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Décisions

CA Rennes, recours fiscaux - cont.pp, 20 décembre 2023, n° 22/07363

RENNES

Ordonnance

Autre

CA Rennes n° 22/07363

20 décembre 2023

Recours fiscaux - cont.PP

ORDONNANCE N°15

N° RG 22/07363 -

N° Portalis DBVL-V-B7G-TLUS

Société MILTON PHARMACEUTICAL COMPANY UK LIMITED

Société MILTON PHARMACEUTICAL COMPANY LIMITED

S.A.S. PAEONIA

S.A.S. ROSAE

S.A.S. RIVADIS HOLDING

Société LABORATOIRES RIVADIS SAS

S.A.S. MILTON FRANCE

S.A.S. MILTON INTERNATIONAL

M. [A] [NR]

C/

LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DES FINANCES PUBLIQUES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 20 DÉCEMBRE 2023

Monsieur Fabrice ADAM, premier président de chambre à la cour d'Appel de Rennes, suppléant le Premier Président par application de l'ordonnance du 8 décembre 2022,

GREFFIER :

Monsieur Pierre DANTON, lors des débats et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 septembre 2023

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée publiquement le 20 décembre 2023, par mise à disposition au greffe, comme indiqué à l'issue des débats

****

DEMANDEUR :

La société de droit britannique MILTON PHARMACEUTICAL COMPANY UK LIMITED, a private company limited by shares dont le company number est 4194174, agissant par son Director en exercice, domicilié au siège social sis

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 13] (ROYAUME-UNI)

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société de droit irlandais MILTON PHARMACEUTICAL COMPANY LIMITED, a private company limited by shares, dont le company number est 325205, agissant par son Director en exercice domicilié au siège social sis

[Adresse 24]

[Adresse 24]

[Localité 17] EIRE (IRLANDE)

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société PAEONIA, SAS dont le siège est situé [Adresse 10], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°449.068.428, agissant par son président en exercie, M. [A] [NR]

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société ROSAE, SAS dont le siège est situé [Adresse 10], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°893.608.190, agissant par son président en exercie, M. [A] [NR]

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société RIVADIS HOLDING, SAS dont le siège est situé [Adresse 10], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°627.120.272 représentée par sa présidente en exercice la société PAEONIA, SAS dont le siège est situé [Adresse 10], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°449.068.428, agissant elle-mêle par son président en exercice, M. [A] [NR]

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société LABORATOIRES RIVADIS SAS dont le siège est situé [Adresse 27] [Localité 20] immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Niort sous le n° 347.956.336, représentée par sa présidente en exercice, la société PAEONIA, SAS dont le siège est situé [Adresse 10], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°449.068.428, agissant elle-même par son président en exercice, M. [A] [NR]

représenté par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société MILTON FRANCE, SAS dont le siège est situé [Adresse 10] [Localité 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°888.084.365, représentée par sa présidente en exercice, la société PAEONIA, SAS situé [Adresse 10] [Localité 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°449.068.428, agissant elle-même par son président en exercice, M. [A] [NR]

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

La société MILTON INTERNATIONAL, SAS dont le siège est situé [Adresse 10] [Localité 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°432.241.560, représentée par sa présidente en exercice, la société PAEONIA, SAS situé [Adresse 10] [Localité 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°449.068.428, agissant elle-même par son président en exercice, M. [A] [NR]

représentée par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocate au barreau de PARIS

Monsieur [A] [NR]

né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 26]

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté par Me Delphine RAVON de la SELEURL CABINET DELPHINE RAVON, avocat au barreau de PARIS

DÉFENDEUR :

Le Directeur Général des Finances Publiques, représenté par l'Administrateur général des finances publiques, chargé de la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales

[Adresse 8]

[Localité 11]

Représenté par Me Jean DI FRANCESCO de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société anonyme simplifiée Paeonia, dont le siège social est à [Localité 7], [Adresse 10], est la société holding du groupe Rivadis.

Jusqu'au 1er janvier 2021, cette société était détenue à hauteur de 98,07'% par Mme'[LW] [BF] épouse [NR]. Depuis cette date, son capital est détenu à hauteur de 82,04'% par la société anonyme simplifiée Rosae dont l'associé unique (100 %) est M.'[A] [NR], domicilié à [Localité 7], [Adresse 4].

Ce dernier est l'actuel président des sociétés Rosae et Paeonia.

La société Paeonia détient':

- d'une part, 99,99'% du capital de la société Rivadis Holding dont le siège est à [Localité 7], [Adresse 10], et dont elle assure la présidence, laquelle a pour filiales différentes sociétés dont les sociétés Laboratoires Rivadis (détenue à hauteur de 99,99'%), Rivadis Diffusion (détenue à hauteur de 100'%), Auriège [Localité 23] (détenue à hauteur de 100'%), Dexi International (détenue à hauteur de 100'%) et Dexi Diffusion (détenue à hauteur de 100'%),

- et, d'autre part, 100'% du capital de la société anonyme simplifiée Milton International (anciennement Newco) dont le siège est à [Localité 7], [Adresse 10], et dont elle assure la présidence, laquelle a pour filiales à 100'% notamment les sociétés':

' Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd dont le siège est situé au Royaume Uni à [Localité 13], [Adresse 5] qui a pour activité la fabrication de produits pharmaceutiques,

' Milton Pharmaceutical Cy Ltd dont le siège est en Irlande à [Localité 17], [Adresse 24], qui a pour activité le commerce en gros de produits pharmaceutiques,

' Milton France dont le siège social est à [Localité 7], [Adresse 10].

La société Paeonia a enfin pour autre filiale à 100 % la société anonyme simplifiée Coquelicot dont le siège est également à [Localité 7], [Adresse 10].

Les deux sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd et Milton Pharmaceutical Cy Ltd sont entrées dans le groupe Rivadis en 2001 et ont pour représentant légal M. [A] [NR].

Ce dernier détient par ailleurs directement 0,01'% du capital des sociétés Paeonia, Rivadis Holding et Laboratoires Rivadis.

Exposant qu'il résulte des éléments qui ont été recueillis que les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd et Milton Pharmaceutical Cy Ltd':

- disposent en France de leurs organes de direction, de leurs centres décisionnels, leur capital étant détenu in fine par des personnes physiques résidant en France,

- disposent (ou ont disposé), en Angleterre ou en Irlande, d'une adresse au sein d'une société de domiciliation,

- ne disposent pas, à leur siège social, de moyens matériels suffisants leur permettant d'exercer leurs activités respectives (fabrication de produits pharmaceutiques de base pour l'une et commerce de gros de produits pharmaceutiques pour l'autre),

- reçoivent en France du courrier à l'adresse du siège social de leur associé unique,

- disposent des moyens humains et matériels des sociétés françaises du groupe Rivadis pour réaliser, l'une, son activité et, l'autre, son chiffre d'affaires,

