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Décisions

Cass. 2e civ., 11 février 2021, n° 18-16.535

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Colmar, du 14 mars 2018

14 mars 2018

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 14 mars 2018), la société General Motors Strasbourg a conclu avec la société Roide Doubs technique, devenue la société Sidéo Roide Doubs technique (la société Sidéo RDT), assurée auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz), un contrat de fournitures de pièces constituant l'un des composants de boîtes automatiques destinées à équiper des véhicules automobiles.

 

2. La société Sidéo RDT a confié le traitement thermique de durcissement de ces pièces, nécessaire pour éviter leur usure prématurée, à la société Établissements Amyot (la société Amyot), assurée au titre de sa responsabilité civile par la société Generali IARD (la société Generali).

 

3. Ayant découvert, à l'occasion d'un contrôle interne, que certaines des pièces commandées n'avaient pas fait l'objet d'un traitement thermique, la société General Motors, aujourd'hui dénommée la société Punch Powerglide Strasbourg (la société PPS), a assigné la société SidéoRDT en paiement de dommages-intérêts et de frais financiers.

 

4. Cette dernière a appelé en garantie la société Amyot, tandis que la société PPS a formé contre la société Allianz, intervenue volontairement dans la procédure, une demande de condamnation à garantir son assurée.

 

5. La société Amyot, condamnée par un jugement du 14 juin 2013 à garantir, dans une certaine limite, la société Sidéo RDT et son assureur Allianz des condamnations prononcées à leur encontre au bénéfice de la société PPS, a été placée, le 6 octobre 2014, en redressement judiciaire, puis, le 23 septembre 2015, en liquidation judiciaire, la SCP PL... ayant été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

 

6. Le 11 mai 2016, la société Allianz, qui avait interjeté appel le 25 juillet 2013 du jugement du 14 juin 2013, a assigné la société Generali en intervention forcée.

 

Examen des moyens

 

Sur le premier moyen

 

Enoncé du moyen

 

7. La société Generali fait grief à l'arrêt de déclarer recevable sa mise en cause par la société Allianz et de dire qu'elle sera tenue in solidum avec la SCP PL..., en qualité de liquidateur en exercice de la société Amyot, de relever et garantir la société Sidéo RDT et la société Allianz de toutes condamnations prononcées à leur encontre, alors « que l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige ; que la procédure collective ouverte contre l'assuré mis en cause, postérieurement au jugement de première instance le condamnant avec d'autres, ne constitue pas une évolution du litige permettant l'appel en garantie formé contre son assureur de responsabilité par un coauteur pour la première fois en cause d'appel ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que la société Allianz IARD, assureur de la société SideoRDT, est intervenue volontairement devant le tribunal de grande instance de Strasbourg afin de demander la condamnation de la société Amyot à les relever, elle et son assurée, de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre ; que dès lors, en affirmant que la liquidation judiciaire de la société Amyot, prononcée postérieurement au jugement dont appel, caractérisait « une évolution du litige rendant recevable la mise en cause d'un tiers afin de garantir la société Amyot des condamnations prononcées à son encontre », tandis que l'appel en garantie formé par la société Allianz IARD contre la société Generali, assureur de la société Amyot, aurait pu l'être dès la première instance, puisque cette dernière avait été appelée en la cause à ce stade de la procédure, la cour d'appel a violé l'article 555 du code de procédure civile.»

 

Réponse de la Cour

 

Vu l'article 555 du code de procédure civile :

 

8. Il résulte de ce texte que les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité peuvent être appelées devant la cour d'appel, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

 

9. L'arrêt, pour déclarer recevable la mise en cause de la société Generali par la société Allianz retient que la première, qui n'était pas partie à l'instance, a été assignée en intervention forcée devant la cour d'appel le 11 mai 2016 et que la société Amyot a été placée en liquidation judiciaire le 23 septembre 2015, soit postérieurement au jugement dont appel, ce qui constitue une évolution du litige rendant recevable sa mise en cause afin de garantir la société Amyot des condamnations prononcées à son encontre.

 

10. En statuant ainsi, alors que l'ouverture, après le jugement, d'une procédure collective à l'égard de la société Amyot n'a pas eu pour effet de modifier les données juridiques du litige et ne constitue pas une évolution de celui-ci, permettant, pour la première fois devant la cour d'appel, la mise en cause de la société Generali, contre laquelle la société Allianz était déjà en mesure d'agir devant le premier juge, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

 

Portée et conséquences de la cassation

 

11. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

 

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

 

13. Il y a lieu de déclarer irrecevable l'appel en intervention forcée de la société Generali par la société Allianz.

 

Mise hors de cause

 

14. La Cour de cassation statuant sans renvoi, il n'y a pas lieu de prononcer de mise hors de cause. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare recevable la mise en cause de la société Generali IARD par la société Allianz IARD, en ce qu'il dit que la société Generali IARD sera tenue in solidum avec la SCP PL..., en qualité de liquidateur en exercice de la société Amyot, de relever et garantir la société Sidéo Roide Doubs technique et la société Allianz IARD de toutes condamnations prononcées à leur encontre, et en ce qu'il condamne la société Generali IARD aux dépens de l'appel, in solidum avec la société Amyot, l'arrêt rendu le 14 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

 

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

 

DÉCLARE irrecevable l'appel en intervention forcée de la société Generali IARD par la société Allianz IARD ;

 

DIT que la SCP PL..., en qualité de liquidateur en exercice de la société Amyot, sera seule tenue de relever et garantir la société Sidéo Roide Doubs technique et la société Allianz IARD de toutes condamnations ;

 

Condamne la société Allianz IARD aux dépens exposés devant la Cour de cassation et dit que la société Generali IARD n'est pas tenue de ceux exposés devant la cour d'appel pour l'appel en garantie ;

 

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Allianz IARD à payer la somme de 3 000 euros à la société Generali IARD, et rejette les autres demandes formées à ce titre ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille vingt et un.