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Décisions

CA Cayenne, ch. com., 11 septembre 2023, n° 22/00022

CAYENNE

Arrêt

Autre

CA Cayenne n° 22/00022

11 septembre 2023

COUR D'APPEL DE CAYENNE

15 avenue du Général de Gaulle - 97300 CAYENNE

Chambre commerciale

ARRÊT N°

N° RG 22/00022 - N° Portalis 4ZAM-V-B7G-BAGU

LS/JP

S.A.S. U KDIS

C/

S.A.S. GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité.

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2023

Jugement Au fond, origine Tribunal mixte de Commerce de CAYENNE, décision attaquée en date du 13 Janvier 2022, enregistrée sous le n° 2020/01352

APPELANTE :

S.A.S. U KDIS

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Boris CHONG SIT, avocat au barreau de GUYANE, lors des débats

INTIMEE :

S.A.S. GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Maurice CHOW CHINE, avocat au barreau de GUYANE, lors des débats

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 juin 2023 en audience publique et mise en délibéré au 11 septembre 2023, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Aurore BLUM. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Aurore BLUM, Présidente de chambre

M. Yann BOUCHARE, Président de chambre

M. Laurent SOCHAS, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Madame Lysiane DESGREZ, Directeur des services judiciaires faisant fonction de Greffier, présente lors des débats et Madame Jessika PAQUIN, Greffier placé, présente lors du prononcé.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

La SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES a conclu en date du 20 juillet 2017 avec la SAS U KDIS exploitant l'établissement SUPER U [Localité 4] sis [Adresse 3] un contrat d'entretien des locaux , des vitres et du parking à compter du 1er octobre 2017 pour une durée de deux ans, moyennant une rémunération mensuelle globale de 3350 euros HT.

Le contrat prévoyait une éventuelle tacite reconduction et un préavis de 3 mois en cas de rupture de contrat.

Par courrier du 29 mai 2019, la SAS U KDIS a notifié à la SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES la cessation du contrat d'entretien à effet au 30 juin 2019.

Par acte d'huissier en date du 24 juillet 2020, la SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES (ci après GDS) a fait assigner, au visa de l'article 1103 et 1211 du Code civil et 442-1 du Code de commerce, la SAS U KDIS devant le tribunal mixte de commerce de Cayenne d'une demande en paiement.

Par jugement contradictoire du 13 janvier 2022, le tribunal mixte de commerce de Cayenne a :

- dit que la résiliation unilatérale du contrat à durée déterminée conclu entre la SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES et la SAS U KDIS est irrégulière,

- condamné la SAS U KDIS à payer à la SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES la somme de 13 400 euros ( treize mille quatre euros) correspondant aux mensualités restant dues au terme du contrat de nettoyage de deux ans,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné la SAS U KDIS à payer à la SAS GUYANE DEVELOPPEMENT SERVICES la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS U KDIS aux dépens,

- taxé et liquidé les frais de greffe à la somme de 61,03 euros,

- rappelé que la décision est exécutoire par provision.

Par déclaration en date du 18 janvier 2022, la SAS U KDIS a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions responsives d'appelante en date du 6 mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, la SAS U KDIS sollicite:

- l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris,

- qu'il soit dit et jugé que la résiliation litigieuse est régulière par application des articles 1183, 1184 et suivants du code civil,

- qu'il soit dit et jugé qu'aucune indemnité compensatrice de préavis n'est due à la SAS GDS,

- que la SAS GDS soit déboutée de toutes ses prétentions à son encontre,

- que la SAS GDS soit condamnée à payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, la SAS U KDIS expose qu'en application des articles L8222-1 du code du travail et L243-45 du code de la sécurité sociale, elle a sollicité de la SAS GDS la fourniture d'une extrait Kbis à jour mentionnant l'activité de ménage/nettoyage, et d'une attestation de vigilance. Elle explique qu'après avoir renouvelé sa demande et qu'en l'absence de production du document dit attestation de vigilance, elle a été contrainte de mettre un terme à la relation contractuelle.

La société appelante soutient que contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, elle n'avait pas besoin de préciser dans la mise en demeure que la sanction de l'inexécution par la société GDS de ses obligations l'exposait à une résiliation du contrat, celle-ci étant toujours sous-entendue en vertu de l'article 1184 du code civil. Elle fait valoir que la production de l'attestation de vigilance est obligatoire du fait de textes d'ordre public auxquels le contrat ne peut déroger.

La SAS U KDIS estime en conséquence qu'elle était fondée à user de la faculté de résiliation unilatérale autorisée par l'article 1266 du code civil, et ce même si les dispositions impératives relatives à la production de l'attestation de vigilance ne sont pas rappelées au contrat du 20 juillet 2017. Elle souligne en outre que la menace pesant sur la SAS U KDIS résultant de l'impéritie de la SAS GDS caractérise un manquement suffisamment grave de nature à autoriser la rupture de la relation commerciale selon la procédure d'urgence prévue par l'article 1226 du code civil dispensant celui qui y recourt de la formalité de la mise en demeure préalable et du respect du préavis contractuel.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 19 avril 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, la SAS GDS sollicite que la cour:

- confirme au visa des articles 1212 et 1226 du code civil le jugement entrepris,

- à titre subsidiaire, condamne la société U KDIS à lui payer la somme totale de 10 050 euros pour non respect du préavis, outre intérêts au taux appliqué par la BCE (article L 441-6 du code de commerce),

- déboute la société U KDIS de l'intégralité de ses prétentions,

- condamne la société U KDIS à lui payer la somme de 5000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la SAS GDS expose que par courrier du 29 mai 2019, la société UK DIS lui a notifiée sans aucun motif la cessation du contrat d'entretien sans respecter le délai contractuel de préavis. Elle indique lui avoir alors adressé une facture correspondant à 3 mois d'exécution du contrat, facture que la société UK DIS n'a pas voulu régler.

La société intimée fait valoir les dispositions de l'article 1212 du code civil, estimant que le contrat conclu pour une durée minimum de deux années ne pouvait être résilié avant l'échéance contractuellement prévue. Elle soutient en outre que la résiliation ne pouvait intervenir qu'après une mise en demeure préalable respectant les dispositions de l'article 1226 alinéa 2 du code civil, soit mentionnant qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

La SAS GDS ajoute avoir fourni une attestation de vigilance en octobre 2017, et précise que la société U KDIS n'a sollicité à nouveau cette attestation qu'une fois en août 2018, sans aucune relance, la résiliation intervenue en mai 2019 ne pouvant être justifiée par l'absence de transmission de cette attestation, laquelle est prévue par l'article L 243-45 du code de la sécurité sociale et n'est pas suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat.

L'intimée estime enfin à titre subsidiaire que même si la résiliation unilatérale était considérée justifiée, ceci n'est pas exclusif du respect du délai de préavis prévu par l'article 2 du contrat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résiliation du contrat d'entretien des locaux.

Aux termes de l'article 1212 du code civil, lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme.

Il est admis que la résiliation fautive d'un contrat à durée déterminée engage la responsabilité de son auteur et ne donne lieu qu'à des dommages et intérêts, le prix n'étant dû qu'en cas d'exécution de la convention.

Les dispositions des articles 1224 et 1226 du code civil prévoient que la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire, soit en cas d'inexécution suffisamment grave d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. Le créancier peut à ses risques et périls résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat. Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent. Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.

En l'espèce, il est constant que selon contrat versé aux débats conclu en date du 6 juin 20 juillet 2017, la société UKDIS a confié à la SAS GDS l'entretien des locaux du magasin SUPER U de [Localité 4] à compter du 1er octobre 2017 pour une durée minimum de deux années.

L'article 2 dudit contrat prévoit que le contrat 'se renouvelle par tacite reconduction pour une période de même durée sauf résiliation, au gré de chaque partie, moyennant le respect d'un délai de préavis de trois mois. En cas de non respect de ces dispositions, le préavis est toujours dû en totalité (non respect du préavis), voir une somme égale au montant des prestations qui auraient été effectuées jusqu'au terme du contrat (rupture anticipée infondée), ceci sans préjudice de tout autre droit et action.'

Il ressort des pièces versées à la procédure que selon LRAR en date du 29 mai 2019, la société UKDIS a indiqué à la SAS GDS procéder à la résiliation du contrat en cours selon les termes suivants :

' Par la présente, j'ai le regret de vous informer que j'entends résilier le contrat d'entretien de nos locaux qui nous lie à la date du 30 juin 2019 (...)'

Il ne peut qu'etre constaté que la société U KDIS n'a procédé à aucune mise en demeure, et a simplement adressé le courrier de résiliation ci-dessus ne faisant état d'aucune raison ou manquement de la SAS GDS à ses obligations.

Dès lors, le fait que que la société GDS ait produit ou non l'attestation de vigilance est indifférent à l'irrégularité de la résiliation du contrat.

Si l'appelante se prévaut par ailleurs de ce que la SAS GDS aurait gravement manqué à ses obligations, il convient cependant de constater qu'elle ne produit au soutien de ses allégations qu'un échange de mail par lequel elle sollicite la production de l'attestation de vigilance auprès de la SAS GDS, laquelle explique en réponse le 29 août 2018 les difficultés l'empêchant de produire cette dernière.

Dans ces conditions, ces seuls éléments ne démontrant pas que la SAS GDS aurait gravement inexécuté ses obligations, il ne peut qu'être constaté que c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la demande en paiement de la somme de 13 400 euros correspondant à la somme égale au montant des prestations qui auraient été effectuées jusqu'au terme du contrat est bien fondée.

La décision déférée sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Au regard de la solution apportée au règlement du litige en cause d'appel, la SAS U KDIS sera déboutée de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et sera condamnée à payer la somme de 2 000 euros sur ce fondement à la SAS GDS au titre des frais exposés en appel.

La SAS U KDIS sera en outre condamnée aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du tribunal mixte de commerce de CAYENNE en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS UKDIS à payer à la SAS GDS la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel, et LA DEBOUTE de sa demande sur ce fondement,

CONDAMNE la SAS UKDIS aux entiers dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par la Présidente, Aurore Blum, et le Greffier placé, [L] [Z], et placée au rang des minutes.

Le Greffier La Présidente

Jessika Paquin Aurore Blum