- recourent aux services de sous-traitants ou de tiers sur les territoires britanniques et français pour l'une ou sur le territoire irlandais pour l'autre pour assurer des missions de suivi ou d'information de la clientèle ou encore de vente et de logistique,

et qu'il peut ainsi être présumé que ces sociétés exercent en France une activité de fabrication ou de commercialisation, sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes et omettent de passer les écritures comptables correspondantes depuis leur création, M.'[EJ] [SS], inspecteur des finances publiques spécialement habilité par le Directeur général des finances publiques, a, par requête du 22'novembre 2022, saisi, sur le fondement des dispositions de l'article L 16B du livre des procédures fiscales, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nantes qui, par ordonnance du 29'novembre 2022 a autorisé les agents expressément désignés et habilités par le directeur général des Finances publiques, assistés des officiers de police judiciaire placés sous l'autorité du général [SC] [YL], commandant de la région de gendarmerie du Pays de la Loire, de Mme le commissaire divisionnaire [KT] [AO], chef de la sûreté départementale de [Localité 7] et de M.'[KF] [ML], commandant de police, chef par intérim du service national de police détaché auprès de la DGDDI / DNRED que ceux-ci auront désignés, à procéder aux saisies et visites nécessitées par les agissements présumés reprochés aux sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd et Milton Pharmaceutical Cy Ltd, dans les locaux et dépendances désignés où des documents et supports d'information illustrant la fraude présumée sont susceptibles de se trouver, à savoir locaux et dépendances sis à Nantes':

- [Adresse 10], susceptibles d'être occupés par les sociétés Milton International et/ou Rivadis Holding et/ou Paeonia et/ou Rosae et/ou Laboratoires Rivadis et/ou Rivadis Diffusion et/ou Milton France et/ou Dexi Diffusion et/ou Dexi International et/ou Auriège [Localité 23] et/ou Coquelicot et/ou Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd et/ou Milton Pharmaceutical Cy Ltd,

- [Adresse 4], susceptibles d'être occupés par M. [A] [NR] et/ou la société [NR] St Louis.

Il a été procédé aux visites domiciliaires ainsi autorisées le 1er décembre 2022.

Par déclaration postée le 13'décembre 2022, les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et M. [A] [NR] ont interjeté appel de cette ordonnance.

Aux termes de leurs dernières écritures (5'septembre 2023), les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et M. [A] [NR] nous demandent de':

- infirmer l'ordonnance signée le 29'novembre 2022 par Mme'Marie-Sygne Bunot-Rouillard, juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nantes autorisant la visite des locaux et dépendances sis [Adresse 10], [Localité 7] et [Adresse 4], [Localité 7] au visa des articles L.16 B et R.16 B-1 du livre des procédures fiscales,

- en conséquence, annuler les opérations de visites et de saisies domiciliaires autorisées par ces ordonnances,

- ordonner la destruction, sous astreinte de 2'000'euros par jour de retard passé un délai de 8'jours à compter de la décision à intervenir, de toute copie sous quelque forme que ce soit des documents dont la saisie est annulée, à charge pour l'administration de justifier de la destruction effective de ces documents,

- dire que l'administration sera rétroactivement réputée ne jamais avoir détenu les pièces saisies,

- condamner le Directeur général des finances publiques aux dépens et à payer aux appelants la somme de 4'500'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700'du code de procédure civile.

À l'appui de leurs demandes, les requérants font, en premier lieu, valoir que les présomptions de fraude alléguées sont dépourvues de toute matérialité et de tout bien fondé, ne s'agissant, en l'espèce, que du simple exercice par les appelants de la liberté d'établissement et de la libre circulation des capitaux instaurées par le traité des communautés européennes en ses articles 52'et 56. Ils soutiennent que les deux sociétés anglaise et irlandaise, reprises par la société Laboratoires Rivadis en 2001, exercent respectivement leurs activités exclusivement en Angleterre (où est implanté le courtier de la société anglaise, la société Ceuta Haelthcare Ltd) et en Irlande, pays dans lesquels elles satisfont à leurs obligations fiscales.

Ils soutiennent, en second lieu, que les 135'pièces produites par l'administration à l'appui de son recours sont illicites, faute par l'administration d'avoir respecté le règlement européen 2016/679 dit règlement général pour la protection des données (RGPD) lequel est applicable en France depuis le 1er juin 2019 et s'impose expressément aux autorités fiscales. Ils rappellent d'ailleurs que la Cour de cassation a récemment jugé que le traitement de données à caractère personnel mis en œuvre par l'administration fiscale aux fins d'obtenir une autorisation de procéder à des opérations de visite et de saisies entrait bien dans le champ d'application de ce règlement.

Ils précisent que constitue une donnée à caractère personnel «'toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable'» et ajoutent que la protection s'étend aux données intéressant une personne physique dans le cadre de son activité professionnelle lorsqu'elle est exercée au sein d'une personne morale.

Or, ils relèvent que l'administration n'a pas respecté ses obligations à l'égard des personnes concernées aussi bien en ce qui concerne les données issues de la collecte directe, c'est à dire des déclarations des contribuables (29'pièces), que celles issues de la collecte indirecte c'est à dire d'informations provenant de tiers et notamment des sites Internet (106'pièces). Ils observent que sans ces pièces, le juge des libertés et de la détention n'aurait évidemment pas fait droit à la requête.

Ils prétendent, en troisième lieu, que le juge des libertés et de la détention n'a pas vérifié de manière concrète la proportionnalité de la mesure laquelle ne s'imposait pas, un simple contrôle fiscal ou droit de communication, suffisant et n'a donc pas procéder au contrôle effectif que la loi lui imposait de faire.

Aux termes de ses dernières écritures (27'juillet 2023), le Directeur général des finances publiques nous demande de':

- confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Nantes du 29'novembre 2022,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions,

- condamner les appelants au paiement de la somme de 2'000'euros sur le fondement de l'article 700'du code de procédure civile.

Le Directeur général des finances publiques rappelle qu'il ressort du dossier que les deux sociétés britannique et irlandaise Milton Pharmaceutical ont pour dirigeant, M. [NR], résident français, par ailleurs président des sociétés Rosae et Paeonia et bénéficiaire effectif, ce qui permet de présumer que leur centre décisionnel se trouve en France, ce d'autant que leurs sièges sociaux sont établis en Angleterre et en Irlande à des adresses de domiciliation, que leurs moyens humains et matériels dans ces pays sont inexistants ou très limités (un salarié pour la société anglaise), qu'elles ne disposent pas de moyens de communication téléphonique locaux, que le nom de domaine utilisé pour leur site Internet est enregistré en France par la société Rivadis Holding, ce site étant administré par un cabinet basé en France. Il précise que la société britannique a recours en Angleterre aux services de la société Ceuta Healthcare qui assure le suivi et la gestion de la clientèle de même que les prestations logistiques, de la société Connected PR pour ses relations avec les médias et la promotion de ses produits, et de la société française Quick Fds pour la gestion de ses obligations informatives vis à vis des clients. Il relève que les deux sociétés reçoivent du courrier à [Localité 7], [Adresse 10]. Il ajoute que les différents sites consultés permettent de constater que les produits diffusés sous la marque Milton sont pour partie fabriqués en France par Milton International ou par Laboratoires Rivadis, que ces sociétés et la société Rivadis Holding ont procédé à des prestations de service intracommunataires à destination des deux sociétés Milton Pharmaceutical qui ont bénéficié du travail de salariés employés par les différentes entités françaises du groupe, tous éléments permettant de présumer de l'exercice d'une activité en France alors que ces deux sociétés n'y souscrivent aucune déclaration fiscale.

Il fait valoir qu'il se fonde donc bien sur des présomptions de fraude et non, comme prétendu, sur la seule existence de deux filiales établies à l'étranger, n'entendant nullement remettre en cause la liberté d'établissement et la libre circulation des capitaux.

