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Décisions

CA Rouen, ch. civ. et com., 21 décembre 2023, n° 21/00868

ROUEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Regine (SCI)

Défendeur :

Remiplast (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Foucher-Gros

Conseillers :

M. Urbano, Mme Menard-Gogibu

Avocats :

Me Florence Drouin, Me Caroline Scolan, Me Marie-Odile de Milleville

TJ Rouen, 19 janvier 2021, n° 20/00671

19 janvier 2021

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte du 19 mars 1999, la SCI Régine a donné à bail à la SAS Remiplast, pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 1999, des locaux à usage industriel et commercial situé [Adresse 1] à [Localité 6] (76) comprenant deux ateliers, des bureaux, un magasin, deux cours dont une avec droit de parking, pour un loyer annuel de 174.000 Francs (26 526,13 euros), payable mensuellement et d'avance.

Par avenant du 22 septembre 2003, les surfaces louées ont été réduites, entraînant un nouveau loyer annuel fixé à 12.000 euros hors taxe à compter du 1er juin 2003, les autres conditions du bail restant inchangées.

Par jugement du 23 février 2012, le tribunal de grande instance de Rouen a dit que le loyer du bal renouvelé au 30 novembre 2008 est de 14 925 €.

Par acte du 28 février 2018, la SAS Remiplast a fait délivrer à son bailleur une demande de renouvellement de bail pour une durée de neuf années entières à compter du 1er mars 2018, les termes et conditions du bail initial demeurant inchangés à l'exception des clauses devenues illégales depuis la loi Pinel du 18 juin 2014, en particulier celles concernant les charges locatives, impôts, taxes, redevances et travaux, en application des dispositions des articles R 145-35 à R 145-37 du code de commerce.

Par acte du 29 mai 2018, la SCI Régine a accepté le principe du renouvellement du bail, en proposant de porter le loyer annuel à 86.000 euros HT.

Par des échanges ultérieurs de courriers, le locataire a refusé la modification du loyer, puis le bailleur a rapporté sa proposition à 43.848,36 euros HT par an par paliers de 10 % chaque année, proposition de nouveau refusée par le locataire.

Le 10 décembre 2018, le bailleur a saisi la commission départementale de conciliation qui, le 14 avril 2019, a rendu un avis proposant un montant de loyer annuel de 30.000 euros HT, avec une augmentation de 10 % par an à compter du 1er mars 2018 conformément aux dispositions de la loi Pinel.

Accepté par la SCI Régine, cet avis a été refusé par la SAS Remiplast, absente lors de la tentative de conciliation.

C'est dans ces conditions qu'après avoir adressé le 14 octobre 2019 à son locataire un mémoire préalable en fixation de loyer du bail renouvelé, resté sans réponse, la SCI Régine a, par assignation du 3 février 2020, saisi le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Rouen.

Par ordonnance du 19 janvier 2021, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Rouen a :

- rejeté la demande de déplafonnement du loyer du bail renouvelé formée par la SCI Régine contre la SAS Remiplast,

- dit que le loyer renouvelé dû par la SAS Remiplast à la SCI Régine au titre des locaux à usage industriels et commerciaux situés au [Adresse 1] à [Localité 6] s'élève à la somme annuelle de 17.045,28 euros HT payable mensuellement à compter du 1er mars 2018, date de renouvellement du bail commercial liant les parties,

- condamné la SCI Régine à payer à la SAS Remiplast la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la SCI Régine aux entiers dépens.

La SCI Régine a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 26 février 2021.

Par arrêt avant dire droit du 2 juin 2022, la cour a ordonné une expertise et a désigné M. [O] afin d'examiner les lieux objets du bail et entre autres dispositions :

*donner son avis sur les points spécifiques de l'inclusion totale ou partielle de la toiture visée dans le devis du 20 juillet 2021de la SARL Lereffait, dans les locaux donnés à bail, ainsi que sur l'état général des lieux pouvant notamment nécessiter de grosses réparations au sens de l'article 606 du code civil,

*donner au terme de son rapport une estimation motivée du prix du loyer du bail renouvelé après discussion des prix des loyers respectivement proposés par l'une et l'autre des parties,

M. [O] a déposé son rapport le 28 décembre 2022.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2023.

EXPOSE DES PRETENTIONS

Vu le mémoire du 8 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la SCI Régine qui demande à la cour de :

