CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 8 décembre 2023, n° 22/00284
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gaiatrend (SARL)
Défendeur :
Vapotard (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Renard
Conseillers :
Mme Lehmann, Mme Marcade
Avocats :
Me Dauchel, Mme Jean, Me Ledru
Vu le jugement contradictoire rendu le 12 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris,
Vu l'appel interjeté le 24 décembre 2021 par la société Gaïatrend et M. [C] [U],
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 8 septembre 2022 par la société Gaïatrend et M. [U], appelants à titre principal et intimés incidemment,
Vu les uniques conclusions au fond remises au greffe et notifiées par voie électronique le 16 juin 2022 par la société Vapotard, intimée à titre principal et appelante incidente,
Vu l'ordonnance de clôture rendue 22 juin 2023.
SUR CE, LA COUR,
La société Gaïatrend, fondée en 2008 par M. [U], est spécialisée dans l'étude, la conception, la fabrication et la commercialisation de liquides aromatisés pour cigarettes électroniques et de cigarettes électroniques, vendus sous le nom commercial ALFALIQUID. Elle se présente comme pionnière de la cigarette électronique et premier fabricant français d'e-liquides. Elle ajoute que ses produits bénéficient en particulier de la certification E-liquide délivrée par AFNOR CERTIFICATION selon la norme NF XP D90-300-2:2015 qui édicte les caractéristiques essentielles de fabrication d'e-liquide fiable et de qualité et de la conformité HACCP selon la norme NF V01-006.
Elle est notamment titulaire de :
- la marque verbale de l'Union européenne ALFALIQUID, déposée le 25 août 2015 et enregistrée le 30 décembre 2015 sous le n° 014504261 pour désigner des produits en classe 34 et des services en classe 35 et notamment des « Liquides et e-liquides, tous à usage médical ou non à usage médical, tous contenant ou non des succédanés du tabac, tous pour cartouches, recharges et ampoules aromatiques toutes destinées à des cigarettes électroniques, des services de vente en gros et au détail, par correspondance ou sur internet ».
Cette marque ALFALIQUID est utilisée par la société Gaïatrend comme marque ombrelle pour nommer des e-liquides pour cigarettes électroniques qu'elle fabrique et commercialise :
- la marque verbale de l'Union européenne FR-M n° 013134689, déposée le 1er août 2014 et enregistrée le 4 décembre 2014 pour désigner des produits en classes 3 et 34.
- la marque verbale de l'Union européenne FR-M n° 013691738, déposée le 29 janvier 2015 et enregistrée le 12 août 2015 pour désigner des produits en classes 3 et 34.
M. [U], est, à titre personnel, titulaire de la marque verbale de l'Union européenne FR4 n°013515581, déposée le 1er décembre 2014 enregistrée le 4 juin 2015 pour désigner des produits en classes 3, 10 et 34.
Par contrat du 23 décembre 2015, modifié par un avenant du 24 décembre 2018 et inscrit sur les registres de l'EUIPO le 1er octobre 2018, M. [U] a concédé une licence exclusive d'exploitation à la société Gaïatrend sur les marques dont il est titulaire et notamment sur la marque FR4.
Les signes FR-M et FR4 sont chacun apposés sur des produits différents d'e-liquides pour cigarettes électroniques de la gamme ALFALIQUID. La société Gaïatrend précise qu'elle utilisait ces signes bien avant le dépôt des marques sus citées, et ce depuis le mois de septembre 2011 pour FR-M et le mois de mars 2011 pour FR4.
La société Vapotard, immatriculée au registre du commerce et des sociétés depuis le 13 juin 2013, a pour objet la vente de cigarettes électroniques et de leurs accessoires ainsi que de tous objets électroniques, aux professionnels et particuliers. Elle exerce son activité dans six boutiques situées en Normandie et sur ses deux sites Internet www.vapotard.fr et www.vapeurprivee.fr.
Elle indique que depuis le début de son activité, elle commercialise les produits de la société Gaïatrend sous les marques Alfaliquid Original, Dark Story, Siempre, So Fifty, Cool'N Fruit, Axs, Alfapod notamment et commercialise aux côtés de ces marques d'autres marques françaises et étrangères parmi lesquels les produits de la marque LIQUIDEO fabriqués et distribués par la société Akiva.
La société Gaïatrend précise avoir mis en place pour garantir l'image de ses marques et la qualité de ses produits un réseau de distribution sélective avec agrément des revendeurs professionnels.
Elle a conclu avec la société Vapotard, en février 2018, une convention particulière de distribution sélective et un contrat d'agrément. Ces contrats sont produits au débat non signé mais dans les mêmes termes par les deux parties (pièce 43 Gaïatrend et pièce 1 Vapotard).
Le 21 juin 2019, la société Gaïatrend a fait établir un constat par huissier de justice aux fins de faire constater la commercialisation, sur les sites Internet de la société Vapotard, de produits « FS-M », « FS-4 » et « FS4 » de la société Akiva, qu'elle estime contrefaisants de ses marques, proposés à la vente aux côtés de ses propres produits, et constater l'utilisation de ses marques pour faire la promotion des produits concurrents.
Puis, par ordonnance présidentielle du 6 septembre 2019, la société Gaïatrend et M. [U] ont obtenu l'autorisation de faire procéder à des opérations de saisie-contrefaçon au siège de la société Vapotard, lesquelles ont eu lieu le 13 septembre 2019 et ont révélé la présence de stocks de produits dénommés FS-4 et FS-M, produits et fabriqués par la société Akiva.
La société Gaïatrend et M. [U] ont alors fait assigner la société Vapotard devant le tribunal de grande instance de Paris, devenu tribunal judiciaire, par acte du 10 octobre 2019, en contrefaçon de marques et concurrence déloyale et parasitaire.
Ils avaient auparavant déjà fait assigner la société Akiva en contrefaçon de marques, par acte d'huissier de justice du 12 novembre 2018, ce qui a donné lieu à un jugement du tribunal judiciaire de Paris du 27 février 2020 (RG n° 18/13609), et à un arrêt de la cour d'appel de Paris du 15 octobre 2021 (RG n° 20/08665).