Concernant le respect du RGPD, il soutient, s'agissant des documents ayant fait l'objet d'une collecte directe que l'administration a satisfait à son obligation en apportant aux contribuables les informations nécessaires par simple connexion au site impots.gouv.fr où figurent, d'une part, une page relative à la «'confidentialité / informations personnelles'» et, d'autre part, une page permettant d'accéder à un document en format .pdf de 45'pages intitulé «'confidentialité et protection des données'» qui rappelle l'ensemble des mentions requises. Il en tire la conséquence que les informations extraites de ses fichiers sont donc parfaitement licites.

S'agissant de l'information des personnes concernées dans le cadre de la collecte indirecte de leurs données, il entend se prévaloir des exceptions tirées du §5'de l'article 14'et de l'article 23'du RGPD et de l'article 48'de la loi du 6'janvier 1978 modifié par l'ordonnance du 12'décembre 2018, soutenant, d'une part, que l'obligation visée au §1'de l'article 14'du RGPD est susceptible de compromettre gravement la réalisation des objectifs du traitement puisqu'il ne peut être question d'avertir les personnes visées par la requête de la visite projetée et, d'autre part, que la mise en œuvre des dispositions de l'article L 16B entrent à l'évidence dans l'exception de l'article 23'dès lors que le traitement est mis en œuvre dans le but de contrôler ou de recouvrer des impositions.

Il en conclut que les informations produites extraites des fichiers contestés sont parfaitement licites.

Il rappelle enfin qu'aucun texte n'impose au juge de rechercher si l'administration pouvait recourir à d'autres modes de preuve ou à d'autres procédures, que la seule existence de présomptions suffisait sans qu'il y ait lieu de rechercher si la mesure était proportionnée.

SUR CE':

La recevabilité du recours n'est pas contestée et les éléments du dossier ne laissent pas apparaître d'irrégularité à cet égard. Le recours des sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et de M. [A] [NR] sera donc déclaré recevable.

Aux termes des dispositions de l'article L 16 B du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction applicable au présent litige, «'I. ' Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.

II... Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite... Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée... Il désigne le chef du service qui nomme l'officier de police judiciaire chargé d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement... L'ordonnance est notifiée verbalement et sur place au moment de la visite, à l'occupant des lieux ou à son représentant qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal prévu au IV ...'».

Sur la licéité des pièces produites par l'administration à l'appui de sa requête':

Pour prétendre que les 135 pièces produites à l'appui de la requête présentées au juge des libertés et de la détention sont illicites, les appelants font valoir que l'administration fiscale n'a pas respecté le règlement général sur la protection des données.

L'article 1er al 2 de la loi 78-17 du 6 janvier 1978, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 12 décembre 2018 énonce que': «'Les droits des personnes de décider et de contrôler les usages qui sont faits des données à caractère personnel les concernant et les obligations incombant aux personnes qui traitent ces données s'exercent dans le cadre du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 (dit RGPD), de la directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 (directive police justice) et de la présente loi '».

Il suffit de rappeler que le règlement (UE) 2016/679, entré en vigueur le 25 mai 2018, a été transposé en droit français par la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, complétée par le décret n° 2018-687 du 1er août 2018 et par l'ordonnance précitée du 12 décembre 2018.

Suivant son article 2 § 1, le RGPD s'applique au traitement de données à caractère personnel, automatisé en tout ou en partie, ainsi qu'au traitement non automatisé de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans un fichier.

Il convient d'ajouter (considérant n° 14) que la protection conférée par ce règlement s'applique aux (seules) personnes physiques, indépendamment de leur nationalité ou de leur lieu de résidence, en ce qui concerne le traitement de leurs données à caractère personnel, mais ne couvre pas le traitement des données qui concernent les personnes morales.

Il est dorénavant établi (Com., 1er juin 2023, n° 21-18558) que le traitement de données à caractère personnel mis en œuvre par l'administration fiscale aux fins d'obtenir l'autorisation de procéder à des opérations de visite et saisies sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales entre dans le champ d'application matériel du RGPD.

Les requérants rappellent que le régime de protection instauré par le RGPD comprend une obligation, pour le responsable des traitements, d'informer les personnes concernées d'un certain nombre d'éléments, notamment de l'origine, de la source des données ainsi traitées et de leur accessibilité au public.

Les articles 13 et 14 précisent les informations à fournir lorsque les données à caractère personnel ont été (article 13) ou n'ont pas été (article 14) collectées auprès de la personne concernée': identité et coordonnées du responsable du traitement, finalités du traitement, catégories de données, destinataires ou catégories de destinataires des données, durée pendant laquelle les données seront conservées,...

Dans le premier cas (article 13), les informations sont fournies au moment où les données sont obtenues, alors que dans le second (article 14), elles doivent l'être dans le délai fixé à l'article 14.3 et, en l'occurrence, a) dans un délai raisonnable après avoir obtenu les données à caractère personnel, mais ne dépassant pas un mois, eu égard aux circonstances particulières dans lesquelles les données à caractère personnel sont traitées.

Les articles 16'à 22 confèrent aux personnes concernées un certain nombre de droits, comme le droit à la rectification, à l'effacement, à la limitation du traitement, à la portabilité des données, ainsi qu'un droit d'opposition au traitement et un droit de ne pas faire l'objet d'une décision fondée exclusivement sur un traitement automatisé, y compris le profilage.

Le dernier paragraphe (4e) de l'article 13 dispose que les trois paragraphes précédents «'ne s'appliquent pas lorsque, et dans la mesure où, la personne concernée dispose déjà de ces informations'».

Les appelants relèvent que ce droit n'a pas été mis en œuvre par l'administration, des données personnelles concernant des personnes physiques ayant été recueillies auprès de tiers (sites internet) ou dans ses propres fichiers, et traitées par l'administration. Cependant et pour justifier sa position, celle-ci leur oppose, d'une part, les mesures qu'elle a mise en œuvre, en conformité avec les consignes de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, pour informer les contribuables et, d'autre part, deux dispositions du RGPD':

- l'alinéa 5 b de l'article 14': «'la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, en particulier pour le traitement à des fins archivistiques dans l'intérêt public, à des fins de recherche scientifique ou historique ou à des fins statistiques sous réserve des conditions et garanties visées à l'article 89, paragraphe 1, ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement'»,

- l'article 23 1. «'Le droit de l'Union ou le droit de l'État membre auquel le responsable du traitement ou le sous-traitant est soumis peuvent, par la voie de mesures législatives, limiter la portée des obligations et des droits prévus aux articles 12 à 22 et à l'article 34, ainsi qu'à l'article 5 dans la mesure où les dispositions du droit en question correspondent aux droits et obligations prévus aux articles 12 à 22, lorsqu'une telle limitation respecte l'essence des libertés et droits fondamentaux et qu'elle constitue une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique pour garantir : ' e) d'autres objectifs importants d'intérêt public général de l'Union ou d'un État membre, notamment un intérêt économique ou financier important de l'Union ou d'un État membre, y compris dans les domaines monétaire, budgétaire et fiscal, de la santé publique et de la sécurité sociale'»,

rappelant, s'agissant de cette seconde disposition, que le législateur français a entendu user de la faculté ainsi offerte en insérant à l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978 les deux alinéas suivants (al'4 et 5)':

«'En application de l'article 23 du même règlement ((UE) 2016/679 du 27 avril 2016), le droit à l'information ne s'applique pas aux données collectées dans les conditions prévues à l'article 14 de ce règlement et utilisées lors d'un traitement mis en œuvre pour le compte de l'État et intéressant la sécurité publique, dans la mesure où une telle limitation est nécessaire au respect des fins poursuivies par ce traitement et prévue par l'acte instaurant le traitement.

