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Décisions

Cass. com., 13 décembre 2023, n° 22-19.749

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Henry

Avocat :

SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Rennes, du 8 juin 2022

8 juin 2022

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 2022), les 27 mai et 22 juillet 2016, M. [T] a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure ayant été étendue à Mme [T] le 16 septembre suivant. La liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du 3 avril 2018.

2. La société Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] Sévigné (la banque), qui avait précédemment déclaré une créance représentant le solde d'un prêt consenti en 2001 à M. et Mme [T] pour l'acquisition de leur résidence principale, a signifié le 7 janvier 2021 un commandement de payer valant saisie immobilière du bien, puis, le 21 avril suivant, les a assignés à l'audience d'orientation du juge de l'exécution. Ces derniers ont soulevé l'irrecevabilité de la demande.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable et de prononcer la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière, alors « qu'un créancier auquel l'insaisissabilité d'un immeuble est inopposable peut exercer son droit de poursuite sur celui-ci indépendamment de ses droits dans la procédure collective du propriétaire de cet immeuble ; qu'en retenant que l'article L. 643-11 du code de commerce était applicable à la Caisse de crédit mutuel, créancier personnel des époux [T] exerçant son droit de poursuite sur leur résidence principale dont l'insaisissabilité lui était inopposable, la cour d'appel a violé les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce. »

Réponse de la cour

Vu les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce :

4. Il résulte du premier de ces textes que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, et sans que le second texte y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble, qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

5. Pour déclarer irrecevable l'action de la banque tendant à saisir l'immeuble de M. et Mme [T], l'arrêt, après avoir retenu que l'action de la banque n'entrait dans aucune des exceptions prévues à l'article L. 643-11 du code de commerce, au principe de non-recouvrement par les créanciers de l'exercice individuel de leurs actions après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de leur débiteur, en déduit que la banque n'était plus en droit de saisir l'immeuble.

6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application, le second par fausse application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.