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Décisions

CA Versailles, 19e ch., 13 décembre 2023, n° 22/02293

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 22/02293

13 décembre 2023

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 13 DECEMBRE 2023

N° RG 22/02293

N° Portalis DBV3-V-B7G-VKPN

AFFAIRE :

[G] [O]

C/

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES HAUTS DE SEINE.

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation de départage de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : F18/02866

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL SELARLU CABINET SLIM BEN ACHOUR

Me Christophe DEBRAY

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [G] [O]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Slim BEN ACHOUR de la SELEURL SELARLU CABINET SLIM BEN ACHOUR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS - Substitué par Me Jean WILLEMIN, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES HAUTS DE SEINE

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - Substitué par Me Amélie ENGELDINGER, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 novembre 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE.

M. [G] [O] a été embauché à compter du 14 juin 2004 selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent technique (niveau 2) par la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine (ci-après la CAF des Hauts-de-Seine).

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale.

Depuis 2009, M. [O] occupe un emploi de 'technicien conseil prestations familiales à compétences élargies' (niveau 4).

Le 1er janvier 2014, la CAF des Hauts-de-Seine a attribué à M. [O] dix points de compétence supplémentaires, le faisant ainsi passer de 22 à 32 points.

Le 25 octobre 2018, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre pour demander la condamnation de la CAF des Hauts-de-Seine à lui payer des dommages-intérêts pour discrimination illicite, des rappels de salaire et des dommages-intérêts pour préjudice moral.

En janvier 2020, la CAF des Hauts-de-Seine a attribué à M. [O] sept points de compétence supplémentaires, le faisant ainsi passer de 32 à 39 points.

Par un jugement de départage du 29 juin 2022, le juge départiteur du conseil de prud'hommes a :

- dit que l'action de M. [O] est prescrite ;

- débouté M. [O] de ses demandes ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles ;

- condamné M. [O] aux dépens.

Le 19 juillet 2022, M. [O] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par le RPVA le 18 octobre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [O] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :

1°) à titre principal : condamner la CAF des Hauts-de-Seine à lui payer les sommes suivantes :

- 33'034,73 euros à titre de dommages-intérêts du fait de la discrimination subie ou, subsidiairement, au titre de la violation de l'obligation de sécurité de résultat ;

- 11'133,32 euros à titre de rappel de salaire et de prime et 1113,32 euros au titre des congés payés afférents et 3339,90 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de droits à la retraite, avec intérêts au taux légal à compter de la date d'échéance mensuelle de chacun des salaires compris dans cette somme ;

2°) à titre subsidiaire : ordonner à la CAF des Hauts-de-Seine la communication des bulletins de paie des mois de décembre de chaque année de chacun de ses salariés entre le 1er janvier 2011 et le

31 décembre 2018, mais également la liste des agents promus au titre des points de compétences entre 2011 et 2015 au sein de l'agence de [Localité 5] et entre 2016 et 2019 au sein de l'agence de [Localité 4], et ce pour chaque année, ainsi que la copie des entretiens annuel d'évaluation et d'accompagnement (EAEA) pour ces mêmes personnes et pour chaque année sur la période de 2011 à 2019,

- ordonner à la CAF des Hauts-de-Seine d'établir, pour chaque salarié un tableau récapitulant l'ensemble des informations ci-dessus,

- ordonner à la CAF des Hauts-de-Seine d'établir un tableau concernant l'ensemble des personnes concernées reprenant l'ensemble des informations figurant ci-dessus,

- le tout sous astreinte de 80 euros par jour de retard et par document, à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la notification de la présente ordonnance à prévenir,

3°) en tout état de cause :

- condamner la CAF des Hauts de seine à lui verser la somme de 30 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

- condamner la CAF des Hauts de Seine à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article

700 du code de procédure civile,

Le tout avec intérêt légal à compter du jour de l'introduction de la demande,

- condamner la CAF des Hauts de Seine aux entiers dépens,

Aux termes de ses conclusions déposées par le TVA le 20 octobre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la CAF des Hauts-de-Seine demande à la cour de :

- déclarer irrecevable la demande nouvelle de dommages-intérêts au titre du préjudice de retraite;

- confirmer le jugement rendu le 28 juin 2022 ;

- débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [O] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

- condamner M. [O] aux entiers dépens de l'instance d'appel,

- infirmer le jugement rendu en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et statuant à nouveau, condamner M. [O] à lui verser la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.