Il est fait application des dispositions de l'alinéa précédent lorsque le traitement est mis en œuvre par les administrations publiques qui ont pour mission soit de contrôler ou de recouvrer des impositions soit d'effectuer des contrôles de l'activité de personnes physiques ou morales pouvant donner lieu à la constatation d'une infraction ou d'un manquement, à des amendes administratives ou à des pénalités'».

1 ' pièces issues de la collecte indirecte':

Les appelants soutiennent que les 106 pièces collectées par l'administration dans la cadre de la consultation de sites internet (ou relatant une telle consultation), d'une assistance administrative internationale (pièce n°'II-12) ou de droit de communication doivent être considérées comme recueillies de manière illicite faute de mise en œuvre du RGPD.

En premier lieu, il sera relevé que nombre d'entre elles ne comportent le nom d'aucune personne physique identifiable (pièces n° II-1, II-4, II-5, II-6, II-7, II-8, II-9, II-11, II-12-1 à 6, II-13, II-15, II-16, II-17, II-18, II-19, II-23, II-24, II-25, II-26, II-27, II-29, II-30, II-31, II-32, II-33, II-35, II-36, II-38, II-39, II-40,...), de sorte que le RGPD n'avait, en toute hypothèse et en ce qui les concerne, pas à être mis en œuvre.

En second lieu, et ainsi qu'il résulte du texte de l'article L 16 B du livre des procédures fiscales, la mise en œuvre de la procédure que cet article prévoit a pour finalité de permettre à l'administration fiscale de rechercher, dès lors que des présomptions existent, la preuve de ce qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au payement de l'un des trois impôts qu'il vise.

Cette procédure relève donc incontestablement de la mission confiée à l'administration des finances publiques de contrôler ou de recouvrer des impositions et entre, par voie de conséquence, dans le champ de la limitation prévue par les alinéas 4 et 5 de l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978 (dans sa rédaction issue de la loi du 31 juillet 2021) pris en application de l'article 23 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (dit RGPD), de sorte que le droit à l'information prévu par l'article 14 de ce règlement ne s'applique pas à ces données.

En dernier lieu et en toute hypothèse, les personnes physiques qui peuvent être identifiées (ou identifiables) dans les données collectées (M. [A] [NR], Mme [LW] [BF] [NR], M.'[D] [NR], M. [EZ] [NR], M. [LY] [BF], le commissaire aux comptes et l'avocat nantais de la société Milton International pièce I-12, Mme [KV] [E], M. [PJ] [N], Mme [OG] [KD], M. [FM] [PZ], M. [MN] [ZR], M. [F] [HX], Mme [OW] [TH], Mme [OE] [VA], M. [DE] [VP], Mme [A] [J], M. [XI] [WT], M. [S] [K] KPMG ' expert comptable de Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Mme [AI] [AU], M. [DG] [HF], M. [A] [DU]) sont toutes liées à l'une ou l'autre des sociétés du groupe Rivadis (actionnaires, salariés ou anciens salariés) ou encore contractantes de ces sociétés, de sorte que si l'information prévue par l'article 14 du RGPD ' qui comprend la finalité du traitement, c'est à dire la préparation d'une visite domiciliaire ' aurait immanquablement compromis gravement le succès d'une telle mesure qui repose sur l'effet de surprise afin d'éviter que les preuves recherchées ne soient déplacées voire détruites. Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration invoque également l'exception prévue au paragraphe 5 de l'article 14 du RGPD (rappelé supra).

Les 105 pièces dont les données proviennent d'une collecte indirecte ont donc pu être présentées à l'appui de la requête litigieuse de manière licite au regard des principes édictés par le RGPD et des limitations et exclusions qu'il prévoit.

2 ' pièces issues de la collecte directe':

S'agissant des données issues de la collecte directe qui entrent, selon les appelants, dans le champ d'application de l'article 13 du RGPD, ces derniers sollicitent le rejet de vingt neuf pièces, sept étant relatives à des données intéressant des personnes physiques et vingt deux étant relatives à des données résultant de déclarations (en l'occurrence fiscales) émanant de personnes morales.

Les sept premières pièces (I-10, II-42, II-57, III-11, III-13, III-14 et III-19) sont des comptes-rendus de consultation du fichier informatisé Compte fiscal des particuliers, portant sur les déclarations d'impôt sur le revenu 2021 et 2022 et la taxe foncière 2022 de M. [A] [NR] et de Mme [LW] [BF] épouse [NR], en ce qu'elles concernent leur(s) résidence(s) fiscale(s)'; les déclarations d'impôt sur le revenu 2018 à 2021 et les bulletins de recoupement ' traitements et salaires 2018 à 2021 de Mme [OE] [VA] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé'; les déclarations d'impôt sur le revenu 2018 à 2021 et les bulletins de recoupement ' traitements et salaires 2018 à 2021 de Mme [A] [J] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé'; les déclarations d'impôt sur le revenu 2018 à 2021 et le bulletin de recoupement ' traitements et salaires 2018 de M.'[DG] [HF] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé'; les déclarations d'impôt sur le revenu 2019 à 2021 et les bulletins de recoupement'' traitements et salaires 2019 à 2021 de Mme [AI] [AU] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé'; la déclaration d'impôt sur le revenu 2018 et les bulletins de recoupement ' traitements et salaires 2018 à 2021 de Mme'[HV] [L] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé'; la déclaration d'impôt sur le revenu 2018 et les bulletins de recoupement ' traitements et salaires 2018 de M. [A] [DU] en ce qu'ils concernent sa résidence fiscale et l'emploi occupé.

Pour ce qui est des données recueillies directement auprès des personnes intéressées et contenues dans ces pièces, l'information du contribuable sur la protection des données ' qui doit être communiquée au moment où les données sont obtenues ' est disponible et aisément accessible sur le site https://www.impots.gouv.fr (par le truchement duquel les déclarations en matière d'impôt sur le revenu sont effectuées et documents fiscaux disponibles), ce en conformité tant avec le RGPD (article 12.1': «'Les informations sont fournies par écrit ou par d'autres moyens y compris, lorsque c'est approprié, par voie électronique'») qu'avec les consignes diffusées par la CNIL que l'administration rappelle dans ses écritures (indiquant les références du lien : https://www.cnil.fr/fr/conformite-rgpd-information-des-personnes-et-transparence).

Il s'ensuit que pour ces sept pièces, le RGPD a été respecté et que la production de ces pièces est donc également licite.

Les vingt deux autres pièces consistent en':

- seize déclarations d'impôt sur les sociétés issues des dossiers fiscaux dématérialisés des sociétés Paeonia, Rivadis Holding, Rosae, Laboratoires Rivadis et Milton International,

- trois comptes-rendus de consultation du fichier TTC (traitement de la TVA intracommunautaire) concernant les livraisons intracommunautaires de biens et de services effectuées par les sociétés Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis et Milton International à la société de droit britannique Milton Pharmaceutical company UK entre 2018 ou 2019 et 2021 et le 04/03/2022,

- un compte-rendu de consultation du fichier informatisé Compte fiscal des professionnels relatif aux déclarations effectuées par la société Laboratoires Rivadis en 2021 au titre de la taxe foncière et de la cotisation foncière des entreprises pour son établissement de [Localité 20] (Deux-Sèvres),

- un compte-rendu de consultation du fichier informatisé Compte fiscal des professionnels relatif aux déclarations effectuées par la société Auriege [Localité 23] (siège social et établissement secondaire),

- un compte-rendu de consultation du fichier informatisé Compte fiscal des professionnels dont il ressort que les sociétés Milton Pharmaceutical company UK Ltd et Milton Pharmaceutical company Ltd ne sont pas répertoriées, ne déposent pas de déclarations de TVA ni de déclarations en matière d'impôts sur les sociétés.

