Cass. soc., 14 novembre 2000, n° 97-45.001
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu que M. De X... a été engagé à compter du 15 janvier 1990, en qualité de moniteur-éducateur, par l'association " L'Espoir " qui gère un centre d'hébergement pour adultes en difficultés ; que l'employeur, par lettre du 18 décembre 1992, a informé le salarié qu'il faisait jouer la clause résolutoire prévue au contrat de travail s'il n'obtenait pas le diplôme de moniteur-éducateur ou un diplôme équivalent ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale en demandant le paiement d'indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en outre, en cause d'appel, il a réclamé le paiement de rappel de salaires et de dommages-intérêts au titre d'heures supplémentaires ;
Sur le pourvoi principal n° 98-43.314 de l'employeur :
Sur la déchéance du pourvoi :
Vu l'article 989 du nouveau Code de procédure civile dans sa rédaction alors applicable ;
Attendu que lorsque la déclaration de pourvoi ne contient pas l'énoncé, même sommaire, des moyens de cassation invoqués contre la décision attaquée, le demandeur doit, à peine de déchéance, faire parvenir au greffe de la Cour de Cassation, au plus tard dans un délai de trois mois, un mémoire contenant cet énoncé ;
Attendu que la déclaration de pourvoi de l'employeur ne contient pas l'énoncé, même sommaire, d'un moyen de cassation ; qu'en outre, l'employeur n'a pas produit dans le délai légal requis, prévu par le texte susvisé, un mémoire contenant cet énoncé ;
Qu'il s'ensuit que la déchéance du pourvoi est encourue ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par le salarié à l'encontre du pourvoi incident de l'employeur dans l'affaire n° 97-45.001 :
Vu l'article 621 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'une même personne, agissant en la même qualité, ne peut former qu'un seul pourvoi en cassation contre la même décision ;
Attendu que l'employeur qui a formé le 5 novembre 1997 un pourvoi principal, dont la déchéance est prononcée par le présent arrêt, n'est pas recevable à présenter, en la même qualité, un nouveau recours en cassation par la voie d'un pourvoi incident sur le pourvoi principal du salarié contre le même arrêt ;
Sur les trois moyens réunis du pourvoi principal du salarié n° 97-45.001 :
Vu les articles L. 212-4 et L. 212-5 du Code du travail, dans leur rédaction alors en vigueur et l'article 26 de l'ordonnance n° 82-41 du 16 janvier 1982 ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts, la cour d'appel après avoir retenu que le travail au sein de l'association " L'Espoir " est organisé en cycle, énonce qu'en application de l'article L. 212-5 du Code du travail, seules doivent être considérées comme heures supplémentaires celles qui dépassent la durée moyenne de 39 heures calculée sur la durée du cycle de travail et qu'il s'avère qu'au cours d'aucun cycle le salarié n'a dépassé cette durée moyenne ; qu'elle ajoute que si l'article 26 de l'ordonnance du 16 janvier 1982 dispose que la durée du travail des salariés travaillant de façon permanente en équipes successives selon un cycle continu ne doit pas être supérieure en moyenne sur une année à 35 heures par semaine travaillée, cette durée est dépassée si l'on considère comme heure travaillée toute heure de présence, mais est inférieure si on déduit les heures de sommeil et de repas ; qu'elle relève, qu'en toute hypothèse, l'éventuel dépassement de cette moyenne de 35 heures est sans intérêt dans le présent litige, l'article 26 de l'ordonnance précitée n'ayant prévu aucune sanction en ce cas et n'ayant jamais édicté que l'employeur ne pouvait plus alors invoquer la notion de cycle de travail ;
Attendu, cependant, d'abord, qu'en disposant que la durée du travail des salariés travaillant en équipes successives dans une entreprise organisée en cycle continu ne devra pas être supérieure, en moyenne, sur une année, à 35 heures par semaine travaillée, l'article 26 de l'ordonnance du 16 janvier 1982 a limité légalement la durée du travail de ces salariés ; que dès lors, toute heure effectuée au-delà de cette durée, fixée par l'article 26 précité, doit supporter la majoration prévue par l'article L. 212-5 du Code du travail et ouvre droit au repos compensateur, ainsi qu'à des dommages-intérêts pour le préjudice résultant du dépassement de la durée maximale du travail ;
Attendu, ensuite, qu'à l'exclusion du temps nécessaire à l'habillage et au casse-croûte ainsi que des périodes d'inaction dans les industries et commerces déterminés par décret, le temps de travail s'entend du travail effectif, c'est-à-dire du temps pendant lequel le salarié se tient à la disposition de son employeur et doit se conformer à ses directives, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait alors qu'il n'était pas contesté que le salarié était tenu de demeurer dans une chambre de veille mise à sa disposition sur le lieu du travail et devait prendre ses repas sur place pour répondre aux sollicitations des pensionnaires, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE la déchéance du pourvoi n° 98-43.314 formé par l'employeur ;
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi incident de l'employeur sur le pourvoi n° 97-45.001 du salarié ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions rejetant les demandes du salarié en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires, indemnité de repos compensateur et dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 2 septembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.