Une ordonnance de clôture de l'instruction a été rendue le 24 octobre 2023.

SUR CE :

Sur la prescription des demandes indemnitaires et salariales liées à une discrimination

illicite :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1134-5 du code du travail : ' L'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination. / Ce délai n'est pas susceptible d'aménagement conventionnel./Les dommages et intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée' ;

Qu'en l'espèce, M. [O] soutient que la discrimination salariale dont il se plaint, liée à la non attribution annuelle de points de compétence supplémentaires par l'employeur, a commencé en 2013 et a continué jusqu'à ce jour, à l'exception des années 2014 et 2020 où lui ont été octroyées ces points ;

Que la révélation de la discrimination alléguée se manifeste donc, selon le salarié, au moment de la saisine du conseil de prud'hommes et encore à ce jour ;

Que par application des dispositions légales mentionnées ci-dessus, les demandes indemnitaires et salariales formées par M. [O], destinées à réparer l'entier préjudice résultant de la discrimination alléguée, ne sont donc pas prescrites à la date de saisine du conseil de prud'hommes de Nanterre intervenue le 25 octobre 2018 ;

Qu'il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée, d'une part, de la prescription quinquennale prévue par l'article L. 1134-5 du code du travail des demandes indemnitaires et, d'autre part, de la prescription triennale de la demande salariale, qui est soulevée par la CAF des Hauts-de-Seine ;

Que le jugement sera donc infirmé sur ce point et en ce qu'il déboute, au motif d'une telle irrecevabilité, M. [O] de toutes ses demandes ;

Sur la recevabilité de la demande nouvelle en appel de dommages-intérêts lié à la perte de droits à la retraite :

Considérant qu'aux termes de l'article 564 du code de procédure civile : ' à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait' ; qu'aux termes de l'article 565 du même code : 'les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent' ; qu'aux termes de l'article 566 du même code : 'les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises aux premiers juges que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire' ;

Qu'en l'espèce, la demande de dommages-intérêts pour perte de droits à la retraite formée par M. [O] n'est pas nouvelle en appel au sens des dispositions mentionnées ci-dessus puisqu'elle est, selon l'argumentation du salarié, la conséquence de sa demande de rappel de salaire pour discrimination illicite formée en première instance ;

Qu'il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à ce titre par la CAF des Hauts-de-Seine ;

Sur les demandes indemnitaires et salariales fondées sur une discrimination illicite :

Considérant que M. [O] soutient qu'il a été victime d'une discrimination illicite en matière salariale, en ce que son employeur ne lui a pas attribué des points de compétence supplémentaires au titre des années 2013, 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2021, 2022, 2023, à raison de ses arrêts de travail pour maladie et de ses absences liées à l'état de santé de sa fille intervenus à compter de 2013 et à raison de son action prud'homale pour discrimination illicite intentée en mai 2018 ;

Qu'il réclame, en conséquence, un rappel de salaire calculé sur la base de l'octroi de dix points de compétences supplémentaires à partir de l'année 2013 (et les congés payés afférents) outre des dommages-intérêts en réparation du préjudice subséquent pour perte de droits à la retraite, ainsi que des dommages-intérêts en réparation de la violation de l'obligation de non-discrimination;

Considérant que la CAF des Hauts-de-Seine soutient que M. [O] n'a pas été victime de discrimination illicite en ce qu'il ne présente pas d'éléments laissant supposer une telle discrimination, qu'en 2014 des points de compétence supplémentaires lui ont été attribués, que la non attribution de points pendant les années 2015 à 2019 est justifiée par des restrictions budgétaires et par les performances insuffisantes de l'appelant, qu'en 2020 des points supplémentaires lui ont été attribués pour l'année 2019 ; qu'elle conclut donc au débouté des demandes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail : ' Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte, au sens, respectivement, du I de l'article 6 et des 1° et 2° de l'article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ' ;

Qu'aux termes de l'article L. 1132-3 du même code : ' Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés ' ;

Qu'en application de l'article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Qu'aux termes de l'article 4.2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif aux dispositifs de rémunération et à la classification des emplois : 'Article 4 - Progression à l'intérieur de la plage d'évolution salariale

La progression dans la plage d'évolution salariale s'opère sous l'effet de la prise en compte de l'expérience professionnelle et du développement professionnel. [...]