Il sera préliminairement relevé que si les appelants soulèvent l'illicéité de la production de ces vingt deux pièces, ils n'ont procédé à aucune analyse pièce par pièce et se sont abstenus d'indiquer pour chacune d'elle en quoi le RGPD n'aurait pas été observé.

En premier lieu, il convient de rappeler que le traitement des données qui concernent les personnes morales sont exclues du champ du RGPD (considérant n° 14). Il s'ensuit que les sociétés concernées (Milton Pharmaceutical company UK Ltd, Milton Pharmaceutical company Ltd, Rosae, Paeonia, Milton International, Rivadis Holding et Laboratoires Rivadis) ne peuvent solliciter l'application de ce règlement et les droits notamment à l'information qu'il ouvre à leur profit.

Les appelants font toutefois valoir que cette exclusion n'est pas absolue et que le règlement doit recevoir application dès lors que des données liées à une personne morale ou à ses activités peuvent être rattachées à une personne physique.

Il sera, en second lieu, observé que les trois comptes-rendus de consultation du fichier TTC (pièces n° II-45, II-59 et III-16), que les deux comptes-rendus du fichier informatisé Compte fiscal des professionnels relatif aux déclarations effectuées par les sociétés Auriege et Laboratoires Rivadis (pièces n° IV-6 et 7) et que la consultation du même fichier concernant l'absence de déclaration effectuée par les sociétés Milton Pharmaceutical company UK Ltd et Milton Pharmaceutical company Ltd (pièce n° II-2) ne comportent le nom d'aucune personne physique à l'activité de laquelle ces données peuvent être rattachées de sorte que l'exclusion alléguée n'est pas pertinente. La production de ces pièces est donc licite.

En dernier lieu, s'agissant des seize déclarations d'impôts sur les sociétés souscrites par les sociétés Paeonia (deux déclarations relatives aux comptes clos les 31 août 2020 et 31 août 2021, pièces n° I-3 et I-11), Rivadis Holding (deux déclarations relatives aux comptes clos les 31 août 2017 et 31 août 2021, pièces n° I-7 et II-46), Rosae (une déclaration relative au compte clos le 31 août 2021, pièce n° I-9), Laboratoires Rivadis (sept déclarations relatives aux comptes clos entre le 31 août 2015 et le 31 août 2021 ' pièces n° II-58, II-61, II-62, II-69, II-70, II-95 et II-96) et Milton International (quatre déclarations relatives aux comptes clos entre le 31 août 2018 et le 31 août 2021, pièces II-80, II-81, II-82, II-92), il doit être relevé qu'il s'agit de documents officiels, établies par ces sociétés en exécution des articles 223 et suivants du code général des impôts,

' signées par leurs dirigeants ' en l'occurrence, pour la plupart, par M. [A] [NR] et, pour l'une d'entre elles, celle de la société Paeonia relative aux comptes clos le 31 août 2020, par Mme'[LW] [NR],

' comportant les annexes et les données obligatoires que ce code fixe et plus particulièrement':

- la liste des personnes détenant plus de 10 % de leur capital (article 38'II'1°'de l'annexe III du code général des impôts) et, en l'occurrence, seuls les noms de M.'[A] [NR] (pour la société Rosae) et de Mme [LW] [BF] épouse [NR] (pour la société Paeonia en 2020), personnes physiques, y figurent,

- le relevé détaillé des catégories de frais généraux prévu à l'article 54'quater du code général des impôts lorsque ces frais excèdent, pour une ou plusieurs des dites catégories (en l'espèce les cinq salariés les mieux rémunérés), l'un des chiffres fixés par les articles 4'J et 4'K de l'annexe IV du code général des impôts (sont cités les noms de M.'[A] [NR], Mme'[LW] [NR], Mme'[AI] [AU], Mme'[HV] [L] pour la société Paeonia, M.'[D] [NR], M.'[IK] [RO], Mme'[U] [G], M.'[A] [CP] et M.'[EZ] [NR], M.'[V] [M], M.'[A] [DU], M.'[OU] [O], M.'[DG] [HF] et Mme'[U] [G] pour la société Rivadis Holding, Mme'[TX] [X], M.'[EJ] [H], Mme'[I] [GC], Mme'[B] [ZB], Mme'[FO] [NB], M.'[HH]-[LI] [CB], M.'[DG] [Z], M.'[SE] [P], M.'[XY] [JA], M.'[HH]-[UK] [EX], Mme'[FO] [WF], Mme'[FO] [ZB] pour la société Laboratoires Rivadis et Mme'[A] [J], Mme'[JP] [YN], Mme'[T] [ZT], Mme'[Y] [R], Mme'[OE] [VA] et Mme'[C] [RM] pour la société Milton International).

Ces données en ce qu'elles concernent les personnes physiques énumérées ci-dessus n'ont pas été recueilles auprès d'elles mais auprès des sociétés tierces ci-dessus désignées de sorte qu'en ce qui concerne ces personnes, ce n'est pas l'article 13 du RGPD qui s'applique mais l'article 14 (Informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée).

Or, les limitation et exception prévues par les articles 48 alinéas 4 et 5 de la loi du 6 janvier 1978 (dans sa rédaction issue de la loi du 31 juillet 2021) pris en application de l'article 23 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (dit RGPD) et 14 paragraphe 5 du RGPD trouvent à s'appliquer pour les motifs exposés ci-dessus en raison, d'une part, de la finalité de contrôle et de recouvrement des impositions qui est celle de l'article L 16 B du livre des procédures fiscales et, d'autre part, du risque de compromettre gravement le succès de la visite domiciliaire envisagée en attirant l'attention des dirigeants et principaux cadres des sociétés du groupe concerné.

Ces seize pièces ont donc été également produites de manière licite.

Le moyen ainsi soulevé par les appelants sera donc rejeté pour l'ensemble des pièces produites par l'administration fiscale devant le juge des libertés et de la détention à l'appui de sa requête.

Sur les présomptions de fraude alléguées':

Il convient préalablement de rappeler que conformément à l'article L 16 B du livre des procédures fiscales, le juge n'a pas à rechercher si les infractions de fraude sont d'ores et déjà caractérisées et leur preuve rapportée, points qui ressortent de la seule compétence du juge de l'impôt, mais doit, en revanche, s'assurer qu'il existe effectivement des éléments laissant présumer que la personne concernée se serait soustraite à ses obligations fiscales (déclaratives ou de payement) au titre, s'agissant d'une personne morale, de l'impôt sur les sociétés ou de la TVA, notamment en omettant sciemment de passer des écritures dans les documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts. La présomption que suppose cet article est une présomption simple.

