CA Rennes, 5e ch., 20 décembre 2023, n° 21/00403
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SCI de la Haute Patonnais (SCI)
Défendeur :
Hostellerie (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Le Champion
Conseillers :
Mme Parent, Mme Hauet
Avocats :
Me Cressard, Me Chauvin
Par acte sous seing privé du 30 juillet 1998, la SCI La Haute Patonnais a donné à bail commercial à la SARL Hostellerie [Adresse 3] des locaux situés au [Adresse 3] à [Localité 4] d'une maison à usage d'hôtel-restaurant pour 9 années à compter du 1er août 1998 moyennant un loyer annuel de 15 906,55 euros HT.
Par acte authentique en date du 18 juillet 2007, la SCI La Haute Patonnais a consenti au renouvellement d'un bail commercial, pour une durée de neuf ans à compter du 1er août suivant, au profit de la SARL Hostellerie [Adresse 3], dudit immeuble à usage d'hôtel-bar restaurant. Le loyer annuel a été fixé à 21 600 euros HT, du 1er août 2007 au 31 octobre 2008 puis à 25 200 euros HT, à compter du 1er novembre 2008. Le loyer s'est élevé à la somme annuelle de 28 493,76 euros HT le 01 juillet 2016.
Par acte d'huissier en date du 29 janvier 2016, la SCI La Haute Patonnais a fait signifier à la SARL Hostellerie [Adresse 3] un congé avec offre de renouvellement du bail pour le 31 juillet 2016 moyennant un loyer annuel de 36 000 euros hors taxes. Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 17 octobre suivant, la locataire a accepté le principe du renouvellement de son bail commercial mais a refusé le nouveau loyer demandé par la bailleresse.
Par acte d'huissier en date du 13 octobre 2017, la SCI La Haute Patonnais a fait assigner la SARL Hostellerie [Adresse 3] devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Rennes aux fins de voir notamment fixer le montant annuel du loyer, à compter du 1er août 2016, à la somme de 54 600 euros hors taxes.
Par jugement du 17 septembre 2018, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Rennes a constaté l'accord des parties sur le renouvellement du bail à la date du 1er août 2016 et a ordonné, avant dire droit, une expertise confiée à M. [H].
M. [H] a déposé son rapport d'expertise le 2 octobre 2019.
Par jugement en date du 23 novembre 2020, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Rennes a :
- débouté la SCI La Haute Patonnais de sa demande de déplafonnement du loyer de renouvellement du bail la liant à la SARL Hostellerie [Adresse 3] et portant sur un local à usage d'hôtel-bar-restaurant, situé [Adresse 3] à [Localité 4],
- en conséquence, dit que le montant du loyer du bail renouvelé correspond à sa valeur plafonnée, soit la somme annuelle de 24 185,93 euros HT,
- condamné la SCI La Haute Patonnais aux dépens de l'instance,
- condamné la SCI La Haute Patonnais à payer à la SARL [Adresse 3] la somme 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande, plus ample ou contraire,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- dit que monsieur le greffier de la juridiction adressera copie de la présente décision à l'expert missionné dans la présente instance, à savoir monsieur [M] [H], domicilié [Adresse 2].
Le 19 janvier 2021, la SCI La Haute Patonnais a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 26 septembre 2023, elle demande à la cour de :
- réformer la décision rendue par le juge des loyers commerciaux le 14 décembre 2020 en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à voir fixer le loyer du bail renouvelé à sa valeur locative,
- constater la monovalence des locaux loués sis [Adresse 1] à [Localité 4] lui appartenant et donnés à bail à la société Hostellerie [Adresse 3],
- fixer le loyer du bail renouvelé à 42 181 euros HT annuels, à compter de la date du renouvellement soit le 1er août 2016,
- ordonner l'apurement des comptes entre les parties, en tenant compte du versement par la société bailleresse de la somme de 16 413,91 euros au titre d'un trop perçu de loyers,
- dire qu'à défaut pour les parties de rédiger un nouveau bail dans le délai d'un mois de la décision à intervenir, cette dernière tiendra lieu de bail,
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner la SARL Hostellerie [Adresse 3] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre sa condamnation aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 28 septembre 2023, la SARL Hostellerie [Adresse 3] demande à la cour de :
À titre principal,
- confirmer la décision dont appel en toutes ses dispositions,
- débouter la SCI La Haute Patonnais de toutes ses demandes fins et conclusions,
En conséquence,
- constater le renouvellement du bail consenti par la SCI La Haute Patonnais à elle pour une période de 9 ans à compter du 1er août 2016 aux mêmes clauses et conditions que le bail expiré, sous réserve des modifications impératives introduites par la loi n°2014-626 du 18 juin 2014 et le décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014,
- dire que la règle du plafonnement doit s'appliquer compte tenu du caractère polyvalent des locaux et de l'absence de modification notable des éléments déterminant la valeur locative,
- fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 24 185,93 euros HT par an à compter du 1er août 2016,
- ordonner l'apurement des comptes entre les parties sur ces bases,
À titre subsidiaire, et si par impossible la cour estimait que le déplafonnement du loyer est justifié :
- fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 31 710 euros HT par an,
En toute hypothèse,
- dire que conformément aux dispositions de l'article L.145-34 du code de commerce, la variation du loyer découlant d'une augmentation ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l'année précédente,
- dire que conformément aux dispositions de l'article L.145-57 du code de commerce, faute pour le bailleur d'avoir envoyé au preneur, dans le délai d'un mois qui suivra la décision définitive, un projet de bail ou faute d'accord sur ce projet, la décision rendue vaudra bail,
- débouter la SIC La Haute Patonnais de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner la SCI La Haute Patonnais à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SCI La Haute Patonnais aux entiers dépens de l'instance qui comprendront notamment le coût de l'expertise judiciaire de M. [H].