Article 4.1. L'expérience professionnelle

A l'exception des ingénieurs-conseils, des salariés occupant un emploi de niveau 10 E à 12 E, ainsi que des salariés occupant un emploi de niveau VIII à X des informaticiens, tous les salariés perçoivent, au terme de chaque année d'ancienneté, des points d'expérience professionnelle. (...)

Article 4.2. Le développement professionnel

Les salariés peuvent se voir attribuer par la direction des points de compétence destinés à rétribuer l'accroissement des compétences professionnelles mises en œuvre dans l'emploi.

Les compétences recouvrent des savoirs, c'est-à-dire des connaissances théoriques et professionnelles mises en œuvre dans l'exercice du travail et des savoir-faire techniques et relationnels, observables dans la tenue de l'emploi.

L'identification de l'accroissement de compétences passe obligatoirement par l'élaboration de référentiels de compétences, dans les conditions définies à l'article 8 du présent texte.

Dans ce cadre, les compétences doivent être appréciées sur la base de faits précis, objectifs, observables et mesurables.

L'évaluation de la compétence est formalisée à l'occasion de l'entretien annuel, tel que prévu à l'article 7.

Le montant de chaque attribution est exprimé en points entiers.

Dans la limite de la plage d'évolution salariale telle que définie à l'article 3 du présent accord, ce montant correspond au minimum à :

7 points pour les salariés occupant un emploi de niveau :

1 à 4 des employés et cadres ; [...]

12 points pour les salariés occupant un emploi de niveau :

5 A à 7 des employés et cadres ; [...]

15 points pour les salariés occupant un emploi de niveau :

8 à 9 des employés et cadres ; [...]

[...]

Le nombre total de points de compétences attribué dans chaque organisme au cours de chaque année doit être réparti au moins sur 20% de l'effectif pour chacune des deux catégories définies ci-après :

- salariés occupant un emploi de niveau 1 à 4 des employés et cadres, 1 E à 4 E des personnels soignants, éducatifs et médicaux des établissements et œuvres, 1 à IV B des informaticiens ;

- salariés occupant un emploi de niveau 5 A à 9 des employés et cadres, 5 E à 12 E des personnels soignants, éducatifs et médicaux des établissements et œuvres, V à X des informaticiens, 10 A à 12 des ingénieurs-conseils.'

Qu'il résulte de ces stipulations du protocole d'accord du 30 novembre 2004 que l'attribution annuelle de points de compétence, décidée par la direction d'une Caisse, est facultative et est fondée sur l'accroissement des compétences professionnelles mises en œuvre dans l'emploi pendant l'année en cause ;

Qu'en l'espèce, sur une discrimination salariale résultant de la non attribution de points de compétence à raison d'absences liées à l'état de santé de sa fille, laquelle se rattache donc à une discrimination liée à la situation de famille en application des dispositions légales mentionnées ci-dessus, M. [O] ne verse aux débats aucun élément sur l'existence de telles absences depuis 2013 et, en toutes hypothèses, sur la connaissance par l'employeur de l'état de santé de sa fille ; qu'il ne présente ainsi pas à ce titre des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ;

Que sur la discrimination résultant de la non attribution des points de compétence à raison d'arrêts de travail pour maladie, s'agissant de la non attribution au titre de l'activité fournie en 2013, M. [O] ne verse aux débats aucun élément relatif à la survenue de tels arrêts de travail pendant l'année 2013 ; qu'il verse deux courriels adressés à la directrice des ressources humaines à la fin de 2013 l'accusant d'avoir l'intention, dans le cadre de la campagne d'attribution de points alors en cours, de ne pas lui en attribuer de points au titre de cette année là, ainsi qu'une attestation établie tardivement en décembre 2019 par une ancienne supérieure (Mme [B]) partie à la retraite en 2014 et accusant de manière imprécise la Caisse d'une telle discrimination, lesquels sont en toutes hypothèses démentis par l'attribution non contestée de dix points de compétence supplémentaires au 1er janvier 2014 au titre de l'activité fournie en 2013 ; qu'il ne présente ainsi pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au titre de l'année 2013 ;