Il doit être précisé qu'une société de droit étranger est tenue, lorsqu'elle exerce une activité en France par l'intermédiaire d'un établissement stable, aux obligations résultant des articles 54,'209'et 286'I'3°'du code général des impôts, qui exigent la passation d'écritures comptables permettant de justifier des opérations imposables en France, de sorte que lorsqu'elle a méconnu ses obligations déclaratives, elle peut être présumée avoir omis sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou avoir passé ou fait passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts.

Tout d'abord et contrairement à ce qu'exposent les appelants, l'administration fiscale ne reproche pas au groupe Rivadis d'investir à l'étranger et d'y détenir des filiales, opération évidemment licite et conforme au droit européen dont ils font état, mais à ces filiales de méconnaître leurs obligations fiscales et comptables en France où, selon l'administration, elles disposeraient de leur centre de direction et exerceraient une partie de leur activité.

1 ' s'agissant de la société anglaise Milton Pharmaceutical company UK Ltd':

Il résulte des pièces produites par l'administration à l'appui de la requête présentée au juge des libertés et de la détention que la société anglaise Milton Pharmaceutical company UK Ltd, qui a pour activité la fabrication de produits pharmaceutiques de base (II-5), est, depuis 2001, une filiale du groupe Rivadis (société Paeonia) dont le capital a été successivement détenu par ses filiales les sociétés Rivadis Holding, jusqu'au 1er août 2018, et Milton International (anciennement Newco), depuis cette date'; qu'elle a pour dirigeant depuis 2001, M.'[A] [NR], résident français (pièce I-10), par ailleurs président de la société Paeonia (groupe Rivadis) (pièces I-I, I-2, I-2 bis) et principal bénéficiaire, depuis le 1er janvier 2021, par le biais de sa holding personnelle, la société Rosae, dont il assume également la présidence (pièces I-5 et I-5 bis) laquelle détient 82,04 % du capital de la société Paeonia. Avant cette date, le principal bénéficiaire était Mme [LW] [BF] épouse [NR], résidente française (pièce I-10), jusqu'alors actionnaire majoritaire de la société Paeonia.

Le siège social (registred office) de la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd a été successivement fixé':

- [Adresse 9] [Localité 18], dans les locaux de la société Tee & Company, expert comptable (II-37),

- Mitchells [Adresse 6], [Localité 14] (Gloucestershire), cette adresse correspondant au siège de la société Mitchells Chartered Accountants, cabinet indépendant d'experts comptables, de conseiller d'affaires et de fiscalistes (site Internet www.mitchells.org pièce II-1) dans les locaux de laquelle se trouve le siège de 327 sociétés selon le site Dun & Bradstreet (pièce II-6),

- depuis le 10 juin 2021, [Adresse 5] (pièce II-4), cette adresse correspondant à un établissement de la société Mitchell Glanville (site Internet www.mitchells.org), société de service aux entreprises, et où sont domiciliées 260 autres sociétés (pièce II-13) selon la base de données Orbis. L'administration relève à bon escient que les déclarations fiscales («'Corporation tax computation for the corporation tax accounting'») arrêtées aux 31 août 2017, 2018 et 2019 (pièces II-12-1 à 3) portent en première page la mention «'Mitchell Glanville ([Localité 13]) Limited, [Adresse 5]'», c'est à dire l'adresse du dernier siège de la société,

Il résulte de l'examen des états financiers («'report of the director and audited financial statement'») de la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd arrêtés aux 31 août 2017, 2018 et 2019 (pièces II-12-4 à 6) que cette société n'a exposé, au cours de ces exercices, aucune dépense de personnel (ses seules charges consistant au coûts d'achat des produits, aux coûts de distribution et aux dépenses administratives dont la liste est précisée dans le document «'trading and profit and loss account'») et qu'elle n'a déclaré pour le premier de ses exercices qu'un seul employé ou directeur («'the average monthly nomber of employees during the year was 1'») et aucun pour les exercices suivants. La réponse à la demande d'assistance confirme ce point (II-12': «'according to Financial statement submitted to HMRC there is no employee coste for the year ended 31 august 2017, 31 august 2018 and 31 august 2019'»).

L'état financier arrêté au 31 août 2020 (I-15) fait état d'un employé (2019).

Ces mêmes documents précisent que la société n'avait pas au cours des trois exercices clos les 31 août 2017, 2018 et 2019 d'immobilisations corporelles. L'exercice clos au 31 août 2020 fait, en revanche, état de 492 944 £ d'immobilisations (usine et machines), sans préciser ni en quoi ni où ont été réalisées ces immobilisations.

Il résulte de la consultation des annuaires téléphoniques Yell et Phone Book que la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd ne dispose pas de ligne téléphonique fixe en Grande Bretagne (I-16 et I-17).

L'exploitation par l'administration des informations et données résultant de la consultation du site Internet https://www.milton-tm.com (dont cinq déclinaisons sont à la disposition du public': Royaume-Uni, France, Irlande, Chine et Australie) a permis de mettre en évidence les points suivants dans sa version britannique (https://www.milton-tm.com/en), consultée le 17 octobre 2022':

- le nom de domaine «'milton-tm.com'», créé le 19 septembre 2001 et localisé en Grande Bretagne, a été enregistré et est la propriété de la société française Rivadis Holding,

- l'administrateur du site, identifié grâce au numéro de téléphone mentionné et à un droit de communication est la société française PCCG (https://ipsilon-ip.com) dont le siège est à [Localité 12] (Hauts de Seine), cabinet de propriété intellectuelle spécialisé dans le dépôt, le suivi, l'entretien et la défense de tous les droits de propriété intellectuelle, et notamment les brevets, les marques, les modèles et les noms de domaines (II-21 à 23),

- la société a pour adresse en Angleterre (II-33) : [Adresse 9] [Localité 18] United Kingdom (qui était celle de son siège social jusqu'en 2007...) et qu'elle peut être jointe (II-24) au n° de téléphone suivant': [XXXXXXXX01] ou à l'adresse de messagerie': [Courriel 16],

' ce numéro de téléphone gratuit attribué à la société Milton renvoie à une plate-forme de communication multicanal Cleanroom Technology gérée par la société H PCI Media Limited qui a pour mission de fournir des informations sur les produits,

' l'adresse de messagerie renvoie au site de la société Ceuta Helthcare qui assure pour les industriels notamment du secteur de la santé, la sous-traitance des missions de vente et de gestion des marques au Royaume-Uni (II-27 et II-28),

- la rubrique « professionnal & press : press office » du site (pièces II-43 et II-44) mentionne l'adresse de messagerie [email protected] pour répondre à toute question et renvoie au site http://connectedpr.com/milton/ qui présente la marque Milton et les actualités des produits. La société Connected PR est une société spécialisée dans les communications stratégiques couvrant les relations avec les médias, la gestion des médias sociaux, le marketing numérique et la gestion d'événements, la personne en charge du dossier Milton est Mme [BM] [GS] dont l'adresse de messagerie est [Courriel 22] et qui est manifestement une employée de la société Connected PR,

- la rubrique « Safety Sheet data » du site « https://www.milton-tm.com » renvoie vers le site https://www.quickfds.com/fr qui est celui de la société Quick-FDS qui a pour activité d'accompagner les entreprises dans leur gestion quotidienne des Fiches de Données de Sécurité (FDS) et datas associées,

- la page Retail (II-40) précise que pour devenir revendeur Milton, il faut contacter la'Responsable de l'administration des ventes, Mme [OE] [VA] à l'adresse de messagerie [Courriel 25], résidente française successivement employée par les sociétés françaises Laboratoires Rivadis (2018) et Milton International (septembre 2018 - décembre 2021) comme gestionnaire AP (approvisionnement ') (Pièce II-42)

- l'onglet produits (II-63) précise que':

' les produits de stérilisation sont fabriqués, pour ceux dont l'origine est précisée, en France, en Grande Bretagne (Sterilising Fluid, Sterilising Tablets) ou au Royaume Uni (Mini Sterilising Tablets),

' les six produits d'hygiène proposés sont tous fabriqués en France,

et que pour toute demande d'exportation (export enquiry), il convient de s'adresser par messagerie à': [Courriel 19].