- constater la recevabilité de la procédure en fixation du prix du bail renouvelé au 1er mars 2018 initiée par la SCI Régine,

- infirmer l'ordonnance de loyer rendue le 19 janvier 2021 par le juge des loyers commerciaux,

Par conséquent,

- fixer à compter du 1er mars 2018 le montant du loyer du bail renouvelé à la somme de 30 000,00 euros HT en principal, l'augmentation sera effectuée par paliers de 10% chaque année de la façon suivante (en ce non compris d'indexation annuelle) :

*au 01.03.2018 montant du loyer annuel HT : 18 749,83 euros,

*au 01.03.2019 montant du loyer annuel HT : 20 624,81 euros,

*au 01.03.2020 montant du loyer annuel HT : 22 687,29 euros,

*au 01.03.2021 montant du loyer annuel HT : 24 956,01 euros,

*au 01.03.2022 montant du loyer annuel HT : 27 451,61 euros,

*au 01.03.2023 montant du loyer annuel HT : 30 000,00 euros,

*au 01.03.2024 montant du loyer annuel HT : 30.000,00 euros,

*au 01.03.2025 montant du loyer annuel HT : 30 000,00 euros

- condamner la SAS Remiplast au paiement des intérêts au taux légal sur les compléments de loyers arriérés, en vertu de l'article 1155 du code civil et ce à compter du 1er mars 2018 et jusqu'à parfait paiement, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1 154 du code civil,

- débouter la SAS Remiplast de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la SAS Remiplast à payer à la SCI Régine une somme de 5 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.

Vu le mémoire du 12 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la société Remiplast qui demande à la cour de :

A titre principal,

- juger la SCI Régine irrecevable en ses demandes faute de mémoire notifié par lettre recommandée avec accusé de réception au preneur dans les formes de l'article R145-26 du code de commerce dans le cadre de la procédure devant la cour après le dépôt du rapport d'expertise,

En conséquence,

- juger l'action en fixation du prix du bail renouvelé prescrite au regard de l'article L 145-60 du code de commerce,

- déclarer de plus fort la SCI Régine irrecevable en son action,

- juger que le bail est renouvelé dans les termes du contrat de bail dont le prix avait été fixé par un précédent jugement du 23.02.2012,

- et à tout le moins de la décision du 19.01.2021 sans déplafonnement,

- laisser à la charge de la SCI Régine les frais de l'expertise judiciaire,

- condamner la SCI Régine à 50 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du bail,

- condamner la SCI Régine à régler une indemnité article 700 à la concluante, à hauteur de 10 000 euros, et aux entiers dépens lesquels comprendront les frais de l'expertise,

A titre subsidiaire,

- débouter la SCI Régine de sa demande de déplafonnement,

- confirmer la décision du 19 janvier 2021 fixant à 1 420 euros hors taxes par mois le prix du loyer pendant l'instance,

- condamner la SCI Régine à 50 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du bail,

- laisser à la charge de la SCI Régine les frais de l'expertise judiciaire,

- condamner la SCI Régine à régler une indemnité article 700 à la concluante, à hauteur de 10 000 euros, et aux entiers dépens en ce compris les frais de l'expertise,

A titre infiniment subsidiaire,

- fixer la valeur du prix du loyer renouvelé au 1er mars 2018 à 14 040,00 euros HT (correspondant 10 euros du m2 utile),

- laisser à la charge de la SCI Régine les frais de l'expertise judiciaire,

- condamner la SCI Régine à 50 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du bail,

- condamner la SCI Régine à régler une indemnité article 700 à la concluante, à hauteur de 10 000 euros, et aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'action de la SCI Régine

Exposé des moyens :

La SAS Remiplast soutient que :

- les actions en matière de baux se prescrivent par deux ans ;

- seuls les mémoires interrompent la prescription biennale de l'article L145-60 du code de commerce et l'absence d'établissement de mémoire constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte par l'existence de conclusions qui sont affectées de nullité ;

- le délai biennal de prescription qui a commencé à courir à l'issue de l'ordonnance du 19 janvier 2021 a expiré le 18 janvier 2023 sans qu'un mémoire ait été signifié, de sorte que la prescription est acquise.

- la déclaration d'appel n'a pas interrompu le délai de prescription ;

- les dispositions combinées des articles R145-26 et R145-33 du code de commerce avec les dispositions applicables à la représentation obligatoire (notamment l'article 910-4 du code de procédure civile) font obstacle à ce qu'un mémoire notifié avant que la cour ait statué couvre l'irrégularité de conclusions antérieures.

