Cass. 3e civ., 26 octobre 2011, n° 10-18.858
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Didier et Pinet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 9 mars 2010) que M. X..., preneur à bail de locaux à usage commercial appartenant aux époux Y..., a demandé par acte du 21 janvier 2003 le renouvellement de son bail venu à son terme le 31 décembre 2002 ; que les bailleurs ayant accepté le principe du renouvellement mais non le loyer proposé, ont assigné M. X... en fixation du prix du bail ; que la société La Baraka, à qui M. X... a fait apport de son fonds de commerce, est intervenue volontairement à l'instance ; que lors de l'appel formé contre la décision ayant accueilli la demande des bailleurs, M. X... et la société La Baraka ont conclu à la nullité du jugement avant dire droit et du jugement au fond à défaut de notification d'un mémoire préalable à la saisine du juge ;
Attendu que Mme Z..., veuve Y..., fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande et de constater la prescription de l'action en fixation du loyer alors, selon le moyen :
1°/ que le défaut de notification d'un mémoire préalable à la saisine du juge aux fins de fixation du prix du bail renouvelé ne constitue pas l'une des irrégularités de fond limitativement énumérées à l'article 117 du code de procédure civile ; qu'en retenant que l'absence d'une telle notification affectait en l'espèce l'assignation du 11 août 2003 et les conclusions de M. et Mme Y... d'une nullité de fond, que les appelants étaient dès lors recevables à invoquer en application de l'article 118 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte et l'article 117 du code de procédure civile ;
2°/ que les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ; qu'il en va ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public ; que, comme le soutenait Mme Y..., il résulte de leurs écritures prises devant le président du tribunal de grande instance de Metz que M. X... et la société La Baraka avaient conclu au fond avant de soulever l'exception de procédure tirée du défaut de notification d'un mémoire préalable à la saisine du juge ; qu'en considérant qu'ils étaient recevables à soulever cette exception de procédure devant elle, la cour d'appel a violé l'article 74 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en toute hypothèse, devant les tribunaux de grande instance du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, la demande tendant à la fixation du prix du bail renouvelé peut, par dérogation aux dispositions des articles 29 et suivants du décret n° 53-960 du 30 septembre 1953, devenus les articles R. 145-23 et suivants du code de commerce, être formée soit selon les dispositions du code de procédure civile, soit par remise au greffe d'un acte introductif d'instance ; qu'en retenant que l'assignation du 11 août 2003 et les conclusions de M. et Mme Y... devant le président du tribunal de grande instance de Metz étaient nulles en l'absence de notification d'un mémoire préalable à la saisine du juge conformément aux dispositions des articles R. 145-24 à R. 145-27 du code de commerce, la cour d'appel a violé ces textes par fausse application, et les articles 31, 37 et 38 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par refus d'application ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la saisine initiale du juge des loyers commerciaux n'avait pas été précédée d'un mémoire notifié à la partie adverse et exactement retenu que la procédure prévue par les articles R. 145-24 à R. 145-27 en ce qu'elle est relative au dépôt des mémoires et à leur notification s'impose aux justiciables comme ayant été édictée dans le cadre de l'organisation judiciaire et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et non dans l'intérêt de l'une ou l'autre des parties, que la notification préalable à la saisine du juge du mémoire du demandeur ou du défendeur ne peut être remplacée par aucun acte même extra-judiciaire et que les conclusions déposées devant le juge des loyers commerciaux ne peuvent suppléer l'absence de mémoire, la cour d'appel, sans être tenue de répondre à un moyen inopérant tiré de la faculté de saisir le juge conformément à l'article 31 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en a déduit à bon droit que l'assignation du 11 août 2003 et les conclusions de M. et Mme Y... étaient affectées d'une nullité de fond entraînant la nullité du jugement du 14 décembre 2004 et celle du jugement subséquent du 18 septembre 2007 et que le bailleur ayant accepté le principe du renouvellement le 31 mars 2003, la prescription était acquise le 1er avril 2005 par application des dispositions de l'article L. 145-60 du code de commerce, aucun acte interruptif régulier n'étant intervenu dans ce délai ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à M. X... et à la société La Baraka la somme globale de 2 500 euros, rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille onze.