Que s'agissant de la non attribution de points de compétence au titre de son activité durant les années 2014 et 2015, si M. [O] verse aux débats des arrêts de travail pour maladie survenus durant cette période, il se borne à indiquer de manière imprécise qu'il avait de 'bons résultats' et à citer quelques bribes de ses évaluations, sans expliquer en quoi ses évaluations annuelles faisaient état d'un accroissement de ses compétences professionnelles au sens du protocole d'accord du 30 novembre 2004 et lui permettaient ainsi de prétendre à l'attribution de points de compétence

supplémentaires ;

Que s'agissant de la non attribution de points de compétence au titre de son activité durant l'année 2016, M. [O] invoque son évaluation afférente à cette année, signée le 19 juin 2017, laquelle mentionne au titre du bilan de l'année écoulée : 'Année mitigée pour [G] du fait de ses absences imprévues' et au titre des commentaires finaux : '[G] dispose de bonnes connaissances législatives et techniques, ce qui fait de lui un acteur majeur au sein de l'agence. Cependant, ses soucis de santé lui font obstacle pour une évolution professionnelle pour l'instant. Nous essayons donc en contrepartie de lui confier de nouvelles missions afin de diversifier ses activités' ; qu'il présente à ce titre des éléments de faits laissant supposer une discrimination illicite liée à l'état de santé dans la non attribution de points de compétence au titre de son activité pour l'année 2016 ;

Que s'agissant de la non attribution de points de compétence au titre de son activité durant les années 2017 et 2018, si M. [O] verse aux débats des arrêts de travail pour maladie survenus durant cette période, il ne verse pas ses évaluations professionnelles annuelles ce qui ne permet pas d'établir qu'il pouvait prétendre à l'attribution de points de compétence supplémentaires à raison d'un accroissement des compétences professionnelles mises en œuvre dans l'emploi pendant l'année en cause ;

Que s'agissant des points de compétences relatifs à l'activité de 2019, alors qu'il a été placé en arrêt de travail pour maladie à de multiples reprises durant cette période, il est constant que sept points de compétence supplémentaires lui ont été attribués en janvier 2020 au titre de son activité de l'année 2019, lui permettant de passer de 32 à 39 points ;

Que s'agissant de la non attribution de points de compétence relatifs à l'activité des années 2021, 2022 et 2023, M. [O] n'allègue pas avoir été en arrêt de travail pour maladie durant cette période ; que de plus il ne verse pas aux débats ses évaluation annuelles ce qui ne permet pas d'établir qu'il pouvait prétendre à l'attribution de points de compétence supplémentaires ;

Que sur une discrimination dans la non- attribution des points de compétence à raison de l'action prud'homale intentée en mai 2018, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, sept points de compétence supplémentaires lui ont été attribué en 2020 au titre de l'activité de l'année 2019 ; qu'il ne présente donc pas d'éléments de fait laissant supposer une mesure de rétorsion à son action en justice ;

Qu'il résulte de ce qui précède que M. [O] présente des éléments de faits laissant supposer une discrimination illicite dans la non attribution en 2017 de points de compétence au titre de l'activité de l'année 2016, fondée sur ses arrêts de travail pour maladie survenus en 2016, et donc sur son état de santé ;

Qu il incombe donc à l'employeur de prouver que cette mesure est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Que pour sa part, la CAF des Hauts-de-Seine invoque une baisse de productivité de M. [O] dans l'activité fournie en 2017 et 2018, mais n'allègue aucune explication de cette nature pour l'année 2016 ; qu'elle indique également que d'autres salariés ont connu une évolution de carrière comparable mais verse sur ce point des tableaux élaborés pour les besoins de la cause et ne présentant aucune garantie de fiabilité ; qu'aucun élément n'est avancé non plus sur des 'restrictions budgétaires' en matière salariale pour cette année ;

Que dans ces conditions, M. [O] est fondé à soutenir qu'il a été victime d'une discrimination illicite fondée sur son état de santé dans la non attribution de points de compétence en 2017 au titre de l'année 2016 ;

