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Décisions

Cass. com., 15 novembre 1994, n° 93-12.835

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Poullain

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Gatineau, Me Jacoupy

Douai, du 4 janv. 1993

4 janvier 1993

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 janvier 1993), que Mme Y... a commandé la rénovation d'une maison à l'entreprise " Time River " ; qu'ayant constaté que ce contrat avait été mal exécuté, elle a assigné en paiement de dommages-intérêts M. Z..., qui exerçait son activité commerciale sous le nom de " Time River ", ainsi que M. X... en tant que son associé de fait ;

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à payer diverses sommes à Mme Y..., alors, selon le pourvoi, que, d'une part, la responsabilité du représentant salarié ne peut être engagée envers un tiers en qualité d'associé apparent du dirigeant de l'entreprise qui l'emploie, que si la croyance des tiers en une telle qualité a procédé d'une erreur commune et invincible ; qu'en constatant que Mme Y... " avait toutes raisons de penser qu'elle avait à faire " en la personne de M. X... et de M. Z... " à des associés de fait ", l'arrêt qui s'est contenté d'une erreur légitime du tiers a violé les articles 1845 et suivants du Code civil et L. 751-1 du Code du travail ; alors, d'autre part, qu'il n'est pas contesté que l'entreprise de rénovation dirigée par M. Z... ne s'est jamais présentée aux tiers sous la forme d'une société ; qu'ainsi Mme Y... dont l'arrêt constate qu'elle a eu simultanément à faire à MM. X... et Z..., n'avait pu croire en toute bonne foi qu'elle traitait avec les deux associés ; qu'en engageant néanmoins la responsabilité de M. X... en cette qualité, l'arrêt, sans rechercher si la situation de fait avait été de nature à induire Mme Y... en erreur sur la qualité de son interlocuteur, n'est pas justifié légalement au regard des articles 1382 et 1875 du Code civil ; alors, en outre, que le représentant salarié est habilité comme tel à traiter directement avec les clients pour le compte de son employeur ; qu'en considérant que M. X..., du seul fait d'avoir personnellement signé des courriers et devis adressés à Mme Y... avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en qualité d'associé envers cette dernière, sans indiquer en quoi l'attitude de M. X... eu égard aux pouvoirs que lui conférait sa fonction de représentant, était constitutive d'une faute, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1382 du Code civil et L. 751-1 du Code du travail ; alors, enfin, qu'en tout état de cause, la prétendue faute consistant à avoir induit Mme Y... en erreur sur sa véritable qualité était dépourvue de toute incidence sur le préjudice invoqué par cette dernière résultant de " l'inexécution défectueuse " des prestations commandées par elle ; qu'en condamnant néanmoins M. X... au versement des sommes de 177 613,52 francs à Mme Y... en réparation de ce préjudice et de 25 000 francs au titre du trouble de jouissance, l'arrêt a violé l'article 1382 du Code civil ;

Attendu qu'ayant relevé que l'entreprise " Time River " avait adressé à Mme Y... des lettres portant soit les signatures de M. Z... et de M. X... présentées de façon semblable, soit celle de M. Z... seul, un emplacement étant alors prévu pour M. X... ou la lettre étant accompagnée d'un " mot " de lui, ainsi que deux devis signés par M. X... tandis qu'un devis portait reçu de deux paiements, une fois sous la signature de M. Z..., l'autre sous celle de M. X..., l'arrêt constate qu'aucun de ces documents ne mentionne que M. X... agissait pour le compte de M. Z... et retient qu'il a donné à Mme Y... toutes les raisons de penser qu'elle avait à faire à des associés ayant d'identiques pouvoirs et d'identiques responsabilités dans l'entreprise ; que les juges du fond ont procédé à la recherche prétendument omise et souverainement apprécié que M. X... avait créé à l'égard de Mme Y... l'apparence qu'il avait traité pour le compte d'une société dont il était l'associé ; que la personne qui a créé l'apparence à l'égard d'un tiers d'une société dont il serait l'un des associés est tenue des obligations contractées envers ce tiers ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision de la cour d'appel est justifiée ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.