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Décisions

Cass. crim., 10 mai 1973, n° 73-90.372

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rolland

Rapporteur :

M. Gagne

Avocat général :

M. Davenas

Amiens, ch. d'acc., du 19 déc. 1972

19 décembre 1972

SUR L'ENSEMBLE DES MOYENS PRIS DE DIVERSES NULLITES DONT SERAIT ENTACHEE LA PROCEDURE D'INSTRUCTION ET SUR LE MOYEN RELEVE D'OFFICE PRIS DE LA VIOLATION PAR L'ARRET DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 206 DU CODE DE PROCEDURE PENALE;

ATTENDU QUE SAISI PAR LES EPOUX X..., INCULPES DE NON-ASSISTANCE A PERSONNE EN PERIL, D'UNE REQUETE TENDANT : 1° A TRANSMETTRE LE DOSSIER DE LA PROCEDURE A LA CHAMBRE D'ACCUSATION POUR FAIRE PRONONCER L'ANNULATION DE CERTAINS ACTES DE LA PROCEDURE;

2° A VOIR ORDONNER UNE CONTRE-EXPERTISE, LE JUGE D'INSTRUCTION A CRU DEVOIR RENDRE UNE ORDONNANCE UNIQUE POUR REJETER LESDITES CONCLUSIONS TANT EN CE QUI CONCERNE LES NULLITES ALLEGUEES ET LA DEMANDE DE TRANSMISSION DU DOSSIER A LA CHAMBRE D'ACCUSATION QUE LA DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE;

QUE SUR APPEL DES INCULPES, LA CHAMBRE D'ACCUSATION, A BON DROIT, A DECLARE CET APPEL IRRECEVABLE EN CE QUI CONCERNE LA DECISION DU JUGE RELATIVE AUX NULLITES DE PROCEDURE;

QU'EN EFFET, LADITE ORDONNANCE N'ENTRE, DE CE CHEF, DANS AUCUN DES CAS LIMITATIVEMENT ENUMERES A L'ARTICLE 186 DU CODE DE PROCEDURE PENALE COMME DONNANT OUVERTURE AU DROIT D'APPEL DE L'INCULPE;

ATTENDU, CEPENDANT, QUE BIEN QU'ELLE EUT DECLARE L'APPEL IRRECEVABLE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION A, EN CONTRADICTION AVEC SA PROPRE DECISION, EXAMINE D'OFFICE, D'AILLEURS POUR LES ECARTER, LES NULLITES DE PROCEDURE ALLEGUEES PAR LES INCULPES;

MAIS ATTENDU QU'IL N'APPARTENAIT PAS A LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE CONTROLER, FUT-CE POUR REJETER LES GRIEFS DE LA DEFENSE, LA REGULARITE D'ACTES QUI FAISAIENT PARTIE D'UNE PROCEDURE QUI NE LUI ETAIT PAS SOUMISE AU SENS DE L'ARTICLE 206 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LES INCULPES CONSERVANT D'AILLEURS L'ENTIERE POSSIBILITE DE FAIRE VALOIR DANS LES CONDITIONS ET AU TEMPS OU LA LOI LE PERMET, TOUS MOYENS TIRES D'UNE NULLITE DE LA PROCEDURE D'INSTRUCTION;

D'OU IL SUIT QUE CELLES DES DISPOSITIONS DE L'ARRET AYANT STATUE D'OFFICE SUR LES NULLITES D'INSTRUCTION ALLEGUEES PAR LES PREVENUS, APRES LES AVOIR DECLAREES IRRECEVABLES, DOIVENT ETRE CASSEES PAR VOIE DE RETRANCHEMENT ET SANS RENVOI;

QUE, D'AUTRE PART, LES DEMANDEURS N'ETANT PAS EN DROIT D'INTERVENIR DE CE CHEF DEVANT LA CHAMBRE D'ACCUSATION, ILS NE SAURAIENT DAVANTAGE ETRE ADMIS A CRITIQUER LES DISPOSITIONS DE L'ARRET SUR CE POINT;

QU'AINSI LES MOYENS SOULEVES PAR LES DEMANDEURS ET RELATIFS A DES NULLITES PRETENDUES DE LA PROCEDURE D'INSTRUCTION SONT IRRECEVABLES;

SUR LES MOYENS PRIS D'INEXACTITUDES ALLEGUEES DANS L'EXPOSE DES FAITS PAR L'ARRET ATTAQUE;

ATTENDU QUE LES CONSTATATIONS DE FAIT DES ARRETS DES CHAMBRES D'ACCUSATION ECHAPPENT, EN RAISON DE LEUR CARACTERE SOUVERAIN, AU CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION;

QUE, DES LORS, LES MOYENS NE SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS;

SUR LE MOYEN PRIS DU REFUS PAR LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE DESSAISIR LE JUGE D'INSTRUCTION DE COMPIEGNE AU PROFIT D'UN AUTRE JUGE;

ATTENDU QUE LES ARTICLES 206 ET 207 DU CODE DE PROCEDURE PENALE NE PERMETTENT A LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE DESSAISIR UN JUGE D'INSTRUCTION QUE LORSQU'ELLE A ANNULE TOUT OU PARTIE DE LA PROCEDURE OU LORSQU'ELLE INFIRME UNE ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION, QUE TEL N'ETANT PAS LE CAS EN L'ESPECE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION AURAIT EXCEDE SES POUVOIRS EN NE LAISSANT PAS AU JUGE D'INSTRUCTION LEGALEMENT SAISI LE SOIN DE POURSUIVRE L'INFORMATION;

QUE C'EST DES LORS PAR L'EXACTE APPLICATION DES TEXTES CI-DESSUS RAPPELES QU'ELLE A ECARTE LA REQUETE DES INCULPES SUR CE POINT;

QU'AINSI LE MOYEN DOIT ETRE REJETE;

SUR LE MOYEN PRIS DU REFUS PAR LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE SE SAISIR DE FAITS D'HOMICIDE INVOLONTAIRE SUR LA PERSONNE DE BEATRICE X... ET D'OMISSION DE PORTER SECOURS A BEATRICE X..., FAITS QUI AURAIENT ETE COMMIS, D'APRES LES DEMANDEURS, DANS LE RESSORT DE LA COUR D'APPEL DE PARIS PAR D'AUTRES QU'EUX, POSTERIEUREMENT AUX FAITS RETENUS CONTRE EUX PAR LA PREVENTION;

ATTENDU QUE PAR LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF LE JUGE D'INSTRUCTION AVAIT ETE SAISI CONTRE X... ET SON EPOUSE NON PAS DE FAITS D'HOMICIDE INVOLONTAIRE SUR LA PERSONNE DE BEATRICE X..., MAIS DE FAITS D'OMISSION DE PORTER SECOURS A PERSONNE EN PERIL;

QUE CES INFRACTIONS SONT NETTEMENT DISTINCTES LES UNES DES AUTRES DANS LEURS ELEMENTS MATERIELS ET INTENTIONNELS, L'OMISSION DE PORTER SECOURS POUVANT N'AVOIR PAS ENTRAINE LA MORT ET LA MORT POUVANT AVOIR EU D'AUTRES CAUSES QUE L'OMISSION DE PORTER SECOURS;

QUE C'EST DES LORS, A BON DROIT, QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION S'EST DECLAREE INCOMPETENTE POUR CONNAITRE DE FAITS ALLEGUES PAR LES DEMANDEURS DANS LEUR MEMOIRE, FAITS DONT LA JURIDICTION D'INSTRUCTION N'AVAIT PAS ETE SAISIE PAR LE MINISTERE PUBLIC ET QUI, AU SURPLUS, A LES SUPPOSER ETABLIS, AURAIENT ETE COMMIS PAR D'AUTRES QUE LES EPOUX X..., INCULPES, ALORS QUE LEUR FILLE ETAIT HOSPITALISEE DANS DES ETABLISSEMENTS SITUES DANS UN RESSORT JUDICIAIRE AUTRE QUE CELUI DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE;

SUR LE MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 216 DU CODE DE PROCEDURE PENALE;

VU LEDIT ARTICLE;

ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 216 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION RESERVE LES DEPENS SI SON ARRET N'ETEINT PAS L'ACTION DONT ELLE A EU A CONNAITRE;

ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE QUI N'A PAS MIS FIN A LA PROCEDURE N'EN A PAS MOINS CONDAMNE LES PARTIES APPELANTES AUX DEPENS;

QU'UNE TELLE DECISION, CONTRAIRE A LA LOI, ET REVETANT UN CARACTERE DEFINITIF REND, SOUS CE RAPPORT, LE POURVOI RECEVABLE ET DOIT ENTRAINER LA CASSATION DE CETTE DISPOSITION DE L'ARRET;

SUR LE MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE POUR DEFAUT DE REPONSE A UN CHEF ESSENTIEL DU MEMOIRE REGULIEREMENT DEPOSE DEVANT LA CHAMBRE D'ACCUSATION ET QUI TENDAIT A CE QUE SOIT INFIRMEE LA DISPOSITION DE L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION REJETANT UNE DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE;

VU LEDIT ARTICLE;

ATTENDU QUE D'APRES L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, SONT DECLARES NULS LES JUGEMENTS ET ARRETS QUI NE CONTIENNENT PAS DE MOTIFS OU DONT LES MOTIFS SONT INSUFFISANTS;

QU'IL EN EST DE MEME LORSQU'IL A ETE OMIS OU REFUSE DE PRONONCER SUR UNE OU PLUSIEURS DEMANDES DES PARTIES;

ATTENDU QUE LES INCULPES QUI CONTESTAIENT LES CONCLUSIONS DU RAPPORT DES EXPERTS Z... ET A..., COMMIS PAR LE JUGE D'INSTRUCTION, AVAIENT, CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 167 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, FORMULE, DANS LEURS CONCLUSIONS DEPOSEES ENTRE LES MAINS DU JUGE D'INSTRUCTION, UNE DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE;

QUE L'APPEL, CONCU EN TERMES GENERAUX, INTERJETE PAR LES INCULPES, TOUCHAIT AINSI CETTE DISPOSITION DE L'ORDONNANCE;

QUE SELON L'ARTICLE 186 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, CET APPEL ETAIT, POUR CE CHEF, RECEVABLE;

QUE DANS LEUR MEMOIRE DEVANT LA CHAMBRE D'ACCUSATION LES INCULPES AVAIENT REPRIS LEUR DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE EN NE LA FONDANT PAS SEULEMENT, CONTRAIREMENT A CE QU'EXPOSE L'ARRET, SUR LA RECHERCHE DES INFRACTIONS QUI POURRAIENT ETRE RELEVEES A LA CHARGE DE MEMBRES DU PERSONNEL MEDICAL APPELE A DONNER DES SOINS A BEATRICE X..., CE QUI ETAIT, AINSI QU'IL A ETE JUGE CI-DESSUS, EN DEHORS DE LA SAISIE DU JUGE D'INSTRUCTION DE COMPIEGNE;

QUE LES INCULPES AVAIENT EGALEMENT ET D'ABORD FONDE LEUR DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE SUR LA NECESSITE, SELON EUX, DE FAIRE EXAMINER PAR TROIS NOUVEAUX EXPERTS L'ENSEMBLE DES FAITS, AUSSI BIEN CEUX SUR LESQUELS S'APPUYAIT L'ACCUSATION QUE CEUX INVOQUES PAR LA DEFENSE, CES DERNIERS ELEMENTS AYANT ETE IGNORES DES PREMIERS EXPERTS QUI AVAIENT DEPOSE LEUR RAPPORT AVANT L'INCULPATION DES EPOUX X..., AFIN QUE CES NOUVEAUX EXPERTS DONNENT LEUR AVIS SUR LE POINT DE SAVOIR SI, EN L'ABSENCE DE CONNAISSANCES MEDICALES, ET EN L'ABSENCE, D'APRES LES INCULPES, DE TOUTE MISE EN GARDE PREALABLE DU CORPS MEDICAL, ILS POUVAIENT, EUX, EPOUX X..., ETRE EN MESURE DE DECELER L'EXISTENCE D'UN PERIL EVIDENT ET IMMINENT POUR LA VIE DE LEUR FILLE;

ATTENDU QUE CE CHEF D'ARTICULATION DU MEMOIRE ETAIT ESSENTIEL;

QU'EN S'ABSTENANT D'Y REPONDRE, L'ARRET A VIOLE LE TEXTE DE LOI CI-DESSUS VISE, LA SEULE FORMULE GENERALE DU DISPOSITIF, "DEBOUTE LES EPOUX X... DE TOUTES LEURS PRETENTIONS", NE POUVANT EN L'ABSENCE TOUT MOTIF LUI SERVANT DE SUPPORT, PERMETTRE A LA COUR DE CASSATION D'EXERCER SON CONTROLE;

D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE DE CE CHEF;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE PAR VOIE DE RETRANCHEMENT ET SANS RENVOI L'ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS EN DATE DU 19 DECEMBRE 1972 DANS SES DISPOSITIONS PAR LESQUELLES IL A STATUE SUR DES NULLITES DE LA PROCEDURE D'INSTRUCTION ET DANS CELLES PAR LESQUELLES IL A CONDAMNE LES APPELANTS AUX DEPENS;

CASSE ET ANNULE EN OUTRE LEDIT ARRET MAIS SEULEMENT EN CE QU'IL A OMIS DE STATUER SUR UNE DEMANDE DE CONTRE-EXPERTISE, TOUTES AUTRES DISPOSITIONS AUTRES QUE CELLES CENSUREES CI-DESSUS ETANT MAINTENUES;

ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS AUTREMENT COMPOSEE.