La SCI Régine soutient que :

- le délai de prescription a été interrompu par la déclaration d'appel, et ceci jusqu'à ce que l'arrêt soit rendu.

- l'irrégularité portant sur l'absence de notification d'un mémoire peut être couverte par la notification d'un mémoire régulier tant que la cour d'appel n'a pas statué

Réponse de la cour :

L'action en fixation du loyer du bail renouvelé est soumise au délai de prescription biennale de l'article L 145-60 du code de commerce.

Aux termes de l'article 2241 du code civil : « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure. »

Aux termes de l'article 2242 du même code : « L'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à interruption de l'instance ».

Ces dispositions ne sont pas seulement applicables à l'acte introductif d'instance mais également à l'acte de recours, ils sont en conséquence applicables à la déclaration d'appel du 26 février 2021.

Par ailleurs, les dispositions R145-26 et suivants du code de commerce étant dérogatoires à la procédure d'échanges par conclusions prévue aux articles 908 à 910-1 du code de procédure civile, la société Remiplast ne peut soutenir que les dispositions combinées des articles R145-26 et R145-33 avec les dispositions applicables à la représentation obligatoire (notamment l'article 910-4 du code de procédure civile) font obstacle à ce qu'un mémoire notifié avant que la cour ait statué couvre l'irrégularité de conclusions antérieures

La société Remiplast ne soutient pas que le délai a expiré antérieurement à la décision entreprise du 19 janvier 2021. A compter de cette date, un nouveau délai a commencé à courir jusqu'au 19 janvier 2023. Ce délai a été interrompu par la déclaration d'appel du 26 février 2021, et ce jusqu'à l'arrêt entrainant l'extinction de l'instance.

Ainsi, même si les conclusions déposées par la société Régine étaient entachées de nullité, le mémoire notifié le 8 septembre 2023 par la SCI Regine, avant que la cour statue a eu pour effet de régulariser la nullité de ses conclusions antérieures.

Le délai de prescription de l'action étant interrompu lorsque ce mémoire a été notifié, la fin de non-recevoir sera rejetée.

Sur le montant du loyer

Exposé des moyens :

La SCI Régine soutient que :

- depuis le jugement du 23 février 2012 la loi Pinel, en supprimant certains transferts de charges du bailleur au preneur portant sur les grosses réparations et sur toutes les charges de la ville ou de police a modifié les obligations qui incombaient à ce dernier; les charges qui pèsent désormais sur le bailleur peuvent être invoquées par lui pour prétendre à une augmentation du loyer du bail renouvelé qui n'est pas soumis au plafonnement ;

- elle a donné à bail à la SAS Remiplast une surface de 2150 m² représentant 1000 m² de toiture ; toute réparation devant intervenir sera d'un coût très important pour la SCI Régine et le loyer fixé par le premier juge ne pourra couvrir la dépense ;

- s'il est exact que le devis de réparation de toiture versé aux débats par la SCI Régine est afférent à des locaux qui ne sont pas concernés par le bail, il constitue la preuve que le loyer dû actuellement par le preneur ne pourra suffire à faire face à cette charge ;

- l'expert a tiré les conséquences de cette situation en estimant que le montant du loyer devait s'établir à 36 000 euros (hors taxes) ;

- l'état actuel des locaux n'est que la conséquence de la carence du locataire qui n'a jamais fait les travaux nécessaires mis à sa charge.

La SAS Remiplast soutient que :

- l'impossibilité pour le bailleur de répercuter sur le preneur les charges de grosses réparations et la CET ne peuvent en eux-mêmes constituer une modification du bail induisant une modification notable de l'équilibre du contrat, et permettre le déplafonnement ;

- la SCI Régine ne caractérise aucune modification notable du bail permettant une augmentation du loyer ;

- les lieux sont vétustes, aucune clause n'a transféré la charge de la vétusté au preneur et une partie des locaux est inoccupée de ce fait de sorte que la surface utile est de 1405 m²; les travaux autres que locatifs n'ont pas été entrepris par le bailleur ;

- la base de 10 euros le m² est conforme à la réalité ;

- le devis relatif à la toiture produit par la SCI Régine ne concerne pas les lieux loués.