Le jugement du tribunal judiciaire du 12 novembre 2021, dont appel, a :
- déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer soulevée par la société Vapotard,
- débouté la société Vapotard de sa demande en nullité des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581 pour défaut de caractère distinctif,
- rejeté la demande de la société Vapotard portant sur la nullité des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581 pour déceptivité,
- déclaré la société Gaïatrend déchue de ses droits sur les marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 à compter du 12 mai 2016,
- déclaré M. [U] déchu de ses droits sur la marque verbale de l'Union européenne FR4 n° 013515581 à compter du 12 mai 2016,
- dit que la partie la plus diligente devra porter à la connaissance de l'EUIPO la présente décision devenue définitive afin que soit inscrite au registre des marques de l'Union européennes les mentions rectificatives ci-dessus,
- dit qu'en reproduisant le terme ALFALIQUID pour promouvoir des produits concurrents, la société Vapotard s'est rendue coupable de contrefaçon de la marque ALFALIQUID n°014504261 dont est titulaire la société Gaïatrend,
- dit que la société Vapotard s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l'encontre de la société Gaïatrend,
- débouté la société Gaïatrend de sa demande formée sur le fondement du dénigrement,
En conséquence,
- fait interdiction à la société Vapotard de faire usage du signe ALFALIQUID à quelque titre que ce soit dans la vie des affaires pour promouvoir et commercialiser des produits en lien avec les cigarettes électroniques et les e-liquides qui ne proviennent pas de la société Gaïatrend, sous astreinte de 150 (cent cinquante) euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, l'astreinte courant sur trois mois,
- dit que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte,
- condamné la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme de 7 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de la marque ALFALIQUID n°014504261,
- rejeté la demande de la société Gaïatrend fondée sur le droit à l'information,
- dit n'y avoir lieu à publication,
- dit n'y avoir lieu à rappel des produits,
- condamné la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la concurrence déloyale et parasitaire,
- débouté la société Vapotard de sa demande reconventionnelle fondée sur la rupture brutale des relations commerciales établies,
- condamné la société Vapotard à payer à la seule société Gaïatrend la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Vapotard aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
La société Gaïatrend et M. [U] demandent à la cour de juger l'appel formé par la société Gaïatrend et M. [U] recevable et bien fondé et y faisant droit :
* annuler et/ou reformer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- déclaré la société Gaïatrend déchue de ses droits sur les marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n°013691738 à compter du 12 mai 2016,
- déclaré M. [U] déchu de ses droits sur la marque verbale de l'Union européenne FR4 n° 013515581 à compter du 12 mai 2016,
- dit que la partie la plus diligente devra porter à la connaissance de l'EUIPO la présente décision devenue définitive afin que soit inscrite au registre des marques de l'Union européennes les mentions rectificatives ci-dessus,
- débouté la société Gaïatrend de sa demande formée sur le fondement du dénigrement,
- limité à la somme de 7 000 euros la condamnation de la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de la marque ALFALIQUID n° 014504261,
- limité à la somme de 15 000 euros la condamnation de la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend en réparation du préjudice subi du fait de la concurrence déloyale et parasitaire,
- rejeté la demande de la société Gaïatrend fondée sur le droit à l'information,
- dit n'y avoir lieu à publication,
- dit n'y avoir lieu à rappel des produits,
- limité la condamnation de la société Vapotard à payer à la seule société Gaïatrend la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté la société Vapotard de sa demande en nullité des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581 pour défaut de caractère distinctif,
- rejeté la demande de la société Vapotard portant sur la nullité des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581 pour déceptivité,
- dit qu'en reproduisant le terme ALFALIQUID pour promouvoir des produits concurrents, la société Vapotard s'est rendue coupable de contrefaçon de la marque ALFALIQUID n° 014504261 dont est titulaire la société Gaïatrend,
- dit que la société Vapotard s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l'encontre de la société Gaïatrend,
- en conséquence,
- fait interdiction à la société Vapotard de faire usage du signe ALFALIQUID à quelque titre que ce soit dans la vie des affaires pour promouvoir et commercialiser des produits en lien avec les cigarettes électroniques et les e-liquides qui ne proviennent pas de la société Gaïatrend, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, l'astreinte courant sur trois mois,
- dit que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte,
- débouté la société Vapotard de sa demande reconventionnelle fondée sur la rupture brutale des relations commerciales établies,
- condamné la société Vapotard aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire,
* Statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable la pièce 26 de la société Vapotard,
- dire et juger que l'offre en vente et la vente par la défenderesse de liquides aromatisés pour cigarettes électroniques sous les dénominations FS-M, FS4 et FS-4 constituent des actes de contrefaçon des marques FR-M et FR4,
- dire et juger que l'usage des marques ALFALIQUID et FR4 à des fins publicitaires pour promouvoir des produits concurrents constitue un acte de contrefaçon de ces marques,
- dire et juger que la vente de produits concurrents imitant les caractéristiques de présentations et d'arômes des produits correspondant et mettant en avant l'identité totale de ces produits de la collection Gaïatrend et la présentation dévalorisante de ces produits sont constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire,
En conséquence,
- interdire à la société Vapotard la poursuite des actes de contrefaçon de marques sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du jugement à venir,
- interdire à la société Vapotard la poursuite des actes de concurrence déloyale parasitaire sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
- ordonner la confiscation des produits contrefaisants et de tous supports comportant la reproduction de ces produits aux fins de leur destruction par la société Gaïatrend et aux frais de la société défenderesse,
- ordonner la communication par la société Vapotard du chiffre d'affaires réalisé dans le cadre des ventes réalisées par celle-ci au travers de ses deux sites internet et dans ses boutiques physiques à partir du 21 juin 2014 en spécifiant le chiffre d'affaires éventuellement réalisé avec les produits authentiques de Gaïatrend, certifié par son expert-comptable, avec les factures correspondantes, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- ordonner la communication par la société Vapotard des achats de produits FS4, FS-4 et FS-M effectués à partir du 20 juin 2014 certifié par son expert-comptable, avec les factures correspondantes, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- réserver à l'appelante le droit de parfaire ses demandes de dommages-intérêts à réception de ces informations certifiées,
- autoriser la publication de la décision à intervenir sur le site internet de Gaïatrend pendant une période d'un an à compter de la signification du jugement à intervenir,
- ordonner la publication du jugement à intervenir sur les deux sites de la société Vapotard pendant une période minimale de 6 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard,
- ordonner la publication du jugement à intervenir dans deux revues spécialisées au choix de la demanderesse et aux frais de la société Vapotard,
- condamner la société Vapotard à verser à la société Gaïatrend une somme de 418 000 euros à titre de provision à valoir sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice économique consécutif aux agissements de contrefaçon de marques,
- condamner la société Vapotard à verser à M. [U] une somme de 68 000 euros à titre de provision à valoir sur les dommages-intérêts consécutifs en réparation du préjudice économique consécutif aux agissements de contrefaçon par imitation de la marque FR4 et de contrefaçon par usage publicitaire de la marque FR4,
- condamner la société Vapotard à verser à la société Gaïatrend la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice consécutif aux agissements de concurrence déloyale,
- condamner la société Vapotard à verser à la société Gaïatrend la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice consécutif aux agissements de parasitisme,
- dire et juger que les demandes reconventionnelles de la société Vapotard sont irrecevables et en tous les cas infondés,
- débouter la société Vapotard de toutes ses demandes reconventionnelles,
- condamner la société Vapotard à verser à la société Gaïatrend la somme de 30 000 euros et à M. [U] la somme de 5 000 euros en remboursement des peines et soins du procès en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Vapotard aux entiers frais et dépens de la procédure en ce y compris les frais de constat d'huissier et de saisie-contrefaçon qui ont été assumés par la société Gaïatrend.