Les fiches concernant les produits fabriqués en France renvoient aux sociétés françaises du groupe Rivadis (Laboratoires Rivadis qui a employé pendant la période considérée 2017 ' 2021 entre 150'et 180 salariés et dont les bilans font apparaître des immobilisations corporelles comprises entre 14'et 15'000'000'euros, cf. pièces II-58, 61, 62, 95 et 96, et Milton International)

Les recherches effectuées par l'administration fiscale à partir des fiches diffusées par les distributeurs en ligne Amazon (II-73), Asda (II-74) et Ocado (II-75) précisent que':

' le produit Mini Sterilising Tablets est fabriqué par Alloga (UK) et que pour toute information il convient de s'adresser à Laboratoire Rivadis,

' l'adresse du fabricant (manufacturer adress) du produit Sterilising Tablets dont l'origine est «'United Kingdom'» (page 2) est Laboratoire Rivadis [Adresse 27] [Localité 20] (page 3),

' le produit Sterilising Fluid dont le pays d'origine est «'United Kingdom'» (page 1) a pour fabriquant (manufacturer) Laboratoire Rivadis [Adresse 27] [Localité 20] France (page 3),

La fiche diffusée par Amazon (II-85) relative au produit Milton Solo Travel Steriliser dont l'origine n'est pas précisée sur le site Internet Milton-tm dans sa version britannique indique que le pays d'origine de ce produit est la Chine.

Il résulte d'un droit de communication exercé auprès de la Poste (II-88) que la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd reçoit du courrier à l'adresse [Adresse 10] (et non Sambat comme indiqué) qui est également l'adresse de Rivadis.

Une convention de prestation de services (pièce n° II-49) a été conclue le 17 septembre 2004 entre la société Rivadis Holding et ses filiales dont la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd. Cette convention, renouvelée par avenants, porte sur les domaines suivants': assurances, gestion du personnel, comptabilité, fiscalité, prestations financières, prestations commerciales, prestations juridiques, contrôle de la qualité, recherches et développement, frais de siège. Ces prestations ont été réalisées par l'intermédiaire des dirigeants et/ou associés et de salariés tous résidents français de la société Rivadis Holding.

Il ressort des extractions du fichier Traitement de la TVA Intracommunautaire effectuées par l'administration que la société Rivadis Holding (numéro de TVA intracommunautaire FR44627120272) a procédé à des prestations de service intracommunautaires à destination de la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd à hauteur de 64 640 euros au titre de l'année 2018 et 800 euros au titre de l'année 2019 (pièce n° II-45) et qu'après la réorganisation du groupe en 2018, la société Milton International (numéro de TVA intracommunautaire FR77432241560) a procédé à des prestations de service intracommunautaires à destination de la même société à hauteur de 284 474 euros au titre de la période du 01/01/2019 au 31/12/2019 et de 279 454 euros au titre de la période du 01/01/2020 au 31/12/2020 (pièce n° III-16).

Il est à peine besoin de préciser que plusieurs salariés domiciliés en France des sociétés françaises du groupe Rivadis font état dans leurs profils LinkedIn d'interventions en Grande Bretagne. Ainsi, Mme [A] [J], successivement responsable commerciale des sociétés françaises Laboratoires Rivadis et Milton Internationale (pièce II-57), précise être « en charge de la stratégie de développement produit et de sa mise en place pour la marque Milton en France et à l'international (ajoutant qu'elle) développe les ventes de la marque Milton et met en place la stratégie commerciale et marketing en Grande-Bretagne, Irlande, Australie et France » (pièce n°ll-50), M.'[A] [DU] indique notamment avoir assuré entre mai 2012 - déc. 2017 «'la gestion directe des 3 filiales (UK, Irlande et Australie) et développement du réseau de distributeurs sur 30 pays pour l'ensemble des marques'» (pièce III-15).

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les organes de direction et le centre décisionnel de la société de droit britannique Milton Pharmaceutical company UK Ltd sont situés en France, à [Localité 7] dans les locaux du groupe français dont elle dépend (et où elle reçoit du courrier), que ses sièges sociaux successifs ont été fixés en Grande Bretagne dans des locaux de société d'expertise-comptable et de fiscalistes où se trouvent domiciliées de très nombreuses sociétés et où elle ne dispose pas de moyen, permettant de présumer qu'il s'agit d'une domiciliation, qu'elle n'a, dans ce pays, pas de moyens humains (aucun salaire versé) et matériels (aucune immobilisation jusqu'en 2020, absence de ligne téléphonique) lui permettant d'exercer l'activité de «'fabrication de produits pharmaceutiques de base'» conforme à son objet social (les produits qu'elle vend étant a priori fabriqués soit en France par les sociétés françaises du groupe, soit en Chine, soit en Grande Bretagne par la société Alloga UK, que pour réaliser son activité elle recourt aux moyens tant des sociétés françaises du même groupe que de sous-traitants implantés en Grande Bretagne et en France pour assurer des missions telles que la fabrication, le suivi et l'information de la clientèle, la communication, la vente et la logistique.

Ces différents points permettent de présumer que la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd dispose d'un établissement stable en France.

2 ' s'agissant de la société irlandaise Milton Pharmaceutical company Ltd':

Il résulte des pièces produites par l'administration à l'appui de la requête présentée au juge des libertés et de la détention que la société anglaise Milton Pharmaceutical company Ltd, qui a pour activité le commerce de gros de produits pharmaceutiques (III-2), est, depuis 2001, une filiale du groupe Rivadis (société Paeonia) dont le capital a été successivement détenu par ses filiales les sociétés Rivadis Holding, jusqu'au 1er août 2018, et Milton International (anciennement Newco), depuis cette date'; que ses dirigeants ont été':

- depuis 2001, M.'[A] [NR], résident français, par ailleurs président de la société Paeonia (groupe Rivadis) (pièces I-I, I-2, I-2 bis) et principal bénéficiaire, depuis le 1er janvier 2021, par le biais de sa holding personnelle, la société Rosae dont il assume également la présidence (pièces I-5 et I-5 bis) laquelle détient 82,04 % du capital, de la société Paeonia,

- du 2 mai 2001 au 22 mai 2014, M. [FM] [PZ], résident suisse,

- du 22 mai 2014 au 1er juillet 2021, Mme [LW] [NR], résidente française (actionnaire majoritaire de la société Paeonia jusqu'en décembre 2020 et donc principale bénéficiaire jusqu'à cette date).

Le secrétariat de la société est assuré depuis le 2 mai 2019 par Mme [AI] [AU], résidente française (pièces III-2 et III -2 bis), par ailleurs, successivement directrice administrative du 1er mai 2019 au 31 décembre 2020 et, depuis cette date, directrice générale de la société française Paeonia (pièce n° III-13).