Réponse de la cour :

Aux termes de l'article L.145-33 du code de commerce, ''le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après 1° les caractéristiques du local considéré, 2° la destination des lieux, 3° les obligations respectives des parties, 4° les facteurs locaux de commercialité, 5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage. Un décret en Conseil d'Etat précise la consistance de ces éléments.''

Aux termes de l'article L.145-34 du même code, alinéa 1er, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, ''à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux(...).''

Ainsi le loyer du bail renouvelé doit correspondre à la valeur locative, celle-ci étant déterminée d'après les cinq éléments énumérés par l'article L. 145-33 et définis par les articles R.145-3 à R. 145-8 du code de commerce.

Le bailleur peut cependant obtenir le déplafonnement du loyer, par application de l'article L. 145-34, lors du renouvellement du bail, en cas de modification notable de l'un ou de plusieurs des quatre premiers éléments de la valeur locative (caractéristiques du local considéré, destination des lieux, obligations respectives des parties, facteurs locaux de commercialité).

Il appartient au bailleur de démontrer la consistance du motif de déplafonnement qu'il invoque soit au cas présent la modification notable des obligations respectives des parties.

Aux termes de l'article R145-8 du code de commerce : '' (') Les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer(...)''

Aux termes de l'article R. 145-35 du code de commerce en vigueur depuis le 16 novembre 2014 :

'' Ne peuvent être imputés au locataire :

1° Les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l'article 606 du code civil ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux ;

2° Les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation le bien loué ou l'immeuble dans lequel il se trouve, dès lors qu'ils relèvent des grosses réparations mentionnées à l'alinéa précédent ;

3° Les impôts, notamment la contribution économique territoriale, taxes et redevances dont le redevable légal est le bailleur ou le propriétaire du local ou de l'immeuble ; toutefois, peuvent être imputés au locataire la taxe foncière et les taxes additionnelles à la taxe foncière ainsi que les impôts, taxes et redevances liés à l'usage du local ou de l'immeuble ou à un service dont le locataire bénéficie directement ou indirectement (').''

Aux termes de l'article 606 du Code civil '' Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières.

Celui des digues et des murs de soutènement et de clôtures aussi en entier.

Toutes autres réparations sont d'entretien.''

Le bail initial du 19 mars 1999 fixe à la charge du preneur au titre de la clause relative à ''l'entretien, travaux et réparations'' l'entretien des lieux loués en bon état de réparations locatives et mise aux normes obligatoires incombant au locataire, toutes les réparations y compris celles résultant de l'article 606 du Code civil. Au titre de la clause relative à la ''responsabilité et recours et impôt foncier'', il est stipulé que le preneur sera tenu de satisfaire à toutes les charges de la ville ou de police dont les locataires sont tenus et d'acquitter ses contributions personnelles, mobilières, taxe professionnelle et tous impôts à la charge des locataires.

Le bail renouvelé au 1er mars 2018 étant un nouveau bail, il ne peut pas reprendre les charges énumérées par l'article R 145-35 du code de commerce et le bailleur ne peut plus transférer au preneur les grosses réparations mentionnées à l'article 606 du Code civil.

La cour a ordonné une mesure d'expertise en ayant relevé que la nécessité pour le bailleur de supporter désormais la charge des grosses réparations au sens de l'article 606 du Code civil est de nature à entraîner un déplafonnement du prix du bail. Le bailleur avait produit en ce sens un devis du 20 juillet 2021 de reprise partielle de la toiture pour la somme de 20 644 euros TTC.

Les locaux litigieux sont situés à [Localité 6] dans le centre de la commune.

Il ressort du rapport de l'expert judiciaire que « L'ensemble des lieux loués est dans un état vétuste, sauf une partie des bureaux au rez-de chaussée, le long de la cour intérieures sont en bon état général.

L'atelier, comprenant les vestiaires, et la zone de stockage, sous la couverture en shed, est dans un état vétuste mais reste exploitable par le locataire.

Le reste des lieux loué est en état d'abandon et ne peut donc être occupé par le preneur.

Une mise sur le marché desdits locaux ne pourrait plus être destinée à une activité industrielle ou artisanale avec atelier de production ou de fabrication. Seule la destination de stockage de matériel pourrait trouver preneur.

Ce type de locaux ne correspondent plus aux normes actuelles du marché de locaux d'activités. »

L'expert précise au titre des facteurs de diminution de la valeur que, les locaux sont pris dans un ensemble immobilier plus grand, que l'accès privatif est difficile, que l'autre accès par une porte se situe sur une cour commune, que les bureaux et ateliers sont séparés et enfin que le marché sur le secteur d'[Localité 4] est le moins prisé de la métropole [Localité 5] Métropole Normandie.

