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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 31 octobre 2011, n° 11/02298

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

PNE (SARL)

Défendeur :

Maille Fine (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

Mme Chokron, Mme Gaber

Avocats :

Me Belfayol Broquet, Me Galichet, Me Marciano

TGI Paris, du 17 déc. 2010, n° 09/16372

17 décembre 2010

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL PNE, exerçant sous le nom commercial BELLA JONES, a pour activité le création, la conception, la vente et la diffusion de vêtements et accessoires et indique être titulaire de droits d'auteur relatifs à deux modèles, un manteau tricoté référencé LOIS et une robe tricotée référencée LOISIR dans sa collection BABYDOLL, créés le 20 décembre 2007 par Mme Sylvie SONSINO qui lui a cédé l'intégralité de ses droits sur ces deux modèles, lesquels ont alors fait l'objet de dépôts FIDEALIS les 16 avril et 14 mai 2008.

Indiquant avoir constaté que la SARL MAILLE FINE proposait à la vente dans son magasin à l'enseigne PAPILLON ROUGE à Paris sous les références 0902 et 0905 des vêtements reproduisant les caractéristiques de ses deux modèles et après avoir fait procéder le 24 août 2009 à un procès-verbal de constat d'achat, la société PNE a fait pratiquer le 15 septembre 2009 une saisie-contrefaçon (autorisée par ordonnance du 10 septembre 2009) au siège de cette société avant de la faire assigner le 13 octobre 2009 devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur.

Vu le jugement rendu contradictoirement le 17 décembre 2010 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

- déclaré irrecevables les demandes présentées par la société PNE - BELLA JONES,

- condamné la société PNE - BELLA JONES à payer à la société MAILLE FINE la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société PNE - BELLA JONES aux dépens,

- rejeté le surplus des demandes.

Vu l'appel interjeté le 07 février 2011 par la SARL PNE.

Vu les dernières conclusions de la SARL PNE, signifiées le 18 mai 2012.

Vu les dernières conclusions de la SARL MAILLE FINE, signifiées le 18 juin 2012.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 03 juillet 2012.

M O T I F S D E L ' A R R Ê T

Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;

Considérant qu'il suffit de rappeler que les premiers juges ont déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon de droits d'auteur de la SARL PNE aux motifs que les conditions de création des deux modèles en cause demeurent ignorées, aucun document ne venant détailler le processus de création et que dès lors la présomption de titularité est inopérante ;

I : SUR LA TITULARITÉ DES DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DE LA SARL PNE :

Considérant que la SARL PNE rappelle qu'elle bénéficie de la présomption de titularité des droits d'auteur sur les deux modèles en cause du seul fait de leur divulgation et de leur exploitation ;

Considérant qu'à ce titre elle déclare verser aux débats les pièces établissant la preuve du processus de création de ces deux modèles ainsi que la date et leur lieu de création (attestation de leur auteur, Mme Sylvie SONSINO, dépôts FIDEALIS, attestation de M. Elie HAMON, PDG du groupe PHL, intermédiaire avec le fabricant chinois) ;

Considérant qu'elle fait en outre valoir que Mme Sylvie SONSINO lui a cédé l'ensemble de ses droits d'auteur et qu'elle est en conséquence recevable à agir en contrefaçon des droits d'auteur dont elle est investie sur ces modèles ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE, qui conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, réplique que Mme Sylvie SONSINO est gérante de la SARL PNE, laquelle ne peut se constituer une preuve à elle-même, que les croquis produits ne comportent aucune date certaine, que les dépôts FIDEALIS ne prouvent pas la création des oeuvres qu'ils supportent et qu'en revanche de nombreuses factures de commercialisation de ces deux modèles portent la référence 'ORIGIN CHINE';

Considérant qu'elle ajoute que l'attestation de M. Elie HAMON produite devant la cour est de pure complaisance dans la mesure où elle émane d'un partenaire commercial de la SARL PNE ;

Considérant qu'elle en conclut que la SARL PNE est dans l'impossibilité de se retrancher derrière la présomption de titularité des droits dans la mesure où elle ne peut justifier du processus de création et de la date de création de l'oeuvre par l'auteur lui ayant cédé ses droits ;