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur la demande de déplafonnement du loyer
La SCI La Haute Patonnais soutient que les locaux litigieux sont monovalents et qu'il y a eu, au cours de la période de référence, une modification notable des caractéristiques des locaux, des obligations respectives des parties et des facteurs locaux de commercialité de nature à justifier le déplafonnement du loyer.
S'agissant de la monovalence des locaux, elle relève que s'il est acquis que la configuration des lieux ne permet pas de scinder les deux activités à savoir hôtel et bar-restaurant sans réaliser des travaux, elle conteste les conclusions de l'expert judiciaire qui a estimé que les travaux pour y parvenir ne seraient pas coûteux. Elle fait valoir qu'au contraire les travaux sont importants et très coûteux pour une somme qu'elle évalue entre 150 000 et 200 000 euros représentant les deux tiers du chiffre d'affaires annuel dégagé en 2016 et dix années de loyer tel que fixé par le jugement. Elle indique que la séparation physique devra s'accompagner d'une séparation juridique de deux entités, ce qui générera également des coûts. Elle conteste les conclusions du rapport de M. [C] produit par le preneur et se rapporte au rapport de M. [N], gérant de la société Lithek conseil et expert en diagnostic.
Elle invoque également la monovalence économique selon laquelle les activités de bar-restaurant et hôtel sont indivisibles en ce qu'une part importante du chiffre d'affaires est réalisée par la proposition commerciale de soirées étape avec une clientèle composée de professionnels de passage où le restaurant fonctionne grâce à l'hôtel et inversement. Elle précise que si l'activité bar-restaurant peut se maintenir seule, il en va différemment de l'activité hôtel qui n'apparaît pas rentable au vu des charges qu'un tel établissement nécessite. Elle relève que le rapport de M. [N] a confirmé l'interdépendance économique et physique des deux activités.
S'agissant des facteurs locaux de commercialité, elle argue d'un développement des zones commerciales voisines, de l'augmentation de la population de la commune qui bénéficie d'une réelle attractivité pour soutenir que ces éléments crée une hausse de la demande des chambres d'hôtels sur la commune.
S'agissant de la modification des caractéristiques du local, elle invoque la création d'une terrasse qui a pour objet et pour effet d'augmenter l'attractivité du commerce et la capacité d'accueil de sorte que cela ne peut être considéré comme une simple amélioration mais bien une modification notable des caractéristiques du local justifiant le déplafonnement du loyer. Elle ajoute qu'une chambre a été créée portant de 7 à 8 le nombre de chambres de l'établissement, ce qui constitue une amélioration à prendre en compte pour le second renouvellement au sens de l'article R.145-8 du code de commerce.
S'agissant de la modification des obligations des parties, elle soutient que la taxe foncière a très fortement augmenté au cours du bail en ce qu'elle est passée de 1 281 euros en 2007 à 1 716 euros en 2016, ce qui est de nature à remettre en cause l'équilibre financier du bail.
Enfin, elle considère que l'introduction de l'indice des loyers commerciaux par la loi Pinel de 2014 en cours de bail, que le jugement entrepris a appliqué, a contribué à une baisse du loyer de 4 307 euros annuels ou 15% annuels, ce qui constitue une modification notable des obligations respectives des parties.
