Cass. 1re civ., 18 juillet 1995, n° 93-13.681
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu que les époux Joseph X... et les époux Jean-Claude X... font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable la mise en cause devant la cour d'appel de Mme Jean-Claude Busnelqui n'avait pas été assignée, aux motifs que l'article 552, alinéa 3, du nouveau Code de procédure civile permet en cas d'indivisibilité, d'ordonner la mise en cause de tous les coïntéressés, alors que la mise en cause d'un tiers n'est possible que si l'évolution du litige l'exige, de sorte que la cour d'appel aurait violé l'article 555 du nouveau Code de procédure civile par refus d'application ;
Mais attendu que c'est seulement en application des dispositions propres de l'article 552, alinéa 3, du nouveau Code de procédure civile, d'où il résulte que la cour d'appel peut ordonner d'office la mise en cause de tous les tiers coïntéressés, s'il existe un lien de solidarité ou d'indivisibilité entre ceux-ci et les autres parties de première instance, que Mme Jean-Claude X... a été assignée en intervention forcée par la Caisse ; que cette mise en cause n'étant pas, ainsi, soumise à la condition de l'évolution du litige prévue par l'article 555, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli la demande de la Caisse alors, selon le moyen, d'une part, que la révocation prévue par l'article 1167 du Code civil suppose établie l'insolvabilité du débiteur à la date de la demande et qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé ce texte ; alors, d'autre part, que la cour d'appel n'a constaté ni que la valeur de la terre grevée d'un bail serait insuffisante à désintéresser le créancier ni que M. X... père, percevant les revenus de ce bail, était insolvable ; alors, en troisième lieu, que la cour d'appel aurait dû rechercher, aussi, si la conclusion du bail n'avait pas été motivée par la nécessité pour M. X... qui ne pouvait plus travailler de percevoir ces revenus ; alors, enfin, que s'agissant d'un acte onéreux, la cour d'appel n'a pas caractérisé la complicité de fraude des preneurs ;
Mais attendu que le créancier investi de droits particuliers sur certains biens de son débiteur peut, hors le cas d'insolvabilité du débiteur, faire révoquer les actes frauduleux faits par celui-ci sur ces mêmes biens, dès lors que par cet acte, ce débiteur a réduit la valeur de ces biens de manière à rendre impossible ou inefficace l'exercice des droits des créanciers ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé souverainement que les époux Joseph X... avaient donné à bail pour une durée de 12 années inhabituellement longue les biens hypothéqués qui s'en étaient trouvés diminués considérablement de valeur au point de rendre la sûreté illusoire ; que ce bail avait été conclu alors que M. et Mme Joseph X... étaient sur le point d'être poursuivis par la Caisse et que le risque de l'opération litigieuse avait été accepté par tous les participants en connaissance de cause ; qu'elle a, ainsi, caractérisé la fraude de la part tant des bailleurs que des preneurs et justifié légalement, sur ce point, sa décision ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité du bail à ferme du 26 décembre 1985 alors que cet acte frauduleux ne pouvait être révoqué que dans la mesure de l'intérêt du créancier ;
Mais attendu que c'est seulement par l'anéantissement du bail litigieux à l'égard des tiers, que le bien hypothéqué retrouvera, lors de sa licitation, la valeur que ce bail lui avait fait perdre ; que l'erreur de terminologie incriminée ne concernant ainsi que les rapports des demandeurs au pourvoi, le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.