Considérant ceci exposé, qu'en l'absence de revendication de la part des auteurs, fussent-ils identifiés, l'exploitation de l'oeuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne morale est titulaire sur l'oeuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur ;

Considérant que pour bénéficier de cette présomption simple, il appartient à la personne morale d'identifier précisément l'oeuvre qu'elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation en établissant que les caractéristiques de l'oeuvre revendiquée sont identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom ;

Considérant que l'identification des oeuvres revendiquées par la SARL PNE est établie par les dépôts horodatés auprès de la société FIDEALIS du modèle de manteau en laine tricotée référencé LOIS le 16 avril 2008 et du modèle de robe en laine tricotée référencé LOISIR le 14 mai 2008, les photographies et descriptifs des modèles faisant l'objet de ces deux dépôts correspondant bien à ceux faisant l'objet revendiqués dans le cadre du présent litige ;

Considérant qu'il ressort des pièces comptables produites par la SARL PNE que celle-ci a commencé à commercialiser les modèles référencés LOIS et LOISIR à partir du mois de juillet 2008 comme en justifient les factures de livraison de ces modèles à ses revendeurs (société KOWA en Suisse le 07 juillet 2008, société TIERRA en Suisse le 07 juillet 2008, société Les Filles de Tartempion à Brest le 11 juillet 2008, société Le Bon Marché à Paris le 11 juillet 2008, société REALIDAD à Saint-Pierre-d'Oléron le 11 juillet 2008, société SAGA VIARD PREMIERE le 11 juillet 2008, société Catherine Lafon le 11 juillet 2008, société H DE V à Périgueux le 15 juillet 2008, société Paul Davis en Grande-Bretagne le 15 juillet 2008, société CERALI THE CITRON à Artigues le 15 juillet 2008, société Passy de Patrick Gérard le 17 juillet 2008, société BURLY'S à Compiègne le 18 juillet 2008, société MAILKA à Sens le 21 juillet 2008, société ESTYLE au Danemark le 22 juillet 2008, société MOHRMANN en Allemagne le 22 juillet 2008, société Palais Moire en Italie le 03 septembre 2008, société Le Dressing de Brigitte à Paris le 05 septembre 2008, société MARINA BI-COLORIS en Grèce le 10 septembre 2008, société ALSPORT 89 en Espagne le 10 septembre 2008, société ANIS à Paris le 11 septembre 2008, société Mary Grain d'Orge à Orléans le 11 septembre 2008, société Shop Astrid Jaeger en Allemagne le 11 septembre 2008, société JOYCE en Belgique le 12 septembre 2008, société L'Altra Donna aux Pays-Bas le 16 septembre 2008, société Le Grand Comptoir à Suresnes le 13 octobre 2008, société TOO en Italie le 13 octobre 2008, société POINTURE au Liban le 15 octobre 2008, société SUÈDE en Italie le 22 octobre 2008, société BURLY'S à Compiègne le 30 octobre 2008) ;

Considérant que ces modèles apparaissent également dans le catalogue automne-hiver 2008/2009 de la collection BELLA JONES ;

Considérant en conséquence que la SARL PNE justifie d'une exploitation non équivoque sous son nom commercial BELLA JONES des modèles LOIS et LOISIR depuis le mois de juillet 2008 et peut revendiquer la présomption de titularité des droits de propriété intellectuelle sur ces deux oeuvres ;

Considérant que s'il s'agit d'une présomption simple pouvant être renversée par la preuve contraire, il appartient au défendeur à l'action en contrefaçon qui prétend la combattre de rapporter la preuve, qui lui incombe, d'une exploitation antérieure des modèles litigieux par une personne morale tierce ;

Considérant que le seul fait que les factures de livraison ci-dessus mentionnées indiquent, pour les modèles en cause, 'ORIGIN. CHINE' n'est pas suffisant en lui-même pour établir que ces modèles auraient été créés et commercialisés en Chine antérieurement à leur exploitation par la SARL PNE ;