Qu'il est par suite fondé à réclamer l'attribution de points de compétence supplémentaires en 2017 au titre de l'année 2016, mais ce à hauteur de seulement sept points ainsi que prévu par l'article 4.2 du protocole d'accord du 30 novembre 2004 mentionné ci-dessus qui fixe le 'pas de compétence' minimal à sept points, aucune justification n'étant apportée à l'attribution de dix points de compétence demandée par l'appelant ;

Qu'il sera en conséquence alloué à ce titre une somme de 708,84 euros brut à titre de rappel de salaire correspondant à cette attribution de points de compétence supplémentaires ;

Que cette attribution de points se répercutant par ailleurs sur les années postérieures, il sera ainsi alloué à M. [O] un rappel de salaire d'un montant de 709,84 euros pour chacune des années 2018 à 2023, soit une somme de 3549,20 euros brut ;

Que sur la demande de rappel de salaire antérieure, eu égard à ce qui est dit ci-dessus, il y a lieu de débouter M. [O] ;

Qu'au total, il sera ainsi alloué à M. [O] une somme de 4 258,04 euros brut, outre 425,80 euros brut au titre des congés payés afférents ;

Que sur la demande nouvelle en appel de dommages-intérêts pour perte de droits à la retraite afférente à ce rappel de salaire, M. [O] ne justifie en rien d'un préjudice à ce titre ;

Que sur la demande de dommages-intérêts au titre de la discrimination illicite, M. [O] n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre, se bornant à soutenir que toute discrimination doit être sanctionnée ;

Sur la demande subsidiaire d'allocation d'une indemnité de 33 034,73 euros au titre de la violation de 'l'obligation de sécurite de résultat' :

Considérant en l'espèce que M. [O] ne soulève aucun moyen à ce titre dans ses conclusions ; qu'il y a lieu de débouter l'appelant de cette demande ;

Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :

Considérant que M. [O] soutient à ce titre que la discrimination subie ainsi que des mesures de représailles (dite de 'flicage') décidées à la suite de sa dénonciation d'une telle discrimination ont entraîné une dégradation de son état de santé en 2019 ; qu'il considère que ce comportement constitue tout à la fois une violation de l'article L. 1132-4 du travail, de l'obligation de sécurité ainsi que de l'obligation de loyauté contractuelle et réclame en conséquence une somme de 30'000 euros en réparation du préjudice moral en résultant ;

Que toutefois, les allégations de représailles et de 'flicage' du salarié par l'employeur ne reposent que sur les déclarations d'une déléguée syndicale contenues dans un courriel adressé à M. [O] le 13 janvier 2022 et ne sont corroborées par aucun autre élément de preuve ; qu'aucun manquement n'est donc établi à ce titre ;

Que par ailleurs, les pièces médicales versées aux débats font état abusivement d'un lien de causalité entre la dégradation de l'état de santé de M. [O] et ses conditions de travail au sein de la CAF des Hauts-de-Seine en l'absence de toute constatation personnelle du médecin traitant relatives à ces conditions de travail ;

Que dans ces conditions, il y a lieu de débouter M. [O] de cette demande indemnitaire ;

Sur les intérêts légaux :

Considérant qu'il y a lieu de rappeler que les intérêts légaux sur les sommes de nature salariales allouées ci-dessus courent à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes pour les salaires exigibles antérieurement à cette date puis à compter de chaque échéance devenue exigible pour les créances postérieures à cette date ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement attaqué en ce qu'il statue sur ces deux points ; que la CAF des Hauts-de-Seine, partie succombante, sera condamnée à payer à M. [O] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Rejette la fin de non-recevoir tiré de la nouveauté en appel de la demande de dommages-intérêts pour perte de droits à la retraite soulevée par la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine,

Infirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine ,

Condamne la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine à payer à M. [G] [O] une somme de 4258,04 euros brut à titre de rappel de salaire depuis 2017 et 425,80 euros brut au titre des congés payés afférents,

Rappelle que les intérêts légaux sur les sommes de nature salariales allouées ci-dessus courent à compter de la date de réception par la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes pour les salaires exigibles antérieurement à cette date puis à compter de chaque échéance devenue exigible pour les créances postérieures à cette date,

Condamne la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine à payer à M. [G] [O] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,