En réponse, la SARL Hostellerie [Adresse 3] demande de voir appliquer la règle du plafonnement compte tenu du caractère polyvalent des locaux et de l'absence de modification notable des éléments déterminant la valeur locative.
S'agissant du caractère polyvalent des locaux, elle soutient que le bailleur ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que les lieux loués ne pourraient être affectés à une autre activité sans des travaux importants et coûteux. Elle indique que la faisabilité de la séparation des activités est établie par un rapport de l'APAVE et que l'expert judiciaire a estimé que le coût de réaménagement n'était pas prohibitif, ce qui permettrait, selon elle, d'isoler aisément les activités d'hôtel et de restaurant pour lesquelles il existe une clientèle distincte. Elle conteste le rapport non contradictoire du cabinet LITHEK qui a évalué les travaux entre 150 000 et 200 000 euros, ce qu'elle estime exorbitant et produit le rapport de M. [C] qui a évalué les travaux d'aménagement destinés à isoler les deux établissements entre
40 000 et 50 000 euros HT en précisant que les travaux ne sont pas d'une grande ampleur ni d'une grande technicité.
Elle ajoute que le seul critère est la divisibilité matérielle des locaux et soutient que les spéculations de l'appelante sur la rentabilité de chacune des activités considérées indépendante l'une de l'autre ne présente aucun intérêt pour la solution du litige.
Elle conteste toute modification notable des caractéristiques des locaux en arguant que l'installation d'une terrasse, construite pour permettre l'accès aux personnes à mobilité réduite, constitue une simple amélioration relevant des dispositions de l'article R.145-8 du code de commerce et ne peut être invoquée lors du premier renouvellement qui suit l'accession à ces travaux. Elle indique que la transformation d'une salle en chambre familiale constitue certes une modification des caractéristiques du local mais qui ne peut être qualifiée de notable.
Elle réfute également toute modification notable des obligations respectives des parties. S'agissant de la taxe foncière, si elle a effectivement augmenté, elle fait valoir que cette augmentation demeure modeste (1 716 euros en 2016) au regard des revenus tirés de la location qui s'élevaient à 28 000 euros à la date du renouvellement du bail et que cette hausse doit être relativisée puisque l'indexation du loyer a eu pour conséquence un accroissement régulier des revenus du bailleur. S'agissant du changement d'indice du fait de la loi Pinel, elle considère que cela n'a pas entraîné de modification notable en ce que la différence entre les deux loyers calculés sur la base de l'indice de la construction et sur la base du nouvel indice des loyers commerciaux n'est que de 1 000 euros par an soit 83 euros par mois.
Enfin, elle expose que la modification des facteurs locaux de commercialité invoquée par le bailleur n'est pas notable et n'a pas eu d'impact favorable sur le commerce considéré, le chiffre d'affaires ayant même baissé. Elle ajoute que les entreprises nouvellement implantées dans le secteur de [Localité 4] disposent de salles permettant à leurs salariés de se restaurer sur place et que la concurrence s'est renforcée avec l'implantation de nouveaux restaurants.
Elle demande de voir débouter le bailleur de sa demande de déplafonnement et de confirmer le jugement en ce sens.
Les bailleurs sollicitant le déplafonnement du loyer sont tenus de rapporter la preuve d'une modification notable des éléments suivants.
* Sur le caractère monovalent ou polyvalent des locaux
Aux termes des dispositions de l'article L.145-36 alinéa 1er du code de commerce, les éléments permettant de déterminer le prix des baux des terrains, des locaux construits en vue d'une seule utilisation et des locaux à usage exclusif de bureaux sont fixés par décret en conseil d'Etat.
Aux termes des dispositions de l'article R.145-10 du code de commerce, le prix du bail des locaux construits en vue d'une seule utilisation peut, par dérogation aux articles L.145-33 et R.145-33 et suivants, être déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité concernée.
Il est constant qu'il appartient au bailleur de rapporter la preuve du caractère monovalent du local.