Considérant en effet que M. Elie HAMON, PDG de la SA Groupe PHL, agent et importateur, atteste le 07 février 2011 avoir reçu de la SARL PNE le 20 décembre 2007, instructions afin de faire fabriquer les modèles LOIS et LOISIR par un sous-traitant chinois, la société D.H. Fashion, et n'avoir jamais proposé à la SARL PNE des produits issus du marché local asiatique ;

Considérant qu'est jointe à cette attestation - outre les documents permettant d'identifier formellement son auteur - la facture de livraison de ces modèles par la SA Groupe PHL à la SARL PNE en date du 15 avril 2008 et son paiement le 19 juin 2008 ;

Considérant que cette attestation, qui remplit les conditions de forme de l'article 202 du code de procédure civile, n'a fait l'objet d'aucune plainte pénale pour faux et qu'il n'existe aucun élément laissant supposer qu'elle ne serait que de pure complaisance comme l'affirme péremptoirement la SARL MAILLE FINE ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE ne justifie donc pas d'éléments de nature à combattre la présomption de titularité des droits de propriété intellectuelle de la SARL PNE sur les oeuvres revendiquées par cette dernière ;

Considérant dès lors que le jugement entrepris sera infirmé et que, statuant à nouveau, la SARL PNE sera déclarée titulaire des droits de propriété intellectuelle sur les modèles de vêtements référencés LOIS et LOISIR et recevable en son action en contrefaçon de ces modèles ;

II : SUR LA CONTREFAÇON :

L'originalité des modèles LOIS et LOISIR :

Considérant que la SARL PNE décrit ainsi qu'il suit les caractéristiques du modèle de manteau LOIS :

- manteau tricoté, croisé et fermé par deux gros boutons,

- deux grosses pressions cousues à l'intérieur du manteau, au même niveau que les boutons extérieurs pour maintenir l'effet croisé,

- empiècement sur le devant et dos tricoté en points fantaisie 'croisillon', allant des épaules jusque sous la poitrine (devant et dos),

- manches longues, tricotées en jersey,

- points fantaisie (deux bandes tricotées en mailles croisées, séparées par une bande tricotée à quatre mailles) cousus au centre des manches, de l'épaule au poignet,

- bas du vêtement, bas des manches et bord de chaque ouverture du manteau finis par une côte 2x2 centimètres avec à l'extrémité des points crochetés formant des boules,

- encolure du manteau finie par le même type de point crocheté formant des boules ;

Considérant qu'elle décrit ainsi qu'il suit les caractéristiques du modèle de robe LOISIR :

- robe tricotée,

- empiècement sur devant et le dos en points fantaisie 'natté', allant des épaules jusque sous la poitrine (devant et dos),

- manches courtes, tricotées en jersey,

- points fantaisie (deux bandes tricotées en mailles croisées, séparées par une bande tricotée à quatre mailles) cousus au centre des manches, de l'épaule au bas de la manche,

- bas du vêtement et bas des manches finis par une côte 2x2 centimètres avec à l'extrémité des points crochetés formant des boules,

- encolure de la robe terminée par le même type de point crocheté formant des boules ;

Considérant qu'elle soutient que ces modèles tirent leur originalité de la combinaison de leurs caractéristiques, qui procèdent de choix arbitraires et d'agencements reflétant la personnalité et la créativité de leur auteur ;

Considérant qu'elle fait valoir que la SARL MAILLE FINE ne verse aucun élément pouvant remettre en cause l'originalité de ces modèles ;

Considérant qu'à titre subsidiaire la SARL MAILLE FINE conclut au débouté de la SARL PNE de ses demandes au titre de la contrefaçon en répliquant que l'ensemble des éléments composant les modèles LOIS et LOISIR est d'une banalité évidente et que leur combinaison ne fait pas apparaître un effort personnel créatif ou un parti pris esthétique de nature à leur conférer une originalité propre à les faire bénéficier de la protection du livre I du code de la propriété intellectuelle ;