Le siège social (registred office) de la société Milton Pharmaceutical company Ltd a été fixé [Adresse 24], [Localité 17], (Irlande). Cette adresse ' qui est celle du siège de 2 076'sociétés selon le site Orbis consulté par l'administration (pièce n° III-3) ' est également celle de diverses sociétés du groupe KPMG (pièces n° III- 3 et III-18), c'est à dire du comptable agréé (chartered accountants) de la société Milton Pharmaceutical company Ltd ainsi qu'il résulte des états financiers abrégés (abridged financial statements) rédigés par M. [K], KPMG, [Adresse 24] [Localité 17], les 16 mai 2018, 25 janvier 2019, 3 mars et 13 novembre 2020 (pièces III- 4 à 7), le contact de messagerie de la société Milton Pharmaceutical company Ltd étant [Courriel 15] (pièces n° III-9 et III-21).

Ces états abrégés ne font pas état de rémunérations versées (point 3), mais précisent que la société a versé des frais de gestion (management fees) à Laboratoires Rivadis SAS, une société du groupe dont elle dépend, s'élevant en 2017 et en 2018 à la somme de 41 760 euros, en 2019 à celle de 9 840 et en 2020 à celle de 15 720 euros (point 13).

La version irlandaise du site « https://www.milton-tm.com/ie» renvoie quant aux termes et conditions à Milton Pharmaceutical company Ltd, numéro d'enregistrement 4194174, sise [Adresse 5] [Localité 13] United Kingdom, c'est à dire à la société britannique.

L'adresse courriel de contact ([Courriel 16]) est identique à celle auquel renvoie la version britannique du site ce qui permet de supposer que la société irlandaise recourt au même sous-traitant (soit la société Ceuta Healthcare) que la société Milton Pharmaceutical company UK Ltd pour assurer le suivi et la gestion de la clientèle ainsi que des prestations de logistique sur le territoire irlandais.

La rubrique professionnal & press de la version irlandaise du site https://www.milton-tm.com/ie (pièce n°ll-55) mentionne les mêmes informations que la version anglaise et renvoie donc au prestataire Connected PR ([email protected] et http://connectedpr.com/milton/) avec le même contact.

Il résulte d'un droit de communication exercé auprès de la Poste (II-88) que la société irlandaise Milton Pharmaceutical company Ltd reçoit également du courrier à l'adresse [Adresse 10] qui est également l'adresse de Rivadis.

Tout comme la société britannique, la société irlandaise est partie à la convention de prestations de services du 17 septembre 2004 et bénéficie à ce titre des mêmes services effectués par les mêmes personnes.

La concernant, il résulte des extractions du fichier Traitement de la TVA Intracommunautaire effectuées par l'administration que la société Rivadis Holding (numéro de TVA intracommunautaire FR44627120272) a procédé à des prestations de service intracommunautaires à destination de la société Milton Pharmaceutical company Ltd à hauteur de 19'520'euros au titre de l'année 2018 et 800 euros au titre de l'année 2019 (pièce n°ll-45) et qu'après la réorganisation du groupe en 2018, la société Milton International (numéro de TVA intracommunautaire FR77432241560) a procédé à des prestations de service intracommunautaires à destination de la même société à hauteur de 68 000 euros au titre de la période du 01/01/2019 au 31/12/2019, 45'112'euros au titre de la période du 01/01/2020 au 31/12/2020 et de 50'721'euros au titre de la période du 01/01/2021 au 31/12/2021 (pièce n° 111-16).

Abstraction faite des salariés français déjà cités du groupe Rivadis (Mme [A] [J] et M. [A] [DU]) qui font également état de leurs interventions au profit de la société Milton Pharmaceutical company Ltd, Mme [AI] [AU], française, domiciliée en France (tout comme ses prédécesseurs depuis 2011, MM. [PJ] [N], [CR] [W] et [DG] [HF]), en l'espèce [Adresse 2] à [Localité 21], salariée de la société Peonia dont elle figure au nombre des mieux rémunérés (I-3 et I-11), en a exercé le secrétariat à compter du 2 mai 2019 (pièces III-2, III-2bis, III-9 et III-12).

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les organes de direction et le centre décisionnel de la société de droit irlandaise Milton Pharmaceutical company Ltd sont situés en France, à [Localité 7] dans les locaux du groupe français dont elle dépend (et où elle reçoit du courrier), que son siège social a été fixé en Irlande dans des locaux de sa société d'expertise-comptable, la société irlandaise KMPG, où se trouvent domiciliées de très nombreuses sociétés et où elle ne dispose pas de moyen permettant de présumer qu'il s'agit d'une domiciliation, qu'elle n'a, dans ce pays, pas de moyens humains (aucun salaire versé) et matériels lui permettant d'exercer son activité commerciale que pour ce faire, elle recourt tant aux moyens des sociétés françaises dont elle dépend que de sous-traitants sur les territoires britanniques ou français pour assurer des missions telles que le suivi et l'information de la clientèle, la communication, la vente et la logistique.

Ces différents points permettent de présumer que la société Milton Pharmaceutical company Ltd dispose d'un établissement stable en France.

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Les sociétés de droit britannique Milton Pharmaceutical company UK Ltd et de droit irlandais Milton Pharmaceutical company Ltd n'étant pas répertoriées au compte fiscal des professionnels, à la date de l'extraction effectuée le 14/10/2022 (Pièce n°ll-2), il peut être présumé qu'elles exercent en France une partie de leur activité, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes en matière d'impôt sur les bénéfices et en matière de TVA et ainsi avoir omis de passer les écritures comptables y afférentes dont la tenue est imposée par le code général des impôts (articles 54 et 209-I pour l'IS et 286 pour la TVA).

Sur la proportionnalité de la mesure':

Il est constant que les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, qui organisent le droit de visite des agents de l'administration des impôts et le recours devant le premier président de la cour d'appel, assurent la conciliation du principe de la liberté individuelle et du droit d'obtenir un contrôle juridictionnel effectif de la décision prescrivant la visite avec les nécessités de la lutte contre la fraude fiscale, de sorte que l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée et du domicile est proportionnée au but poursuivi (Com. 20 novembre 2019, n° 18-15423).

Dès lors que le texte précité ne subordonne pas la visite domiciliaire à la preuve de ce qu'aucune autre mesure, moins intrusive quant au respect de la vie privée, aurait permis à l'administration fiscale d'aboutir au même résultat, l'argumentation développée de ce chef (mesure disproportionnée) est inopérante.

L'ordonnance critiquée sera donc confirmée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles':

Parties succombantes, les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et M. [A] [NR] supporteront la charge des dépens.

Ils devront verser à l'Etat, représenté par le Directeur général des finances publiques une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS':

Vu l'article L 16 B du livre des procédures fiscales, le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (dit RGPD), les articles 1er al 2 et 48 de la loi du 6 janvier 1978,

Rejetons le moyen soulevé tiré de l'illicéité des pièces produites par l'administration.

Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nantes le 29 novembre 2022 en toutes ses dispositions.

Condamnons les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et M. [A] [NR] aux dépens.

Condamnons les sociétés Milton Pharmaceutical UK Cy Ltd, Milton Pharmaceutical Cy Ltd, Paeonia, Rosae, Rivadis Holding, Laboratoires Rivadis, Milton France, Milton International et M. [A] [NR] à verser à l'Etat français représenté par le Directeur général des finances publiques une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT