamner la société Atelier Charentaises aux entiers dépens d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur les demandes fondées sur la clause de non-concurrence :

Concernant l'activité exercée :

1- Les appelants soutiennent que l'activité de la société L'atelier charentaises n'était ni identique, ni même similaire à celle de la société Lagarde, et se trouvait exclue du champ de la clause de non-concurrence.

Elle ajoute que pour les besoins de la clause de non-concurrence, les seules activités à exclure de la société Lagarde étaient la vente en gros d'articles chaussants destinés à une clientèle exclusivement de professionnels GSA, GSS et GSB (Pour Jeva-[X]), ainsi que la vente aux détaillants, et la vente au détail d'articles chaussants aux particuliers, mais alors exclusivement en ligne, au travers de sites marchands (pour la Pantoufle Charentaise).

Ils considèrent que les parties ont entendu exclure de la clause de non-concurrence les activités de vente en ligne et de production d'articles chaussants, auxquelles s'intéresse exclusivement la société L'atelier charentaises.

2- Les intimées répliquent que la clause de non-concurrence vise les activités de commercialisation d'articles chaussants, mais aussi de fabrication, sur le territoire national à l'exclusion de la zone de [Localité 12] intra-muros et ce sous réserve de cantonner cette activité sous l'enseigne [X].

Elles concluent en conséquence à la confirmation du jugement.

Sur ce :

3- Selon les dispositions de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

4- L'acte de cession des actions de la société Lagarde stipule en son article 5, au paragraphe Non-concurrence :

Les cédants s'interdisent pendant une durée de sept (7) ans à compter de la date de cession, sur le territoire national (à l'exclusion de la zone de [Localité 12] intra-muros, constituée par les arrondissements 1 à 20, sous réserve de cantonner cette activité sous l'enseigne [X]), d'entreprendre ou de s'intéresser, directement ou indirectement, notamment par l'intermédiaire de toute société ou membre de leur famille interposé(e), et à quelque titre que ce soit, notamment en qualité d'associé, d'actionnaire, de dirigeant, de mandataire social, de salarié, de conseil ou autre, rémunéré ou non, à toute entreprise, société ou personne morale ayant une activité identique ou similaire, connexe ou complémentaire à celle de la Société.

Il est ensuite précisé au même article que sans préjudice de l'application de la clause de non-concurrence visée ci-dessus, les sociétés Jeva [X] et la Pantoufle Charentaise poursuivront leurs activités respectives actuelles, ce qui sera accepté par l'acquéreur comme ne constituant pas une activité concurrente à la Société ni susceptible de l'être.

Pour l'application de cette disposition particulière, les activités de ces deux sociétés sont définies ainsi qu'il suit :

Jeva-[X]' (marques Jeva, [X], La P'ite Fabrique et Rd Confort,

La vente en gros d'articles chaussants destinés à une clientèle :

- exclusivement de professionnels GSA (grandes surfaces alimentaires), GSS (Grande surfaces spécialisées), GSB (Grandes surfaces bazar),

- ainsi que la vente aux détaillants, grossistes, sites Internet, hors zones de chalandises actuelles de la société (dont les sites d'[Localité 4], [Localité 9], [Localité 6], et leurs zones de chalandises) sous réserve de la clientèle grande distribution.

"La pantoufle charentaise"

La vente au détail d'articles chaussants aux particuliers et aux hôpitaux et comités d'entreprises, exclusivement en ligne au travers de sites marchands.

5- Il convient de rappeler le contexte de la conclusion de cette clause de non-concurrence, tel qu'il résulte des mentions préliminaires figurant en page 5 de l'acte (Origine et situation juridique et économique de l'activité).

L'activité de la société Lagarde, telle qu'indiquée aux statuts, était celle de fabrication et commerce de tous articles chaussants, mais à la date de la cession, elle se limitait à la seule commercialisation d'articles chaussants dans ses trois établissements situés [Adresse 3], [Adresse 8], et [Adresse 1].

L'extrait Kbis versé au débat (pièce 1 des intimés) confirme que l'activité exercée par la SAS Lagarde était et demeure celle de vente au détail de tous articles chaussants.

Il existait en outre à la date de la cession un contrat de distribution non exclusive des produits de la gamme Jeva-[X], entre la société Jeva [X] en qualité de fournisseur, et la société Lagarde en qualité de détaillant, agréée en qualité de membre du réseau Jeva-[X].

La société Lagarde était en outre autorisée, par le même contrat de distribution, à utiliser les marques JEVA, Jéva, [X], RD Confort, La p'tite fabrique, [Localité 12] Couture, Comme pépé...par [X], la signature d'un art de vivre et le Blason.

6- Il résulte de ces éléments que nonobstant la référence faite aux « activités connexes ou complémentaires » qui s'analyse pour cette partie en une clause de style, la commune intention des parties n'était pas d'interdire à la société Jeva-[X] la fabrication d'articles chaussants, ce qui correspondait à son activité lors de la cession. Une interprétation contraire aurait pour effet de priver d'objet le contrat de distribution sélective des articles chaussants fabriqués par la société Jeva-[X].

Par ailleurs, la vente en gros d'articles chaussants à des détaillants était exclue de manière exprès du champ d'application de la clause de non-concurrence, sauf pour les trois sites d'activité de la société Lagarde à [Localité 4], [Localité 9], et [Localité 6] et leurs zones de chalandises.

La vente en ligne sur site Internet était également exclue du champ d'application de la clause de non-concurrence.

Sur les débiteurs de l'obligation de non-concurrence :

7- La société ADL et la société Lagarde soutiennent que la commune intention des parties lors de la conclusion du contrat de cession d'actions était de faire appliquer la clause de non-concurrence aux associés de la société financière de la Forge, et donc à M. [F] [X] qui en était associé, et qui a bien eu connaissance de cette clause puisqu'il a par son vote accepté les termes de l'acte lors d'une assemblée générale du 14 novembre 2016.

Les parties auraient en outre entendu soumettre à cette clause non seulement les cédants expressément désignés, mais également les personnes physiques qui représentent la société débitrice de l'obligation, ainsi que ses associés indéfiniment responsables, et en particulier M. [F] [X], qui était également, lors de la signature de l'acte, directeur commercial de la société Jeva-[X].

La commune intention des parties aurait été en outre de soumettre la clause à tous les membres de la famille [X], compte tenu de la notoriété de ce patronyme, et notamment à M. [F] [X], en rasion de son implication ancienne dans les affaires de la famille [X].

8- Les appelants soulignent que M. [F] [X] n'a pas signé l'acte de cession des titres, et que le procès-verbal de l'assemblée générale de la société Financière de la Forge n'a été signé qu'après la cession des actions, seulement par M. [D] [X], sans que la preuve soit rapportée d'une acceptation de la clause par les associés.

La société L'atelier charentaise ne pourrait donc être considérée comme un intermédiaire, par le biais de M. [F] [X], susceptible d'avoir violé la clause.

Ils ajoutent que M. [V], simple dirigeant de la société L'atelier charentaise, ne saurait être concernée par la clause.

Sur ce :

9- Selon les dispositions de l'article 1199 du code civil, le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties.

Les tiers ne peuvent ni demander l'exécution du contrat ni se voir contraints de l'exécuter, sous réserve des dispositions de la présente section et de celles du chapitre III du titre IV.

10- L'article 5 de l'acte de cession d'actions stipule que la clause de non-concurrence est à la charge des cédants.

Les cédants sont désignés en page 1 comme étant: [Z] [X], [A] [X], [S] [X], [W] [X], [Y] [X] et la société civile Financière de la Forge, représentée par [D] [X].

11- En application de l'article 1842 du code civil, la société Financière de la Forge dispose de la personnalité morale du fait de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce d'Angoulême le 27 novembre 2001 sous le numéro 439 964 30 au vu de l'extrait Kbis versé au débat (pièce 31 des intimés).

Il en résulte que l'obligation de non-concurrence souscrite en qualité de cédante par la société Financière de la Forge ne créait pas de plein droit une obligation de même nature à la charge de M. [F] [X], en sa seule qualité d'associé de cette personne morale, quand bien même il aurait eu connaissance de cette clause lors de l'assemblée générale extraordinaire de la société Financière de la Forge tenue le 14 novembre 2016, au cours de laquelle a été adoptée à l'unanimité la résolution autorisant la cession de l'ensemble des actions de la société Lagarde à effet au 1er décembre 2016.

Le vote en faveur de cette cession, aux conditions prévues au projet, ne peut créer une obligation personnelle à sa charge, alors qu'il n'était pas cédant.

12- Il doit être relevé par ailleurs que M. [F] [X], qui n'était pas gérant de la société Lagarde, n'a pris aucune part à la rédaction ou à la préparation de l'acte de cession, et il n'est nullement démontré qu'il soit intervenu de quelque manière que ce soit pour en définir ou préciser les clauses.

13- Par ailleurs, il ne résulte pas des pièces produites que lors de la signature de l'acte de cession des actions, M. [F] [X] se soit trouvé impliqué dans l'exploitation du fonds de commerce de la société Lagarde, dans l'un des sites d'[Localité 4], [Localité 9] ou [Localité 6], à savoir la vente au détail, ni qu'il se soit comporté comme le propriétaire de ce fonds de commerce, ni qu'il ait dès cette époque noué des relations avec la clientèle de la société Lagarde, puisqu'il était seulement directeur commercial de la société Jeva-[X], ayant alors une activité principale distincte de fabrication d'articles chaussants.

14- En outre, et ainsi que les appelants le font valoir à juste titre, l'interdiction de tout intérêt direct ou indirect vise les cédants, et la clause n'emporte pas interdiction à des tiers au contrat de cession, même membre de la famille [X], d'avoir un intérêt dans une société exerçant une activité de nature concurrentielle, dès lors que cette société n'entretient pas de lien capitalistique avec l'un ou l'autre des cédants.

En l'espèce, il n'est pas établi que la société L'atelier charentaises présente un lien quelconque sur le plan de la composition du capital social avec l'une ou l'autre des personnes cédantes.

15- Les intimées procèdent par simple affirmation, sans produire d'éléments probants, lorsqu'elles soutiennent que la commune intention des parties était de faire peser la clause de non-concurrence non seulement sur la société holding, mais également sur le gérant et les associés indéfiniment responsables de la société Financière de la Forge, alors qu'aucune des clauses de l'acte de cession, ne révèle une telle intention d'obliger à titre personnel les associés de cette personne morale.

16- Enfin, aucune des clauses de l'acte ne révèle la commune intention des parties de rendre personnellement débiteurs de l'obligation de non-concurrence les membres de la famille [X]; cette interdiction n'étant faite qu'aux cédants.

Ainsi que les appelants le font valoir à juste titre, une telle clause d'interdiction, ainsi entendue dans un sens général, présenterait un caractère manifestement disproportionné qui la rendrait non-écrite.

17- La responsabilité de M. [F] [X] ne peut être retenue sur le fondement d'une violation de la clause de non-concurrence.

18 - La société Atelier charentaises ne peut dès lors être considérée comme une société interposée, constituée par l'un des débiteurs de l'obligation de non-concurrence.

19- Les intimés fondent leur action à l'encontre de M. [L] [V] sur le fait qu'il est associé et gérant de la société L'atelier charentaises, de sorte qu'il se rendrait complice de la clause de non-concurrence, et engagerait à sa titre sa responsabilité délictuelle.

20- Dès lors que la cour écarte la responsabilité contractuelle de M. [F] [X], comme celle de la société Atelier Charentaises, et qu'aucun fait distinct n'est imputé à M. [V], tiers au contrat de cession d'actions, et qui n'est nullement lié aux cédants, aucune responsabilité personnelle ne peut lui être imputée sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

21- Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et statuant à nouveau de débouter la société Lagarde et la société ADL de leurs demandes formées au titre de la violation de la clause de non-concurrence à l'encontre de MM. [X] et [V], et de la société L'atelier charentaises.

Le jugement sera en revanche confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral.

Sur les demandes au titre du contrat de licence de marque et du contrat de distribution :

22- Les sociétés Lagarde et ADL soutiennent que le contrat de licence de marque et le contrat de distribution sélective, qui étaient en cours entre la société Lagarde et la société Jeva-[X], n'ont fait l'objet d'aucune résiliation, et ont été transférés à la société La Manufacture Charentaise lors de la reprise par cette dernière des actifs de la société Jeava-[X], ainsi que l'a retenu le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société Jeava-[X], dans son ordonnance non frappée de recours en date du 24 juillet 2019.

Elles soulignent que même si les contrats de licence de marque et de distribution conclus le 14 décembre 2016 ne figurent pas dans la liste des contrats en cours énumérés au jugement de cession du fonds de commerce au profit de la société L'atelier charentaises, ils ont bien été transférés en même temps que la cession des actifs incorporels.

Elles considèrent que la société L'atelier charentaises a délibérément refusé d'approvisionner la société Lagarde en articles chaussants, ce qui constitue une rupture fautive du contrat, ouvrant droit à indemnisation à hauteur de la somme de 750 000 euros HT, en répararation du non-respect des contrats à compter de mai 2020 jusqu'au 14 décembre 2022, sur la base d'un marge brute annuelle moyenne de 300 000 euros HT.

23- MM. [X] et [V], et la société L'atelier charentaise répliquent que l'on ne peut appliquer en l'espèce ni les dispositions de l'article L. 714-1 du code de la propriété intellectuelle, ni celles de l'article L. 642-7 du code de commerce, concernant les transferts de contrats dans le cadre d'un plan de cession.

Ils soutiennent que l'acquisition d'éléments d'actifs de gré à gré dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société La Manufacture charentaise n'a pu emporter la cession de plein droit des contrats de licence et de distribution sélective, malgré l'acquisition des marques.

Ils ajoutent que les contrats en question avaient été conclus au titre d'un intuitu personae, de sorte qu'ils n'ont pu être transmis de manière automatique.

Sur ce :

24- Les contrats de licence de marque et de distribution en date du 14 décembre 2016 étaient des contrats en cours lors l'ouverture du redressement judiciaire de la société Jeva-[X], par jugement du 1er février 2018.

25- En application des dispositions de l'article L. 622-13 du code de commerce applicables en matière de redressement judiciaire (article L. 631-14 du code de commerce), aucune résiliation de ces contrats n'a pu intervenir de plein droit par le seul effet du jugement d'ouverture.

Aucune mise en demeure de prendre parti sur la poursuite des contrats n'a été adressée par la société Lagarde, de nature à entraîner la résiliation de plein droit des contrats en l'absence de réponse de l'administrateur dans le délai d'un mois en application de l'article L. 622-13 .

 

26- Le jugement du 18 mai 2018 arrêtant le plan de cession de la SAS Jeva-[X] ne mentionne pas, en pages 8 et 11, les contrats de licence de marque et de distribution conclus le 14 décembre 2016 avec la société Lagarde dans la liste des contrats transférés aux sociétés Chateaubriand Investissement à Mme [I] [H] et M. [J], cessionnaires auxquels s'est ensuite substituée la société La Manufacture Charentaise.

27- L'acte de cession d'entreprise du 15 novembre 2018 porte cession, notamment, des éléments incorporels du fonds de commerce, en ce compris l'ensemble des brevets et marques; il ne contient aucune mention relative à la poursuite des contrats de licence de marque et de distribution avec la société Lagarde.

28- Dès lors, en application des dispositions de l'article L. 642-7 alinéa 7 du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur au 18 mai 2018, la société Lagarde aurait pu demander au juge-commissaire qu'il en prononce la résiliation si la poursuite de son exécution n'était pas demandée par le liquidateur.

Or tel n'a pas été le cas, la société Lagarde n'ayant déposé aucune requête en ce sens.

29- La Selarl Hirou, es qualité de mandataire liquidateur de la société Jeva-[X], a par requête en date du 23 janvier 2019, demandé au juge-commissaire la résiliation du contrat de licence de marque, en application des articles L. 641-11-1 IV du code de commerce.

30- Par ordonnance du 24 juillet 2019, le juge-commissaire a rejeté cette requête, au motif que la reprise des marques et licences par la société La Manufacture charentaise avait emporté le transfert de la licence de marque qui en était l'accessoire.

Toutefois, le dispositif de la décision ne statue que sur le rejet de la requête, elle n'a pas autorité de chose jugée sur le principe du transfert des contrats; cette ordonnance ne peut donc s'imposer à la cour dans le cadre du présent litige, d'autant plus que les appelants n'admettent pas expressément que les contrats litigieux aient pu être transférés à ce stade, puisqu'ils indiquent « il n'est pas certain que ces deux contrats aient été transmis à la Manufacture charentaise » (page 52 de leurs conclusions).

31- Il est constant, en droit, que la cession d'un fonds de commerce comprenant la cession de la propriété des droits sur des marques n'emporte pas cession du contrat de distribution des produits revêtus de ces marques (en ce sens, Cour de cassation, chambre commerciale, 19 octobre 2022, pourvoi n° 21-16169).

32- Il en résulte que le contrat de distribution sélective du 14 décembre 2016 n'a pas été cédé de plein droit, comme accessoire des éléments incorporels du fonds de commerce, lors de la cession d'entreprise du 15 novembre 2018.

33- Le contrat de distribution sélective et le contrat de licence de marque, conclus tous deux le 14 décembre 2016, formaient un ensemble indivisible dans l'esprit des parties, ainsi que celles-ci l'avaient stipulé à l'article 20 du contrat de licence de marque (le contrat de distribution sélective constituant l'annexe III du contrat de licence de marque).

En outre, le contrat de licence de marque du 14 décembre 2016 a été conclu intuitu personae, en raison des rapports contractuels anciens existant entre la société Jeva-[X], fabricant de pantoufles, articles chaussants d'intérieur, et la société Lagarde, distributeur de ces produits depuis de nombreuses années, dans ses magasins de détail d'[Localité 4], [Localité 6] et [Localité 9]. Le contrat de licence de marque n'a donc été conclu qu'en raison de l'agrément donné à la société Lagarde dans le contrat de distribution sélective, en fonction de son aptitude à commercialiser ce type de produits.

34- Il est donc exclu que le contrat de licence de marque ait pu se trouver transmis, accessoirement à la cession des marques, lors de la cession du fonds de commerce à la société la Manufacture charentaise, sur le fondement légal invoqué par les intimés (articles 1709 et suivants du code civil).

A cet égard, il sera relevé que dès le 19 novembre 2018, la société La Manufacture charentaise a notifié à la société Lagarde, avec mise en demeure, son opposition à l'exploitation par cette dernière des marques Jeva et [X].

35 - Surabondamment, il sera relevé que ces deux contrats n'auraient pu être transmis lors de la vente aux enchères des éléments d'actifs de la société La Manufacture charentaise, au profit de la société Atelier charentaise, le 28 mai 2020.

36- Il ressort de la pièce 3 des appelants que la société Atelier Charentaises a fait l'acquisition aux enchères des actifs corporels et incorporels de la société la Manufacture charentaise, au prix de 205 000 euros.

Au vu de la description figurant sur le site Interenchères (pièce 2 des appelants), il a été procédé à la vente en un seul lot des actifs de la liquidation judiciaire de la société La Manufacture charentaises et de la société Manufacture Degorce, corporels et incorporels (ce qui incluait les noms et marques). En revanche, il n'est fait aucune mention des contrats de distribution et de licence de marque.

37- Dès lors que la société Atelier charentaise n'est pas liée par le contrat de distribution sélective du 14 décembre 2016, il ne peut lui être reproché ni un manquement aux stipulations de l'article 4 de ce contrat (Logistique d'approvisionnement), aux termes duquel le fournisseur s'oblige à assurer l'approvisionnement régulier du distributeur agréé en fonction des commandes de ce dernier, et dans un délai raisonnable, ni une rupture fautive de ce même contrat.

38- Il convient en conséquence de rejeter la demande de la société Lagarde en paiement de la somme de 750 000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du non-respect des contrats entre mai 2020 et le 14 décembre 2022.

Sur les demandes accessoires :

39- Il est équitable d'allouer à la société L'atelier charentaise, à M. [F] [X] et à M. [L] [V] la somme globale de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

40- Tenues aux dépens, les sociétés Lagarde et ADL supporteront leurs propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême le 8 juin 2023, sauf en ce qu'il a rejeté la demande formée par les sociétés Lagarde et ADL au titre de l'indemnisation du préjudice moral,

Statuant à nouveau,

Dit que la clause de non-concurrence insérée à l'acte de cession d'actions du 14 décembre 2016 n'est opposable ni à la société Atelier Charentaises, ni à M. [F] [X], ni à M. [L] [V],

Rejette en conséquence les demandes de la société Lagarde et de la société ADL à l'encontre de la société Atelier Charentaise, de M. [F] [X], et de M. [L] [V], au titre de la violation de la clause de non-concurrence,

Y ajoutant,

Dit que les contrats de licence de marque et de distribution sélective du 14 décembre 2016 n'ont pas été transférés à la société l'Atelier charentaises, et qu'ils ne sont pas opposables à la société l'Atelier charentaises, ni à MM. [F] [X] et [L] [V],

Dit que la société l'Atelier charentaises n'a pas engagé sa responsabilité contractuelle au titre des contrats de licence de marque et de distribution sélective du 14 décembre 2016,

Rejette en conséquence la demande de la société Lagarde à l'encontre de la société Atelier Charentaises en paiement de la somme de 750 000 euros HT au titre du non-respect des des contrats de licence de marque et de distribution sélective du 14 décembre 2016,

Condamne in solidum les sociétés Lagarde et ADL à payer à la société Atelier Charentaises, à M. [F] [X], et à M. [L] [V], ensemble, la somme globale de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne in solidum les sociétés Lagarde et ADL aux dépens de première instance et d'appel.