Considérant que pour le manteau LOIS l'auteur a fait le choix de coudre deux grosses pressions à l'intérieur, au même niveau que les boutons extérieurs, pour maintenir l'effet croisé, que pour les deux modèles il a fait le choix esthétique de placer un empiècement sur le devant et le dos tricoté en points fantaisie 'croisillon' pour le manteau LOIS et 'natté' pour la robe LOISIR, qu'il a également fait le même choix de coudre ces points fantaisie sur les manches, qu'enfin il encore fait le choix esthétique de finir les bas du vêtement, des manches, des bords et de l'encolure par une côte de 2x2 cm avec à l'extrémité des points crochetés formant des boules ;

Considérant que pour justifier de l'absence d'originalité des modèles en cause, la SARL MAILLE FINE se contente d'affirmer que leurs caractéristiques se retrouveraient dans des ouvrages destinés au grand public et notamment 'L'ultime guide du tricot' dont elle produit la photocopie de certaines pages aux débats ;

Considérant que cet ouvrage édité en 2008, se présente comme 'un guide de référence exhaustif' permettant à ses lecteurs 'd'entreprendre avec confiance n'importe quel projet de tricot' ; qu'il ne présente aucune modèle et indique simplement, aux pages 114 et 115 qui sont les seules communiquées au débats par la SARL MAILLE FINE, la technique de groupement des mailles pour créer des effets, notamment de smocks tricotés ;

Considérant que ce document, qui est l'unique pièce produite aux débats par la SARL MAILLE FINE pour contester l'originalité des modèles en cause, ne reprend donc nullement l'ensemble des caractéristiques revendiquées par la SARL PNE telles que détaillées plus haut ;

Considérant dès lors que la combinaison de ces éléments et leur agencement relève de partis pris esthétiques arbitraires portant l'empreinte de la personnalité et de la créativité de leur auteur de nature à faire bénéficier les modèles de vêtements référencés LOIS et LOISIR de la protection conférée par le livre I du code de la propriété intellectuelle ;

La preuve de la contrefaçon des modèles LOIS et LOISIR :

Considérant que la SARL PNE fait valoir que la SARL MAILLE FINE commercialise une robe et un manteau reproduisant respectivement les caractéristiques de ses modèles LOISIR et LOIS, reprenant à l'identique l'ensemble des caractéristiques originales de ces deux modèles telles qu'analysées précédemment ;

Considérant qu'elle soutient que les ressemblances sont incontestables et qu'en commercialisant ces articles, la SARL MAILLE FINE a porté atteinte à ses droits et a commis des actes de contrefaçon ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE n'énonce pas de moyens particuliers quant à la matérialité des faits de contrefaçons, se contentant de conclure à l'absence d'originalité des modèles revendiqués par la SARL PNE ;

Considérant que les modèles argués de contrefaçon et portant les références 0902 et 0905 ont été importés d'Italie par la SARL MAILLE FINE auprès de la société de droit italien MONDO MODA S.R.L. ainsi que cela ressort d'une facture en date du 10 août 2009 ;

Considérant qu'il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 15 septembre 2009 et des photographies qui y sont annexées que le modèle de robe commercialisé par la SARL MAILLE FINE sous la référence 0902 présente les caractéristiques suivantes :

- robe en tricot,

- empiècement en points 'nattés' sur le devant et le dos, allant des épaules jusque sous la poitrine et les omoplates,

- manches courtes avec, au centre, des points fantaisie de l'épaule aux poignets,

- bas du vêtement et des manches finis par une côte terminée par des boules ou similaires,

- encolure présentant le même type de points,

- deux poches plaquées sur le devant ;

Considérant que ce modèle reprend à l'identique les caractéristiques de la robe référencée LOISIR telles que décrites plus haut ;

Considérant qu'il résulte de ce même procès-verbal et des photographies qui y sont annexées que le modèle de manteau commercialisé par la SARL MAILLE FINE sous la référence 0905 présente les caractéristiques suivantes :

- manteau tricoté fermé par deux gros boutons,

- deux pressions sont cousues à l'intérieur du manteau à l'emplacement des boutons, une autre pression est également visible,

- empiècement en points 'nattés' sur le devant et le dos, allant des épaules jusque sous la poitrine et les omoplates,

- manches longues avec, au centre des points fantaisie de l'épaule aux poignets,

- bas du manteau et des manches finis par une côte terminée par des boules,

- encolure présentant le même type de points.