La société Vapotard demande à la cour de :
* annuler et/ou reformer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- déclaré la société Gaïatrend déchue de ses droits sur les marques verbales de l'Union Européenne FR-M n° 013134689 et n° 01369738 à compter du 12 mai 2016
- déclaré M. [U] déchu de ses droits sur la marque verbale de l'Union européenne FR4 n° 013515581 à compter du 12 mai 2016,
- débouté la société Gaïatrend de sa demande formée sur le fondement du dénigrement,
- rejeté la demande de la société Gaïatrend fondée sur le droit à l'information,
- dit n'y avoir lieu à publication,
- dit n'y avoir lieu à rappel des produits,
*Statuant à nouveau :
A titre principal,
- annuler pour défaut de distinctivité et caractère trompeur les marques verbales suivante FR-M enregistrée le 4 décembre 2014 sous le n° 013134689, FR-M enregistrée le 12 août 2015 sous le numéro 013691738 et FR-4 (sic) enregistrée le 4 juin 2015 sous le numéro 013515581,
- ordonner la communication de la décision à l'EUIPO
* A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où les marques ne seraient pas annulées
- prononcer la déchéance de la société Gaïatrend et M. [U] de leurs droits sur leurs marques FR-M et FR-4 (sic) pour défaut d'exploitation à titre de marque,
- prononcer la déchéance de la société Gaïatrend et M. [U] de leurs droits sur leurs marques FR-M et FR-4(sic) pour dégénérescence,
- ordonner la communication de la décision à l'EUIPO,
- dire qu'il n'existe aucune atteinte à la marque ni aucune confusion permettant de caractériser une quelconque contrefaçon,
* En tout état de cause,
- dire et juger que la société Vapotard n'a commis aucun acte de contrefaçon ni de concurrence parasitaire à l'encontre de la société Gaïatrend et M. [U],
- dire et juger que la société Gaïatrend et M. [U] ne justifient d'aucun préjudice lié aux agissements de la société Vapotard,
- débouter la société Gaïatrend et M. [U] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
- dire que la société Vapotard et la société Gaïatrend sont en relations commerciales établies depuis 2013,
- dire et juger comme fautive la rupture totale par la société Gaïatrend de leurs relations commerciales établies avec la société Vapotard,
- fixer la durée de préavis raisonnable à 6 mois,
- condamner la société Gaïatrend et M. [U] au paiement de la somme de 113 415,36 euros euros au titre du préavis qu'ils auraient dû accorder à la société Vapotard dans le cadre de la rupture brutale de leur relation commerciale établie,
- condamner la société Gaïatrend et M. [U] au paiement de la somme de 226 830,56 euros au titre de la perte de marge que devra supporter la société Vapotard du fait de la rupture brutale de leur relation commerciale établie,
- condamner la société Gaïatrend et M. [U] au paiement de la somme de 53 875 euros au titre de la perte de marge qu'a dû supporter la société Vapotard sur les produits AFLALIQUID qu'elle avait en stock et qu'elle n'a pu écouler du fait de l'interdiction de commercialiser les produits Gaïatrend,
- condamner la société Gaïatrend et M. [U] en réparation du préjudice moral subi par la société Vapotard à la somme de 100 000 euros,
- condamner la société Gaïatrend et M. [U] solidairement à verser à la société Vapotard la somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.
A titre liminaire, il sera relevé qu'aucune demande de sursis à statuer n'est présentée devant la cour de sorte que le chef du jugement ayant déclaré cette demande irrecevable est devenu irrévocable.
Sur la pièce 26 de la société Vapotard,
La société Gaïatrend et M. [U] demande que soit déclarée irrecevable la pièce 26 de la société Vapotard qui ne lui aurait pas été communiquée. Pour autant, elle ne justifie pas de ce défaut de communication alors que cette pièce est régulièrement mentionnée dans la liste des pièces communiquées par la société Vapotard en annexe de ses dernières conclusions.
Il n'y a dès lors pas lieu d'écarter des débats la pièce 26 de la société Vapotard.
Sur la demande d'annulation des marques FR-M et FR4 pour défaut de distinctivité et caractère trompeur
La société Vapotard a formé appel incident relativement à la validité des marques verbales de l'Union européenne FR-M et FR4 retenue par le tribunal alors que selon elle ces signes sont dépourvus de distinctivité.
Les trois marques litigieuses ont été déposées entre le 1er août 2014 et le 29 janvier 2015. C'est à ces dates qu'il convient dès lors d'apprécier le caractère distinctif au regard des textes alors en vigueur.
L'article 7 du règlement européen n° 207/2009 du 26 février 2009, applicable aux dépôts litigieux, dispose que sont refusées à l'enregistrement :
« (')
b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;
c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l'époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d'autres caractéristiques de ceux-ci ;
d) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce ;
e) les signes constitués exclusivement :
i) par la forme imposée par la nature même du produit,
ii) par la forme du produit nécessaire à l'obtention d'un résultat technique,
iii) par la forme qui donne une valeur substantielle au produit ;
f) les marques qui sont contraires à l'ordre public ou aux bonnes m'urs ;
g) les marques qui sont de nature à tromper le public, par exemple sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service (') ».
L'article 52 du Règlement précité énonce que la marque enregistrée contrairement aux dispositions de l'article 7 peut être annulée.
La cour rappelle que la distinctivité d'une marque s'apprécie au jour du dépôt par rapport aux produits visés à l'enregistrement.
Le signe est descriptif s'il présente avec les produits en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement une description d'une des caractéristiques des produits et des services en cause.