En l'espèce, les parties s'accordent sur le fait que la configuration actuelle des lieux ne permet pas de scinder les deux activités bar-restaurant et hôtel sans réaliser de travaux et ce conformément au rapport d'expertise judiciaire de M. [H]. Celui-ci a indiqué dans sa note préalable que 'après examen des plans et vérification in situ des locaux, la mise en oeuvre de travaux de cloisonnement avec la redéfinition de l'usage de certaines pièces, permettrait d'isoler les activités, un accès indépendant existant étant potentiellement disponible pour l'activité hôtelière' en précisant 'le coût du réaménagement dans ces conditions ne nous apparaît pas prohibitif'. Dans son rapport définitif, il a maintenu la possibilité 'de séparation des activités de l'établissement sans travaux dispendieux. Ainsi le cloisonnement de l'actuelle salle de petit déjeuner, l'accès escalier aux étages, le hall de sortie et la seconde réserve et l'office, est de nature à séparer les activités. La séparation des activités sous réserve de la mise en oeuvre des travaux adéquats respectant la législation est techniquement possible ainsi qu'il résulte du rapport APAVE produit.' Le rapport de l'APAVE du 4 janvier 2018 confirme la faisabilité du partage des activités d'hôtel et de restaurant en deux activités distinctes.
Contestant le montant peu prohibitif des travaux retenu par l'expert judiciaire, l'appelante produit le rapport de visite de M. [N] de la société LITHEK Conseil expert en diagnostic qui évalue de son côté les travaux à réaliser entre 150 000 et 200 000 euros sans pour autant les détailler. Le montant des travaux retenu par M. [N] est non seulement en contradiction avec le rapport d'expertise judiciaire mais également avec le rapport technique réalisé par M. [C], expert judiciaire, mandaté par le preneur qui, après visite sur site, a conclu que la séparation des activités est possible en réalisant des travaux de faible ampleur compris entre 40 000 et 50 000 euros HT en retenant des travaux d'isolement horizontal entre les deux établissements ainsi que la séparation des réseaux électriques, d'eau et de chauffage, l'alimentation en gaz ainsi que les ventilations mécaniques étant indépendantes tout comme les accès y compris de livraison.
Par ailleurs, il résulte également du rapport d'expertise que l'activité bar-restaurant n'est plus une simple activité spécifique de celle de l'hôtel mais bien une activité indépendante qui représente, d'après l'expertise, au cours des années comptables 2012 à 2016 près de 70% du chiffre d'affaires du preneur de sorte qu'il doit en être déduit que l'activité initialement annexe de bar-restaurant a acquis une indépendance par rapport à l'activité d'hôtellerie.
Au vu de ces éléments, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le bailleur ne démontrait pas le caractère monovalent des locaux et a rejeté sa demande de déplafonnement du loyer à ce titre.
* S'agissant des autres motifs de déplafonnement invoqués
Aux termes de l'article L.145-34 du code de commerce : 'A moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier, publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié'.
L'article L.145-33 du code de commerce prévoit pour sa part que: ' le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1° les caractéristiques du local considéré ;
2° la destination des lieux ;
3° les obligations respectives des parties ;
4° les facteurs locaux de commercialité ;
Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;
Un décret en Conseil d'Etat précise la consistance de ces éléments.'
S'agissant des caractéristiques du local considéré, l'article R.145-3 du code de commerce dispose que ces caractéristiques s'apprécient en considération:
1° de sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public,
2° de l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux,
3° de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée,
4° de l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail,
5° de la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.
Il résulte de l'expertise judiciaire que le preneur a utilisé, au cours du bail expiré, une partie du parking donnant sur le pignon ouest du restaurant pour l'aménagement d'une terrasse permettant l'accès PMR. La superficie de la terrasse est de 47m2 dont 14m2 pour la partie réservée à l'accès PMR soit une surface nette de terrasse de 33m2. Cette terrasse se présente au jour de la visite comme une surface bétonnée sans aménagement au sol particulier. L'expert a précisé en page 35 que 'sa situation singulière pour l'exploitation d'une véritable terrasse destinée à augmenter la surface offerte pour une clientèle, non aménagée et non couverte, ne peut en fonction de la saison que permettre l'adjonction limitée de tables et ne nous apparaît pas comme un élément décisif et attractif permettant d'augmenter sensiblement l'offre de vente.'
En tout état de cause, comme le relève à juste titre le preneur dans ses écritures, lorsque des travaux caractérisent tout à la fois une modification notable et une amélioration des lieux loués, le second caractère doit prédominer sur le premier de sorte que le bailleur ne peut l'invoquer comme motif de déplafonnement.
Quant à la transformation d'une salle sous comble en chambre familiale, il convient de relever que le bailleur admet lui-même qu'il ne s'agit que d'une amélioration. Il ne peut s'en prévaloir comme motif de déplafonnement.
S'agissant des obligations respectives des parties, il résulte des dispositions de l'article R.145-8 du code de commerce que les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. Les améliorations apportées aux lieux loués ou au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge.
Les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.
Il est aussi tenu compte des modalités selon lesquelles le prix antérieurement applicable a été originairement fixé.