- deux poches plaquées sur le devant ;

Considérant que ce modèle reprend à l'identique les caractéristiques du manteau référencé LOIS telles que décrites plus haut ;

Considérant que les seules différences qui tiennent, sur l'un et l'autre modèle, à la présence de deux poches plaquées sur le devant, ne sont que de détail ;

Considérant que la comparaison des modèles permet donc à la cour de dire que les produits commercialisés par la SARL MAILLE FINE sous les références 0902 et 0905 reprennent, dans la même combinaison, les caractéristiques du fondement de l'originalité des modèles LOIS et LOISIR revendiqués par la SARL PNE ;

Considérant dès lors qu'en important en France, mettant en vente et vendant une robe et un manteau en tricot sous les références 0902 et 0905, la SARL MAILLE FINE a commis des actes de contrefaçon des oeuvres constituées par les modèles LOIS et LOISIR dont la SARL PNE est titulaire ;

Les mesures réparatrices :

Considérant que la SARL PNE réclame en réparation des faits de contrefaçon - outre des mesures d'interdiction de commercialisation des modèles contrefaisants sous astreinte de 2.500 € par jour de retard, d'interdiction de diffusion de la représentation de ces modèles sous astreinte de 2.500 € par jour de retard et de destruction de ces modèles - les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :

- 25.000 € en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte aux investissements exposés en vue de la création et de la promotion des modèles LOIS et LOISIR,

- 40.000 € en réparation du préjudice subi du fait de la dévalorisation des modèles LOIS et LOISIR,

- 30.000 € en réparation du préjudice moral et de l'atteinte à son image de marque,

- 40.000 € en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon sous réserve des informations complémentaires comptables pouvant être obtenues en cours de procédure ;

Considérant qu'à titre infiniment subsidiaire, la SARL MAILLE FINE fait valoir qu'elle n'a commercialisé que 166 modèles pour un prix de vente moyen de 25 € et que le préjudice résultant de la contrefaçon ne saurait donc être supérieur à la somme de 4.150 €, concluant au débouté de la SARL PNE du surplus de ses demandes indemnitaires relatives à une prétendue atteinte aux investissements exposés, au prétendu avilissement des modèles LOIS et LOISIR et à la prétendue atteinte à son image de marque ;

Considérant qu'il sera fait interdiction à la SARL MAILLE FINE de faire fabriquer, d'exporter, d'importer et de commercialiser soit directement, soit par l'intermédiaire de toute filiale, établissement secondaire, usine, sous-traitant, grossiste, détaillant, franchisé et autre revendeur, tout produit contrefaisant les modèles de vêtements référencés LOIS et LOISIR revendiqués par la SARL PNE, et en particulier les modèles commercialisés par la SARL MAILLE FINE sous les références 0902 et 0905, ce dans un délai de 48 heures à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pour une durée de trois mois ;

Considérant qu'il sera également fait interdiction à la SARL MAILLE FINE de diffuser, sur quelque support que ce soit notamment sur ses catalogues et sur son site Internet, la représentation, notamment photographique, de tout produit contrefaisant les modèles référencés LOIS et LOISIR revendiqués par la SARL PNE, et en particulier les modèles commercialisés par la SARL MAILLE FINE sous les références 0902 et 0905, ce dans un délai de 48 heures à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pour une durée de trois mois ;

Considérant que la liquidation de ces astreintes restera de la compétence du juge de l'exécution.