M. [O] a précisé que la toiture visée dans le devis du 20 juillet 2021 n'est pas incluse dans la désignation des locaux loués, reprise sur le plan annexé au bail et son avenant.

Si l'expert, a donné son avis sur l'état général des lieux, il n'a pas précisé si des grosses réparations au sens de l'article 606 du Code civil sont nécessaires aux locaux loués étant désormais certain que le devis du 20 juillet 2021 de la SARL Lerefait de reprise partielle de la toiture pour la somme de 20 644 euros ne concerne nullement les locaux loués à la société Remiplast de sorte que la SCI Régine ne démontre pas la nécessité de procéder à ce type de travaux pour le local dont s'agit et par la même le caractère notable de la modification invoquée procédant du transfert au bailleur de la charge relative aux grosses réparations.

Si le 25 mars 2019, le bailleur a pris en charge le coût de travaux de reprise de dallage suite à son affaissement pour la somme de 1545,60 euros, la facture produite ne permet pas de déterminer la cause du désordre alors que la charge de la vétusté n'a pas été transférée au preneur par le bail initial. Il en résulte que le bailleur ne démontre pas que lesdits travaux auraient incombé à la société locataire avant l'entrée en vigueur de la loi Pinel au titre des grosses réparations résultant de l'article 606 du Code civil de sorte qu'il ne démontre pas le caractère notable de la modification invoquée au titre des obligations des parties.

En ce qui concerne le transfert de la taxe économique et territoriale, ainsi que relevé par le premier juge, la SCI Régine ne justifie ni de son montant ni même qu'elle y est assujettie de sorte qu'elle ne démontre pas plus le caractère notable de la modification invoquée au titre des obligations des parties.

A défaut pour la SCI Régine de démontrer l'existence d'une modification notable des obligations respectives des parties l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de déplafonnement du loyer du bail renouvelé formée par la SCI Régine contre la SAS Remiplast .

Par voie de conséquence, elle sera confirmée en ce qu'elle a dit que le loyer renouvelé dû par la SAS Remiplast à la SCI Régine s'élève à la somme annuelle de 17.045,28 euros HT payable mensuellement à compter du 1er mars 2018, date de renouvellement du bail commercial liant les parties, soit un renouvellement aux conditions antérieures et rejeté le surplus des demandes de la SCI Regine.

Sur la demande reconventionnelle de la SAS Remiplast

Exposé des moyens

La SAS Remiplast soutient que :

- elle a découvert en cours d'instance que la SCI Régine s'était engagée à vendre les lieux loués à un bailleur social qui va les raser ;

- la SCI Régine n'a pas été loyale en dissimulant cet état de fait.

La SCI Régine soutient que la SAS Remiplast avait été avisée de l'existence d'une promesse de vente portant sur les lieux loués et que seule la confidentialité des négociations interdit de la verser aux débats.

Réponse de la cour :

Tout contrat doit être exécuté de bonne foi.

Il ressort de messages électroniques échangés entre les parties entre le 17 juin et le 21 octobre 2022 que la société Remiplast n'ignorait pas l'existence de négociations entre le bailleur et la société Cogedim. Elle a en effet donné son accord pour qu'accèdent à son site des opérateurs d'un bureau d'étude pour effectuer des diagnostics lui étant précisé par Monsieur [V] [J] (SCI Régine) qu'il serait accompagné d'une personne de la société Cogedim. Puis Monsieur [I] [Y] (société Remiplast) a accepté une proposition de rendez vous le 25 octobre 2022 afin d'échanger sur le projet de Cogedim et la résiliation amiable du bail à son terme, rendez vous finalement annulé en raison du refus de communication de la promesse de vente par le bailleur au preneur compte tenu de sa confidentialité.

Il s'ensuit que le preneur qui a été informé de négociations en cours puis qui a été invité à échanger sur le projet de la société Cogedim et sur la résiliation amiable du bail ne peut utilement arguer d'une exécution déloyale du bail de sorte que sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire ;

Rejette la fin de non-recevoir opposée par la SCI Remiplast ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Déboute la SCI Remiplast de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne la SCI Régine aux dépens de l'instance en eux compris les frais d'expertise,

Condamne la même à payer à la société Remiplast la somme de 2500 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel.