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Décisions

CA Rennes, 8e ch prud'homale, 4 décembre 2023, n° 20/05289

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 20/05289

4 décembre 2023

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°377

N° RG 20/05289 -

N° Portalis DBVL-V-B7E-RA7F

Mme [H] [G]

C/

S.A.S.. 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le : 04-déc-23

à :

Me Célia MARTIN GRIT

Me Sandra LEVY-REGNAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 DECEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nadège BOSSARD, Présidente,

Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,

Madame Anne-Cécile MERIC, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 Octobre 2023

devant Mesdames Nadège BOSSARD et Anne-Cécile MERIC, magistrats tenant l'audience en la formation rapporteur, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame [T] [B], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Décembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [H] [G]

née le 25 Novembre 1986 à [Localité 5] (67)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Célia MARTIN GRIT, Avocat au Barreau de NANTES

INTIMÉE :

La S.A.S. 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra LEVY-REGNAULT de la SARL SLR AVOCAT, Avocat au Barreau de NANTES

Suivant contrat à durée déterminée, la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES (ci-après société 2A), société spécialisée dans l'organisation de manifestations commerciales éphémères à thème, a engagé Mme [G] à compter du 22 juillet 2013, pour exercer les fonctions d'assistante de gestion et logistique. La relation contractuelle s'est ensuite poursuivie, d'abord par renouvellement du contrat à durée déterminée, du 13 mai 2014 jusqu'au 13 septembre 2014, puis par contrat à durée indéterminée à compter du 15 septembre 2014.

Lors de son entretien individuel, le 22 mars 2015, Mme [G] a sollicité une augmentation de salaire. Du 10 avril au 31 août 2015, Mme [G] a été en congé de maternité.

Le 23 mars 2016 lors d'un nouvel entretien individuel, la société 2A lui a proposé une augmentation de ses primes comme suit, outre l'octroi d'une prime de 300 euros pour implication dans son travail :

- une prime logistique selon les conditions définies dans son contrat de travail, déclenchée en fonction du nombre de stands ou chalets présents par opération commerciale et détaillées ;

- une prime sur suivi de décoration (2300 € dont 300 € de décoration d'été) ;

- une prime sur le résultat net (750 € si résultat net = 350 000 €).

En 2017, Mme [G] a de nouveau sollicité une augmentation de salaire, qui a été refusée par la société 2A.

Le 11 juillet 2017, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie.

Du 14 septembre 2017 au 2 janvier 2018, Mme [G] était en congé de maternité.

En janvier 2018, Mme [G] a sollicité un temps partiel à 80%. Son horaire a été réduit à 28 heures par semaine.

Le 18 avril 2018, Mme [G] a démissionné de son poste d'assistante logistique, selon les termes de son courrier.

Le 18 mai 2018, elle a quitté l'entreprise après son préavis d'un mois.

Par courriel du 4 juin 2018 adressé à M. [V] (responsable Financier), Mme [G] a contesté son reçu pour solde de tout compte.

Par courrier du 12 octobre 2018, Mme [G] a mis en demeure la société 2A de payer notamment, ses primes dues au titre de la logistique des opérations liées à la période de Noël 2016 et 2017, et des dommages et intérêts pour la discrimination dont elle avait été victime pendant toute l'exécution de son contrat de travail.

Le 12 avril 2019, Mme [G] a saisi le Conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :

' Fixer le salaire de référence à la somme de 1.368,16 € (80 %),

' Dire et juger :

- que la demande en paiement due au titre des primes dues à Mme [G] est justifiée,

- que Mme [G] a fait l'objet d'une discrimination liée à ses congés maternité,

En conséquence,

' Condamner la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES à verser :

- 5.360 € bruts de rappel de salaires au titre des primes dues 2017 en 2018 (sous réserve de la répartition des stands installés en centres commerciaux),

- 1.050 € bruts de rappel de salaires au titre des primes 2016 dues en 2017,

- 1.700 € nets de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non paiement des primes,

- 7.920 € bruts de rappel de salaires au titre de la discrimination,

- 16.417 € nets de dommages et intérêts pour discrimination,

- 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Assortir lesdites sommes des intérêts au taux légal outre le bénéfice de l'anatocisme,

' Ordonner la remise du bulletin de salaire, du solde de tout compte, du certificat de travail et de l'attestation Pôle Emploi rectifiée sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 7ème jour suivant le prononcé du jugement à intervenir, et se réserver le droit de liquider ladite astreinte, le cas échéant,

' Exécution provisoire de la totalité du jugement à intervenir,

' Débouter la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la partie défenderesse aux entiers dépens.

La cour est saisie de l'appel interjeté par Mme [G] le 29 octobre 2020 contre le jugement du 30 septembre 2020, par lequel le Conseil de prud'hommes de Nantes a :

' Dit que la demande en paiement de primes de Mme [G] n'est pas justifiée,

' Dit que Mme [G] n'a pas été discriminée dans le paiement des salaires et le versement de primes,

' Débouté en conséquence Mme [G] de l'ensemble de ses demandes,

' Débouté la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES de sa demande reconventionnelle,

' Condamné Mme [G] aux dépens éventuels.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 30 mars 2023 suivant lesquelles Mme [G] demande à la cour de :

' Fixer le salaire de référence de Mme [G] à 1.368,16 € bruts (80 %),

' Recevoir Mme [G] en ses demandes et l'y déclarée bien fondée,

' Réformer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Nantes en date du 30 septembre 2020 dans son ensemble en ce qu'il a :

- considéré que la demande en paiement de primes de Mme [G] n'était pas justifiée et que cette dernière n'avait pas été discriminée dans le paiement de ses salaires, et le versement de ses primes,

- dit que la demande en paiement de primes de Mme [G] n'était pas justifiée

- débouté Mme [G] de sa demande :

- en paiement rappel de salaire au titre du non-paiement de ses primes,

- de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non-paiement de ses primes,

- dit que Mme [G] n'a pas :

- été discriminée dans le paiement des salaires et le versement de primes,

- fait l'objet de discrimination liée à son congé maternité,

- débouté en conséquence Mme [G] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [G] aux dépens éventuels.

En conséquence, statuant à nouveau,

' Dire et juger la demande en paiement due au titre des primes dues à Mme [G] est justifiée,

' Dire et juger Mme [G] a fait l'objet d'une discrimination liée à ses congés maternité et de son état de grossesse,

' Condamner la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES à payer à Mme [G] les sommes suivantes :

- 5.360 € bruts de rappel de salaire au titre des primes dues 2017 en 2018,

- 1.050 € bruts de rappel de salaire au titre des primes 2016 dues en 2017,

- 1.700 € nets de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non paiement des primes,

- 7.920 € bruts de rappel de salaire au titre de la discrimination du fait de son congé maternité,

- 16.417 € nets de dommages et intérêts pour discrimination du fait de son congé maternité,

' Assortir lesdites sommes de l'intérêt légal outre le bénéfice de l'anatocisme, à compter de la date de la saisine du Conseil de prud'hommes de Nantes,

En tout état de cause,

' Débouter la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES de l'ensemble de ses demandes et prétentions formées à titre reconventionnel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Ordonner la remise du dernier bulletin de salaire, reçu pour solde de tout compte, et de l'attestation Pôle Emploi rectifiée sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du septième jour suivant le prononcé de la décision à intervenir,

' Condamner la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES à verser à Mme [G] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES aux entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 12 avril 2021, suivant lesquelles la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES demande à la cour de :

' Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Nantes le 30 septembre 2020 en toutes ses dispositions,

' Débouter Mme [G] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

' Condamner Mme [G], à titre reconventionnel, au versement d'une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clotûre a été prononcée le 8 juin 2023.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières écritures sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes rappels de salaire au titre des primes des années 2016 et 2017 :

Mme [G] sollicite 5.360 euros de rappel de salaire au titre des primes de l'année 2017 dues en 2018 et 1.050 euros au titre des primes de l'année 2016 dues en 2017.

Pour infirmation du jugement n'ayant pas fait droit à ses demandes, Mme [G] reproche à son employeur le non versement de primes contractuelles de Noël, refus justifié selon elle par des conditions d'attribution non prévues au contrat. Elle réfute ainsi la distinction opérée par la société entre primes de montage/démontage et primes sur suivi de la décoration. Cette dernière n'a selon elle jamais été évoquée auparavant, et le seul critère d'obtention des primes est, selon elle, le nombre de chalets et stands montés et démontés par opération commerciale. Elle ajoute qu'il n'existait aucune condition de présence effective à Noël pour les obtenir. Elle expose que la convention collective ne prévoit pas l'absence de versement de primes pour congé de maternité ou toute autre absence entre les mois d'août et décembre et que les critères de répartition des primes au sein de l'entreprise n'ont jamais été communiqués aux salariés et soumis aux représentants du personnel. Elle ajoute que la préparation des marchés de Noël ne s'effectue pas seulement durant la période de mars à décembre de chaque année, mais tout au long de l'année.

Pour confirmation, la société 2A expose qu'étant spécialisée dans les marchés de Noël, seuls les salariés présents durant cette période pouvaient prétendre au versement de la prime annuelle, période comprise entre les mois d'août et décembre de chaque année. Elle précise que les primes accordées venaient récompenser les efforts des salariés pour l'exécution de certaines tâches identifiées par la société comme pouvant générer une valeur ajoutée supplémentaire si elles sont bien exécutées.

Sur la possibilité pour l'employeur de ne pas verser des primes en raison de l'absence du salarié :

Il ressort d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation qu'un bonus de coopération, expressément subordonné à la participation active et effective des salariés à une activité, destiné à rémunérer une activité spécifique et à récompenser le service rendu à ce titre, peut ne pas être dû à la salariée pendant son congé de maternité faute pour elle d'avoir exercé les fonctions spécifiques dans les conditions particulières prévues.

La Cour de cassation a jugé que ne viole pas le principe de non-discrimination l'employeur qui refuse à une salariée en congé de maternité le versement d'une prime liée à la participation active et effective des salariés à des activités spécifiques, faute pour elle d'avoir effectivement exercé les fonctions y ouvrant droit (Ch. soc., 19 septembre 2018, n° 17-11.618).

Sauf disposition conventionnelle ou usage contraire, le montant d'une prime ou d'une gratification doit faire l'objet d'un abattement proportionnel au temps d'absence chaque fois que celle-ci est destinée à rémunérer une activité effective ou récompenser les services rendus.

La convention collective :

Il convient de se référer aux dispositions conventionnelles organisant le maintien du salaire pour déterminer les éléments de rémunération à maintenir en sus du salaire de base tels que les primes , indemnités et accessoires de salaire en cas d'absence du salarié.

Si un accord collectif peut tenir compte des absences, même motivées par la maladie ou la grossesse, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution.

En l'espèce, il est non contesté que l'activité principale de la société 2A la fait dépendre de la Convention Collective Nationale des Prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire (IDCC 2098). Il ne ressort pas de ladite convention collective de condition expresse de présence concernant l'octroi de primes.

Par conséquent, la convention collective applicable à l'espèce ne prévoit pas de disposition relative à l'absence du salarié au regard de son droit à versement des primes. Il convient dès lors de se référer au contrat de travail.

Le contrat de travail :

L'article 8.3 du contrat de travail de Mme [G] stipule 'en sus du salaire ci-avant défini, des primes sur la logistique des opérations liées à la période de Noël uniquement pourront être versées si les conditions ci-après sont entièrement réunies :

- Garantir le respect de notre cahier des charges auprès de nos fournisseurs et avoir effectué l'ensemble des réservations pour le bon déroulement de la mission de montage et démontage (délais, tarifs et qualités des prestations des fournisseurs) ;

- Respect des délais de mise à disposition des fiches et compte-rendu de mission et de leurs tenues ;

- implication dans le travail au quotidien.

Les primes seront déclenchées en fonction du nombre de stands ou chalets présents par opération commerciale et détaillées comme suit [...]'.

Une prime variable ponctuelle dite 'prime de décoration' venait, selon l'employeur, s'y ajouter, sur la base du bilan de l'année écoulée et en fonction des objectifs remplis de l'année à venir. Celle-ci n'était pas mentionnée dans le contrat de travail de la salariée.

Les primes et gratifications ne constituent pas un élément du salaire si elles ne sont pas obligatoires. L'employeur n'est dès lors pas tenu de faire figurer l'ensemble des primes dans le contrat de travail. Si la prime de logistique est en l'espèce expressément prévue au contrat de travail de la salariée, la prime de décoration n'y figure pas.

En exécution de cette stipulation et de la prime dite de décoration non prévue dans le contrat de travail, la salariée a perçu des primes d'un montant annuel brut de :

- 900 euros en 2015 ;

- 1.580 euros en 2016 ;

- 3.550 euros en 2017 ;

versée au mois de décembre de l'année considérée ou au mois de janvier de l'année suivante.

L'employeur oppose les absences de la salariée pour congé de maternité et l'absence de sa participation active et effective aux activités de l'entreprise pour expliquer leur non versement.

La cour rappelle que les primes versées doivent répondre à des critères de fixation et d'attribution objectifs, mesurables et licites.

En l'espèce, l'employeur a transmis :

- les modalités d'attributions des primes pour Mme [G] (pièce n°15) ;

- le montant brut des salaires et des primes sur plusieurs années pour l'ensemble du

personnel concerné (pièces n°28 et 29).

Au cours des années 2016 et 2017, Mme [G] justifie avoir régulièrement exercé ses fonctions à l'exception d'un arrêt de travail du 10 juillet 2017 au 13 septembre 2017 et de son deuxième congé de maternité du 14 septembre 2017 au 4 janvier 2018.

Le droit à une rémunération variable résulte en l'espèce du contrat de travail et l'employeur produit les modalités de fixation d'une partie de la prime variable conformément aux critères visés au contrat, à l'exception de la prime dite de décoration.

L'année 2016 :

La salariée a ainsi perçu en 2017, au titre de l'activité de l'année 2016 :

- une prime de logistique (montage/démontage) d'un montant de 1.100 euros bruts ;

-une prime sur suivi de décoration de 1.700 euros bruts.

- une prime exceptionnelle de 750 euros.

Il ressort du contrat de travail que le montant et le versement de la prime de logistique peut être conditionnée au respect du cahier des charges. C'est donc à bon droit que l'employeur a pu justifier le différentiel de 190 euros entre la prime théorique et la prime perçue motif pris du respect de cette condition qualitative d'octroi de ladite prime.

Concernant le versement de 1.700 euros bruts de prime sur suivi de décoration sur un total théorique de 2.300 euros tel que défini par Mme [G], les pièces versées en procédure, notamment la lecture des entretiens individuels professionnels réalisés pour l'année 2016, révèlent que ce montant est conforme à l'évaluation portée sur cette mission.

Mme [G] sera dès lors déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre des primes 2016 dues en 2017 pour un montant de 1.050 euros en ce qu'il ressort des éléments du dossier que la rémunération variable a été versée à la salariée en contrepartie de son activité.

L'année 2017 :

Mme [G] sollicite 5.360 euros de rappel de salaire au titre des primes de l'année 2017 dues en 2018 réparties comme suit :

970 euros pour les chalets, 1040 euros pour les stands, 300 euros pour l'implication au travail, 2300 euros de prime de décoration, 750 euros de prime de résultat.

Il ressort du contrat de travail de Mme [G] et des différentes pièces versées en procédure que les primes n'étaient ni soumises à des conditions d'assiduité, ni même d'ancienneté ou à une condition de présence à la date du paiement.

Toutefois, la prime contractuelle de logistique ou de montage/démontage, telle que fixée au contrat de travail vise à gratifier les opérations logistiques réalisées par les salariés exclusivement en lien avec la période de Noël.

L'absence de Mme [G] durant la seconde moitié de l'année 2017 ne permet pas, à elle seule, à justifier que la salariée n'a pas rempli les conditions visées dans la clause de son contrat de travail pour l'octroi de la prime dite de logistique. De même l'allégation de ce que la société 2A effectue 90 pourcent de son chiffre d'affaires en fin d'année est sans lien avec les critères tels qu'exposés dans le contrat de travail selon lesquels les primes de logistique sont liées à la période de Noël. Toutefois, aucune pièce de la procédure ne permettant de conclure à la participation de Mme [G] aux opérations commerciales de démontage et montage en 2017, elle sera déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre des primes de logistique pour l'année considérée.

Concernant la prime de décoration, aucune pièce versée en procédure ne permet de constater que les critères d'octroi de la prime de décoration étaient fixes, objectivables et connus des salariés. La pièce n°29 versée par l'employeur et qui récapitule les primes sur objectifs perçues par salarié et par année ne vient pas plus expliciter les critères d'attribution de la prime de décoration. Seule la pièce n°15, versée devant le bureau de conciliation et d'orientation du CPH de Nantes vient préciser que ' la prime de décoration est évaluée par la direction en fonction de l'implication du salarié dans le bon accomplissement du suivi de la décoration. Concernant cette prime, il faut qu'il y ait de nouveaux projets de décoration pendant l'année '.

Si l'employeur précise a posteriori que la commercialisation des emplacements auprès des exposants venait de débuter lors du congés de maladie puis de maternité de la salariée, de sorte qu'elle ne pouvait prétendre à une prime de décoration, il ne peut alléguer que les primes de décoration étaient entièrement liées à la période de Noël, en ce qu'il ressort de l'entretien individuel du 23 mars 2016 que la prime de suivi de décoration pour l'année 2015 était de 2.300 euros dont 300 euros de décoration d'été.

Si une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus, un bonus de coopération peut expressément être subordonné à la participation active et effective des salariés à des activités spécifiques, il ne ressort pas en l'espèce que la prime de décoration était corrélée à la période de Noël, contrairement à la prime dite de logistique.

La prime de décoration ne répondant pas à des critères de fixation et d'attribution objectifs, mesurables et licites, et l'employeur ne versant en procédure aucune modalité de calcul de ladite prime de décoration, il sera fait application des éléments produits par la salariée, même si celle-ci s'appuie sur un tableau récapitulatif des primes théoriques. Il ne sera par ailleurs pas procédé à un calcul au prorata de la présence de Mme [G] en ce qu'il n'est pas démontré que cette prime était soumise à une condition d'assiduité ou à une participation active et effective des salariés.

Dès lors, la société 2A sera condamnée à verser à Mme [G] la somme de 2.300 euros au titre des primes de l'année 2017 et le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non versement des primes :

Mme [G] sollicite le règlement de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non paiement des primes, d'un montant de 1.700 euros.

Pour infirmation du jugement à ce titre, Mme [G] expose avoir subi un préjudice consistant à avoir été démotivée au point de démissionner en prenant le risque de n'avoir aucun droit au chômage. Pour justifier sa demande, elle évoque :

- la mauvaise foi de la société en matière d'attribution des primes ;

- le fait que d'autres salariés auraient dénoncé les pratiques aléatoires de la société 2A en matière d'attribution des primes.

Elle produit les témoignages de M. [X] et Mme [Y] qui attestent de pratiques aléatoires dans le versement des primes.

Pour confirmation, la société 2A expose que les deux témoignages sont inopérants et que la salariée ne rapporte nullement la preuve de son préjudice.

En vertu de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

En l'espèce, les éléments avancés par la salariée ne suffisent pas à caractériser des indices laissant présumer une mauvaise foi de l'entreprise dans le calcul et le paiement des primes ni dans le versement de celles-ci.

Par ailleurs, Mme [G] ne rapporte pas la preuve de son préjudice.

Comte tenu de ce qui précède, Mme [G] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes de rappel de salaire et de dommages et intérêts pour discrimination du fait d'un congé maternité :

Mme [G] sollicite, au titre de la discrimination, le règlement d'un rappel de salaire d'un montant de 7.920 euros et de dommages et intérêts pour 16.417 euros.

Pour infirmation à ce titre, Mme [G] soutient avoir été discriminée dans l'attribution de primes et le refus d'augmentation de son salaire. Elle expose que ces discriminations se caractérisent par une absence d'augmentation de la part fixe de son salaire alors que sa charge de travail a doublé, et que la preuve en est rapportée par l'embauche de deux salariés à la suite de sa démission. Elle rappelle que le fait de ne pas lui verser sa prime au titre de l'année 2017 a été motivée par son absence lors de la période de Noël en raison de son congé de maternité. Elle ajoute qu'elle s'est vue accorder une prime plus conséquente car elle avait dénoncé le fait que seuls les hommes bénéficiaient d'une prime d'atelier au sein de la société, alors que travaillant dans les mêmes locaux, elle en était privée, sans raison objective.

Pour confirmation, la société 2A expose que son salaire fixe mensuel était conforme aux dispositions conventionnelles applicables. Elle précise que le quantum demandé correspond à un rappel de salaire sur quatre ans, alors que la prescription en matière de salaires est limitée à trois ans.

En application de l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte, au sens, respectivement, du I de l'article 6 et des 1° et 2° de l'article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique'.

L'article L. 1134-1 du même code, dans sa rédaction applicable depuis le 20 novembre 2016, précise que 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

Une inégalité de salaire peut constituer une discrimination si la différence de traitement concerne des personnes placées dans une situation comparable et si cette différence n'est pas justifiée par un motif étranger à toute discrimination au sens de l'article L. 1132-1 du code du travail.

Il n'appartient pas au salarié qui s'estime victime d'une discrimination d'en prouver l'existence. Suivant l'article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La salariée établit, outre ses grossesses, les faits suivants :

- un refus d'augmentation par son employeur de la part fixe de son salaire ;

- le non versement de la totalité du montant théorique des primes au titre de l'année 2017 ;

- un salaire de 1700 euros bruts pour un poste d'assistante de gestion et logistique quand d'autres salariées de la société, assistantes de gestion ou assistantes de logistique bénéficient d'un salaire équivalent en CDD et alors que Mme [G] est la seule salariée de la société à cumuler les deux fonctions de gestion et de logistique (pièce n°28) ;

- un salaire de 1700 euros bruts alors que Mme [C], embauchée en CDD au poste de chargée de logistique pour la remplacer pendant son congé maternité était rémunérée à hauteur de 1.750 euros bruts ;

- des entretiens individuels annuels élogieux faisant état d'une personne investie dans son travail (pièces 35 et 36).

Elle produit également les attestations de :

- Mme [Y], ancienne juriste de la société, qui expose que Mme [J] [O], présidente directrice générale, avait 'une aversion' pour Mme [G] ; elle indique qu'elle considérait Mme [G] comme « un syndicaliste qui ne posait que des problèmes ou demandait une augmentation » ; elle précise que Mme [J] critiquait aussi son physique, '(trop bourrue, et camionneur) pour être présentée aux fournisseurs' ainsi que sa 'manière d'être' ;

- M. [R], ancien salarié, qui décrit un mode managérial de la direction 'flou' et qui 'ne favorise pas une communication fluide et transparente' ;

- ainsi que divers échanges de SMS et courriels instantanés d'anciens salariés qui font état de difficultés rencontrées dans le versement des primes.

Ces faits, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination en raison de sa grossesse.

Il incombe en conséquence à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination en raison de sa grossesse.

Il ressort de la comparaison entre le contrat de travail, les bulletins de salaire de Mme [G] et la grille de salaire conventionnelle applicable au cas d'espèce que la rémunération de Mme [G] est conforme aux dispositions de la convention collective, Mme [G] relevant de la catégorie TAM, niveau IV, coefficient 200. Si le supérieur hiérarchique direct de Mme [G], M. [V], avait préconisé une augmentation de salaire, la décision d'augmenter ou non la rémunération fixe de la salariée relevait du pouvoir décisionnel de la Direction, dans le respect des montants fixés par les dispositions conventionnelles.

L'employeur expose que si le salaire fixe de Mme [G] n'a pas été augmenté, sa part variable a, elle, évolué favorablement sur les deux années litigieuses. L'employeur explique ainsi que si la part fixe du salaire de Mme [G] n'a pas augmenté, sa rémunération a toutefois évolué favorablement sur la période litigieuse.

Il établit par des raisons objectives ne pas avoir discriminé Mme [G] par rapport à ses autres collègues de travail par la production de deux tableaux récapitulatifs des salaires mensuels bruts et des primes sur objectifs pour la période 2014 à 2019 et précise que les fonctions d'assistante de gestion et logistique ne sont pas les mêmes que celles de chargée de logistique et décoration, Mme [G] ne pouvant dès lors comparer sa rémunération avec celle d'un chargé de logistique.

Il explique que le montant des primes qui a été attribué à la salariée était fonction de la politique de primes d'objectifs.

L'employeur produit les témoignages suivants, de salariés qui viennent démentir l'existence de discriminations au sein de l'entreprise :

- Mme [W], commerciale depuis 2018, qui relate son expérience positive pendant sa grossesse et son congé de maternité un an après son arrivée dans l'entreprise ;

- M. [N], présent depuis 20 ans dans l'entreprise et délégué du personnel, qui atteste de l'absence de politique discriminatoire au sein de la société.

L'employeur produit également plusieurs échanges de mails qui démontrent les relations cordiales entretenues avec Mme [G] jusqu'à son départ.

Il apporte ainsi à ses décisions une justification objective étrangère à toute discrimination à raison de la grossesse.

La discriminiation en raison de la grossesse n'étant pas établie, les demandes de rappel de salaire et de dommages et intérêts ne sont donc pas fondées.

Par voie de conséquence, par substitution de motifs, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a déclaré que Mme [G] n'a pas été discriminée dans le paiement des salaires et le versement des primes.

- Sur la demande de rectification des documents sociaux :

Il convient d'ordonner la remise des documents sociaux rectifiés (bulletins de salaires, reçu pour solde de tout compte et attestation pôle emploi) conformément à la présente décision.

Mme [G] sera déboutée de sa demande tendant à voir assortir cette condamnation d'une astreinte par jour de retard.

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- Sur les intérêts au taux légal et leur capitalisation :

Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale seront dus à compter de la réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation.

Ces intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Chaque partie ayant partiellement succombé dans ses prétentions, la cour écarte l'application de l'article 700 du code de procédure civile et laisse à chacune la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé en ce qu'il a condamné Mme [G] aux dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions'sauf en ce qu'il a :

- dit que la demande en paiement de rappel de salaire au titre des primes de Mme [G] n'était pas justifiée ;

- condamné Mme [G] aux dépens éventuels ;

statuant à nouveau,

Dit que la demande en paiement de rappel de salaire dû au titre des primes de l'année 2017 est justifiée ;

Condamne la SASU 2A ANIMATIONS ET ACTIONS COMMERCIALES à payer la somme de 2.300 euros bruts de rappel de salaire au titre des primes de l'année 2017 ;

Rappelle qu'en application de l'article 1231-6 du code civil les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les autres sommes à caractère indemnitaire, en application de l'article 1231-7 du code civil, porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les prononce ;

Ordonne la capitalisation de ces intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Ordonne la remise des documents sociaux rectifiés conformément au dispositif de l'arrêt ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens de première instance ;

y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes';

Rejette les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.