Considérant que conformément aux dispositions de l'article L 335-8 dernier alinéa du code de la propriété intellectuelle il sera ordonné la destruction par un huissier de justice au choix de la SARL PNE et aux frais avancés de la SARL MAILLE FINE de tous articles contrefaisants sur simple présentation par la SARL PNE des devis justificatifs ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, la juridiction prend en considération pour fixer les dommages et intérêts, les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire de ces droits du fait de l'atteinte ;

Considérant qu'en l'état des documents produits aux débats il apparaît que la SARL MAILLE FINE a importé d'Italie 178 pièces du modèle référencé 0902 et 127 pièces du modèle référence 0905 et qu'elle a commercialisé 87 pièces référencées 0902 et 79 pièces référencées 0905 à un prix de vente moyen de 30 € HT pour le modèle 0902 et de 25 € HT pour le modèle 0905 ;

Considérant qu'en ce qui concerne le préjudice subi du fait des actes de contrefaçon il apparaît que 166 pièces contrefaisantes ont été commercialisées, qu'il convient de retenir au titre des bénéfices ainsi réalisés par la SARL MAILLE FINE la somme de 4.150 € qu'elle propose à titre infiniment subsidiaire ;

Considérant qu'en ce qui concerne la demande au titre de l'atteinte aux investissements exposés par la SARL PNE (frais de création et de promotion), les attestations produites par cette dernière concernant le coût de promotion en 2008 et 2009 portent sur l'ensemble des collections de la SARL PNE sans aucune ventilation entre les modèles LOIS et LOISIR et les autres modèles de ces collections ; qu'ainsi la preuve d'un préjudice distinct de ce chef n'est pas rapportée ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'avilissement des modèles LOIS et LOISIR il apparaît qu'en commercialisant les produits contrefaisants à un prix inférieur de près des deux tiers, la SARL MAILLE FINE a dévalorisé les modèles contrefaits qui ont de ce fait perdu de leur attractivité alors qu'ils connaissaient un certain succès tant en France qu'à l'étranger ainsi qu'analysé plus haut ;

Considérant qu'au vu des éléments de la cause et du nombre d'articles contrefaisants commercialisés, la cour évalue le préjudice résultant de ce chef à la somme globale de 15.850 € pour les deux modèles ;

Considérant qu'en ce qui concerne le préjudice moral résultant de l'atteinte portée à l'image de marque de la SARL PNE, il apparaît que ce préjudice est constitué dès lors qu'il y a eu des actes de contrefaçon, que la cour évalue ce préjudice à la somme de 10.000 € ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE sera donc condamnée à payer à la SARL PNE la somme globale de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon ;

III : SUR LA CONCURRENCE DÉLOYALE ET PARASITAIRE :

Considérant que la SARL PNE fait valoir que la SARL MAILLE FINE a commis des faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire de nature à engager sa responsabilité délictuelle sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil en reprenant à l'identique l'ensemble des caractéristiques originales de ses modèles LOIS et LOISIR et en créant un effet de gamme par leur déclinaison dans plusieurs coloris différents, de nature à accentuer le risque de confusion auprès de la clientèle ;

Considérant qu'elle en conclut qu'en agissant ainsi la SARL MAILLE FINE a cherché à se placer dans le sillage de la notoriété de ses propres modèles et à profiter indûment de ses investissements ;

Considérant que la SARL PNE réclame à ce titre la somme de 100.000 € en réparation de son préjudice ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE conclut, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, à l'irrecevabilité des demandes de la SARL PNE au titre de la concurrence déloyale et parasitaire au motif qu'il s'agit de demandes nouvelles présentées pour la première fois en cause d'appel ;

Considérant que la SARL PNE n'énonce pas de moyen en réponse sur ce point ;

Considérant qu'aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ;

Considérant que les actions en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire ont des fondements juridiques différents et ne s'appuient pas sur les mêmes actes fautifs ; qu'elles ne tendent donc pas aux mêmes fins et n'obéissent pas aux mêmes conditions ;

Considérant qu'il ressort des pièces de la procédure qu'en première instance la SARL PNE n'avait présenté aucune demande au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ; que cette demande, présentée pour la première fois devant la cour, est une prétention nouvelle au sens de l'article 564 et doit dès lors être déclarée irrecevable ;

IV : SUR LES AUTRES DEMANDES :

Considérant que la SARL PNE demande qu'il soit ordonné à la SARL MAILLE FINE de lui communiquer, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard, une attestation certifiée conforme par son expert-comptable relative aux quantités de produits référencés 0902 et 0905 commercialisés en France ;

Considérant que dans la mesure où la cour a indemnisé la SARL PNE de l'ensemble de ses préjudices résultant des actes de contrefaçon et a ainsi vidé sa saisine, cette demande de communication de pièces est sans objet ;

Considérant que la SARL PNE demande en outre à titre de réparation complémentaire, la publication du présent arrêt dans dix journaux ou publications professionnels 'y compris électronique' (sic) à son choix et aux frais avancés de la SARL MAILLE FINE sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 8.000 € HT ;

Considérant qu'il apparaît que le préjudice subi par la SARL PNE a été suffisamment réparé par l'allocation de dommages et intérêts, qu'elle sera déboutée de sa demande de publication à titre de réparation complémentaire ;

Considérant qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique de la partie condamnée, d'allouer à la SARL PNE la somme de 10.000 € au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant que la SARL MAILLE FINE, partie perdante tenue à paiement, ne pourra qu'être déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que pour les mêmes motifs la SARL MAILLE FINE sera condamnée au paiement des dépens de la procédure de première instance et d'appel ;

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.

Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau :

Déclare la SARL PNE titulaire des droits de propriété intellectuelle sur les modèles de vêtements référencés LOIS et LOISIR.

Déclare la SARL PNE recevable en son action en contrefaçon des modèles référencés LOIS et LOISIR.

Déclare la SARL PNE bien fondée en son action en contrefaçon des dits modèles.

Dit qu'en important en France, mettant en vente et vendant une robe et un manteau en tricot sous les références 0902 et 0905, la SARL MAILLE FINE a commis des actes de contrefaçon des oeuvres constituées par les modèles LOIS et LOISIR dont la SARL PNE est titulaire.

Fait interdiction à la SARL MAILLE FINE de faire fabriquer, d'exporter, d'importer et de commercialiser soit directement, soit par l'intermédiaire de toute filiale, établissement secondaire, usine, sous-traitant, grossiste, détaillant, franchisé et autre revendeur, tout produit contrefaisant les modèles de vêtements référencés LOIS et LOISIR revendiqués par la SARL PNE, et en particulier les modèles commercialisés par la SARL MAILLE FINE sous les références 0902 et 0905, ce dans un délai de 48 heures à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte provisoire de 500 € (CINQ CENTS EUROS) par jour de retard pour une durée de trois mois.

Fait interdiction à la SARL MAILLE FINE de diffuser, sur quelque support que ce soit notamment sur ses catalogues et sur son site Internet, la représentation, notamment photographique, de tout produit contrefaisant les modèles référencés LOIS et LOISIR revendiqués par la SARL PNE, et en particulier les modèles commercialisés par la SARL MAILLE FINE sous les références 0902 et 0905, ce dans un délai de 48 heures à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte provisoire de 500 € (CINQ CENTS EUROS) par jour de retard pour une durée de trois mois.

Dit que la liquidation de ces astreintes restera de la compétence du juge de l'exécution.

Ordonne la destruction par un huissier de justice au choix de la SARL PNE et aux frais avancés de la SARL MAILLE FINE de tous articles contrefaisants sur simple présentation par la SARL PNE des devis justificatifs.

Condamne la SARL MAILLE FINE à payer à la SARL PNE la somme globale de TRENTE MILLE EUROS (30.000 €) à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon.

Déboute la SARL PNE du surplus de ses demandes indemnitaires.

Déclare irrecevables comme nouvelles en cause d'appel les demandes de la SARL PNE au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.

Déclare sans objet la demande de la SARL PNE tendant à la communication de pièces sous astreinte.

Déboute la SARL PNE de sa demande de publication judiciaire du présent arrêt.

Condamne la SARL MAILLE FINE à payer à la SARL PNE la somme de DIX MILLE EUROS (10.000 €) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Déboute la SARL MAILLE FINE de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SARL MAILLE FINE aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.