Il est constant que la taxe foncière a augmenté de 34% en passant de 1 281 euros en 2007 à 1 716 euros en 2016. Toutefois, il appartient au bailleur de justifier qu'il a supporté, au cours du bail expiré, une charge supplémentaire qui est d'une telle importance qu'elle affecte de manière très substantielle les revenus qu'il tire du local. Or en l'espèce, le bailleur a tiré des revenus de la location une somme de 25 200 euros au début du bail et une somme de 28 494 euros en fin de bail de sorte que l'augmentation de la taxe foncière n'a pas eu d'incidence substantielle sur les revenus perçus par le bailleur.
Quant à l'application de l'indice des loyers commerciaux suite à l'entrée en vigueur de la loi Pinel du 18 juin 2014, le preneur justifie que le loyer plafonné en fonction de l'indice des loyers commerciaux s'élève à 24 185,93 euros (21 600 euros x 108,40 (ILC 1er T.2016)/ 96,81 (ILC 1er T.2007) et que le loyer plafonné en fonction de l'indice du coût de la construction s'élève à 25 187 euros (21 6000 euros x 1,615 (ILC 1er T.2006) : 1,385 (ICC 1er T.2007) soit une différence de près de 1 000 euros par an. Les modalités de calcul du preneur ne sont pas contestées par l'appelante. Par ailleurs, cet indice des loyers commerciaux fait peser un aléa sur chacune des parties. En l'absence de modification notable des obligations des parties justifiée par le bailleur, il n'y a pas lieu à déplafonnement de ce chef.
S'agissant des facteurs locaux de commercialité, l'article R.145-6 du code de commerce prévoit enfin que: 'les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire'.
Il est constant que l'appréciation de la modification des facteurs locaux de commercialité doit se faire in concreto en fonction de l'intérêt que représente cette évolution pour le commerce considéré, le déplafonnement ne pouvant intervenir que si la modification des facteurs locaux de commercialité est de nature à avoir une incidence favorable sur le commerce exercé.
L'expert judiciaire, qui a relevé une augmentation de la population de la commune de 14% entre 2009 et 2016, a indiqué que les locaux sont implantés dans un secteur d'habitat hors zone de chalandise et que l'environnement commercial n'a pas subi de modifications importantes au cours du bail écoulé. L'expert a noté en page 36 que s'il y a eu une augmentation sensible de la population, le lien avec l'activité exercée n'est pas rapporté et ne s'est pas traduit par une augmentation de l'activité. Il ajoute que la restauration gastronomique pratiquée par l'établissement a peu de lien avec l'impact touristique d'un parc d'attractions.
Il conclut qu'au regard de la situation des locaux, hors zone d'attractivité particulière, l'éventuelle évolution de l'activité y compris avec l'apport touristique (création du parc de loisirs du Chêne Joli) n'a pas eu d'impact très important sur le commerce considéré.
Le preneur justifie par la production de son compte de résultat que son chiffre d'affaires n'a pas profité du développement de la commune puisque son chiffre d'affaires n'a que légèrement augmenté au cours de l'exercice 2012/2013 avant de décroître régulièrement par la suite.
Par conséquent, le bailleur échoue à démontrer la modification matérielle des facteurs locaux de commercialité. Il n'y a, dès lors, pas lieu à déplafonnement.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCI La Haute Patonnais de sa demande de déplafonnement du loyer de renouvellement du bail et en ce qu'il a fixé le montant du bail renouvelé à la somme de 24 185,93 euros HT par an à compter du 1er août 2016.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à ordonner l'apurement des comptes entre les parties sollicité par le preneur s'agissant des dispositions de l'article L.145-57 du code de commerce. De même, il n'y a pas lieu de reprendre les dispositions des articles L.145-34 et L.145-57 du code de commerce dans le dispositif de la présente décision comme le sollicite le preneur.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombant en son appel, la SCI La Haute Patonnais sera condamnée à verser la somme 3 000 euros à la SARL Hostellerie [Adresse 3] au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens d'appel. Les dispositions du jugement entreprises relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées sauf à préciser que les dépens comprendront le coût de l'expertise judiciaire de M. [H].
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf à préciser que les dépens comprendront le coût de l'expertise judiciaire de M. [M] [H] ;
Y ajoutant,
Déboute la SCI La Haute Patonnais de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamne la SCI La Haute Patonnais à payer à la SARL Hostellerie [Adresse 3] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ;
Condamne la SCI La Haute Patonnais aux entiers dépens d'appel ;
Déboute la SARL Hostellerie [Adresse 3] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.