La société Vapotard demande au dispositif de ses écritures à la cour d'annuler les trois marques verbales FR-M enregistrée sous le n° 013134689, FR-M enregistrée sous le numéro 013691738 et FR-4 (sic) enregistrée sous le numéro 013515581.
Pour autant, le débat soumis à la cour tant par la société Gaïatrend que par la société Vapotard dans la motivation de leurs écritures ne porte pas sur l'ensemble des produits désignés par les dépôts des marques litigieuses mais sur certains seulement d'entre eux.
La société Gaïatrend et M. [U] opposent :
- la marque FR-M n° 013134689, déposée le 1er août 2014 et enregistrée le 4 décembre 2014 en ce qu'elle désigne en classes 3 et 34 des « arômes ou additifs pour les cartouches de cigarettes électroniques, cigares électroniques, cigarillos électroniques, pipes électroniques ; (') cartouches aromatiques destinées à un dispositif électronique de substitut de cigarettes, de cigares, de cigarillos ou de pipes contenant des succédanés du tabac non à usage médical »,
- la marque FR-M n° 013691738, déposée le 29 janvier 2015 et enregistrée le 12 août 2015 en ce qu'elle désigne en classes 3 et 34, outre les produits ci-dessus cités de la marque n° 013134689 les « arômes ou additifs pour les cartouches de cigarettes électroniques, cigares électroniques, cigarillos électroniques, pipes électroniques ; (') cartouches aromatiques destinées à un dispositif électronique de substitut de cigarettes, de cigares, de cigarillos ou de pipes contenant des succédanés du tabac non à usage médical », les « liquides et e-liquides pour cigarettes électroniques ».
- la marque FR4 n° 013515581, déposée le 1er décembre 2014 enregistrée le 4 juin 2015 en ce qu'elle désigne en classes 3, 10 et 34 les « Arômes ou additifs pour les recharges de cigarettes électroniques, cigares électroniques, cigarillos électroniques, pipes électroniques, chichas électroniques ; Cartouches aromatiques destinées à un dispositif électronique de substitut de cigarettes, de cigares, de cigarillos, de chichas électroniques ou de pipes contenant des succédanés du tabac non à usage médical ; E-liquide pour cigarettes électroniques et dispositifs électroniques d'inhalation ; Fluides et liquides aromatiques pour cigarettes électroniques et dispositifs électroniques d'inhalation ».
La société Vapotard fait valoir que les signes FR4 et FR-M ne sont pas distinctifs mais sont de simples acronymes constituant des désignations administratives couramment utilisées dans le secteur des e-liquides et parfaitement compris par les consommateurs.
Elle soutient que le signe FR4 résulte de la volonté d'imiter le produit chinois RY4, très apprécié des consommateurs, pour montrer que le produit est très proche de l'arôme typique du RY4 nommé ainsi car il serait le 4ème produit de l'usine chinoise basée à Ruyan et qu'il serait simplement procédé au remplacement des lettres RY par FR pour signifier la provenance française du produit.
De même, s'agissant du signe FR-M, la société Vapotard soutient que les lettres FR sont également là pour spécifier le rattachement du produit avec la France et que la lettre M signifie MARLBORO afin de désigner un arôme proche des cigarettes de la marque MARLBORO. Elle précise que la société Gaïatrend a été condamnée par jugement du tribunal de grande instance de Nancy en date du 25 janvier 2016 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Nancy du 15 novembre 2017 pour contrefaçon de la marque MARLBORO sur une procédure initiée par une assignation en date du 23 août 2013 par la société Philip Morris Brands, titulaire de la dite marque MARLBORO. Elle prétend que c'est en raison de cette procédure que le lettre M a été choisie pour désigner MARLBORO.
En l'espèce, il convient de rechercher si à la date des dépôts des marques, respectivement les 1er août 2014 et 29 janvier 2015 pour les marques FR-M et 1er décembre 2014 pour la marque FR4, le public pertinent, à savoir le consommateur moyen des produits concernés et les professionnels du secteur, percevaient le signe FR4 et le signe FR-M comme déscriptifs des arômes de cartouches ou liquides pour cigarettes électroniques étant rappelé que le signe doit être pour cela appréhendé dans son ensemble.
La société Vapotard prétend que l'utilisation du chiffre 4 ou de la lettre M renvoie nécessairement à une saveur bien précise, un tabac blond vanillé et caramélisé pour le chiffre 4 s'apparentant au produit RY4 et la saveur de la cigarette MARLBORO pour la lettre M.
Cependant la cour qui a pris connaissance de l'intégralité des pièces versées au débat, écartant celles qui sont postérieures à la date respective des dépôts considérés, retient que s'il est confirmé qu'antérieurement à 2014 il existait un produit RY4 produit en Chine et connu d'une partie du public pertinent, il n'est pas démontré à suffisance que le signe FR4, à la date du dépôt de la marque, le 1er décembre 2014, constituait la désignation usuelle et nécessaire, auprès de l'ensemble des professionnels du secteur et des utilisateurs des produits concernés, d'un liquide pour cigarette électronique d'une saveur déterminée.
De même, il n'est pas démontré que le signe FR-M, à la date du dépôt des deux marques, les 1er août 2014 et 29 janvier 2015, était spontanément compris par le public pertinent comme étant de façon univoque et objective nécessairement associé aux cigarettes MARLBORO, ou même à leur goût ou saveur.
Ainsi, les marques présentaient à la date de leurs dépôts un caractère arbitraire et distinctif.
La société Vapotard prétend par ailleurs que la présence du signe FR au sein des marques considérées est trompeuse car elle laisse à penser que les produits marqués bénéficient d'un label officiel.
Elle procède toutefois par des affirmations qui ne sont pas fondées. Outre qu'il n'est aucunement montré que les lettres FR seront associées à un label officiel, il n'est pas davantage établi qu'elles seraient de nature à tromper le public sur la qualité ou la provenance géographique du produit alors, surtout, que le public est, en l'espèce, renseigné sur la qualité et la provenance géographique des produits de la société Gaïatrend par les labels officiels "NF" et "Origine France Garantie" dont cette dernière est titulaire.
Dès lors le jugement qui a débouté la société Vapotard de ses demandes en nullité des marques litigieuses pour défaut de caractère distinctif et pour déceptivité est confirmé de ces chefs.
Sur la déchéance des marques FR-M et FR4 pour défaut d'exploitation et pour dégénérescence
L'article 18 du règlement sur la marque de l'Union européenne du 14 juin 2017, en vigueur depuis le 1er octobre 1017, dispose que :
« 1. Si, dans un délai de cinq ans à compter de l'enregistrement, la marque de l'Union européenne n'a pas fait l'objet par le titulaire d'un usage sérieux dans l'Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque de l'Union européenne est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage ».
Et en application de l'article 58 du même règlement, « 1. Le titulaire de la marque de l'Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l'Office ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon :
a) si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux dans l'Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, et qu'il n'existe pas de justes motifs pour le non-usage ; toutefois, nul ne peut faire valoir que le titulaire est déchu de ses droits si, entre l'expiration de cette période et la présentation de la demande ou de la demande reconventionnelle, la marque a fait l'objet d'un commencement ou d'une reprise d'usage sérieux ; cependant, le commencement ou la reprise d'usage fait dans un délai de trois mois avant la présentation de la demande ou de la demande reconventionnelle, ce délai commençant à courir au plus tôt à l'expiration de la période ininterrompue de cinq ans de non-usage, n'est pas pris en considération lorsque des préparatifs pour le commencement ou la reprise de l'usage interviennent seulement après que le titulaire a appris que la demande ou la demande reconventionnelle pourrait être présentée ;
b) si la marque est devenue, par le fait de l'activité ou de l'inactivité de son titulaire, la désignation usuelle dans le commerce d'un produit ou d'un service pour lequel elle est enregistrée ;
c) si, par suite de l'usage qui en est fait par le titulaire de la marque ou avec son consentement pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, la marque est propre à induire le public en erreur notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique de ces produits ou de ces services.
2. Si la cause de déchéance n'existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, le titulaire n'est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés ».
La société Vapotard demande la confirmation du jugement qui a déclaré déchues les marques FR-M et FR4 et propose de prendre, comme les premiers juges, pour période de référence les cinq années précédant la date à laquelle les déchéances ont été demandées, soit la période allant du 12 mai 2016 au 12 mai 2021.
Elle fait sienne l'argumentation du tribunal qui a retenu la déchéance aux motifs que les termes FR-M et FR4 sont utilisés pour désigner des saveurs, mais non à titre de marque et que seule la marque ALFALIQUID permet de garantir l'origine des produits concernés, à savoir notamment des e-liquides.
Il n'est pas discuté que pendant la période de référence, les signes FR-M et FR 4 sont utilisés pour désigner les produits désignés dans les enregistrements de marque argués de déchéance.
La cour retient que l'utilisation des termes FR-M et FR-4 par la société Gaïatrend pour désigner une saveur spécifique de produits n'est pas exclusif d'un usage à titre de marque permettant de garantir l'origine des produits concernés.
Contrairement à ce que soutient la société Vapotard, l'arôme ou la saveur d'un e-liquide pour cigarette électronique ne constitue pas un composant du produit mais une caractéristique de celui-ci qui participe de son identité et le distingue d'un autre produit de la même catégorie. En permettant au consommateur d'identifier et de distinguer au sein de la marque ombrelle ALFALIQUID les différents e-liquides selon leur arôme ou leur saveur, les signes FR-M et FR4 sont utilisés à titre de marque et répondent à la fonction essentielle de la marque d'indication de l'origine commerciale du produit. Un signe arbitraire peut à la fois servir à indiquer une caractéristique du produit, telle sa saveur, et également sa provenance.
De même, l'utilisation de la marque ombrelle ALFALIQUID pour une gamme de produits et à ses côtés les marques FR-M et FR-4 pour désigner spécifiquement un produit particulier de la gamme, n'est pas exclusif d'un usage à titre de marque des termes FR-M et FR-4. La coexistence de plusieurs signes sur un même produit n'implique pas que l'un ou l'autre n'est pas exploité en tant que marque
Les éléments produits aux débats établissent que les produits sont présentés à la vente dans des flaconnages indiquant sous la marque ombrelle ALFALIQUID, le signe FR-M ou le signe FR4 selon le produit. Les signes FR-M et FR4 sont bien exploités à titre de marque dès lors qu'ils ont pour fonction, au même titre que la marque ombrelle au côté de laquelle ils sont apposés, de permettre au public d'identifier l'origine commerciale du produit et de distinguer ce produit de ceux d'une autre entreprise.
Il s'ensuit que le jugement qui a retenu la déchéance des marques litigieuses pour défaut d'exploitation doit être infirmé et la société Vapotard déboutée de ses demandes de ces chefs.
La société Vapotard soutient également que les marques seraient déchues par dégénérescence dès lors que les signes désignent des saveurs des produits et non les produits eux-mêmes et seraient devenus génériques.
Pour autant, la dégénérescence n'est établie que si la marque est devenue la désignation usuelle dans le commerce du produit par la faute de son propriétaire.
La société Gaïatrend et/ou M. [U] qui ont engagé de nombreuses procédures dont les parties ont fait état pour défendre leurs marques n'ont aucunement de manière fautive laisser dégénérer leurs marques.
Les demandes formées de ce chef sont en conséquence mal fondées et seront rejetées.
Sur la contrefaçon des marques FR-M, FR4 et ALFALIQUID,
L'article 9 du règlement sur la marque de l'Union européenne du 14 juin 2017 dispose que :
« 1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque:
a) ce signe est identique à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée ;
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque ;
c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'Union et que l'usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l'Union européenne ou leur porte préjudice.
3. Il peut notamment être interdit, en vertu du paragraphe 2:
a) d'apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement;
b) d'offrir les produits, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins sous le signe, ou d'offrir ou de fournir des services sous le signe ;
c) d'importer ou d'exporter les produits sous le signe ;
d) de faire usage du signe comme nom commercial ou dénomination sociale ou comme partie d'un nom commercial ou d'une dénomination sociale ;
e) d'utiliser le signe dans les papiers d'affaires et la publicité ;
f) de faire usage du signe dans des publicités comparatives d'une manière contraire à la directive 2006/114/CE. (') ».
L'article L. 122-2 du code de la consommation énonce que :
« La publicité comparative ne peut :
1° Tirer indûment profit de la notoriété attachée à une marque de produits ou de services, à un nom commercial, à d'autres signes distinctifs d'un concurrent ou à l'appellation d'origine ainsi qu'à l'indication géographique protégée d'un produit concurrent ;
2° Entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activité ou situation d'un concurrent ;
3° Engendrer de confusion entre l'annonceur et un concurrent ou entre les marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens ou services de l'annonceur et ceux d'un concurrent ;
4° Présenter des biens ou des services comme une imitation ou une reproduction d'un bien ou d'un service bénéficiant d'une marque ou d'un nom commercial protégé. »
L'article L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle énonce que constitue une contrefaçon la violation des interdictions posées par l'article 9 du règlement sur la marque de l'Union européenne.
Sur la contrefaçon par imitation des marques FR-M et FR4,
Il est établi et non contesté que la société Vapotard commercialise des e-liquides provenant de la société Akiva sous les signe FS-M, FS4 et FS-4. Les appelants estiment qu'il s'agit d'actes de contrefaçon par imitation des marques FR-M de la société Gaïatrend pour le signe FS-M et de la marque FR4 de M. [U] pour les signes FS4 et FS-4.
Pour apprécier la contrefaçon, il y a lieu de rechercher si, au regard d'une appréciation des degrés de similitude entre les signes et entre les produits et/ou services désignés, il existe un risque de confusion comprenant un risque d'association dans 1'esprit du public concerné, ce risque de confusion devant être apprécié en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce.
Le public pertinent est en l'occurrence constitué des consommateurs moyens acheteurs d'e-liquides pour cigarettes électroniques et des professionnels du secteur.
Il n'est pas contesté que les e-liquides commercialisés par la société Vapotard sont des produits identiques ou similaires à ceux désignés par les marques opposées.
Les signes n'étant pas identiques, il convient de rechercher s'il existe entre les signes en présence un risque de confusion dans l'esprit du public concerné, incluant le risque d'association, qui doit être apprécié globalement à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques en tenant compte notamment des éléments distinctifs de celles-ci.
Visuellement, les signes ne se distinguent que par la lettre R remplacée par la lettre S et pour l'un des signes, FR-4, par l'ajout d'un tiret. Ils sont donc visuellement très proches.
Phonétiquement, pour le même motif, leur similarité est forte, ce d'autant que le tiret ne se prononce pas.
Sur le plan conceptuel, les signes évoquent tous des codes sans signification particulière immédiatement perceptible. Ils renvoient néanmoins à des concepts très proches si l'on considère que la lettre F située en attaque dans les deux signes peut se référer à la France.
Dès lors, il convient de conclure que les signes présentent une similarité forte, combinée à l'identité ou similarité des produits concernés, ce dont il résulte que le consommateur d'attention moyenne sera nécessairement amené à attribuer aux produits une origine commune créant ainsi un risque de confusion. La contrefaçon par imitation est ainsi caractérisée.
Sur la contrefaçon par reproduction des marques ALFALIQUID et FR4,
Les appelants reprochent à la société Vapotard de proposer à la vente les produits de la société Akiva, concurrents à ceux de la société Gaïatrend en faisant usage des marques ALFALIQUID de cette dernière et FR4 de M. [U].
La cour qui a pris connaissance du procès-verbal de constat établi par huissier de justice le 21 juin 2019 a pu relever que la société Vapotard a, sur son site internet « www.vapotard.fr », reproduit les deux marques ALFALIQUID et FR4 pour promouvoir des e-liquides, qui sont des produits désignés de manière identique aux enregistrements des deux marques opposées, et ce pour promouvoir des e-liquides de la marque concurrente LIQUIDEO.
Les annonces qui présentent les e-liquides LIQUIDEO sont rédigées comme suit : « Nouveau !!! les flacons Alfaliquid FR4 pas cher (sic) sont remplacés par le FS4 de la marque française LIQUIDEO : même goût, même prix, même qualité française ».
Le produit FS4 de LIQUIDEO, vendu « en promo » est présenté sur plusieurs pages du site de la société Vapotard comme : « E LIQUIDE 3, 50 EUROS FS4 TABAC FR4 PAS CHER ».
Les marques ALFALIQUID et FR4 sont donc utilisées à l'identique pour designer des produits identiques à ceux de l'enregistrement des marques antérieures. La contrefaçon de marque par reproduction est ainsi caractérisée.
Ces messages qui ont pour effet de créer dans l'esprit du public une association entre deux marques concurrentes, l'une tirant profit d'une plus grande connaissance du public attachée à l'autre et présentant ses produits comme une reproduction des produits concurrents ne peuvent en application de l 'article L. 122-2 du code de la consommation, constituer des publicités comparatives licites au sens de l 'article 9 du règlement sur la marque de l'Union européenne, contrairement à ce que soutient la société Vapotard.
Ainsi, le jugement qui a retenu que la société Vapotard a commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque ALFALIQUID doit être confirmé et il doit être ajouté qu'elle a aussi commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque FR4.
Sur la concurrence déloyale et la concurrence parasitaire distinctes des faits de contrefaçon,
La société Gaïatrend soutient que les flacons et le packaging de ses produits et ceux commercialisés sous la marque LIQUIDEO de la société Akiva présentent la même forme de flacon et de bouchon, la même couleur dominante bleue visible sur l'emballage et le capuchon, le même emplacement vertical des marques ombrelles, le même drapeau bleu-blanc-rouge en ligne fine et le même emplacement, horizontal en bas, des marques. Elle reproche également de mettre en avant les mêmes saveurs et arômes des produits e-liquides.
Elle soutient que ces ressemblances n'ont pas pu échapper à la société Vapotard, revendeur des produits de la société Gaïatrend et qu'elle aurait dû l'avertir conformément à ses obligations contractuelles de défense de la marque et des produits Gaïatrend alors qu'elle a exploité au maximum ces similitudes dans sa communication commerciale, pour entretenir la plus grande confusion dans l'esprit de ses clients aux seules fins de promouvoir des produits concurrents vendus moins chers.
La cour observe que la demande de la société Gaïatrend ne se fonde pas sur une violation contractuelle mais sur une concurrence déloyale de nature délictuelle qui nécessite de justifier d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil consistant à commercialiser des produits imitant ou reproduisant des produits concurrents avec pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l'esprit du public.
Pour autant, outre qu'il n'est pas contesté que la société Vapotard n'est pas intervenue dans le choix du packaging, ni des saveurs des produits fabriqués par son fournisseur la société Akiva, et qu'elle était en droit de vendre parrallèlement des produits de la société Gaïatrend et des produits provenant de sociétés concurentes, telle la société Akiva, force est de constater que la preuve de confusion entre les produits n'est pas apportée.
En effet la cour observe que la couleur dominante sur les produits est différente ; le flacon de la marque ALFALIQUID est blanc avec un peu de bleu, tandis que ceux de la marque LIQUIDEO sont d'un bleu turquoise très différent. De même, la majeure partie du flacon LIQUIDEO est en bleu turquoise avec un design en forme de vaguelettes alors que le flacon ALFALIQUID est blanc avec simplement le bouchon bleu et une fine bande bleue, le tout dans un design très linéaire. La charte graphique est également différente, chargée de nombreuses mentions sur les produits de la société Gaïatrend et plus épurée sur les produits LIQUIDEO.
Il ne peut être reproché à la société Vapotard d'avoir tenté de créer auprès du public une confusion entre les produits ALFALIQUID et LIQUIDEO.
Dès lors, la cour retient qu'il n'est pas caractérisé à l'encontre de la société Vapotard des faits illicites, distincts de la contrefaçon, consistant à créer dans l'esprit du public une confusion entre les produits.
De même, et comme retenu par les premiers juges, il n'est justifié d'aucun dénigrement ou dévalorisation des produits de la société Gaïatrend sur le site de la société Vaopotard, l'information relative aux prix des produits n'étant pas constitutive d'un dénigrement.
Ainsi, le jugement est infirmé en ce qu'il a retenu des faits de concurrence déloyale et confirmé en ce qu'il a débouté du grief de dénigrement.
En revanche, c'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que la société Gaïatrend démontre avoir travaillé sur son image et obtenu pour ses produits un certificat de l'AFNOR et une attestation d'évaluation de la HACCP garantissant les standards de qualité et de sécurité de ses e-liquides et, que son e-liquide FR-M est par ailleurs présenté comme un produit phare et le produit e-liquide pour cigarette électronique le plus vendu en France et classé parmi les meilleurs e-liquides au goût tabac. Elle justifie également d'investissements publicitaires. Il est en outre démontré que la société Vapotard vend les produits de la société Gaïatrend depuis au moins 2013, voire 2011.
Ainsi, c'est pertinemment qu'ils ont retenu que les inscriptions, sur les sites internet «www.vapotard.fr » et « www.vapeurprivee.fr » telles que « e liquide 3,50 euros FS4 tabac FR4 pas cher », ou encore « les flacons Alfaliquid FR4 pas cher (sic) sont remplacés par le FS4 de la marque française LIQUIDEO : même goût, même prix, même qualité française » pour que la société Vapotard « reste toujours moins cher à [Localité 9], à [Localité 7], à [Localité 8], [Localité 6], [Localité 5] », la société Vapotard offrant d'ailleurs des flacons LIQUIDEO en cadeau aux consommateurs ayant commandé des flacons du e-liquide FR4 de la marque ALFALIQUID, démontrent suffisamment que la société Vapotard a utilisé la notoriété et la qualité attachées aux e-liquides de la marque ALFALIQUID pour vendre des produits concurrents à moindre coût, afin de maintenir sa position parmi les vendeurs les moins chers de e-liquides. Elle a ainsi profité des investissements de la société Gaïatrend pour obtenir un avantage commercial, qui est constitutif de parasitisme.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu une concurrence parasitaire au préjudice de la société Gaïatrend.
Sur les mesures réparatrices indemnitaires,
Sur l'indemnisation des actes de contrefaçon,
L'article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée ».
Il ressort des factures saisies par l'huissier de justice instrumentaire lors des opérations de saisie-contrefaçon réalisées le 13 septembre 2019, et telles que listées par la société Gaïatrend et M. [U], listing non contesté par la société Vapotard, que cette dernière a acquis de la société Akiva, entre le 25 février 2019 et le 13 septembre 2019 comme suit les produits LIQUIDEO FS4 / FS-4 et FS-M :
Le 25 février 2019 :
Facture FA2017034997 : 390 boîtes de 15 flacons d'e-liquides FS-4
Le 26 mars 2019 :
Facture FA2017035948 : 119 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035947 : 79 boîtes de 15 flacons FS- 4
Facture FA2017035943 : 22 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035942 : 8 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035940 : 2 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035939 : 4 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 25 février 2019 :
Facture FA2017034997 : 390 boîtes de 15 flacons d'e-liquides FS-4
Le 26 mars 2019 :
Facture FA2017035948 : 119 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035947 : 79 boîtes de 15 flacons FS- 4
Facture FA2017035943 : 22 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035942 : 8 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035940 : 2 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017035939 : 4 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 26 avril 2019 :
Facture FA2017037016 : 440 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037017 : 13 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037023 : 25 boîtes de 15 flacons FS4 et 2 boîtes de 15 flacons FS-M
Facture FA2017037024 : 52 boîtes de 15 flacons FS4 et 4 boîtes de 15 flacons FS-M
Le 26 mai 2019 :
Facture FA2017037706 : 6 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037693 : 328 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037705 : 2 boîtes de 15 flacons FS-4 et 2 boîtes de 15 flacons FS-M
Facture FA2017037707 : 10 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037708 : 16 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 12 juin 2019 :
Facture FA2017038596 : 11 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017038597 : 100 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017038598 : 22 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017038599 : 6 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017037600 : 15 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 27 juin 2019 :
Facture FA2017039145 : 4 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017039144 : 7 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017039137 : 330 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017039135 : 6 boîtes de 15 flacons FS4 et 2 boîtes de 15 flacons FS-M
Le 15 juillet 2019 :
Facture FA2017039778 : 10 boîtes de 15 flacons FS4
Facture FA2017039777 : 26 boîtes de 15 flacons FS4
Facture FA2017039776 : 20 boîtes de 15 flacons FS4 et 4 boîtes de 15 flacons FS-M
Le 18 juillet 2019 :
Facture FA2017039941 : 426 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 27 août 2019 :
Facture FA2017040924 : 30 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2017040921 : 6 boîtes de 15 flacons FS-4
Le 12 septembre 2019 :
Facture FA2019091242 : 30 boîtes de 15 flacons FS-4 et 7 boîtes de 15 flacons FS-M
Facture FA2019091243 : 400 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2019091244 : 1 boîte de 15 flacons FS-4
Facture FA2019091245 : 10 boîtes de 15 flacons FS-4
Facture FA2019091246 : 4 boîtes de 15 flacons FS-4
Les prix HT des paquets de 15 flacons acquis auprès de la société Akiva varie entre 21,60 euros et 22, 95 euros, soit une moyenne d'environ 1,50 euros le flacon.
La société Vapotard précise qu'elle revend le flacon de 10 ml à environ 3,90 euros.
La société Gaïatrend produit une attestation de son expert-comptable énonçant qu'au regard de l'exercice clos au 30 juin 2019, le taux de marge brute réalisée par la société Gaïatrend est de 85 %.
Les appelants précisent encore que M. [U] en sa qualité de titulaire et concédant de la marque FR4 estime à 10 % de la marge réalisée le préjudice qui doit lui être réparé.
La cour observe que la masse contrefaisante est essentiellement composée de produits FS4 et FS-4 contrefaisant la marque FR4 de M. [U], les produits FS-M, contrefaisant les marques FR-M de la société Gaïatrend ne représentant que 21 cartons de 15 flacons.
Néanmoins, la cour retient que la contrefaçon par reproduction de la marque ALFALIQUID de la société Gaïatrend, ci-dessus caractérisée a permis la vente tant des produits FS-M que des produits FS4 et FS-4. Le préjudice subi par la société Gaïatrend s'étend dès lors au-delà des seules ventes de produits FS-M.
Ni la société Gaïatrend, ni M. [U] ne justifie, ni ne quantifie un préjudice moral devant entrer en considération pour l'appréciation du préjudice en vertu de l'article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle.
Ils forment une demande provisionnelle de condamnation à hauteur de 418 000 euros pour la société Gaïatrend et de 68 000 euros pour M. [U] et sollicitent pour le surplus qu'il soit ordonné à la société Vapotard de communiquer sous astreinte des pièces complémentaires.
Pour autant, la cour qui a pris connaissance de l'ensemble des éléments du débat considère qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de communication complémentaire et, tenant compte de ces éléments et d'un report mesuré des consommateurs sur les produits concurrents, fixe en application de l'article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle à la somme de 60 000 euros l'indemnisation due par la société Vapotard à la société Gaïatrend et à 50 000 euros celle due à M. [U] en réparation de leur entier préjudice respectif subi par la contrefaçon de leurs marques respectives.
Sur l'indemnisation des actes de parasitisme,
Comme retenu par les premiers juges, s'il n'est pas démontré que la baisse des ventes des e-liquides FR-M et FR4 au cours de l'année 2019 résultent des agissements de la société Vapotard, la société Gaïatrend a nécessairement subi un manque à gagner du fait du détournement de clientèle résultant desdits agissements.
La cour fixe, au vu des éléments du débat, à la somme de 10 000 euros la réparation de l'entier préjudice subi de ce chef par la société Gaïatrend.
Sur les autres mesures de réparation,
L'interdiction prononcée par le tribunal sous astreinte à l'encontre de la société Vapotard de faire usage du signe ALFALIQUID à quelque titre que ce soit dans la vie des affaires pour promouvoir et commercialiser des produits en lien avec les cigarettes électroniques et les e-liquides qui ne proviennent pas de la société Gaïatrend est confirmée.
Il sera en outre prononcé la même interdiction de faire usage des signes FR-M, FR4, FS-M, FS-4 et FS4 à quelque titre que ce soit dans la vie des affaires pour promouvoir et commercialiser des produits en lien avec les cigarettes électroniques et les e-liquides qui ne proviennent pas de la société Gaïatrend, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, l'astreinte courant sur trois mois.
Les préjudices de la société Gaïatrend et de M. [U] étant ainsi entièrement réparés, le jugement sera également confirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de publication et de rappel des produits et la demande de confiscation des produits sera rejetée comme non justifiée.
Sur les demandes incidentes de la société Vapotard relatives à la rupture abusive des relations commerciale établies
La société VAPOTARD se prévaut des dispositions de l'article L. 442-1 II du code de commerce qui dispose que :
« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.
En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois.
Les dispositions du présent II ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».
Il n'est pas contesté que la société Vapotard bénéficiait de relations commerciales avec la société Gaïatrend depuis 2013, lesquelles ont porté sur un important volume d'affaires auxquelles il a été mis fin par la société Gaïatrend suivant courrier du 25 septembre 2019 motivé par la saisie-contrefaçon effectuée le 25 septembre 2019.
Au vu des termes de l'arrêt rendu ce jour et des actes de contrefaçon constatés en suite notamment des opérations de saisie-contrefaçon du 25 septembre 2019, la rupture du contrat sans préavis était justifiée.
Le jugement qui a débouté la société Vapotard de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles doit être confirmé de ce chef.
Sur les frais et dépens,
Les condamnations prononcées par le jugement de la société Vapotard aux dépens de première instance et au paiement d'une somme de 5 000 euros à la société Gaïatrend sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées.
La société Vapotard est en outre condamnée aux dépens d'appel et, en équité, à payer une somme complémentaire de 4 000 euros à la société Gaïatrend pour ses frais irrépétibles d'appel et de 8 000 euros à M. [U] pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, étant précisé que ces sommes incluent les frais de constat et de saisie-contrefaçon déboursés par la société Gaïatrend.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant dans les limites de l'appel principal et de l'appel incident,
Dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce 26 de la société Vapotard,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré la société Gaïatrend déchue de ses droits sur les marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581 à compter du 12 mai 2016, dit que la partie la plus diligente devra porter à la connaissance de l'EUIPO la décision devenue définitive afin que soit inscrite au registre des marques de l'Union européennes les mentions rectificatives, dit que la société Vapotard s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et condamné la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme de 7 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de la marque ALFALIQUID n° 014504261 et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la concurrence déloyale et parasitaire,
Y substituant et y ajoutant,
Déboute la société Vapotard de ses demandes de déchéance des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n° 013691738 et FR4 n° 013515581,
Dit que la société Vapotard s'est rendue coupable de contrefaçon des marques verbales de l'Union européenne FR-M n° 013134689 et n°013691738 de la société Gaïatrend,
Dit que la société Vapotard s'est rendue coupable de contrefaçon de la marque verbale de l'Union européenne FR4 n° 013515581 de M. [C] [U],
Condamne la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de ses marques ALFALIQUID n° 014504261, FR-M n° 013134689 et FR-M n° 013691738,
Condamne la société Vapotard à payer à M. [C] [U] la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de sa marque FR4 n° 013515581,
Déboute la société Gaïatrend de ses demandes au titre de la concurrence déloyale,
Condamne la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de parasitisme,
Fait interdiction à la société Vapotard de faire usage des signes FR-M, FR4, FS-M, FS-4 et FS4 à quelque titre que ce soit dans la vie des affaires pour promouvoir et commercialiser des produits en lien avec les cigarettes électroniques et les e-liquides qui ne proviennent pas de la société Gaïatrend, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, l'astreinte courant sur trois mois,
Déboute la société Gaïatrend et M. [C] [U] de leur demande de confiscation,
Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif,
Condamne la société Vapotard à payer à M. [C] [U] la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, incluant les frais de constat d'huissier et de saisie-contrefaçon,
Condamne la société Vapotard à payer à la société Gaïatrend la somme complémentaire de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Vapotard aux dépens d'appel.